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16/06/2015 | FRANCE | N°14-17850

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 16 juin 2015, 14-17850


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le troisième moyen :
Vu l'article 562 du code de procédure civile ;
Attendu que l'appel ne défère à la cour que la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément ou implicitement et de ceux qui en dépendent ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 13 mars 2014), que la société Atelier espace architectural, chargée d'une mission de maîtrise d'oeuvre, a été condamnée à payer à la société Epices et Tout, maître de l'ouvrage, diverses sommes au titre du dép

assement du coût des travaux et du retard d'exécution ; que le maître de l'ouvrage a ét...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le troisième moyen :
Vu l'article 562 du code de procédure civile ;
Attendu que l'appel ne défère à la cour que la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément ou implicitement et de ceux qui en dépendent ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 13 mars 2014), que la société Atelier espace architectural, chargée d'une mission de maîtrise d'oeuvre, a été condamnée à payer à la société Epices et Tout, maître de l'ouvrage, diverses sommes au titre du dépassement du coût des travaux et du retard d'exécution ; que le maître de l'ouvrage a été condamné au paiement du solde des honoraires du maître d'oeuvre ; que le maître d'oeuvre a formé un appel limité aux condamnations prononcées à son encontre ; que le maître de l'ouvrage a demandé la confirmation du jugement en toutes ses dispositions ;
Attendu que pour infirmer le jugement en ce qu'il a condamné le maître de l'ouvrage à payer au maître d'oeuvre le solde de ses honoraires, l'arrêt retient que la société Atelier espace architectural ne forme pas la demande qu'elle avait formée reconventionnellement à ce titre en première instance et ne sollicite pas la confirmation de cette disposition ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le jugement n'était pas critiqué de ce chef, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les autres moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il infirme le jugement en ce qu'il a condamné la société Epices et Tout à payer à la société Atelier espace architectural la somme de 8 171,07 euros au titre du solde de ses honoraires, l'arrêt rendu le 13 mars 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Condamne la société Epices et Tout aux dépens du présent arrêt ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize juin deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour la société Atelier espace architectural.
Le premier moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Atelier Espace Architectural à payer à la société Epices et Tout la somme de 34 841,80 €,
Aux motifs que « les parties ont signé une convention le 2 avril 2010 aux termes de laquelle la SELARL ATELIER ESPACE ARCHITECTURAL s'engageait dans une mission de maîtrise d'oeuvre pour la réalisation des travaux de réhabilitation et la gestion du chantier de la SARL EPICES ET TOUT. Il est expressément indiqué dans ce document que selon l'architecte les travaux s'élèveront à 170.000 € HT et s'achèveront trois mois après leur début. Les travaux ont débuté la première semaine du mois de mai, l'architecte attestant le 30 avril 2010 que la fin était fixée au 31 juillet 2010. Or le 11 octobre 2010, le montant définitif des travaux était arrêté à la somme de 204.841,80 € HT soit 224.990,79 € TTC, les dits travaux s'étant achevés le septembre 2010. Il convient ainsi de déterminer si le dépassement du coût des travaux dans une proportion de 28 % et de la durée du chantier de deux mois sont imputables à l'architecte, et si ces manquements ouvrent ainsi droit à indemnisation. Le droit applicable à la SELARL ATELIER ESPACE ARCHITECTURAL est non seulement le droit commun mais aussi le code de déontologie applicable aux architectes. Ainsi en application des dispositions de articles 1134 et 1147 du Code civil, les conventions tiennent lieu de loi aux parties et doivent être exécutées de bonne foi, et que tout manquement du débiteur l'expose au paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi. Encore l'architecte est tenu en application de l'article 36 du Code de déontologie des architectes à une obligation d'information et de conseil envers son client. Il doit ainsi informer le client que les travaux projetés dépassent le budget fixé initialement et ce même si les travaux réalisés s'avéraient nécessaires. En l'espèce l'architecte ne produit aucune pièce prouvant qu'il a informé la SARL EPICES ET TOUT d'un dépassement de 28 % du coût estimatif, chiffrage qu'elle a lui même proposé le 2 avril 2010. En revanche, la SARL EPICES ET TOUT dans deux courriers des 20 août et 23 septembre 2010 s'est plainte auprès de la SELARL ATELIER ESPACE ARCHITECTURAL de découvrir un dépassement important du coût des travaux sans en avoir été prévenue auparavant. Il n'est pas sans incidence de relever que la SELARL ATELIER ESPACE ARCHITECTURAL était parfaitement informée du budget limité pour la SARL EPICES ET TOUT puisque le plafond de l'assurance était de 160.000 € HT et avait été porté avec l'accord du client à 170.000 € HT ; qu'ainsi l'appelante savait pertinemment que toute somme supplémentaire serait supportée exclusivement par sa cliente qui était en situation financière précaire. Ainsi l'écart entre le coût annoncé et le coût réel étant très important alors que la SELARL ATELIER ESPACE ARCHITECTURAL ne démontre pas la réalisation d'aucune prestation non prévue, le premier Juge a, à juste titre, retenu sa responsabilité comme ayant manqué à son devoir de conseil. L'étude du préjudice qui consiste dans cette différence est tout autant justifiée » (arrêt p. 3 et 4) ;
Alors que, d'une part, la société Atelier Espace Architectural a fait valoir, dans ses conclusions d'appel (p. 2), qu'elle avait adressé au maître d'ouvrage une esquisse dans laquelle le coût du projet était évalué à la somme de 195.000 € HT, ce qu'elle lui avait rappelé par lettre du 31 août 2010 ; qu'en décidant que le maître d'oeuvre avait manqué à son obligation de conseil à l'égard du maître d'ouvrage quant au coût du projet, sans répondre au moyen fondé sur l'esquisse et la lettre du 31 août 2010 qui permettaient d'établir une information du maître d'ouvrage sur le coût du projet, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors que, d'autre part, la société Atelier Espace Architectural a aussi soutenu que tous les ouvrages pouvant résulter du dépassement de prix profitaient au maître d'ouvrage qui n'a jamais prétendu qu'il n'était pas en mesure financière de les assumer, faute de quoi il aurait renoncé au projet (concl. p. 2 et 3) ; qu'il s'en suivait que le maître d'oeuvre n'avait pas commis de faute puisque sa responsabilité au titre d'un dépassement du coût estimatif des travaux suppose que le maître d'ouvrage lui ait demandé de ne pas dépasser le coût prévisionnel ou qu'il se soit engagé à ne pas le dépasser ; qu'en décidant néanmoins qu'une faute de la société Atelier Espace Architectural était caractérisée, sans répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
Le deuxième moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Atelier Espace Architectural à payer à la société Epices et Tout la somme de 8.252,40 €,
Aux motifs que « en ce qui concerne les retards dans les travaux, l'engagement était précis dès le 2 avril 2010 et réaffirmé le 30 avril de la même année. Les travaux ont été en réalité achevés le 25 septembre 2010 soit avec un retard de 1 mois et 24 jours. Ce retard trouve son origine dans un manque de direction du chantier par l'architecte qu'en effet il ne s'est rendu pendant toute la durée du chantier qu'à 9 reprises, et aucune reprise durant les mois d'août et septembre et ce quand bien même une réunion était fixée au 4 août 2010. Il convient encore de relever que la SARL EPICES ET TOUT n'est pas restée inactive puisque dès le 13 août 2010, elle rappelait les engagements contractuels, le retard prix et les conséquences pour son activité estivale de restauration. Il importe peu, contrairement à ce que soutient l'appelante, que ces retards soient imputables aux entreprises intervenantes sur le chantier puisque l'architecte chargé d'une mission complète de maîtrise d'oeuvre, comme en l'espèce, répond des entières fautes des entrepreneurs dans leur retard non justifié et que dès lors l'obligation de l'architecte n'est plus d'une obligation de moyen, comme il est allégué, mais d'une obligation de résultat. D'ailleurs l'appelante ne fournit aucun justificatif sur les démarches qu'elle a pu effectuer auprès de ces entreprises pour résorber leur retard. Il s'évince de ces éléments que l'architecte a été défaillant dans son obligation de direction du chantier et ce d'autant plus qu'il n'apporte pas la preuve d'aucun événement extérieur qui auraient pu justifier un retard » (arrêt p.5 et 6) ;
Alors que l'architecte n'est, en dehors des garanties légales, débiteur que d'une obligation de moyens, notamment en ce qui concerne les délais d'exécution des travaux ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a jugé que le maître d'oeuvre répondait des fautes des entrepreneurs dans leur retard et qu'il était tenu non d'une obligation de moyens mais d'une obligation de résultat, violant ainsi l'article 1147 du Code civil.
Le troisième moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif sur ce point, d'avoir constaté qu'en appel, la société Atelier Espace Architectural ne formait aucune demande quant au paiement de ses honoraires, et de l'avoir déboutée de sa demande de condamnation de la société Epices et Tout à lui payer la somme de 8 171,07 € en paiement du solde de ses honoraires ;
Aux motifs que s'agissant de la demande reconventionnelle de première instance de la société Atelier Espace Architectural, devant la Cour, dans ses dernières écritures, elle ne forme aucune demande reconventionnelle et ne demande pas la confirmation de cette disposition ; qu'ainsi force est de constater qu'elle y a renoncé. La décision déférée sera réformée sur ce point (arrêt p.6 alinéa 4) ;
Alors que, d'une part, l'appel ne défère à la cour que la connaissance des chefs de jugements qu'il critique expressément ou implicitement et de ceux qui en dépendent ; que la portée de l'appel est déterminée d'après l'état des dernières conclusions ; que dans ses conclusions d'appel, la société Atelier Espace Architectural a expressément limité son appel aux condamnations prononcées à son encontre ; que la société Epices et Tout n'a pas formé d'appel incident pour critiquer le chef de jugement la condamnant à payer à l'architecte la somme de 8171,07 € au titre du solde des honoraires ; qu'en infirmant le jugement sur ce point, la cour d'appel a violé les articles 4 et 562 du code de procédure civile ;
Alors que, d'autre part, le juge qui relève un moyen d'office doit préalablement ordonner la réouverture des débats pour permettre aux parties de s'expliquer sur son bien-fondé ; que dans ses conclusions d'appel, la société Epices et Tout n'a pas invoqué le moyen selon lequel l'architecte n'ayant pas demandé la confirmation de la disposition du jugement relative à ses honoraires, qu'il y avait renoncé et qu'il y avait lieu d'infirmer le jugement sur ce point ; qu'en prononçant cette infirmation sans avoir assuré le respect du principe du contradictoire, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 14-17850
Date de la décision : 16/06/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 13 mars 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 16 jui. 2015, pourvoi n°14-17850


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : Me Ricard, SCP Boulloche

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.17850
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