LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que les époux Paul X... ont vendu par acte authentique du 24 juin 2004, à M. Y... deux parcelles de terre ; qu'estimant que cette vente avait été conclue en violation du droit de préemption qu'il tiendrait du bail rural verbal de 1982 qu'il invoque, M. Christian X... a assigné les époux Paul X..., aux droits desquels viennent les consorts X..., et M. Y... en nullité de cette vente et en dommages-intérêts pour avoir obstrué l'accès à ces deux parcelles ;
Sur le troisième moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles 4 et 562 du code de procédure civile ;
Attendu que débouter M. Christian X... de sa demande de dommages-intérêts dirigée contre M. Y..., la cour d'appel retient qu'elle n'est saisie que des dispositions du jugement déclarant irrecevable l'action en nullité de la vente du 24 juin 2004 ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle était saisie d'un appel contre toutes les dispositions du jugement du 5 mai 2010 qui avait rejeté la demande de dommages-intérêts formée par M. Christian X... contre M. Y... en réparation de l'obstruction des parcelles, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen, le deuxième moyen et le troisième moyen pris en ses deux dernières branches, qui n'apparaissent manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. Christian X... de sa demande de dommages-intérêts formée contre M. Y..., l'arrêt rendu le 1er juin 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis, autrement composée ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y... à payer à M. Christian X... la somme de 2 900 euros ; rejette la demande de M. Y... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept juillet deux mille quinze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable, en raison de la forclusion, la demande en nullité émanant de Monsieur Christian X... ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'aux termes de l'article L. 412-12 du code rural, au cas où le droit de préemption n'aurait pu être exercé par suite de la nonexécution des obligations dont le bailleur est tenu, le preneur est recevable à agir en nullité de la vente et dommages et intérêts dans le délai de 6 mois à compter du jour où la vente lui a été connue et ce à peine de forclusion ; que M. X... soutient que, contrairement à ce qu'a considéré le premier juge, il n'a eu connaissance des conditions de la vente que le 6 octobre 2004 et qu'il a donc bien introduit son action dans le délai de six mois et il ajoute qu'en tout état de cause ce délai ne lui est pas opposable dès lors que M. Y... a commis une fraude en acquérant les parcelles de terre en parfaite connaissance de son droit de préemption, en cachant ce fait au notaire et en abusant de la faiblesse de ses parents ; qu'or, c'est bien la date de la connaissance par le preneur de la vente, et non la date de la vente elle-même ou celle où le titulaire du bail en a connu les conditions qui constitue le point de départ du délai de forclusion de six mois prévu par le texte susvisé et il n'est pas contestable qu'ainsi qu'il l'écrivait lui-même dans son assignation et ses écritures postérieures, M. Christian X... a eu connaissance de cette vente le 27 juillet 2004 ; que son assignation étant en date du 5 avril 2006, son action a donc été introduite hors du délai prévu et, dès lors qu'il ne justifie d'aucune cause permettant de considérer que ce délai ne lui serait pas opposable et notamment pas de la fraude qu'il impute à M. Y..., elle est incontestablement irrecevable parce que forclose ; que le jugement entrepris doit donc être confirmé
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il résulte de l'article L. 412-12 du code rural qu'au cas où le droit de préemption n'aurait pu être exercé par suite de la non-exécution des obligations dont le bailleur est tenu en application de la présente section, le preneur est recevable à intenter une action en nullité de la vente et en dommages et intérêts devant les tribunaux paritaires dans un délai de six mois à compter du jour où la date de la vente lui est connue, à peine de forclusion ; qu'en l'espèce, il n'est pas discuté que Monsieur Christian X... a eu connaissance de la vente contestée le 27 juillet 2004 et force est de constater qu'il n'a pas intenté l'action prévue par l'article L. 412-12 du code rural dans les six mois puisqu'il n'a fait délivrer son assignation que le 5 avril 2006, soit près de deux ans après la date à laquelle il a eu connaissance de la vente de la parcelle ; que son action est forclose et sera en conséquence déclarée irrecevable ;
ALORS QUE, dans le cas où le droit de préemption n'aurait pu être exercé, par suite de la non-exécution des obligations dont le bailleur d'un fonds rural est tenu, le preneur est recevable à former une demande en nullité de la vente devant les tribunaux paritaires des baux ruraux dans un délai de six mois, à peine de forclusion ; que ce délai ne court qu'à compter du jour où la date de la vente lui est effectivement connue ; qu'en faisant ici courir le délai de six mois du jour où Monsieur Christian X... aurait eu connaissance de la vente, et non du jour où la date de cette vente a été portée à sa connaissance, la cour viole l'article L. 412-12, alinéa 3, du code rural et de la pêche maritime.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté au fond Monsieur Christian X... de sa demande tendant à l'annulation de la vente conclue le 24 juin 2004 entre les époux X... et Monsieur Y... ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'aux termes de l'article L. 412-12 du code rural, au cas où le droit de préemption n'aurait pu être exercé par suite de la non-exécution des obligations dont le bailleur est tenu, le preneur est recevable à agir en nullité de la vente et dommages et intérêts dans le délai de 6 mois à compter du jour où la vente lui a été connue et ce à peine de forclusion ; que M. X... soutient que, contrairement à ce qu'a considéré le premier juge, il n'a eu connaissance des conditions de la vente que le 6 octobre 2004 et qu'il a donc bien introduit son action dans le délai de six mois et il ajoute qu'en tout état de cause ce délai ne lui est pas opposable dès lors que M. Y... a commis une fraude en acquérant les parcelles de terre en parfaite connaissance de son droit de préemption, en cachant ce fait au notaire et en abusant de la faiblesse de ses parents ; qu'or, c'est bien la date de la connaissance par le preneur de la vente, et non la date de la vente elle-même ou celle où le titulaire du bail en a connu les conditions qui constitue le point de départ du délai de forclusion de six mois prévu par le texte susvisé et il n'est pas contestable qu'ainsi qu'il l'écrivait lui-même dans son assignation et ses écritures postérieures, M. Christian X... a eu connaissance de cette vente le 27 juillet 2004 ; que son assignation étant en date du 5 avril 2006, son action a donc été introduite hors du délai prévu et, dès lors qu'il ne justifie d'aucune cause permettant de considérer que ce délai ne lui serait pas opposable et notamment pas de la fraude qu'il impute à M. Y..., elle est incontestablement irrecevable parce que forclose ; que le jugement entrepris doit donc être confirmé ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il résulte de l'article L. 412-12 du code rural qu'au cas où le droit de préemption n'aurait pu être exercé par suite de la non-exécution des obligations dont le bailleur est tenu en application de la présente section, le preneur est recevable à intenter une action en nullité de la vente et en dommages et intérêts devant les tribunaux paritaires dans un délai de six mois à compter du jour où la date de la vente lui est connue, à peine de forclusion ; qu'en l'espèce, il n'est pas discuté que Monsieur Christian X... a eu connaissance de la vente contestée le 27 juillet 2004 et force est de constater qu'il n'a pas intenté l'action prévue par l'article L. 412-12 du code rural dans les six mois puisqu'il n'a fait délivrer son assignation que le 5 avril 2006, soit près de deux ans après la date à laquelle il a eu connaissance de la vente de la parcelle ; que son action est forclose et sera en conséquence déclarée irrecevable ;
ALORS QUE commet un excès de pouvoir le juge qui, après avoir constaté l'irrecevabilité d'une action ou d'une demande, statue néanmoins sur son bien-fondé ; qu'en déboutant Monsieur X... de l'ensemble de ses prétentions, et notamment de sa demande tendant à l'annulation de la vente litigieuse, après avoir constaté l'irrecevabilité de son initiative procédurale en raison de la forclusion, la cour viole les articles 122 du code de procédure civile et L. 412-12, alinéa 3, du code rural et de la pêche maritime, ensemble excède ses pouvoirs.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur Christian X... de sa demande tendant à la condamnation de Monsieur Y... à lui payer la somme de 20. 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE la cour n'est saisie que des dispositions du jugement déclarant irrecevable l'action de M. X... en nullité de la vente du 24 juin 2004 ;
ET AUX MOTIFS, à les supposer adoptés des premiers juges, QU'il résulte de l'article L. 412-12 du code rural qu'au cas où le droit de préemption n'aurait pu être exercé par suite de la non-exécution des obligations dont le bailleur est tenu en application de la présente section, le preneur est recevable à intenter une action en nullité de la vente et en dommages et intérêts devant les tribunaux paritaires dans un délai de six mois à compter du jour où la date de la vente lui est connue, à peine de forclusion ; qu'en l'espèce, il n'est pas discuté que Monsieur Christian X... a eu connaissance de la vente contestée le 27 juillet 2004 et force est de constater qu'il n'a pas intenté l'action prévue par l'article L. 412-12 du code rural dans les six mois puisqu'il n'a fait délivrer son assignation que le 5 avril 2006, soit près de deux ans après la date à laquelle il a eu connaissance de la vente de la parcelle ; que son action est forclose et sera en conséquence déclarée irrecevable ;
ALORS QUE, D'UNE PART, la dévolution s'opère pour le tout lorsque l'appel n'est pas limité à certains chefs ; que l'appel défère à la cour la connaissance de tous les chefs du jugement qu'il critique expressément ou implicitement et de ceux qui en dépendent ; qu'en l'espèce, il appert de la déclaration d'appel de Monsieur X... que son appel n'était pas limité et de ses dernières conclusions d'appel, dans lesquelles il réitérait sa demande de dommages et intérêts, qu'était notamment combattu le chef du jugement ayant écarté cette demande ; qu'en considérant néanmoins qu'elle n'était saisie que des dispositions du jugement déclarant irrecevable la demande de Monsieur X... en nullité de la vente du 24 juin 2004, la cour viole l'article 562 du code de procédure civile et les articles 4, 5 et 12 du même code, ensemble le principe dispositif ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART et subsidiairement, si l'action en paiement de dommages et intérêts ouverte au preneur d'un fonds rural dont le droit de préemption a été méconnu doit être intentée, à peine de forclusion, dans un délai de six mois à compter du jour où la date de la vente lui est connue, n'est pas soumise à ce délai la demande en paiement de dommages et intérêts qui tend à la réparation d'un préjudice distinct de celui résultant de la vente intervenue en violation du droit de préemption du preneur ; qu'en l'espèce, la demande de dommages et intérêts formée par Monsieur X... tendait, non point à la réparation du préjudice résultant de la vente conclue au profit de Monsieur Y..., mais à la réparation du préjudice distinct qu'il avait subi du fait des agissements, constitutifs d'une voie de fait, que ce dernier avait commis à son encontre, en obstruant l'accès aux parcelles qui lui étaient données à bail, perturbant de ce fait leur exploitation (cf. les dernières écritures de Monsieur X..., page 10) ; qu'en rejetant néanmoins cette demande indemnitaire, motif pris de la forclusion, la cour viole, par fausse interprétation et fausse application, l'article L. 412-12 du code rural et de la pêche maritime, ensemble les articles 4 et 12 du code de procédure civile et le principe dispositif ;
ET ALORS QUE, ENFIN, et en tout état de cause, à supposer même irrecevable, en raison de la forclusion, la demande de dommages et intérêts telle que formée par Monsieur X..., la cour ne pouvait de toutes façons, sauf à commettre un excès de pouvoir, statuer sur le bien-fondé de celle-ci, ce qu'elle fait en la rejetant, d'où il suit qu'à cet égard également, la cour viole l'article 122 du code de procédure civile, ensemble l'article L. 412-12, alinéa 3, du code rural et de la pêche maritime.