LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon les arrêts attaqués (Poitiers, 3 décembre 2013, rectifié le 18 décembre 2013), que M. X...et Mme Y..., associés titulaires de cent parts chacun de la SARL Bougeer, dont la dissolution anticipée a été décidée, sont convenus le 25 janvier 2011 que, passé le délai de soixante jours à compter de la transmission à l'expert comptable des comptes de la société, chaque associé remettrait à M. Z..., choisi comme médiateur, une offre d'achat des parts sociales de l'autre associé ; que M. X...a remis une offre libellée « néant » tandis que Mme Y...a remis une offre de rachat au prix de 5 000 euros ; qu'invoquant la défaillance de M. X...lors de la signature de l'acte de cession des parts sociales, Mme Y...l'a assigné afin que la vente soit déclarée parfaite ;
Attendu que M. X...fait grief aux arrêts d'accueillir cette demande alors, selon le moyen :
1°/ que le contrat de vente n'est parfait que s'il permet de déterminer le prix par des éléments ne dépendant plus de la volonté de l'une des parties ou de la réalisation d'accords ultérieurs ; qu'en l'espèce il est constant que l'accord fixé par le courrier de M. Z... du 25 janvier 2011 et signé par les parties prévoyait uniquement les modalités de remise d'offres dont les termes étaient fixés unilatéralement par chacune des parties ; que Mme Y...a fixé seule le prix des parts ; que M. X...n'a pas accepté ce prix ; qu'il s'en évinçait que l'accord du 25 janvier 2011, qui ne fixait pas le prix ni ne le rendait déterminable par des éléments objectifs ne dépendant pas de la volonté d'une partie, ne pouvait être qualifié de promesse valant vente ; qu'en disant le contraire au motif que « chacune des parties (¿) s'était engagée à accepter le prix proposé par l'autre s'il était le plus élevé et en ce sens, il y avait bien accord tant sur la chose, les parts sociales, que sur le prix, à savoir le plus élevé », considérant que le prix pouvait être ainsi fixé de manière unilatérale sans avoir à recueillir l'accord des parties, la cour d'appel a violé les articles 1583, 1589 et 1591 du code civil ;
2°/ que l'offre de vente, même convenue selon des modalités précises, ne vaut pas contrat si elle n'est pas acceptée par son destinataire ; que le vente n'est parfaite que s'il y a accord sur la chose et sur le prix ; qu'il est constant en l'espèce que l'accord des parties fixait des modalités de communication d'offres par les deux parties ; que seule Mme Y...a fait une proposition que M. X...a refusé ; qu'en disant que l'offre présentée par Mme Y...valait accord de cession des parts sociales de la société Bougeer, au motif que M. X...en aurait accepté les termes à l'avance, la cour d'appel a violé les articles 1108, 1583, 1589 et 1591 du code civil ;
3°/ que tant l'accord des parties aux termes du courrier de M. Z... du 25 janvier 2011 fixant l'« objet des offres » et les « modalités des offres », que « l'offre de rachat » faite par Mme Y...le 22 avril 2011, exposaient clairement qu'il s'agissait de simples offres, sans mentionner à aucun moment que les parties seraient liées par l'offre faite par le plus offrant ; qu'il était ainsi stipulé dans le premier document que « l'offre devra mentionner précisément le prix d'achat " net vendeur " proposé » ; que le second document précisait que « c'est dans ce contexte que ce jour, le 22 avril 2011, terme du délai de soixante jours dont disposait chacun des associés pour remettre une offre, que Mme Y...offre de libérer (¿), offre de reprendre à son compte (¿), offre un prix net vendeur de 5 000 euros (¿) Cette proposition de rachat est faite sans garantie d'actif et de passif du cédant » ; qu'en considérant que l'offre de Mme Y...valait accord de cession des parts sociales de la société Bougeer, aux motifs inopérants qu'il était mentionné qu'il ne serait pas possible de surenchérir, ce dont il se déduisait uniquement qu'il n'était pas possible de faire de contre-offre, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil par refus d'application du contrat ;
4°/ que selon les termes du courrier de M. Z... du 25 janvier 2011 fixant l'« objet des offres » et les « modalités des offres », il était prévu que « l'offre devra être assortie d'un accord irrévocable des banques (¿) ; toute offre assortie de condition suspensive sera de plein droit irrecevable » ; qu'il résultait du courrier de la banque Crédit agricole du 12 avril 2011 que son accord était « subordonné à une adhésion à l'assurance décès invalidité auprès de la Caisse nationale de prévoyance à hauteur de 100 % » ce dont il s'inférait nécessairement que la banque en avait fait une condition suspensive de l'octroi du crédit ; qu'en disant que cette clause n'était qu'une « une modalité de réalisation du contrat dépendant de la seule volonté de Mme Sonia Y..., mais ne conditionnant pas l'offre elle-même », la cour d'appel a refusé d'appliquer les termes du contrat et partant a violé l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir énoncé que selon l'article 1583 du code civil, la vente est parfaite, entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur dès qu'on est convenu de la chose et du prix, l'arrêt retient que, par l'accord du 25 janvier 2011, M. X...et Mme Y...sont convenus d'une procédure précise d'achat par l'associé le plus offrant des parts sociales appartenant à l'autre, chacune des parties s'engageant à accepter le prix proposé par l'autre s'il était le plus élevé et à renoncer par avance à formuler toute surenchère ultérieure ; que de ces énonciations, constatations et appréciations, desquelles il résulte que le prix de vente des parts sociales ne dépendait pas de la seule volonté de Mme Y...ni d'accords ultérieurs entre les parties, la cour d'appel a exactement déduit que la vente, faite au prix le plus élevé, était parfaite ;
Et attendu, en second lieu, que l'arrêt relève que Mme Y...a offert de racheter les parts de M. X...au prix net vendeur de 5 000 euros ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, faisant ressortir que l'offre de prix de Mme Y...n'était pas une offre de vente mais seulement l'exécution des engagements prévus par l'accord du 25 janvier 2011 auquel M. X...avait consenti, la cour d'appel, qui n'a pas dénaturé cet accord, a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à Mme Y...la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf septembre deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Rémy-Corlay, avocat aux Conseils, pour M. X...
Le moyen reproche aux arrêts infirmatifs attaqués d'AVOIR dit qu'il y a cession des 100 parts sociales détenues par Monsieur Alain X...dans la société Bougeer à Madame Sonia Y...au prix de 5000 ¿ et à effet du 22 avril 2011 ; dit que la présente décision sera transmise au greffe du Tribunal de commerce de Poitiers aux fins de publication aux frais et à la diligence de Madame Sonia Y...; condamné Monsieur Alain X...à payer à Madame Sonia Y...la somme de 2500 ¿ en application de l'article 700 du code de procédure civile ; dit que cette somme se compensera avec le prix de cession de 5000 ¿ à concurrence de son montant, et débouté Monsieur Alain X...de ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE « l'article 1583 du code civil dispose que " la vente est parfaite, entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée et le prix payé ". En l'espèce, il ressort du courrier en date du 25 janvier 2011 adressé par Maître Z... à Mme Sonia Y...et M. Alain X...que ceux-ci ont convenu d'une procédure précise d'achat par l'associé le plus offrant des parts sociales appartenant à l'autre selon des modalités décrites ci-dessus. Ce document a été signé par M. Alain X...avec la mention " bon pour accord " et Mme Sonia Y...qui s'en prévaut, y a nécessairement consenti. Chacune des parties à cette convention (dont l'objectif était de sortir d'une impasse), sauf à ce qu'elle soit dépourvue de tout sens, s'était engagée à accepter le prix proposé par l'autre si il était le plus élevé et en ce sens il y avait bien accord tant sur la chose, les parts sociales, que sur le prix, à savoir le plus élevé. La mention " l'offrant non retenu renonce expressément et par avance à formuler toute surenchère ultérieure, soit directement ou indirectement " en est la démonstration. En conséquence, dès lors que la procédure prévue était respectée et qu'une offre remplissant les conditions stipulées quant à l'objet et les modalités convenues était faite au prix le plus élevé, celle-ci était parfaite et opérait cession des parts sociales. La lecture de l'offre faite par Mme Sonia Y...le 21 avril 2011, soit dans le délai conventionnel de 60 jours et au terme des actes préparatoires figurant dans le document du 25 janvier 2011, met en évidence :- qu'il s'agit d'une offre de rachat de la totalité des 100 parts sociales détenues par M. Alain X...dans la SARL BOUGEER au prix NET VENDEUR de 5000 ¿ ;- que Mme Sonia Y...reprend à son compte les engagements financiers de M. Alain X...au titre des emprunts souscrits par la société COLLON VAILLANT et à l'occasion de son apport en compte courant de la société BOUGEER ;- que Mme Sonia Y...est ainsi substituée sur la créance en compte courant de M. Alain X...dans les comptes de la société BOUGEER ;- que cette offre est accompagnée d'un règlement de la somme de 5000 ¿ et d'une lettre du CREDIT AGRICOLE donnant son accord sur le financement de l'achat des parts de la société COLLON VAILLANT détenues par M. Alain X..., l'octroi d'un prêt professionnel au nom de Mme Sonia Y..., la mutation du prêt de M. Alain X...vers Mme Sonia Y...et la main levée de la caution solidaire de M. Alain X...sur les prêts. Cette offre n'est assortie d'aucune condition suspensive, l'adhésion à l'assurance CNP auquel l'octroi du prêt est subordonné, n'étant qu'une modalité de réalisation du contrat dépendant de la seule volonté de Mme Sonia Y..., mais ne conditionnant pas l'offre elle-même ; Par ailleurs, il ne peut être soutenu que M. Alain X...s'est abstenu de toute offre puisqu'il a fait parvenir à Maître Z... une offre « NEANT » sous pli cacheté datée du 22 avril 2011 démontrant qu'il a lui-même exécuté la convention, même s'il exprimait ainsi sa volonté de ne pas acheter les parts sociales. Enfin, la circonstance que la dissolution de la société ait été votée en assemblée générale n'empêchait pas les deux seuls associés de s'orienter vers une autre issue, dès lors qu'ils en ont convenu autrement comme exposé ci-dessus. En conséquence, l'offre de Mme Sonia Y..., qui satisfait à toutes les conditions convenues entre les parties vaut cession, l'origine de la somme de 5000 ¿ remise en paiement de l'offre étant sans incidence et relevant d'un autre débat ; Il convient donc d'infirmer la décision entreprise »
ALORS QUE 1°) le contrat de vente n'est parfait que s'il permet de déterminer le prix par des éléments ne dépendant plus de la volonté de l'une des parties ou de la réalisation d'accords ultérieurs ; qu'en l'espèce il est constant que l'accord fixé par le courrier de Maître Z... du 25 janvier 2011 et signé par les parties prévoyait uniquement les modalités de remise d'offres dont les termes étaient fixés unilatéralement par chacune des parties ; que Madame Y...a fixé seule le prix des parts ; que Monsieur X...n'a pas accepté ce prix ; qu'il s'en évinçait que l'accord du 25 janvier 2011, qui ne fixait pas le prix ni ne le rendait déterminable par des éléments objectifs ne dépendant pas de la volonté d'une partie, ne pouvait être qualifié de promesse valant vente ; qu'en disant le contraire au motif que « chacune des parties (¿) s'était engagée à accepter le prix proposé par l'autre s'il était le plus élevé et en ce sens, il y avait bien accord tant sur la chose, les parts sociales, que sur le prix, à savoir le plus élevé », considérant que le prix pouvait être ainsi fixé de manière unilatérale sans avoir à recueillir l'accord des parties, la Cour d'appel a violé les articles 1583, 1589 et 1591 du Code civil ;
ALORS QUE 2°) l'offre de vente, même convenue selon des modalités précises, ne vaut pas contrat si elle n'est pas acceptée par son destinataire ; que le vente n'est parfaite que s'il y a accord sur la chose et sur le prix ; qu'il est constant en l'espèce que l'accord des parties fixait des modalités de communication d'offres par les deux parties ; que seule Madame Y...a fait une proposition que Monsieur X...a refusé ; qu'en disant que l'offre présentée par Madame Y...valait accord de cession des parts sociales de la société Bougeer, au motif que Monsieur X...en aurait accepté les termes à l'avance, la Cour d'appel a violé les articles 1108, 1583, 1589 et 1591 du Code civil ;
ALORS QUE 3°) tant l'accord des parties aux termes du courrier de Maître Z... du 25 janvier 2011 fixant l'« objet des offres » et les « modalités des offres », que « l'offre de rachat » faite par Madame Y...le 22 avril 2011, exposaient clairement qu'il s'agissait de simples offres, sans mentionner à aucun moment que les parties seraient liées par l'offre faite par le plus offrant ; qu'il était ainsi stipulé dans le premier document que « l'offre devra mentionner précisément le prix d'achat « net vendeur » proposé » ; que le second document précisait que « c'est dans ce contexte que ce jour, le 22 avril 2011, terme du délai de 60 jours dont disposait chacun des associés pour remettre une offre, que Madame Sonia Y...offre de libérer (¿), offre de reprendre à son compte (¿), offre un prix net vendeur de 5000 ¿ (¿) Cette proposition de rachat est faite sans garantie d'actif et de passif du cédant » ; qu'en considérant que l'offre de Madame Y...valait accord de cession des parts sociales de la société Bougeer, aux motifs inopérants qu'il était mentionné qu'il ne serait pas possible de surenchérir, ce dont il se déduisait uniquement qu'il n'était pas possible de faire de contre-offre, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil par refus d'application du contrat ;
ALORS QUE 4°) selon les termes du courrier de Maître Z... du 25 janvier 2011 fixant l'« objet des offres » et les « modalités des offres », il était prévu que « l'offre devra être assortie d'un accord irrévocable des banques (¿) ; toute offre assortie de condition suspensive sera de plein droit irrecevable » ; qu'il résultait du courrier de la banque Crédit agricole du 12 avril 2011 que son accord était « subordonné à une adhésion à l'assurance décès invalidité auprès de la Caisse nationale de prévoyance à hauteur de 100 % » ce dont il s'inférait nécessairement que la Banque en avait fait une condition suspensive de l'octroi du crédit ; qu'en disant que cette clause n'était qu'une « une modalité de réalisation du contrat dépendant de la seule volonté de Mme Sonia Y..., mais ne conditionnant pas l'offre elle-même », la Cour d'appel a refusé d'appliquer les termes du contrat et partant a violé l'article 1134 du Code civil.