LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 juin 2014), que Mme X..., opérée d'une hernie discale par Mme Y... et atteinte de graves séquelles sensitives et motrices, a saisi la Commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux (CRCI), qui, après expertise, a conclu à la responsabilité de Mme Y..., dont l'assureur, la société Panacéa assurances, a refusé de faire une offre d'indemnisation ; que Mme X..., appelant en la cause l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), a saisi un juge des référés qui a désigné un nouvel expert, mais refusé d'allouer à Mme X... une indemnité provisionnelle ;
Attendu que Mme Y... et la société Panacéa assurances font grief à l'arrêt de les condamner à payer à Mme X... une provision de 30 000 euros, alors, selon le moyen :
1°/ que dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président peut accorder en référé une provision au créancier ; qu'en l'espèce, il est constant que Mme Y... et la société Panacéa assurances ont expressément et utilement contesté les rapports d'expertise qui tendaient à retenir le principe d'une éventuelle responsabilité de Mme Y... à raison d'une prétendue insuffisance de prise en charge dans la phase postopératoire, ce dont il résultait que l'existence de l'obligation d'indemnisation était sérieusement contestée ; qu'en condamnant pourtant Mme Y... et la société Panacéa assurances au paiement d'une somme provisionnelle, la cour d'appel a violé l'article 809 du code de procédure civile ;
2°/ que les juges ne peuvent méconnaitre le sens clair et précis des conclusions d'appel des parties ; qu'en l'espèce, Mme Y... et la société Panacéa assurances contestaient expressément dans leurs écritures d'appel les conclusions des rapports d'expertise ayant retenu le principe d'une éventuelle responsabilité de Mme Y... à raison d'une prétendue insuffisance de prise en charge dans la phase postopératoire ; qu'en jugeant que Mme Y... et la société Panacéa assurances ne discutent pas utilement les conclusions des experts pour en déduire que la demande d'indemnisation provisionnelle de la victime n'est pas sérieusement contestable en son principe, la cour d'appel, qui a dénaturé les conclusions claires et précises de Mme Y... et de la société Panacéa assurances, a violé l'article 1134 du code civil ;
3°/ qu'en se bornant à énoncer de façon péremptoire que Mme Y... et la société Panacéa assurances ne discuteraient pas utilement les conclusions des experts pour en déduire que la demande d'indemnisation provisionnelle de la victime n'est pas sérieusement contestable en son principe, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que, par une appréciation souveraine des conclusions des parties et des éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a estimé que ni la surveillance ni la prise en charge de Mme X... après l'intervention n'avaient été correctes, et qu'elle avait ainsi perdu une chance, estimée à 30%, d'obtenir une meilleure récupération neurologique ; qu'elle a pu en déduire que l'obligation d'indemniser Mme X... n'était pas sérieusement contestable au sens de l'article 809, alinéa 2, du code de procédure civile ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... et la société Panacéa assurances aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme Y... et la société Panacéa assurances à verser à Mme X... la somme globale de 3 000 euros ; rejette les autres demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier juillet deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour Mme Y... et la société Panacéa assurances
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné le Docteur Y... et la société PANACEA ASSURANCES à verser à Madame X... la somme provisionnelle de 30.000 euros à valoir sur l'indemnisation des préjudices litigieux ;
Aux motifs que, « Sur la provision demandée par Mme X...
Considérant que selon le rapport d'expertise du professeur Z... que le comportement du médecin mis en cause n'a pas été conforme aux règles de l'art et aux données acquises de la science dans la surveillance postopératoire et que selon celui du professeur A..., du 18/02/14 soit postérieurement à la première demande de Mme X... en référé, que la gestion des suites opératoires n'a pas été correcte et conduit à considérer qu'il existe une perte de chance fixée à 30% d'obtenir une meilleure récupération neurologique, liée à l'absence de prise en charge précoce et adaptée de la complication postopératoire ;
Considérant que le docteur Y... et la société Panacéa Assurance ne discutent pas utilement ces conclusions dont il se déduit que la demande d'indemnisation provisionnelle de la victime n'est pas sérieusement contestable en son principe ;
Considérant, sur le quantum de celle-ci, que Mme X... invoque des frais de santé. (5228,50 ¿) d'assistance par une tierce personne (76.600¿), d'aménagement domotique (8.922,30 ¿) et de perte de gains professionnels (25.000 ¿) ;
Considérant cependant qu'au regard de l'importance particulière des préjudices subis, la Cour dispose d'éléments suffisants, compte tenu des pièces versées et de la part de responsabilité manifestement imputable au médecin responsable, pour fixer la provision allouée à la somme de 30.000 ¿ » ;
Alors que, d'une part, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président peut accorder en référé une provision au créancier ; qu'en l'espèce, il est constant que le docteur Y... et la société PANACEA ASSURANCES ont expressément et utilement contesté les rapports d'expertise qui tendaient à retenir le principe d'une éventuelle responsabilité du docteur Y... à raison d'une prétendue insuffisance de prise en charge dans la phase postopératoire (conclusions, p. 23 et s.), ce dont il résultait que l'existence de l'obligation d'indemnisation était sérieusement contestée ; qu'en condamnant pourtant le docteur Y... et la société PANACEA ASSURANCES au paiement d'une somme provisionnelle, la Cour d'appel a violé l'article 809 du code de procédure civile ;
Alors que, d'autre part, les juges ne peuvent méconnaitre le sens clair et précis des conclusions d'appel des parties ; qu'en l'espèce, le docteur Y... et la société PANACEA ASSURANCES contestaient expressément dans leurs écritures d'appel les conclusions des rapports d'expertise ayant retenu le principe d'une éventuelle responsabilité du docteur Y... à raison d'une prétendue insuffisance de prise en charge dans la phase post-opératoire (conclusions, p. 23 et s.) ; qu'en jugeant que le docteur Y... et la société Panacéa Assurance ne discutent pas utilement les conclusions des experts pour en déduire que la demande d'indemnisation provisionnelle de la victime n'est pas sérieusement contestable en son principe, la Cour d'appel, qui a dénaturé les conclusions claires et précises du docteur Y... et de la société PANACEA ASSURANCES, a violé l'article 1134 du code civil ;
Alors qu'enfin, en se bornant à énoncer de façon péremptoire que le docteur Y... et la société Panacéa Assurance ne discuteraient pas utilement les conclusions des experts pour en déduire que la demande d'indemnisation provisionnelle de la victime n'est pas sérieusement contestable en son principe, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile.