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16/09/2015 | FRANCE | N°14-13848

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 septembre 2015, 14-13848


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Met hors de cause M. X... en sa qualité de mandataire ad'hoc de la société Moulinex ;

Sur le moyen unique :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué statuant sur renvoi après cassation (Soc. 28 mai 2008, n° 06-46. 013), que la société Moulinex, membre du groupe Brandt Moulinex, a été placée en redressement judiciaire par jugement du 7 septembre 2001 ; qu'une partie du personnel a été licenciée le 19 novembre 2001 ; que M. Y... a saisi la juridic

tion prud'homale de demandes de dommages-intérêts en alléguant que l'employeur n'avait p...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Met hors de cause M. X... en sa qualité de mandataire ad'hoc de la société Moulinex ;

Sur le moyen unique :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué statuant sur renvoi après cassation (Soc. 28 mai 2008, n° 06-46. 013), que la société Moulinex, membre du groupe Brandt Moulinex, a été placée en redressement judiciaire par jugement du 7 septembre 2001 ; qu'une partie du personnel a été licenciée le 19 novembre 2001 ; que M. Y... a saisi la juridiction prud'homale de demandes de dommages-intérêts en alléguant que l'employeur n'avait pas fait appel aux commissions territoriales de l'emploi préalablement à son licenciement conformément aux dispositions de l'accord national du 12 juin 1987 sur les problèmes généraux de l'emploi dans la métallurgie ;

Attendu que pour débouter M. Y... de sa demande, l'arrêt retient que la recherche de reclassement externe à l'entreprise et au groupe s'est traduite par la mise en oeuvre, de la part de la société Moulinex puis des organes de la procédure, relayés par les pouvoirs publics, de moyens tout à fait exceptionnels allant jusqu'à la désignation d'un délégué interministériel ou encore la réactivation, pour les seuls salariés de Moulinex, des conventions de conversion qui avaient été abrogées quelques mois auparavant, que dans ce cadre, il a été fait appel aux commissions territoriales de l'emploi de l'Orne et du Calvados et dont les membres ont pu participer, parmi d'autres et dans un environnement élargissant de façon considérable leurs moyens d'action habituels, à un dispositif de recherche hors du commun ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions du salarié qui faisait valoir que les organes de la procédure ne justifiaient pas de la saisine des commissions territoriales compétentes antérieurement à la mise en oeuvre de la procédure de licenciement collectif pour motif économique, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il confirme le jugement ayant débouté le salarié de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 27 février 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;

Condamne la société Moulinex, représentée par MM. Z... et B..., ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. Y... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize septembre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Foussard, Froger, avocat aux Conseils, pour M. Y....

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QUE, confirmant le jugement, il a débouté M. Y... de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE Monsieur Michel Y... fait valoir que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse faute pour l'employeur d'avoir totalement exécuté son obligation de reclassement ; qu'il n'est pas sérieusement contesté qu'aucune possibilité de reclassement ne s'offrait au sein de l'entreprise, la S. A. MOULINEX ayant cessé toute activité et licencié 3 064 salariés, ni au sein du groupe constitué avec la société BRANDT, laquelle, avec ses douze filiales, a été également placée en redressement judiciaire, a procédé à des licenciements massifs (1 170 salariés) et a fait l'objet d'un plan de cession au profit d'une société israélienne ; que la déconfiture de l'ensemble du groupe rendait toute perspective de reclassement interne parfaitement inexistante ; que la recherche de reclassement s'est étendue à l'extérieur du groupe ; qu'il pesait à cet égard sur la S. A. MOULINEX une obligation conventionnelle tirée de l'article 28 de l'accord national du 12 juin 1987 intitulé " accord sur les problèmes généraux de l'emploi " et disposant que l'employeur amené à envisager un licenciement collectif d'ordre économique doit notamment " rechercher les possibilités de reclassement à l'extérieur de l'entreprise, en particulier dans le cadre des industries des métaux, en faisant appel à la commission territoriale de l'emploi " ; qu'en l'espèce, la recherche de reclassement externe à l'entreprise et au groupe s'est traduite par la mise en oeuvre, de la part de la S. A. MOULINEX puis des organes de la procédure, relayés par les pouvoirs publics, de moyens tout à fait exceptionnels allant jusqu'à la désignation d'un délégué interministériel ou encore la réactivation, pour les seuls salariés MOULINEX, des conventions de conversion qui avaient été abrogées quelques mois auparavant. Dans ce cadre, il a été fait appel aux commissions territoriales de l'emploi de l'Orne et du Calvados, qui ont été saisies comme en attestent les diligences qu'elles ont accomplies pièce 10 de la S. A. MOULINEX) et dont les membres (deux représentants de chacune des organisations syndicales signataires et un nombre de représentants patronaux égal au total des membres des organisations syndicales, selon l'article 2 de l'accord du 12 juin 1987) ont pu participer, parmi d'autres et dans un environnement élargissant de façon considérable leurs moyens d'action habituels, à un dispositif de recherche hors du commun ; que c'est ainsi que le " délégué interministériel aux restructurations MOULINEX ", Monsieur Michel A..., indique dans un courrier du 18 novembre 2008 (pièce 12 de la S. A. MOULINEX) dont les termes ne sont en rien contestés par l'appelant : " il est apparu indispensable aux pouvoirs publics d'élaborer et de mettre en oeuvre un plan pour atténuer l'impact des suppressions d'activité de MOULINEX (...) Dès l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, les pouvoirs publics ont décidé de centraliser l'ensemble des moyens destinés non seulement à la ré-industrialisation des sites de production MOULINEX et à la redynamisation des bassins industriels, mais également au reclassement des salariés dont le licenciement allait être inévitablement prononcé (...) Bien avant l'homologation du plan de redressement judiciaire et donc avant notification des licenciements, mes initiatives ont été nombreuses, ayant conduit à ce que se réunissent régulièrement tous les acteurs concernés : ANPE, ASSEDIC, AFPA, DATAR, Chambres de commerce et d'industrie, Chambres de métiers, organisations patronales (MEDEF) et les représentants des principales organisations syndicales (...) en outre, j'ai personnellement contacté de nombreuses entreprises susceptibles de constituer le cadre de reclassement possible de salariés " ; qu'il est joint à ce courrier des documents de travail démontrant le sérieux et l'ampleur des actions menées dans chacun des bassins d'emploi concernés ; qu'il s'avère ainsi que l'employeur, par lui-même comme avec le concours particulièrement volontariste des pouvoirs publics, a satisfait pleinement à ses obligations légales, conventionnelles et contractuelles de reclassement ;

ALORS QUE, premièrement, M. Y... faisait valoir, dans ses conclusions (p. 12 et 14) qu'il résultait des constatations de plusieurs décisions de justice rendues à l'occasion d'autres instances concernant la même procédure collective qu'aucune justification n'avait été apportée par les organes du redressement judiciaire quant à la saisine de la commission territoriale de l'emploi du Calvados et que si, comme le prétendent les organes du redressement judiciaire, cette démarche avait bien été entreprise, ils n'auraient pas manqué, dès les premières procédures, de produire les justifications correspondantes ; qu'en ne répondant pas au moyen de M. Y... selon lequel les organes de la procédure n'avaient jamais été en mesure d'apporter la moindre justification de la saisine utile de la commission territoriale de l'emploi du Calvados, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions et a, de ce fait, violé l'article 455 du Code de Procédure civile ;

ALORS QUE, deuxièmement, M. Y... faisait valoir, corrélativement, dans ses conclusions (p. 12) que la lettre du 18 novembre 2008 du délégué aux restructuration MOULINEX, sur laquelle s'appuie largement la cour d'appel, ne faisait aucunement allusion à des contacts qui auraient pu s'établir avec les commissions territoriales de l'emploi des départements concernés, en particulier des départements de l'Orne, du Calvados et de la Manche, de sorte que cette lettre ne présentait aucun intérêt s'agissant de la difficulté litigieuse, à savoir s'il était établi ou non que les organes du redressement judiciaire s'étaient attachés à saisir les commissions territoriales de l'emploi avant la mise en oeuvre du licenciement collectif pour motif économique survenu le 19 novembre 2001 ; de sorte qu'en s'appuyant néanmoins sur cette lettre ainsi que, de manière générale, sur « des documents de travail joints », sans les analyser, ne serait-ce que sommairement, ni en préciser la nature et la teneur, pour en déduire que l'employeur avait, avec le concours des pouvoirs publics, exécuté son obligation de reclassement, la Cour d'appel a, de nouveau, violé l'article 455 du Code de Procédure civile ;

ALORS QUE, troisièmement, M. Y... faisait valoir, dans ses conclusions (p. 13 et 14) qu'il résultait des termes de la lettre de l'UIMM de l'Orne que l'Union s'était saisie elle-même de la situation de l'emploi et des conséquences du dépôt de bilan de la société MOULINEX sans qu'à cet égard aucune démarché n'ait été préalablement entreprise et notamment avant le 19 novembre 2001, date de notification des licenciements pour motif économique, et que la commission paritaire territoriale avait attendu le 23 novembre 2001 pour adresser une convocation à ses membres en vue d'une réunion préparatoire du 29 novembre 2001 avec pour ordre du jour la situation de l'emploi et les conséquences du dépôt de bilan de la société MOULINEX en vue d'une nouvelle réunion fixée le 21 décembre 2011 ; qu'il résultait par conséquent de la lettre de l'UIMM de l'Orne, produite aux débats par l'employeur, que la commission paritaire territoriale n'avait pas été saisie en temps utile, à savoir avant le prononcé des licenciement ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions et a, de ce fait, violé l'article 455 du Code de Procédure civile ;

ALORS QUE, quatrièmement, M. Y... faisait valoir, dans ses conclusions (p. 15) qu'à aucun moment, les extraits des comptes rendus des réunions de la commission paritaire territoriale du Calvados ayant trait à la situation de la société MOULINEX et à la question du reclassement des salariés de ses sites implantés dans leur département, à savoir des réunions des 12 février 2002, 12 décembre 2002, 10 avril 2003 et 5 décembre 2003, ne font état d'une quelconque démarche qui aurait été entreprise, en amont du licenciement, auprès de la commission pour qu'elle intervienne dans le cadre des dispositions de l'article 28 de l'accord national sur l'emploi dans la métallurgie du 12 juin 1987, de sorte que l'employeur n'établissait pas, au vu de ces éléments, avoir exécuté son obligation conventionnelle de reclassement ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions et a, de ce fait, violé l'article 455 du Code de Procédure civile

ALORS QUE, cinquièmement, en se bornant à affirmer que l'employeur avait satisfait pleinement à ses obligations légales, conventionnelles et contractuelles de reclassement, sans se prononcer sur le point de savoir si l'employeur ne devait pas justifier de la saisine des commissions paritaires territoriales des départements de la Manche, de la Sarthe et des Hauts-de-Seine, bien que des établissements de la société MOULINEX étaient implantés dans chacun de ces trois départements, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-4 et L. 1235-3 du code du travail et 28 de l'accord national sur l'emploi dans la métallurgie du 12 juin 1987

ALORS QUE, sixièmement, et en toute hypothèse, en s'étant abstenue de rechercher, ainsi qu'il lui était demandé, si la saisine des commissions territoriales de l'emploi, prévue par des dispositions conventionnelles étendant le périmètre de reclassement et destinée à favoriser, avant tout licenciement, un reclassement à l'extérieur de l'entreprise, avait été mise en oeuvre et était intervenue avant le prononcé des licenciements, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-4 et L. 1235-3 du code du travail et 28 de l'accord national sur l'emploi dans la métallurgie du 12 juin 1987 ;

ALORS QUE, septièmement, et en outre, le fait que de très importants moyens aient été mis en oeuvre par l'entreprise débitrice, par les organes de la procédure, ainsi que par les pouvoirs publics est indifférent lorsqu'il s'agit de déterminer si les commissions territoriales de l'emploi avaient été saisie conformément aux dispositions de l'article 28 de l'Accord national sur l'emploi dans la métallurgie du 12 juin 1987 ; de sorte qu'en décidant que l'employeur avait exécuté son obligation conventionnelle de reclassement externe, en se bornant à prendre en considérant, par des motifs inopérants, le fait que la recherche de reclassement externe à l'entreprise et au groupe s'était traduite par la mise en oeuvre, de la part de la S. A. MOULINEX, puis des organes de la procédure, relayés par les pouvoirs publics, de moyens tout à fait exceptionnels allant jusqu'à la désignation d'un délégué interministériel ou encore la réactivation, pour les seuls salariés MOULINEX, des conventions de conversion qui avaient été abrogées quelques mois auparavant, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1233-4 et L. 1235-3 du code du travail et 28 de l'Accord national sur l'emploi dans la métallurgie du 12 juin 1987.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-13848
Date de la décision : 16/09/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 27 février 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 sep. 2015, pourvoi n°14-13848


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.13848
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