La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/07/2015 | FRANCE | N°14-22117

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 09 juillet 2015, 14-22117


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 mai 2014), que, le 28 avril 2007, M. X... a ouvert un compte dans les livres de la société JP Morgan Chase Bank National Association (la banque) et signé une convention de fonctionnement de compte courant associé à un compte d'instruments financiers ; que le 29 novembre 2007, il a souscrit un contrat d'assurance vie auprès de la société Fortis Luxembourg vie et effectué un premier versement provenant de ce compte ; q

ue la banque lui a consenti une convention de prêt sous la forme d'un d...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 mai 2014), que, le 28 avril 2007, M. X... a ouvert un compte dans les livres de la société JP Morgan Chase Bank National Association (la banque) et signé une convention de fonctionnement de compte courant associé à un compte d'instruments financiers ; que le 29 novembre 2007, il a souscrit un contrat d'assurance vie auprès de la société Fortis Luxembourg vie et effectué un premier versement provenant de ce compte ; que la banque lui a consenti une convention de prêt sous la forme d'un découvert en compte ayant pour objet le paiement des intérêts, frais et commissions au titre du crédit, les besoins de trésorerie de l'emprunteur et l'acquisition de titres financiers, ce prêt étant garanti par le nantissement du compte d'instruments financiers, la délégation du contrat d'assurance vie et la caution de la société civile Compagnie Caumartin créée par M. X... ; que, le 10 janvier 2008, celui-ci a procédé, sur son contrat d'assurance vie, à un versement investi en titres Wendel investissements ; qu'ayant exercé sa faculté de renoncer à ce contrat et remboursé l'emprunt, M. X... a assigné la banque en remboursement des intérêts et frais qu'il lui avait réglés, invoquant l'indivisibilité des contrats de prêt et d'assurance vie ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'exclure l'indivisibilité des contrats en cause ;
Attendu que l'arrêt relève que la banque n'est intervenue que pour présenter des propositions de financement sur le montage financier imaginé par les dirigeants du groupe Wendel, qu'elle a proposé à cet effet une modalité, parmi d'autres, consistant à placer les titres sur un contrat d'assurance vie, en présentant cette option comme optimale, mais sans que cela ne suffise à créer un ensemble contractuel, dès lors que le contrat de prêt a été utilisé à d'autres fins, qu'il n'était pas subordonné au contrat d'assurance vie, auquel il ne faisait référence que pour l'inclure au nombre des garanties consenties par l'emprunteur, que les deux contrats n'ont pas été souscrits simultanément, que leur durée était divergente et que l'exécution de l'un ne dépendait pas de l'autre, certains souscripteurs ayant d'ailleurs décidé d'investir différemment leurs actions, le choix de l'assurance vie étant facultatif et répondant uniquement à une volonté d'optimisation fiscale ; que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, en a souverainement déduit que rien ne démontrait que les parties aient eu la commune intention de rendre interdépendants les deux contrats et qu'il y avait lieu d'écarter l'indivisibilité alléguée ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... et le condamne à payer à la société JP Morgan Chase Bank National Association la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juillet deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté M. X... de toutes ses demandes à l'encontre de la société JP Morgan ;
Aux motifs qu'il est démontré que ce montage a été construit par les dirigeants du groupe Wendel, assistés de leur conseiller juridique et fiscal, qui est notamment le cabinet Debevoise et Plimpton, dont les études et les notes de frais sont versées aux débats, afin d'éviter la remise en cause du processus par l'administration fiscale sur le fondement de l'abus de droit ; que la société JP Morgan n'est devenue partenaire financier du projet qu'au début de l'année 2007 après une mise en concurrence avec d'autres banques et qu'elle a alors repris le montage élaboré pour présenter ses propositions de financement ; que c'est ainsi, dans le cadre d'une opération économique et financière visant à la restructuration de sociétés du groupe Wendel et à la détention directe de titres WI par les managers de la société WI que M. X... est devenu propriétaire de 72. 683 actions WI par l'intermédiaire de sa société civile Compagnie Caumartin 2 qui les lui a cédées au prix total de 5. 888. 049, 83 euros, qu'elle a investi dans un portefeuille d'OPCVM sur son contrat de capitalisation de la société Fortis Luxembourg Vie, alors que M. X... logeait ses actions sur son propre contrat d'assurance-vie dans la même société d'assurance ; qu'il a payé cette acquisition de titres par le découvert en compte qui lui a été consenti par la société JP Morgan le 9 janvier 2008 à la suite d'un versement sur son contrat d'assurance-vie souscrit auprès de la société Fortis Luxembourg Vie de 6. 250. 000 euros débités de son compte courant ; que la convention de crédit sous forme d'un découvert en compte consenti par la banque le 9 janvier 2008 a pour seul objet « le paiement des intérêts et de tous les frais et commissions au titre du crédit, les besoins de trésoreries de l'emprunteur, l'acquisition d'instrument financier » ; qu'il est justifié que, le 14 janvier 2008, le compte de M. X... a été débité d'une somme de 6. 250. 000 euros sous le libellé « versement complémentaire Fortis » ; qu'il est ensuite devenu propriétaire de 72. 683 actions WI déposées sur son compte d'assurance-vie ; que le relevé de son compte démontre qu'il a utilisé le surplus pour acheter d'autres titres WI sur le marché, faire des mouvement de fonds entre les comptes de ses sociétés et ses comptes personnels et pour pourvoir à ses besoins personnels, sans épuiser totalement la ligne de crédit ouverte ; que l'objet du crédit en cause n'est pas la souscription d'un contrat d'assurance-vie, mais le financement de l'acquisition de valeurs mobilières et des besoins personnels de l'emprunteur ; que le découvert en compte accordé par la société JP Morgan a permis à M. X... de racheter les titres WI à la société civile Compagnie de Caumartin 2, qu'il a créé et détenait ces titres sur son contrat de capitalisation, en les logeant sur son contrat d'assurance-vie dans un souci d'opacité fiscale ; que la seule référence au contrat d'assurance-vie dans l'acte de prêt figure dans les garanties puisque le contrat d'assurance-vie fait l'objet d'une délégation au profit de la banque prêteuse ; qu'elle s'ajoute aux autres garanties prévues, constituée par le nantissement du compte de titres de M. X... ouvert dans les livres de la banque et le cautionnement de la société civile Compagnie de Caumartin 2 ; que le contrat d'assurance-vie a été souscrit avant l'octroi du crédit et n'est que l'outil de placement des titres acquis par le crédit ; qu'il ne conditionne en rien l'octroi du crédit ; que les fonds prêtés ont été débloqués dès que la cession des titres WI entre la société civile Compagnie Caumartin 2 et M. X... est devenue effective, afin que M. X... puisse les payer à sa société civile qui en a investi le prix sur d'autres supports pour réduire le risque de concentration sur une même valeur ; que l'exécution du contrat de prêt ne dépend pas de celle du contrat d'assurance-vie, l'un ayant une durée de 4 ans et l'autre de 8 ans ; que le rachat des contrats d'assurance-vie ne conditionne pas le remboursement du prêt qui en est indépendant ; qu'il peut être payé par la vente des titres, mais aussi par d'autres moyens, ce qui sera d'ailleurs le cas, M. X... ayant remboursé son prêt à son terme échu le 30 avril 2011 par d'autres fonds à sa disposition ; que rien ne démontre que la commune intention des parties a été de rendre interdépendants le contrat de prêt et le contrat d'assurance-vie qui a été utilisé pour y loger les titres acquis de manière à bénéficier des avantages fiscaux y afférents ; qu'ils auraient pu être employés d'une autre manière ; que chaque manager, devenu propriétaire de titres Wendel à la suite de l'opération complexe précédemment décrite, a choisi l'option qui lui paraissait la plus pertinente pour lui ; qu'il n'est pas contesté que d'autres managers ont investis leurs actions WI sur d'autres supports que des contrats d'assurance ; qu'une fois la détention directe des titres réalisée, M. X... était libre d'en disposer comme il voulait ; que son investissement sur un contrat d'assurance vie est optionnel, facultatif et répond uniquement à un souci d'optimisation fiscale ; que même si la société JP Morgan a servi de courtier entre M. X... et la société Fortis Luxembourg Vie avec qui elle avait l'habitude de travailler et a été son interlocuteur unique, cela ne suffit pas à créer un ensemble contractuel caractérisé par un lien d'interdépendance entre les contrats, dérogatoire à l'effet relatif des contrats prévu par l'article 1165 du code civil ; qu'elle a proposé à son client une modalité parmi d'autres, même si elle a suggéré que c'était la solution optimale reprenant la proposition élaborée au sein du groupe Wendel, de placement des actions acquises par M. X... qui était libre d'en disposer comme il le voulait ; qu'il n'y a pas d'indivisibilité des contrats en cause, de sorte que l'anéantissement éventuel des contrats d'assurance-vie à la suite de l'exercice de la faculté de rétractation par M. X..., s'il est validé par la cour d'appel, n'a aucun effet sur le contrat de prêt qui a été exécuté et remboursé par l'emprunteur le 30 avril 2011 à son terme contractuel indépendamment du rachat du contrat d'assurance vie ; que M. X... est, en conséquence, mal fondé en sa demande de remboursement des intérêts et frais payés au titre du crédit qui lui a été consenti par la société JP Morgan ;
Alors 1°) que l'indivisibilité des contrats résulte de la volonté commune des contractants de former un ensemble contractuel indivisible ; qu'en n'ayant pas recherché, comme elle y était invitée, si le document intitulé « Réflexions sur les conséquences individuelles du projet Solfur », remis à M. X... au mois de mai 2007, par lequel la société JP Morgan lui exposait que la solution « contrat d'assurance-vie + emprunt » prévoyant « l'utilisation du contrat d'assurance-vie pour rembourser l'emprunt » était la « solution optimale », « la plus adaptée », permettant la plus forte « création de valeur » et une « flexibilité de gestion », ne révélait pas la volonté des parties de conclure un ensemble contractuel indivisible comportant un contrat de prêt et un contrat d'assurance-vie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1218 du code civil ;
Alors 2°) qu'après avoir relevé que la société JP Morgan avait proposé à son client, M. X..., plusieurs modalités d'acquisition et de placement de titres de la société Wendel et que M. X... avait accepté uniquement celle que la banque avait présenté comme la « solution optimale », qui consistait à financer l'acquisition des titres par un crédit remboursé par les gains escomptés du placement de ces titres sur un contrat d'assurance-vie en profitant des avantages offerts par ce contrat, la cour d'appel, qui a considéré que rien ne démontrait la commune intention des parties de rendre interdépendants le contrat de prêt et le contrat d'assurance-vie dès lors que M. X... avait le choix de placer les actions comme il le voulait, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que M. X... avait accepté l'ensemble de la « solution optimale » comportant un contrat de prêt et un contrat d'assurance-vie proposée par la société JP Morgan, caractérisant la rencontre des volontés sur cet ensemble contractuel indivisible, et a violé l'article 1218 du code civil ;
Alors 3°) que lorsqu'une partie demande confirmation de la décision déférée, elle est réputée s'en approprier les motifs ; qu'il appartient à la cour d'appel qui décide d'infirmer le jugement entrepris d'en réfuter les motifs déterminants ; qu'en se fondant sur le fait le contrat d'assurance-vie avait été utilisé pour y loger les titres acquis et qu'il s'agissait seulement d'une modalité de placement parmi d'autres, sans réfuter les motifs péremptoires de la décision des premiers juges qui avaient jugé que nonobstant la circonstance que la société JP Morgan avait présenté plusieurs solutions de détention des titres Wendel, dès lors que dans le schéma proposé par la société JP Morgan, l'assurance-vie conseillée par la banque avait été choisie, il existait bien un lien d'interdépendance entre l'ouverture de crédit et la souscription de l'assurance-vie, la cour d'appel a violé l'article 954, alinéa 4, du code de procédure civile ;
Alors 4°) que l'indivisibilité des contrats résulte de la volonté commune des contractants de former un ensemble contractuel indivisible ; qu'en rejetant la qualification de contrats indivisibles au motif que le choix effectué par M. X... de recourir à un contrat d'assurance-vie était optionnel et facultatif, la cour d'appel s'est fondée sur un motif inopérant pour exclure l'acceptation par M. X... d'un ensemble contractuel indivisible proposé par la banque, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article 1218 du code civil ;
Alors 5°) qu'en n'ayant pas recherché, comme elle y était invitée, si l'indivisibilité des contrats de prêt et d'assurance-vie n'était pas caractérisée par la réunion de plusieurs circonstances, à savoir la concomitance de la signature de ces contrats, conclus par le biais d'un interlocuteur unique qui avait présenté une offre globale « assurance-vie + emprunt » à M. X..., le fait que les fonds prêtés avaient été directement et intégralement versés sur le contrat d'assurance-vie, lequel n'était lui-même abondé que par les fonds prêtés et enfin le fait que le contrat d'assurance-vie avait été remis à la banque en garantie du contrat de prêt, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1218 du code civil ;
Alors 6°) qu'après avoir relevé le contrat de prêt d'une somme de plus de 6 000 000 euros exigeait que l'emprunteur consente une délégation totale, au profit du prêteur, sur le contrat d'assurance-vie destiné à accueillir cette somme, la cour d'appel qui s'est fondée sur le motif inopérant selon lequel le contrat d'assurance-vie ne conditionnait pas l'octroi du crédit sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'exigence d'une délégation totale consentie sur le contrat d'assurance-vie en garantie du prêt n'était pas un élément déterminant de celui-ci démontrant l'indivisibilité de cet ensemble contractuel, a de nouveau privé sa décision de base légale au regard de l'article 1218 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 14-22117
Date de la décision : 09/07/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 06 mai 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 09 jui. 2015, pourvoi n°14-22117


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.22117
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award