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17/09/2015 | FRANCE | N°13-28401

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 septembre 2015, 13-28401


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 24 octobre 2013), que M. X... a été engagé à compter du mois d'août 1998 par l'association AFPA (l'association) en qualité de formateur niveau 1, promu en dernier lieu au poste de formateur niveau 3, chef de chantier des travaux publics, classification 385, classe 11, dans la spécialité "production, méthodes et topographie travaux publics" ; que revendiquant une égalité de salaire avec un autre salarié de l'entreprise ayant la même qua

lification, il a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que l'asso...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 24 octobre 2013), que M. X... a été engagé à compter du mois d'août 1998 par l'association AFPA (l'association) en qualité de formateur niveau 1, promu en dernier lieu au poste de formateur niveau 3, chef de chantier des travaux publics, classification 385, classe 11, dans la spécialité "production, méthodes et topographie travaux publics" ; que revendiquant une égalité de salaire avec un autre salarié de l'entreprise ayant la même qualification, il a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que l'association fait grief à l'arrêt de faire droit à la demande du salarié tendant au paiement d'un rappel de salaire en application du principe "à travail égal, salaire égal", alors, selon le moyen :
1°/ qu'effectuent un travail de valeur égale les salariés qui exécutent des travaux qui exigent d'eux un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse ; que l'analyse des travaux ainsi effectués s'apprécie au regard des conditions réelles d'exercice des fonctions ; que l'AFPA faisait en l'espèce valoir que bien que classés au même niveau III classe 11 selon l'ancienne classification, M. X... et M. Y... n'effectuaient pas des travaux de même valeur au point que dans la nouvelle classification mise en place en 2010 -que M. X... avait refusée de se voir appliquer- et qui prenait en compte l'étendue des missions et responsabilités pédagogiques assumées, ils n'étaient pas classés au même niveau, M. X... ayant été classé au niveau formateur expert classe 10 tandis que M. Y... l'avait été au niveau formateur conseil classe 11 ; qu'elle justifiait cette différence de classification par le fait que M. X... exerçait ses fonctions essentiellement dans un cadre prédéfini pour répondre à la commande publique tandis que l'activité de M. Y... était principalement tournée vers le marché privé pour lequel il créait et développait des modules de formation ; qu'en se bornant à constater que les deux salariés étaient au même niveau dans l'ancienne classification et qu'ils avaient tous deux « vocation à » dispenser le même type de formation, sans rechercher comme elle y était invitée si M. Y... ne construisait pas lui-même des modules de formation sur mesure tandis que M. X... se bornait à dispenser des formations dans un cadre prédéfini, la cour d'appel, qui n'a pas procédé à une analyse des conditions réelles de travail des salariés, a privé sa décision de base légale au regard du principe « A travail égal, salaire égal », ensemble l'article L. 3221-4 du code du travail ;
2°/ que l'expérience professionnelle acquise dans la fonction constitue un élément objectif justifiant une différence de traitement, nonobstant l'existence d'une prime d'ancienneté ; que l'AFPA faisait valoir que lorsque le 1er mars 2006, M. X... avait été promu formateur groupe 3 classe 11, M. Y... avait déjà 15 ans d'expérience dans cette fonction ; qu'en retenant que la différence d'ancienneté ne pouvait être prise en compte qu'au titre de la « Prime d'expérience » et que la différence de parcours professionnels invoquée était indifférente puisque tous deux relevaient de la même classification, sans rechercher comme elle y était invitée si l'expérience professionnelle acquise dans la fonction de formateur groupe 3 classe 11 par M. Y... ne justifiait pas qu'il perçoive une rémunération plus élevée que celle de M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe « A travail égal, salaire égal » ;
3°/ que le niveau de qualification et de diplôme constitue un élément objectif justifiant une différence de rémunération ; que l'AFPA faisait valoir que tandis que M. X... ne possédait aucun diplôme dans le domaine des travaux publics, M. Y... était, lui, titulaire d'un DUT génie civil option travaux publics et d'une formation d'ingénieur travaux ; qu'en retenant que la différence de parcours professionnels invoquée était indifférente puisque tous deux relevaient de la même classification, sans analyser les qualifications et diplômes dont étaient respectivement titulaires les deux salariés, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard du principe « A travail égal, salaire égal » ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis sans avoir à entrer dans le détail de l'argumentation des parties, la cour d'appel, qui a retenu que les fonctions réellement exercées par l'intéressé étaient strictement identiques à celles du salarié auquel il se comparait, a estimé que l'employeur n'établissait pas que la différence de traitement qu'elle avait constatée était justifiée par des éléments objectifs et pertinents ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'Association pour la formation professionnelle des adultes aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'Association pour la formation professionnelle des adultes et condamne celle-ci à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept septembre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour l'Association pour la formation professionnelle des adultes
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'AFPA à verser à Monsieur X... un rappel de salaire pour la période du 1er décembre 2006 au 30 septembre 2013, d'AVOIR dit que l'Appointement Individuel de Base (AIB) de Monsieur X... ne pourra être inférieur à la somme brute de 3778,61 euros à compter du mois d¿octobre 2013 et d'AVOIR condamné l'AFPA à lui verser une indemnité 2000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile
AUX MOTIFS PROPRES QUE « en application du principe: "A travail égal, salaire égal" la jurisprudence considère que si rien ne distingue objectivement deux salariés ayant le même travail et la même formation, ils doivent tous deux percevoir le même salaire et, en cas contraire, il appartient alors à l'employeur de justifier de façon objective et pertinente la différence de rémunération observée entre ces deux salariés; Qu'au cas présent il doit être relevé que Monsieur Laurent X... et Monsieur Didier Y... sont tous deux: "Formateurs groupe 3 ¿ Chef de chantier des travaux publics" classification 385 Classe 11 » avec une rémunération constituée de trois composantes : - AIB : attribué en fonction de la classification, - PRU : commun à l'ensemble du personnel AFPA, - Prime d'expérience pour tenir compte de l'ancienneté ; Que force est de constater que si ces deux salariés bénéficient tous deux de la même classification, ils ne bénéficient pas pour autant du même "AIB", 3.778 € pour Monsieur Didier Y... contre 2.817,71 € pour Monsieur Laurent X..., soit en l'occurrence une différence mensuelle de 960,29 € ; Attendu qu'en dépit des explications fournies par l'Association AFPA employant ces deux salariés occupant le même poste et effectuant strictement le même travail, il ressort que cette différence de traitement ne repose sur aucun critère réel et objectif, la différence d'ancienneté ne pouvant être prise en compte qu'au titre de la « Prime d'expérience » tandis que la différence de parcours professionnels invoquée est indifférente puisque tous deux sont "Formateurs Groupe 3, classification 385 .. Classe 11 ", ainsi que cela ressort clairement des mentions identiques figurant sur les bulletins de salaires de ces deux salariés ; Qu'au surplus l'argument avancé par l'appelante selon lequel les formations dispensées par Monsieur Didier Y... seraient plus "valorisantes" ou plus "qualifiantes" est inexact puisque ces deux salariés ont vocation à intervenir indistinctement sur les mêmes types de formation sans que le salarié en référence, Monsieur Didier Y..., puisse justifier d'une clientèle de stagiaires plus qualifiée ou plus valorisante alors que Monsieur Laurent X... a également vocation à intervenir, ainsi qu'il le fait très régulièrement, dans le cadre des formations CNFPT ou sur le marché privé; Que les pièces versées aux débats, et notamment des attestations d'autres salariés, ainsi que la propre attestation écrite émanant de Monsieur Didier Y... indiquant notamment que "Monsieur Laurent X... exerce comme moi la fonction de formateur Travaux Publics Routes et Canalisations au centre AFPA de Bernes sur Oise", démontrent amplement la parfaite identité des fonctions exercées entre Monsieur Laurent X... et Monsieur Didier Y... ; Attendu que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont pu considérer que l'employeur, tenu à une stricte égalité des rémunérations pour l'ensemble des salariés placés dans une situation identique selon le principe "A travail égal, salaire égal ", ne pouvant justifier de façon objective et: pertinente les raisons de cette différence observée de rémunérations, devait être condamné à payer un rappel de salaire au salarié ainsi lésé, lequel doit être revalorisé et réactualisé comme justement calculé de manière suffisamment détaillée dans ses écritures par l'intimé à la somme totale brute de 79.121,42 € pour la période du 1er décembre 2006 au 30 septembre 2013 ; Attendu en revanche que sur la demande de condamnation de l'employeur au paiement de la somme de 7.912,14 € au titre des congés payés y afférents, il convient de considérer que le jugement entrepris doit être également confirmé en ce qu'il a à juste titre débouté Monsieur Laurent X... de ce chef de demande mal fondé puisque dans le rappel de salaire sont inclus les congés payés qui ont déjà été pris et payés; Attendu qu'en définitive il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a retenu le principe de condamnation de l'employeur, l'ASSOCIATION POUR LA FORMATION PROFESSIONNELLE DES ADULTES (AFPA), au versement d'un rappel dû à Monsieur Laurent X... et sur la somme allouée de 1000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, mais de le réformer partiellement sur le montant chiffré en le portant à la somme brute de 79.121,42 €, outre les intérêts au taux légal à compter du 25 novembre 2011, étant précisé que, la relation de travail se poursuivant, cette décision est d'application permanente, le rappel de salaire devant perdurer au mois le mois, à compter de ce jour, le salaire mensuel de base de Monsieur Laurent X... en son Appointement Individuel de Base (AIB) ne pouvant être inférieur à la somme brute de 3.778,61 € à compter du mois d'octobre 2013 inclus »
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « la page 3 de l'entretien annuel du 10 mai 2011 démontre de Monsieur Laurent X... est légèrement mieux noté que Monsieur Didier Y... ; Attendu que les bulletins de salaires de messieurs Laurent X... et Didier Y... indiquent le même emploi « FJ PROD.MET.TOP TP », qu'ils ont la même classification « cadre », qu'ils ont la même position « II », qu'ils ont le même indice « 385 » ; Attendu que le taux d'expérience de messieurs Laurent X... et Didier Y... est différent, mais qu'il correspond à leur ancienneté dans l'entreprise; Attendu que l'employeur est tenu à une égalité des rémunérations pour l'ensemble des salariés placés dans une même situation selon le principe « à travail égal, salaire égal » ; Attendu que l'AFPA n'a pu justifier la différence de rémunération »
1/ ALORS QU' effectuent un travail de valeur égale les salariés qui exécutent des travaux qui exigent d'eux un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse ; que l'analyse des travaux ainsi effectués s'apprécie au regard des conditions réelles d'exercice des fonctions ; que l'AFPA faisait en l'espèce valoir que bien que classés au même niveau III classe 11 selon l'ancienne classification, Monsieur X... et Monsieur Y... n'effectuaient pas des travaux de même valeur au point que dans la nouvelle classification mise en place en 2010 - que Monsieur X... avait refusée de se voir appliquer ¿ et qui prenait en compte l'étendue des missions et responsabilités pédagogiques assumées, ils n'étaient pas classés au même niveau, Monsieur X... ayant été classé au niveau formateur expert classe 10 tandis que Monsieur Y... l'avait été au niveau formateur conseil classe 11 ; qu'elle justifiait cette différence de classification par le fait que Monsieur X... exerçait ses fonctions essentiellement dans un cadre prédéfini pour répondre à la commande publique tandis que l'activité de Monsieur Y... était principalement tournée vers le marché privé pour lequel il créait et développait des modules de formation (conclusions d'appel de l'AFPA p 4 à 7, reprises oralement à l'audience) ; qu'en se bornant à constater que les deux salariés étaient au même niveau dans l'ancienne classification et qu'ils avaient tous deux « vocation à » dispenser le même type de formation, sans rechercher comme elle y était invitée si Monsieur Y... ne construisait pas lui-même des modules de formation sur mesure tandis que Monsieur X... se bornait à dispenser des formations dans un cadre prédéfini, la Cour d'appel qui n'a pas procédé à une analyse des conditions réelles de travail des salariés, a privé sa décision de base légale au regard du principe « A travail égal, salaire égal », ensemble l'article L 3221-4 du Code du travail ;
2/ ALORS QUE l'expérience professionnelle acquise dans la fonction constitue un élément objectif justifiant une différence de traitement, nonobstant l'existence d'une prime d'ancienneté ; que l'AFPA faisait valoir que lorsque le 1er mars 2006, Monsieur X... avait été promu formateur groupe 3 classe 11, Monsieur Y... avait déjà 15 ans d'expérience dans cette fonction (conclusions d'appel de l'exposante p 9, reprises oralement à l'audience) ; qu'en retenant que la différence d'ancienneté ne pouvait être prise en compte qu'au titre de la « Prime d'expérience » et que la différence de parcours professionnels invoquée était indifférente puisque tous deux relevaient de la même classification, sans rechercher comme elle y était invitée si l'expérience professionnelle acquise dans la fonction de formateur groupe 3 classe 11 par Monsieur Y... ne justifiait pas qu'il perçoive une rémunération plus élevée que celle de Monsieur X..., la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe « A travail égal, salaire égal » ;
3/ ALORS QUE le niveau de qualification et de diplôme constitue un élément objectif justifiant une différence de rémunération ; que l'AFPA faisait valoir que tandis que Monsieur X... ne possédait aucun diplôme dans le domaine des travaux publics, Monsieur Y... était, lui, titulaire d'un DUT génie civil option travaux publics et d'une formation d'ingénieur travaux (conclusions d'appel de l'exposante p 8, reprises oralement à l'audience) ; qu'en retenant que la différence de parcours professionnels invoquée était indifférente puisque tous deux relevaient de la même classification, sans analyser les qualifications et diplômes dont étaient respectivement titulaires les deux salariés, la Cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard du principe « A travail égal, salaire égal ».


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-28401
Date de la décision : 17/09/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 24 octobre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 sep. 2015, pourvoi n°13-28401


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Ricard, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.28401
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