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22/09/2015 | FRANCE | N°14-14262;14-14263;14-14267

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 22 septembre 2015, 14-14262 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° X 14-14.267, S 14-14.262 et T 14-14.263 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 20 janvier 2014), que MM. X..., Y... et Z..., anciens salariés des Houillères, qui avaient droit au versement d'une indemnité de logement et d'une indemnité de chauffage par application du Statut du mineur issu du décret n° 46-1433 du 14 juin 1946, ont conclu avec les Houillères des contrats prévoyant le versement immédiat à leur profit d'un capital qu'ils devaient rembourser leur

vie durant au moyen des indemnités de logement et de chauffage auxquel...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° X 14-14.267, S 14-14.262 et T 14-14.263 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 20 janvier 2014), que MM. X..., Y... et Z..., anciens salariés des Houillères, qui avaient droit au versement d'une indemnité de logement et d'une indemnité de chauffage par application du Statut du mineur issu du décret n° 46-1433 du 14 juin 1946, ont conclu avec les Houillères des contrats prévoyant le versement immédiat à leur profit d'un capital qu'ils devaient rembourser leur vie durant au moyen des indemnités de logement et de chauffage auxquelles ils avaient droit jusqu'à leur décès ; qu'estimant injustifiées les retenues opérées au titre de l'indemnité statutaire de chauffage et de logement après remboursement de l'intégralité du capital par l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (ANGDM) qui assure depuis 2004 le service des prestations et avantages dus aux anciens agents retraités des mines et à leurs ayants droit, MM. X..., Y... et Z... ont saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Attendu que les mineurs retraités font grief à l'arrêt de les débouter de leur demande en nullité des contrats alors, selon le moyen :
1°/ que les mineurs ne peuvent renoncer aux dispositions d'ordre public des articles 22 à 24 décret n° 46-1433 du 14 juin 1946 relatifs au statut du personnel des exploitations minières et assimilées qui, dans le but d'assurer la protection sociale des salariés, mettent à la charge de l'employeur l'obligation de leur verser certaines prestations viagères ; que les contrats « capital viager logement de prêt remboursable par versements trimestriels » et « capital viager chauffage de prêt remboursable par versements trimestriels », qui emportent renonciation expresse aux dispositions d'ordre public des articles 22 à 24 du décret du 14 juin 1946, sont nul en raison de l'illicéité de leur objet ; qu'en considérant que ces contrats qui emportaient renonciation définitive aux prestations logements et chauffages et ce jusqu'au décès du souscripteur n'avaient pas un objet illicite, la cour d'appel a violé les articles 22 à 24 du décret du 14 juin 1946 et l'article 6 du code civil ;
2°/ que les articles 1 et 3 des contrats litigieux stipulaient que le CNGR s'engage à verser au retraité un capital en contrepartie duquel ce dernier « autorise le CNGR à procéder à la retenue totale de l'indemnité de logement (de chauffage) », l'article 4 précisant que le demandeur « renonce expressément et définitivement à la prestation de logement en nature (à la prestation de chauffage en nature) » et l'article 5 des contrats litigieux prévoyant que « le présent contrat prend fin au décès du souscripteur » (cf. prod) ; qu'il en résulte que les contrats prévoyaient expressément, dès leur conclusion, que le retraité perdait définitivement le bénéfice des prestations viagères jusqu'à son décès, que le capital ait été ou non remboursé intégralement ; qu'en jugeant néanmoins, pour considérer que les contrats n'emportaient pas renonciation du retraité aux prestations viagères auxquelles le statut lui ouvrait droit, que ces contrats n'avaient pas envisagé, à l'époque de sa souscription, la question de la reprise du versement des indemnités au profit du retraité une fois le capital remboursé, cependant qu'elle avait été clairement exclue par celui-ci, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des conventions et a ainsi violé l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu qu'un mineur peut, lors de son départ en retraite, valablement renoncer au bénéfice des indemnités viagères de logement et de chauffage auxquelles il peut prétendre en application du statut du mineur, en contrepartie du versement immédiat d'un capital calculé en fonction d'un coefficient de capitalisation fixé selon l'âge du mineur au moment de la souscription ; que, par ce motif, substitué à ceux critiqués après avis donné aux parties, la décision déférée se trouve légalement justifiée ; Sur le quatrième moyen :
Attendu que les mineurs retraités font grief à l'arrêt de rejeter la demande tendant à dire que les contrats souscrits devaient être interprétés comme des contrats de prêt sans intérêts alors, selon le moyen :
1°/ que le « contrat capital viager logement de prêt remboursable par versements trimestriels » et le « contrat capital viager chauffage de prêt remboursable par versements trimestriels » prévoyant le versement immédiat par le CNGR d'une certaine somme qualifiée de « capital », remboursable par le mineur retraité, sa vie durant, par voie de compensation avec les prestations viagères de logement et de chauffage auxquelles il avait droit en sa qualité d'ancien mineur, constituent des contrats de prêt ; qu'il en résulte que l'obligation de rembourser cesse une fois le complet paiement du capital emprunté intervenu ; qu'en refusant de requalifier les contrats litigieux en contrats de prêt, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1892 du code civil ;
2°/ que la contradiction de motifs équivaut à son absence ; qu'en affirmant d'une part, que « la question de la reprise du versement des indemnités au profit du retraité une fois la totalité du capital avancé remboursé n'a pas été envisagée à l'époque de la souscription du contrat », pour considérer que cela ne permettait pas d'en déduire que dès leur conclusion ces contrats impliquaient renonciation du mineur aux prestations auxquelles le statut lui donnait droit (arrêt, p. 8), et d'autre part, que « les parties ont ainsi convenu que la dette en contrepartie du capital versé ne se trouverait éteinte qu'au décès du bénéficiaire des indemnités » (arrêt, p. 12), pour en déduire que les contrats litigieux n'étaient pas des contrats de prêt, la cour d'appel qui s'est contredite, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant retenu, par motifs adoptés, d'une part, que les souscripteurs remboursent trimestriellement l'indemnité de logement ou de chauffage qui leur est versée fictivement pour les seuls besoins de sa taxation par l'administration fiscale et non le capital qui leur a été versé, et, d'autre part, que les contrats comportaient un aléa pour l'employeur comme pour les salariés, la cour d'appel en a déduit à bon droit que ces contrats avaient un caractère viager de sorte que la demande de requalification en contrats de prêt devait être rejetée ; que le moyen, qui critique un motif erroné mais surabondant en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
Et attendu qu'il n'y pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les deuxième, troisième et cinquième moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne MM. Y..., Z... et X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux septembre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits aux pourvois n° S 14-14.262, T 14-14.263 et X 14-14.267 par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils pour MM. Y..., Z... et X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté les exposants de leurs demandes tendant à voir constater la nullité des contrats ;
Aux motifs que sur la nullité pour illicéité de l'objet, selon M. Bernard X..., M. Maurice A..., M. René Z..., M. Jean-Claude Y... et M. René B..., la nullité du contrat pour objet illicite résulte de ce que l'on n'a pas le droit de renoncer à un statut d'ordre public et en l'occurrence aux prescriptions des articles 22 et 23 du statut des mineurs ; que l'article 22 du décret du 14 juin 1946 relatif au statut du personnel des exploitations minières énonce que les membres du personnel des mines de combustibles minéraux solides ont droit à une attribution de combustible par l'exploitant ; que si cette attribution n'est pas possible, ils ont droit à une indemnité compensatrice versée par l'exploitant, que les membres du personnel des autres exploitations minières et assimilées ont droit à une prime de chauffage versée par l'exploitant, que les anciens membres du personnel et les veuves peuvent recevoir des prestations de chauffage en nature ou en espèces dont les montants et les conditions d'attribution sont fixés par arrêté du Ministre chargé des Mines ou du Ministre des Finances et des Affaires Economiques ; que l'article 23 de ce décret contient les mêmes dispositions en ce qui concerne le logement, à savoir que les membres du personnel, chefs ou soutiens de famille, sont logés gratuitement par l'entreprise ou, à défaut, perçoivent de celle-ci une indemnité mensuelle de logement, que les autres membres du personnel peuvent percevoir également une indemnité mensuelle de logement, ainsi que les anciens membres du personnel et les veuves ; que les contrats litigieux stipulent que le capital versé est représentatif du versement des indemnités trimestrielles de logement et de chauffage auxquelles les retraités ont droit, le montant de ces indemnités trimestrielles étant retenu par le CNGR devenu l'ANGDM à titre de remboursement pendant la durée de la vie de l'agent retraité ; que dès lors que les dispositions du statut des mineurs laissaient au Ministre compétent la faculté d'apprécier les modalités de versement des prestations, que ces dispositions n'imposaient pas que le versement des indemnités devait être périodique et que les contrats avaient comme objectif, pour les salariés qui choisissaient de les souscrire, de permettre à ceux-ci de bénéficier immédiatement d'un capital représentatif des prestations, plutôt que de continuer à percevoir les indemnités trimestrielles de chauffage et de logement, M. Bernard X..., M. Maurice A..., M. René Z..., M. Jean-Claude Y... et M. René B... ne démontrent pas qu'à la date de signature des contrats litigieux, à laquelle doit s'apprécier leur validité, la stipulation du versement d'un capital représentatif des prestations, amortissable au moyen de la retenue des indemnités trimestrielles, signifiait qu'ils renonçaient à leur droit de percevoir lesdites indemnités ; que le fait que la question de la reprise du versement des indemnités au profit du retraité, une fois la totalité du capital avancé remboursé, n'ait pas été envisagée à l'époque de la souscription du contrat, puisqu'en réalité, le montant du capital versé avait été calculé en fonction d'un coefficient de capitalisation fixé selon l'âge de l'ancien mineur au moment de la souscription, et que le caractère viager du remboursement pouvait aussi avoir pour but d'éviter d'en transférer la charge aux héritiers du retraité, en cas de décès de celui-ci avant l'amortissement du capital, ne permet pas de déduire que, dès sa conclusion, ce contrat impliquait renonciation du mineur aux prestations auxquelles le statut lui donnait droit ; que du reste, dans une lettre adressée au Président des Charbonnages de France le 13 octobre 1949, le Ministre de l'Industrie et du Commerce indiquait notamment que ce qui devait être conservé aux retraités bénéficiant des dispositions de l'article 23 du statut des mineurs, c'est le droit au logement ou à l'indemnité compensatrice, mais pas le logement lui-même qu'il habitait lorsqu'il était en activité et que, pour rendre plus aisée la réinstallation du retraité ou de sa veuve dans un nouveau domicile, il ne verrait pas d'inconvénient à ce que les Bassins offrent aux ayants cause le rachat des droits qu'ils tiennent de l'article 23 du statut du mineur, moyennant un capital versé au moment de l'évacuation du local, représentatif du rachat de la rente viagère ou de l'avantage équivalent, dans la limite d'un maximum de 250 000 francs payés comptant pour les employés et 200 000 francs pour les ouvriers ; que la demande en nullité des contrats souscrits par M. Bernard X..., M. Maurice A..., M. René Z..., M. Jean-Claude Y... et M. René B... pour objet illicite doit être rejetée ;
1°) Alors que les mineurs ne peuvent renoncer aux dispositions d'ordre public des articles 22 à 24 décret n° 46-1433 du 14 juin 1946 relatif au statut du personnel des exploitations minières et assimilées qui, dans le but d'assurer la protection sociale des salariés, mettent à la charge de l'employeur l'obligation de leur verser certaines prestations viagères ; que les contrats « capital viager logement de prêt remboursable par versements trimestriels » et « capital viager chauffage de prêt remboursable par versements trimestriels », qui emportent renonciation expresse aux dispositions d'ordre public des articles 22 à 24 du décret du 14 juin 1946, sont nul en raison de l'illicéité de leur objet ; qu'en considérant que ces contrats qui emportaient renonciation définitive aux prestations logements et chauffages et ce jusqu'au décès du souscripteur n'avaient pas un objet illicite, la cour d'appel a violé les articles 22 à 24 du décret du 14 juin 1946 et l'article 6 du code civil ;
2°) Alors que les articles 1 et 3 des contrats litigieux stipulaient que le CNGR s'engage à verser au retraité un capital en contrepartie duquel ce dernier « autorise le CNGR à procéder à la retenue totale de l'indemnité de logement ( de chauffage)», l'article 4 précisant que l'exposant « renonce expressément et définitivement à la prestation de logement en nature (à la prestation de chauffage en nature) » et l'article 5 des contrats litigieux prévoyant que « le présent contrat prend fin au décès du souscripteur » (cf. prod) ; qu'il en résulte que les contrats prévoyaient expressément, dès leur conclusion, que le retraité perdait définitivement le bénéfice des prestations viagères jusqu'à son décès, que le capital ait été ou non remboursé intégralement ; qu'en jugeant néanmoins, pour considérer que les contrats n'emportaient pas renonciation du retraité aux prestations viagères auxquelles le statut lui ouvrait droit, que ces contrats n'avaient pas envisagé, à l'époque de sa souscription, la question de la reprise du versement des indemnités au profit du retraité une fois le capital remboursé, cependant qu'elle avait été clairement exclue par celui-ci, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des conventions et a ainsi violé l'article 1134 du code civil ;
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté les exposants de leurs demandes tendant à voir constater la nullité des contrats ;
Aux motifs que sur la nullité pour violation de la loi, les articles L. 2254-1 et L. 3252-1 et suivants du code du travail ne sont pas applicables aux mineurs qui bénéficient d'un statut réglementaire ; qu'en tout état de cause, ainsi qu'il a été indiqué au chapitre précédent, en souscrivant aux contrats litigieux, les mineurs retraités n'ont pas renoncé aux avantages qu'ils tenaient du statut des mineurs et n'ont pas accepté de dispositions plus défavorables que celles dont les faisait bénéficier ce statut, puisqu'un capital était versé, destiné à se substituer aux indemnités prévues par le statut ; que par ailleurs, la retenue des indemnités trimestrielles vient compenser le capital versé et ne s'analyse donc pas en une cession des rémunérations ; que du reste, s'agissant de sommes versées postérieurement à la mise à la retraite des salariés considérés, les indemnités ne peuvent être qualifiées de rémunérations au sens de l'article L .3252-1 du code du travail, dont les dispositions et celles qui suivent sont applicables aux sommes dues à titre de rémunération à toute personne salariée ou travaillant pour un ou plusieurs employeurs ; que dans ces conditions, la demande en nullité des contrats pour violation de la loi doit être rejetée ;
1°) Alors que les rapports existant entre l'ANGDM et les mineurs retraités ayant souscrit des contrats « capital viager logement de prêt remboursable par versements trimestriels » et « capital viager chauffage de prêt remboursable par versements trimestriels » trouvent leur source dans le contrat de travail des mineurs ; qu'en refusant d'appliquer le droit du travail aux mineurs ayant conclu de tels contrats, au motif inopérant qu'ils bénéficiaient d'un statut réglementaire, la cour d'appel a violé les articles L.2254-1 et L.3252-1 et suivants du code du travail ;
2°) Alors qu'un salarié ne peut renoncer à l'application du statut collectif en vigueur dans l'entreprise ; que le fait que des agents d'une entreprise publique soient soumis à un statut réglementaire n'exclut pas l'application du principe fondamental selon lequel en cas de conflit de normes, la plus favorable au salarié doit recevoir application ; qu'en refusant de considérer que lors de la signature des contrats litigieux, l'exposant s'était vu illégalement appliquer des dispositions plus défavorables que celles dont lui faisait bénéficier le statut d'ordre public du décret du 14 juin 1946, la cour d'appel a violé l'article L.2254-1 du code du travail ;
3°) Alors que les prestations de logement et de chauffage attribuées aux mineurs étant dues en application du statut institué par le décret du 14 juin 1946 s'analysent en des rémunérations différées ; qu'en décidant néanmoins que les indemnités ne pouvaient être qualifiées de rémunérations au sens de l'article L.3252-1 du code du travail, pour en déduire que la retenue des indemnités trimestrielles ne consistait pas en une cession des rémunérations, la cour d'appel a violé l'article L.3252-1 du code du travail et l'article 141 du Traité de l'Union ;
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté les exposants de leurs demandes tendant à voir constater la nullité des contrats ;
Aux motifs que sur la nullité pour cause d'erreur sur un élément déterminant du contrat, en application de l'article 1110 alinéa 1er du code civil, l'erreur n'est une cause de nullité de la convention que lorsqu'elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l'objet ; qu'il résulte des stipulations des contrats intitulés capital viager logement et capital viager chauffage de prêt remboursable par versements trimestriels que les Houillères du bassin offrent à leur personnel, au moment de leur départ à la retraite, la possibilité de souscrire un contrat viager comportant : - d'une part, le versement immédiat par le CNGR pour leur compte d'un capital ; - d'autre part, le versement trimestriel au CNGR par le retraité sa vie durant, d'une somme déterminée ; qu'il est ensuite précisé que les retraités s'obligent à s'acquitter de la dette ainsi contractée à l'égard des Houillères par des versements trimestriels au CNGR dont le premier interviendra dans le mois de la signature du contrat et les suivants à l'échéance de chaque trimestre civil et ce, jusqu'au décès du contractant, et que le montant de chaque versement trimestriel correspondra à celui de l'indemnité trimestrielle de logement (et de chauffage) à laquelle pourra effectivement prétendre le cocontractant à la date de l'échéance trimestrielle considérée ; que les retraités ont signé le contrat en connaissance, non seulement du montant du capital versé qui y figure, mais encore du montant des indemnités trimestrielles de logement et de chauffage qui devaient leur être allouées ; qu'ils ont accepté, lors de la souscription du contrat, qu'un capital leur soit versé immédiatement, et soit compensé par anticipation avec les indemnités qui devaient leur être servies trimestriellement, et n'ont pas choisi l'option qui leur était également ouverte selon laquelle les indemnités leur seraient versées trimestriellement jusqu'à leur décès ; que l'élément déterminant du contrat était dès lors le versement aux anciens mineurs d'un capital représentatif des indemnités, (dont le montant leur permettait le cas échéant de devenir immédiatement propriétaires d'un bien immobilier), non soumis immédiatement à impôt, ce qui était l'objectif poursuivi à l'époque de la signature des conventions ; que dans ces conditions, les contrats ne peuvent être déclarés nuls, au motif que le consentement des souscripteurs aurait été vicié par l'erreur ;
Alors qu'après avoir retenu que les contrats n'emportaient pas renonciation des mineurs retraités aux prestations viagères auxquelles le statut leur ouvrait droit dès lors que la question du versement des prestations, une fois le capital remboursé, n'avait pas été envisagée lors de la souscription du contrat, la cour d'appel, qui a écarté la demande en nullité des contrats fondée sur l'erreur, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que l'exposant n'avait pu être suffisamment informé et donner un consentement éclairé sur cet élément déterminant des contrats qui n'était pas envisagé et a ainsi violé l'article 1110 du code civil ;
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté les demandes tendant à voir dire que les contrats souscrits par les exposants devaient être interprétés comme des contrats de prêt sans intérêts ;
Aux motifs propres que sur la requalification du contrat, le tribunal a dit qu'il se déduisait des termes du contrat et de la pratique des parties depuis leur conclusion que les souscripteurs ne remboursaient pas par leurs versements trimestriels le capital qui leur avait été versé, mais qu'ils remboursaient l'indemnité de logement ou de chauffage qui leur était versée fictivement pour les seuls besoins de sa taxation par l'administration fiscale et qu'en l'absence de remboursement du capital définitivement acquis à la date de son versement, les conventions litigieuses ne pouvaient être qualifiées de contrats de prêt ; que l'article 1892 du code civil énonce que le prêt de consommation est un contrat par lequel l'une des parties livre à l'autre une certaine quantité de choses qui se consomment par l'usage, à la charge pour cette dernière, de lui en rendre autant, de même espèce et qualité ; que les contrats intitulés « capital viager logement de prêt remboursable par versements trimestriels » et « capital viager chauffage de prêt remboursable par versements trimestriels » contiennent un préambule ainsi rédigé : « les Houillères offrent à leur personnel retraité la possibilité de souscrire un contrat viager comportant, d'une part, le versement immédiat par le CNGR pour leur compte d'un capital, d'autre part le versement trimestriel au CNGR par le retraité sa vie durant d'une somme déterminée» ; que le contrat « capital viager logement de prêt remboursable par versements trimestriels » souscrit par M. Y... M. et M. et Mme A... contient les clauses suivantes : article 1 : le contrat dûment signé, dès réception de la fiche individuelle d'état civil portant la mention marginale « non décédé » délivrée par la mairie du lieu de résidence dans les huit jours qui suivent la cessation d'activité, le CNGR versera à M. (...) par virement bancaire un capital de (...) ; article 2 : M. (...) s'oblige à s'acquitter de la dette ainsi contractée à l'égard des Houillères du bassin de Lorraine à dater du (...) par des versements trimestriels au CNGR dont le premier interviendra le (...) et les suivants à l'échéance de chaque trimestre civil, et ce, jusqu'au décès du contractant ; article 3 : le montant de chaque versement trimestriel correspondra à celui de l'indemnité trimestrielle de logement à laquelle pourra effectivement prétendre M. (...) à la date de l'échéance trimestrielle considérée ; article 4 : M. (...) autorise le CNGR, en règlement des montants précisés ci-dessus qu'il s'est engagé à verser, à retenir à chaque échéance trimestrielle le montant de l'indemnité de logement qui lui sera due à la même échéance ; article 5 : à défaut de présentation dans le délai d'un mois suivant le départ en retraite de la fiche individuelle d'état civil mentionnée à l'article 1, le présent contrat, même signé par les deux parties, sera réputé nul et non avenu ; que le contrat « capital viager chauffage de prêt remboursable par versements trimestriels » souscrit par M. Y... reprend les mêmes articles 1, 2 et 3 que le contrat ci-dessus. Son article 6 est le même que l'article 5 ci-dessus ; qu'il contient par ailleurs les clauses suivantes : article 4 : M. (...) autorise le CNGR, en règlement des montants précisés ci-dessus qu'il s'est engagé à verser, à retenir à chaque échéance trimestrielle le montant de l'indemnité de chauffage qui lui est due à titre personnel à la même échéance ; article : M. (...) renonce expressément au bénéfice de la prestation chauffage en nature. Ses droits seront honorés en espèces pour lui permettre d'une part d'assurer le remboursement du prêt à lui consenti par les Houillères ; que les articles II, III, IV et V des contrats « viager logement de prêt remboursable par versements trimestriels sur une tête » souscrits par MM. X... et Z... et du contrat « viager chauffage de prêt remboursable par versements trimestriels » souscrit par M. A. sont rédigés ainsi qu'il suit : article II : le CNGR s'engage à verser trimestriellement à compter du (...) à M. (...) l'indemnité de logement ( de chauffage) à laquelle il peut effectivement prétendre du fait de sa situation de retraité et compte-tenu des règles en vigueur au moment de la souscription du présent contrat ; article III : aux fins d'amortir le capital déterminé dans l'article I, M. (...) autorise le CNGR à procéder à la retenue totale de l'indemnité de logement (chauffage) définie dans l'article II. La première échéance de remboursement se situe au (trimestre suivant la signature du contrat) ; article IV : M. (...) et tout ayant droit de son chef renoncent expressément et définitivement à la prestation de logement (chauffage) en nature ; article V : le présent contrat prend fin au décès du souscripteur ; que certes, la rédaction de ces contrats comporte une contradiction, puisque le titre indique qu'il s'agit à la fois d'un contrat « capital viager logement ou chauffage » et d'un « prêt remboursable par versements trimestriels » ; que le préambule des contrats énonce toutefois qu'en contrepartie du versement immédiat d'un capital, le retraité versera trimestriellement au CNGR sa vie durant une somme déterminée ; que l'article 2 des contrats stipule que le retraité s'oblige à s'acquitter de sa dette par des versements trimestriels au CNGR et ce, jusqu'à son décès, l'article V que le présent contrat prend fin au décès du souscripteur ; que l'article 3 précise que le montant de chaque versement trimestriel correspondra à celui de l'indemnité de logement (ou de chauffage) à laquelle pourra effectivement prétendre le retraité à la date de l'échéance trimestrielle considérée, l'article III qu'aux fins d'amortir le capital déterminé dans l'article I, le retraité autorise le CNGR à procéder à la retenue totale de l'indemnité de logement (ou de chauffage) ; qu'il résulte de ces stipulations que le montant des indemnités de logement et de chauffage auxquelles pouvait prétendre le souscripteur était affecté au remboursement du capital versé, et ce, jusqu'à son décès ; que le terme contractuellement fixé au remboursement par l'article 2 des conventions étant le décès du souscripteur, il s'agissait donc bien d'un engagement viager de celui-ci ; que les parties ont ainsi convenu que la dette, en contrepartie du capital versé, ne se trouverait éteinte qu'au décès du bénéficiaire des indemnités ; que cette date étant par définition indéterminée, le montant du remboursement théorique, en l'absence d'autre précision, pouvait être supérieur à celui du capital versé et il n'y avait pas de corrélation mathématique entre le capital octroyé et le montant des indemnités dues au retraité, puis retenues au fur et à mesure par le CNGR ; que les appelants invoquent le fait que l'administration fiscale n'a pas remis en cause la non-imposition du capital versé tandis que l'indemnité de logement acquise chaque trimestre continuait à être imposable ; que cette circonstance démontre que les indemnités de logement n'avaient pas la nature d'échéances de remboursement d'un prêt en dépit des termes utilisés, à savoir remboursement ou amortissement du capital versé, ou dette, mais qu'elles conservaient leur caractère d'avantage en nature ; que par ailleurs, la question de savoir si ces contrats répondent ou non à la définition du contrat de rente viagère résultant des dispositions de l'article 1971 du code civil est indifférente à la solution du litige ; qu'il ressort des clauses ci-dessus examinées que les conventions critiquées constituent en réalité des contrats de « rachat » des indemnités de logement et de chauffage, au moyen du versement d'un capital représentatif de ces indemnités ; qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement qui a rejeté la demande de requalification des conventions en contrats de prêt ;
Aux motifs à les supposer adoptés que selon l'article 1156 du code civil on doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties, plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes ; que le contrat de prêt se caractérise par l'obligation de l'emprunteur de rembourser le capital mis à sa disposition sur lequel il n'a aucun droit acquis ; qu'en l'espèce les contrats litigieux disposent que les Houillères offrent à leur personnel au moment du départ à la retraite la possibilité de souscrire un contrat viager comportant : -d'une part le versement immédiat par le CNGR pour leur compte d'un capital au retraité, -d'autre part le versement trimestriel au CNGR par le retraité, sa vie durant, d'une somme déterminée ; que les contrats exactement intitulés « contrat viager logement ou contrat viager chauffage de prêt remboursable par les versements trimestriels » stipulent que: -le retraité s'oblige à s'acquitter de la dette ainsi contractée à l'égard des Houillères par des versements trimestriels et ce jusqu'à son décès, -le montant de chaque versement trimestriel correspondra à celui de l'indemnité trimestrielle à laquelle pourra effectivement prétendre l'intéressé à la date de l'échéance trimestrielle considérée, -le retraité autorise le CNGR à retenir à chaque échéance trimestrielle le montant de l'indemnité qui lui sera due, les contrats souscrits par Monsieur Z... ajoutant « aux fins d'amortir le capital » ; que si les intitulés des contrats et leurs dispositions font appel aux notions de remboursement, de dette et d'amortissement qui appartiennent au domaine du contrat de prêt, il se déduit des termes des contrats et de la pratique des parties depuis leur conclusion que les souscripteurs ne remboursent pas par leurs versements trimestriels le capital qui leur a été versé mais remboursent l'indemnité de logement ou de chauffage qui leur est versée fictivement pour les seuls besoins de sa taxation par l'administration fiscal ; qu'en l'absence de remboursement du capital définitivement acquis à la date de son versement, les conventions litigieuses ne sauraient être qualifiées de contrats de prêt ; qu'aux termes de l'article 1964 du code civil, le contrat aléatoire est une convention réciproque dont les effets, quant aux avantages et aux pertes, soit pour toutes les parties, soit pour l'une ou plusieurs d'entre elles, dépendent d'un événement incertain ; qu'un contrat comporte un aléa dès lors que ses effets dépendent de la durée de la vie humaine ; qu'en l'espèce le contrat comportait bien un aléa pour l'employeur qui prenait le risque de verser immédiatement un capital beaucoup plus important que les indemnités qu'il aurait été amené à servir dans l'hypothèse d'un décès rapide du souscripteur tandis que le souscripteur bénéficiait d'un avantage en optant pour le versement immédiat du capital lui permettant d'accéder à la propriété tout en prenant le risque s'il survivait au-delà de sa période d'amortissement d'avoir perçu un capital nettement inférieur au montant des indemnités qu'il aurait perçues jusqu'à son décès s'il n'avait pas choisi cette option ; qu'il convient donc de rejeter la demande tendant à voir qualifier les conventions litigieuses de contrats de prêt ;
1°) Alors que le « contrat capital viager logement de prêt remboursable par versements trimestriels » et le « contrat capital viager chauffage de prêt remboursable par versements trimestriels » prévoyant le versement immédiat par le CNGR d'une certaine somme qualifiée de « capital », remboursable par le mineur retraité, sa vie durant, par voie de compensation avec les prestations viagères de logement et de chauffage auxquelles il avait droit en sa qualité d'ancien mineur, constitue des contrats de prêt ; qu'il en résulte que l'obligation de rembourser cesse une fois le complet paiement du capital emprunté intervenu ; qu'en refusant de requalifier les contrats litigieux en contrats de prêt, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1892 du code civil ;
2°) Alors que la contradiction de motifs équivaut à son absence ; qu'en affirmant d'une part, que « la question de la reprise du versement des indemnités au profit du retraité une fois la totalité du capital avancé remboursé n'a pas été envisagée à l'époque de la souscription du contrat », pour considérer que cela ne permettait pas d'en déduire que dès leur conclusion ces contrats impliquaient renonciation du mineur aux prestations auxquelles le statut lui donnait droit (arrêt, p. 8), et d'autre part, que « les parties ont ainsi convenu que la dette en contrepartie du capital versé ne se trouverait éteinte qu'au décès du bénéficiaire des indemnités » (arrêt, p. 12), pour en déduire que les contrats litigieux n'étaient pas des contrats de prêt, la cour d'appel qui s'est contredite, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
CINQUIEME BRANCHE DU MOYEN (SUBSIDIAIRE)
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté les demandes des exposants tendant au remboursement des cotisations sociales qu'ils ont payées sur les indemnités logement, postérieurement à l'amortissement du capital, lesquelles auraient dû être précomptées ;
Aux motifs que Bernard X..., M. Maurice A..., M. René Z..., M. Jean-Claude Y... et M. René B... demandent le remboursement des cotisations sociales qu'ils ont payées sur les indemnités chauffage et logement, postérieurement à l'amortissement du capital, lesquelles auraient dû être précomptées ; qu'ils ne produisent pas de justificatif des décomptes qu'ils présentent dans leurs conclusions et ne critiquent pas non plus les explications données par l'ANGDM, selon lesquelles : - elle n'est redevable envers M. X... d'aucun arriéré puisqu'il a déjà obtenu le remboursement des contributions sociales payées après la date de fin de capitalisation, soit le 1er novembre 2011, et qu'il n'est plus imposé au titre de ses prestations de logement et de chauffage depuis cette date ; - Monsieur Z... n'est plus imposé au titre de sa prestation logement depuis le 1er août 2012, date de fin de capitalisation, et il n'est plus assujetti aux prélèvements sociaux sur ces prestations depuis cette date ; - la date de fin de capitalisation en ce qui concerne les prestations de logement de M. et Mme D. ayant été atteinte le 1er avril 2008, M. D. a été remboursé des prélèvements fiscaux et sociaux effectués à tort entre le 1er avril 2008 et le 1er janvier 2009 et elle n'est redevable d'aucun arriéré à son égard ; que les demandes de chef doivent être rejetées ;
Alors que le juge ne peut refuser de statuer en se fondant sur l'insuffisance de preuves qui lui sont fournies par les parties ; que l'exposant demandait le remboursement des cotisations sociales qu'il avait payées sur les indemnités logement, postérieurement à l'amortissement du capital ; qu'en rejetant cette demande en raison de l'absence de production de justificatifs des décomptes, la cour d'appel a violé l'article 4 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-14262;14-14263;14-14267
Date de la décision : 22/09/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 20 janvier 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 22 sep. 2015, pourvoi n°14-14262;14-14263;14-14267


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (président)
Avocat(s) : SCP Rousseau et Tapie, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.14262
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