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24/06/2015 | FRANCE | N°13-28784

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 juin 2015, 13-28784


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée le 7 juillet 1982 par l'association L'Oeuvre du perpétuel secours en qualité de commis administratif à temps partiel, et reconnue travailleur handicapé en 1993, a été placée en arrêt de travail à compter du mois d'octobre 2007, et, à l'issue de deux examens médicaux, déclarée par le médecin du travail inapte à tout poste dans l'entreprise ; que licenciée le 30 juin 2008 pour inaptitude et impossibilité de reclassement, elle a saisi la juridiction p

rud'homale de demandes au titre tant de la rupture que de l'exécution du c...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée le 7 juillet 1982 par l'association L'Oeuvre du perpétuel secours en qualité de commis administratif à temps partiel, et reconnue travailleur handicapé en 1993, a été placée en arrêt de travail à compter du mois d'octobre 2007, et, à l'issue de deux examens médicaux, déclarée par le médecin du travail inapte à tout poste dans l'entreprise ; que licenciée le 30 juin 2008 pour inaptitude et impossibilité de reclassement, elle a saisi la juridiction prud'homale de demandes au titre tant de la rupture que de l'exécution du contrat de travail ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article L. 6321-1 du code du travail ;
Attendu, selon ce texte, que l'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail et veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations ;
Attendu que pour rejeter la demande de dommages-intérêts de la salariée en réparation du préjudice résultant du manquement de l'employeur à son obligation d'adaptation du salarié à l'évolution de son emploi, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que l'intéressée justifie que ses demandes de formation "d'animation culturelle et de langues" et de "contes" ont été successivement refusées en 2006 et 2007, qu'elle avait bénéficié d'une formation en 2005, et que la formation est à l'initiative de l'employeur dans le cadre d'un éventuel plan de formation et à l'initiative de la salariée dans le cadre du congé individuel de formation ou du droit individuel à la formation dont elle n'avait pas fait usage ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la salariée avait, pendant sa présence dans l'entreprise de près de 26 ans, bénéficié d'une seule formation professionnelle, de sorte qu'était caractérisé un manquement de l'employeur à son obligation de veiller au maintien de la capacité de cette salariée à occuper un emploi, la cour d'appel, à laquelle il appartenait d'évaluer le préjudice résultant de ce manquement, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mme X... de sa demande en paiement de la somme de 7 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice lié à la perte de sa capacité d'emploi, l'arrêt rendu le 6 novembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne l'association Oeuvre du perpétuel secours aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Mme X... la somme de 2 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre juin deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame X... de ses demandes tendant à voir juger son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner l'Association l'OEuvre du Perpétuel Secours à lui verser les sommes de 22 000 ¿ à titre de dommages et intérêts et 10 000 ¿ au titre de ses préjudices moral et physique ;
AUX MOTIFS QUE "¿ pour contester le bien-fondé de son licenciement, Madame X... soutient d'abord que l'employeur a manqué à son obligation de reclassement, ensuite que la dégradation de ses conditions de travail a altéré sa santé et constitue une inaptitude imputable à l'employeur ; que s'agissant du respect de son obligation de reclassement, Madame X... fait valoir à bon droit que l'avis d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise ne dispense pas l'employeur de rechercher un reclassement et que le classement en invalidité de 2ème catégorie par la sécurité sociale, qui obéit à une finalité distincte et relève d'un régime juridique différent, est sans incidence sur l'obligation de reclassement du salarié inapte qui incombe à l'employeur ; que cependant, la lettre de licenciement précise que, malgré l'avis du médecin du travail, l'employeur a recherché une possibilité de reclassement dans un poste approprié à ses capacités et aussi proche que possible de l'emploi précédemment occupé, mais qu'aucun poste n'était vacant dans les services administratifs, à temps plein ou à temps partiel, que ce soit sur le site de l'Hôpital Franco-Britannique ou sur celui de l'Hôpital Notre Dame du Perpétuel Secours, et qu'aucune création de poste n'était envisagée dans les services comptabilité - finances, administration générale, ressources humaines, administration patients, accueil-standard, direction générale, secteurs où il aurait été possible de rechercher un poste de reclassement ; que l'employeur justifie suffisamment de son impossibilité de reclassement par la production du registre unique du personnel dont Madame X... ne prétend pas qu'il fasse apparaître des postes vacants compatibles avec son état de santé ;
QUE s'agissant de la dégradation de ses conditions de travail, Madame X... avance qu'au cours de l'exécution du contrat de travail, l'employeur n'aurait pas respecté les préconisations successives du médecin du travail et ainsi manqué à son obligation de sécurité ; que cependant, si elle verse aux débats les différents avis émis par le médecin du travail au cours de l'exécution du contrat de travail et insiste sur l'obligation de sécurité pesant sur l'employeur, elle demeure imprécise quant aux manquements qu'elle lui reproche ; que celui-ci justifie notamment du respect du mi-temps thérapeutique et de la réduction du temps de travail prescrits par le médecin du travail en 1996, 1997 et 1998 ; qu'au sujet du transfert de son bureau au sous-sol dont elle se plaint, la salariée ne conteste, ni que l'ensemble des bureaux des services administratifs a été transféré au sous-sol afin de permettre l'installation d'un service de pédiatrie et d'une unité de néonatalogie, ni qu'une autorisation de passer par le service de balnéothérapie lui a été accordée pour pallier l'absence d'ascenseur direct, ni encore que l'obligation d'enfiler des sur-chaussures répondait à des règles d'hygiène exclusives de toute brimade ; qu'au demeurant, aucun avis médical n'excluait l'usage d'escaliers ; que si la chute qu'elle a faite en 2004 a été prise en charge au titre de la législation du travail, elle n'a pas été imputée à faute à l'employeur ; qu'en ce qui concerne l'attitude de dénigrement et les pressions qu'elle prête à la nouvelle responsable, entrée en fonctions en 1997, les attestations qu'elle fournit, dont les auteurs font essentiellement état de leurs propres doléances à l'égard de leur chef de service ou des qualités qu'elles reconnaissent à Madame X..., n'établissent aucun fait précis commis à son encontre par sa supérieure hiérarchique ; que le jugement doit, en conséquence, être également confirmé en ce qu'il a dit que le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse et a débouté Madame X... de sa demande d'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de sa demande d'indemnisation du préjudice physique et moral résultant du comportement de l'employeur (¿)" (arrêt p.3 dernier alinéa, p.4 alinéas 1 et 2) ;
ALORS QUE le poste de travail des salariés handicapés doit être aménagé de telle sorte que ces travailleurs puissent y accéder aisément ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de la Cour d'appel que, dans le cadre d'une réorganisation des services, le poste de travail de Madame X... a été transféré au sous-sol dans des conditions telles qu'une autorisation de traverser le service de balnéothérapie, imposant l'enfilage de sur-chaussures à chaque passage, lui a été délivrée pour pallier l'absence d'ascenseur ; que l'accès de cette salariée handicapée à son poste de travail a été ainsi rendu plus difficile par l'employeur ; que c'est en traversant ce service au sol glissant qu'elle a été victime d'un accident du travail ; qu'en excluant cependant tout manquement de l'Hôpital Franco-Britannique à son obligation de sécurité de résultat aux termes de motifs inopérants déduits de ce "¿ l'ensemble des bureaux des services administratifs a été transféré au sous-sol afin de permettre l'installation d'un service de pédiatrie et d'une unité de néonatalogie, ¿ qu'une autorisation de passer par le service de balnéothérapie lui a été accordée pour pallier l'absence d'ascenseur direct, ¿ que l'obligation d'enfiler des sur-chaussures répondait à des règles d'hygiène exclusives de toute brimade ; ¿qu'aucun avis médical n'excluait l'usage d'escaliers ¿que si la chute qu'elle a faite en 2004 a été prise en charge au titre de la législation du travail, elle n'a pas été imputée à faute à l'employeur (¿)" la Cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé, ensemble l'article L.4121-1 du Code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame X... de sa demande tendant à voir condamner l'Association OEuvre du Perpétuel Secours à lui verser les sommes de 7 000 ¿ pour préjudice "d'employabilité" ;
AUX MOTIFS QUE "¿ se prévalant de l'obligation d'assurer l'adaptation des salariés et de veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi pesant sur l'employeur, Madame X..., qui justifie de ce que ses demandes de formation "d'animation culturelle et de langues" et de "contes" ont été successivement refusées en 2006 et 2007, sollicite réparation du préjudice en résultant ;
QUE le Conseil de prud'hommes a rejeté sa demande en retenant qu'elle avait bénéficié d'une formation en 2005 et que la formation était à l'initiative de l'employeur dans le cadre d'un éventuel plan de formation et, à l'initiative du salarié, dans le cadre du congé individuel de formation ou du droit individuel à la formation dont elle n'avait pas fait usage ; que la salariée qui se borne à réitérer sa demande sans émettre aucune critique à l'encontre de la décision du Conseil de prud'hommes à cet égard, doit être déboutée de sa demande, et le jugement confirmé de ce chef" (arrêt p.4) ;
ALORS QU'aux termes de l'article L.6321-1 du Code du travail, l'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail et veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations ; qu'il résulte par ailleurs de l'article L.5213-6 du même code que l'employeur est tenu, vis à vis des travailleurs handicapés, d'une obligation de formation renforcée leur permettant d'accéder à un emploi ou de conserver un emploi correspondant à leur qualification, de l'exercer ou d'y progresser de la délivrance d'une formation adaptée à leurs besoins ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations de la Cour d'appel qu'embauchée en 1982, reconnue travailleur handicapé en 1993 et licenciée pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement en 2008, Madame X... n'a reçu qu'une seule et unique formation en 2005 ; qu'en la déboutant de sa demande de dommages et intérêts à ce titre aux termes de motifs inopérants, pris de ce qu'elle n'avait pas fait usage de son droit individuel à la formation, quand le fait qu'elle n'ait bénéficié que d'une unique formation professionnelle d'une demi-journée pendant toute la durée de son emploi dans l'entreprise établissait un manquement de l'employeur à son obligation de veiller au maintien de sa capacité à occuper un emploi, entraînant nécessairement un préjudice qu'il lui appartenait d'évaluer la Cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-28784
Date de la décision : 24/06/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 06 novembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 jui. 2015, pourvoi n°13-28784


Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.28784
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