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17/06/2015 | FRANCE | N°14-10230

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 juin 2015, 14-10230


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1221-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail, ensemble l'article L. 641-9 II du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 ;
Attendu que, sauf novation ou convention contraire, le contrat de travail d'un salarié devenu mandataire social et qui cesse d'exercer des fonctions techniques dans un état de subordination à l'égard de la société est suspendu pendant la durée du mandat, pour retrouver tous ses effets lorsque le

mandat social prend fin ; que les dispositions de l'article L. 641-9...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1221-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail, ensemble l'article L. 641-9 II du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 ;
Attendu que, sauf novation ou convention contraire, le contrat de travail d'un salarié devenu mandataire social et qui cesse d'exercer des fonctions techniques dans un état de subordination à l'égard de la société est suspendu pendant la durée du mandat, pour retrouver tous ses effets lorsque le mandat social prend fin ; que les dispositions de l'article L. 641-9 II du code de commerce relatives à l'exercice des droits propres du débiteur n'ont ni pour objet ni pour effet de faire obstacle à la reprise des effets du contrat de travail suspendu durant le mandat social ; que la liquidation judiciaire de l'employeur, qui met fin aux mandats sociaux, n'entraîne pas, à elle seule, la rupture des contrats de travail ;
Attendu que M. X..., engagé le 1er août 1978 en qualité d'attaché de direction par la société N Spatz et fils, en a été nommé en 1997, administrateur et président du conseil d'administration ; que l'assemblée générale des actionnaires a décidé de suspendre son contrat de travail pendant la durée de son mandat social ; que la société a été placée en redressement, puis en liquidation judiciaire le 29 octobre 2009 ; que M. X... a été licencié pour motif économique, le 6 novembre 2009, par le mandataire liquidateur ;
Attendu que pour débouter l'intéressé de sa demande d'inscription au passif de la société de sa créance de salaire pour la période du 29 octobre au 6 novembre 2009 et des indemnités de préavis et de licenciement, l'arrêt retient, d'une part, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 641-9 du code de commerce issu de la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 que le mandat social du dirigeant survit à la dissolution de la société entraînée par sa liquidation judiciaire pour les besoins de cette liquidation, et, d'autre part, que le contrat de travail subsiste à la condition d'exercer des fonctions techniques distinctes du mandat social sous la subordination de l'employeur, ce dont l'intéressé ne justifie pas pour la période du 29 octobre 2009 jusqu'à son licenciement et ce qui s'explique par le fait que la société avait cessé toute activité, qu'il n'était donc pas salarié au jour du licenciement ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'il résultait de ses constatations que le contrat de travail avait été suspendu pendant la durée du mandat, auquel la liquidation judiciaire qui entraînait la dissolution de la société avait mis fin, et avait été rompu par un licenciement prononcé après cette liquidation judiciaire, et que le salarié, qui n'avait pas exécuté le préavis du fait de la mise en liquidation judiciaire de la société, ne pouvait être privé de la rémunération qu'il aurait perçue s'il avait travaillé et des indemnités de rupture, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 novembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne l'Unedic déléguation AGS-CGEA Ile-de-France Est et Mme Y..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme Y..., ès qualités, et condamne celle-ci et l'Unedic déléguation AGS-CGEA Ile-de-France Est à payer à M. X... la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept juin deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Philippe X... de l'ensemble de ses demandes tendant à voir fixer au passif de la liquidation judiciaire de la SA N Spatz et Fils et garantir par l'AGS ses créances de rappel de salaires et d'indemnités de rupture consécutives à l'exécution et à la rupture du contrat de travail le liant à cette société ;
AUX MOTIFS QU'"il est constant que le contrat de travail de Monsieur X... a été suspendu à compter du 17 janvier 1997 et ce pendant la durée de son mandat social dans la SA N Spatz et Fils ; que le litige porte sur le point de savoir si, à la suite du prononcé de la liquidation judiciaire de cette société le 29 octobre 2009, Monsieur X... a cumulé ou non les qualités de salarié et d'administrateur jusqu'à son licenciement le 6 novembre 2009 pour motif économique (...) ;
QU'en application de l'article L.121-1 devenu L.1221-1 du Code du travail, sauf convention contraire, le contrat de travail d'un salarié devenu mandataire social et qui cesse d'exercer ses fonctions techniques dans un état de subordination à l'égard de la Société est suspendu pendant la durée du mandat, pour retrouver tous ses effets lorsque le mandat prend fin ; qu'inversement, le cumul du mandat social avec un contrat de travail est possible à la condition que le salarié exerce des fonctions techniques rémunérées et distinctes de son mandat social sous la subordination de l'employeur ;
QUE selon l'article 1844-7° du Code civil, la société prend fin par l'effet du jugement ordonnant la liquidation judiciaire ; qu'en application de l'article L.122-4 devenu L.1231-1 du Code du travail, la liquidation judiciaire de l'employeur n'entraîne pas à elle seule rupture des contrats de travail ; que l'article L.641-9 du Code de commerce issu de la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 dispose que lorsque le débiteur est une personne morale, les dirigeants en fonction lors du prononcé du jugement de liquidation judiciaire le demeurent, sauf dispositions contraires des statuts ou décision de l'assemblée générale ; qu'il suit de ces dispositions que le mandat social du dirigeant survit à la dissolution de la société entraînée par sa liquidation judiciaire, pour les besoins de cette liquidation, de même que son contrat de travail, qui n'est pas rompu par le seul effet de la liquidation judiciaire, mais par les divers modes de rupture, notamment dans ce cas par le licenciement pour motif économique, survit à la condition d'exercer des fonctions techniques distinctes de son mandat social, sous la subordination de l'employeur ;
QUE l'accomplissement de la procédure de licenciement, obligatoire pour mettre fin au contrat de travail qui n'est pas rompu par le seul effet de la liquidation judiciaire, ne suffit pas à caractériser l'existence d'un contrat de travail, quand bien même le mandataire liquidateur, dans la lettre de licenciement, a considéré Monsieur X... comme étant salarié depuis la liquidation judiciaire ;
QU'en l'espèce il n'est justifié d'aucun travail effectif de Monsieur X... à compter du 29 octobre 2009 jusqu'à son licenciement, par l'accomplissement de fonctions techniques distinctes de son mandat social maintenu pendant la liquidation judiciaire, ce qui s'explique par le fait que la SA N Spatz et Fils avait cessé toute activité, alors que le bulletin de salaire produit par Monsieur X... pour la période du 1er au 6 novembre 2009 rémunère, non pas sa fonction de direction pour laquelle il avait été embauché à l'origine, mais sa qualité de PDG nécessairement liée à son mandat social ;
QU'il s'ensuit que, n'étant pas salarié au jour de son licenciement, Monsieur X... n'est pas fondé dans ses demandes dont il doit être débouté, le jugement étant infirmé en toutes ses dispositions (¿)" ;
1°) ALORS QUE sauf novation ou convention contraire prévoyant son absorption par le mandat ou sa rupture, le contrat de travail d'un salarié qui devient mandataire social et qui cesse d'exercer des fonctions techniques dans un état de subordination envers la société est suspendu pendant la durée de ce mandat ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de la Cour d'appel que Monsieur X... était, au moment de son licenciement par le liquidateur, titulaire d'un contrat de travail "suspendu à compter du 17 janvier 1997 pendant la durée de son mandat social dans la SA N Spatz et Fils" ; qu'en retenant cependant, pour le débouter de sa demande tendant à voir fixer dans la liquidation judiciaire de la SA N Spatz et Fils et garantir par l'AGSCGEA Ile de France Est ses créances de salaires et d'indemnités de rupture, "que le contrat de travail du dirigeant , qui n'est pas rompu par le seul effet de la liquidation judiciaire survit à la condition d'exercer des fonctions techniques distinctes de son mandat social sous la subordination de l'employeur", ce qui n'avait pas été le cas de Monsieur X..., de sorte que ce dernier "n'était pas salarié au jour de son licenciement" la Cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L.1221-1 du Code du travail ;
2°) ALORS subsidiairement QUE le contrat de travail d'un salarié qui, du fait de sa nomination en qualité de mandataire social, a cessé d'exercer des fonctions techniques dans un lien de subordination, cesse d'être suspendu quand, par l'effet du jugement de liquidation judiciaire, la personne morale représentée est dessaisie de ses pouvoirs d'employeur, lesquels sont exercés par le liquidateur ; qu'il importe peu que, pour les besoins de la liquidation, le dirigeant social soit maintenu dans des fonctions qui ne comportent plus l'exercice d'un quelconque pouvoir de direction ou de contrôle sur les salariés de la personne morale ; qu'en déboutant Monsieur X..., dont elle constatait qu'il avait été licencié par le liquidateur, de sa demande tendant à voir fixer au passif de la SA N Spatz et Fils SA et garantir par l'AGS-CGEA Ile de France Est sa créance de salaires et d'indemnités de rupture au motif inopérant "que le mandat social du dirigeant survit à la dissolution de la société entraînée par sa liquidation judiciaire, pour les besoins de cette liquidation", la Cour d'appel a violé les articles L.1221-1 du Code du travail et L.641-9 du Code de commerce ;
3°) ALORS en toute hypothèse QUE le salarié licencié pendant une période de suspension de son contrat de travail bénéficie des indemnités de rupture s'il en remplit les conditions ; que tel est le cas du salarié dont le contrat de travail a été suspendu par sa nomination à des fonctions d'administrateur, licencié pour motif économique par le liquidateur à la suite de la liquidation judiciaire de la personne morale employeur, et dispensé d'exécution de son préavis en raison de la cessation d'activité ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de la Cour d'appel que Monsieur X... était, au moment de son licenciement par le liquidateur, titulaire d'un contrat de travail "suspendu à compter du 17 janvier 1997¿pendant la durée de son mandat social dans la SA N Spatz et Fils" et que l'exécution d'un travail postérieurement à la liquidation était impossible du fait de la cessation d'activité de l'entreprise ; qu'en déboutant cependant ce salarié de ses demandes tendant à voir fixer dans la liquidation judiciaire et garantir par l'AGS-CGEA Ile de France Est ses créances d'indemnités de rupture la Cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L.1221-1, L.1234-5 et L.1234-9 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-10230
Date de la décision : 17/06/2015
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 14 novembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 jui. 2015, pourvoi n°14-10230


Composition du Tribunal
Président : Mme Lambremon (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.10230
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