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20/05/2015 | FRANCE | N°13-27643

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 mai 2015, 13-27643


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée le 26 août 2000 par la société Meritor LVS France, aux droits de laquelle se trouve la société Inteva Products France, en qualité d'agent de fabrication, a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation de son contrat de travail à durée indéterminée en invoquant notamment un harcèlement moral et une discrimination salariale en raison du sexe ;
Sur le second moyen du pourvoi principal de la salariée et le moyen unique du pourvoi inc

ident de l'employeur :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée le 26 août 2000 par la société Meritor LVS France, aux droits de laquelle se trouve la société Inteva Products France, en qualité d'agent de fabrication, a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation de son contrat de travail à durée indéterminée en invoquant notamment un harcèlement moral et une discrimination salariale en raison du sexe ;
Sur le second moyen du pourvoi principal de la salariée et le moyen unique du pourvoi incident de l'employeur :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal :
Vu les articles L. 3221-2, L. 3221-4 et L. 3221-8 du code du travail ;
Attendu que, pour rejeter la demande de la salariée au titre d'une discrimination salariale en raison du sexe, l'arrêt retient que les éléments produits de part et d'autre, s'ils prouvent que les hommes au coefficient 170 sont légèrement mieux payés que les femmes, essentiellement au niveau du salaire maximum, la différence n'étant que de 2 pour 100 pour les salaires minimum et moyen, ne démontrent pas que la salariée a été moins bien payée que son homologue masculin le moins bien payé et que les pièces de la société, notamment l'évolution des salaires des opérateurs de production passés au coefficient 170 et ayant environ dix ans d'ancienneté, démontrent au contraire que la salariée a un salaire comparable aux leurs, qu'il s'agisse d'hommes ou de femmes ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si la salariée avait perçu pendant plusieurs années une rémunération inférieure à la moyenne des rémunérations perçues par les salariés placés dans une situation identique et ayant la même ancienneté et alors qu'il résultait de ses constatations que les hommes au coefficient 170 étaient mieux payés que les femmes, élément de nature à laisser supposer l'existence d'une discrimination, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande de Mme X... au titre d'une discrimination en raison du sexe, l'arrêt rendu le 10 octobre 2013, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;
Condamne la société Inteva Products France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mai deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour Mme X..., demanderesse au pourvoi principal
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme X... de sa demande de rappel de salaire, de congés payés afférents et de dommages et intérêts pour discrimination sexiste ;
AUX MOTIFS QU' il incombe à la salariée de présenter des éléments de fait la laissant présumer, et, en ce cas, l'employeur devra l'expliquer par des éléments objectifs ; qu'elle soutient qu'elle était moins payée que les hommes ressortant de la même catégorie et ayant le même coefficient les moins bien payés ; qu'elle a été engagée au niveau 1, échelon 2, coefficient 145, passant à l'échelon 3 coefficient 155 le 18 décembre 2000, puis au niveau 2, échelon 1, coefficient 170 en juin 2003 ; qu'or les éléments produits de part et d'autre (bulletin de paye, NAO), s'ils prouvent que les hommes au coefficient 170 sont légèrement mieux payés que les femmes, essentiellement au niveau du salaire maximum (la différence n'étant que de 2 pour 100 pour les salaires minimum et moyen) ne démontrent pas que Mme X... a été moins bien payée que son homologue masculin le moins bien payés ; que les pièces de la société, et notamment l'évolution des salaires des opérateurs de production passés au coefficient 170 et ayant environ 10 ans d'ancienneté (pièce 25) démontrent au contraire que Mme X... a un salaire comparable aux leurs, qu'il s'agisse d'hommes ou de femmes ; que cette réclamation sera rejetée ;
ALORS QUE s'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe « à travail égal, salaire égal » de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs justifiant cette différence ; que la cour d'appel a constaté qu'il ressortait des éléments produits que « les hommes au coefficient 170 sont légèrement mieux payés que les femmes », relevant ainsi des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération ; qu'elle a cependant rejeté la demande de Mme X... aux motifs que la salariée ne démontrait pas avoir été moins bien payée que son homologue masculin le moins bien payé mais qu'au contraire l'évolution des salaires des opérateurs de production passés au coefficient 170 et ayant environ 10 ans d'ancienneté démontrait que Mme X... avait un salaire comparable aux leurs, qu'il s'agisse d'hommes ou de femmes ; qu'en statuant ainsi, tandis qu'il appartenait à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs justifiant la différence de salaire constatée par les juges entre les hommes et les femmes au coefficient 170, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé les articles L. 3221-2 du code du travail, 6 §1 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme et 1315 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
:
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir fait partiellement droit à la demande d'indemnisation de Mme X... pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en condamnant la société Inteva Products France à lui payer la somme de 18.738,10 euros tandis que Mme X... demandait la somme de 50.000 euros ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE les dommages intérêts ne peuvent être inférieurs au salaire des six derniers mois, Mme X... ayant plus de deux ans d'ancienneté dans une entreprise d'au moins onze salariés ; qu'elle justifie par des relevés Pôle Emploi être restée au chômage, de façon ininterrompue, jusqu'au 31 mai 2013 ; que son préjudice matériel et moral a été justement évalué à 18.738,10 euros ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU' il sera fait droit à la demande de Mme X... de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en application de l'article L. 1235-3 du code du travail que le conseil de prud'hommes estime justifié de fixer la somme de 18. 738,10 ¿ représentant 10 mois de salaire ;
ALORS QUE Mme X... faisait valoir que la somme de 18.738,10 ¿ allouée par le conseil de prud'hommes ne réparait pas l'intégralité de son préjudice, puisqu'elle était en arrêt maladie de longue durée pour une grave dépression au moment où son contrat de travail avait été rompu, et qu'elle était toujours aujourd'hui sans emploi (concl., p. 19) ; que la cour d'appel, sans répondre aux nouveaux éléments apportés par Mme X... dans ses conclusions d'appel démontrant que son préjudice n'avait pas été intégralement réparé, s'est contentée d'énoncer que son préjudice matériel et moral avait été justement évalué ; qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions précitées, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 §1 de la Convention européenne des droits de l'homme. Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour la société Inteva Products France, demanderesse au pourvoi incident

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Inteva à payer à madame X... les sommes de 10.000 euros de dommages et intérêts pour harcèlement moral, 1.000 euros au titre de l'obligation de sécurité de résultat, d'AVOIR prononcé la résiliation du contrat de travail aux torts de la société Inteva et d'AVOIR condamné, en conséquence, cette dernière à verser à la salariée les sommes de 18.738,10 euros de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, 3.747,62 d'indemnité compensatrice de préavis, outre 374,76 euros de congés payés y afférents, et 3.747,62 euros d'indemnité de licenciement ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'il peut être le fait de la direction ou de collègues, l'employeur étant responsable des agissements de ses préposés ; que madame X... l'a dénoncé à l'été 2009 ; que, sur les propos et agissements des autres agents de fabrication : madame Y... atteste que quelques mois avant, elle a vu une dispute entre madame X... et madame Z..., et que, voyant madame Z... en arriver aux mains, elle est allée chercher le superviseur, madame X... expliquant qu'elle ne supportait plus que sa collègue parle de sa vie privée à tout le monde ; qu'il est ainsi prouvé que madame Z... a eu une attitude physiquement agressive à l'encontre de sa collègue ; que le témoin ajoute que madame Z... a tenu des propos humiliants vis-à-vis de madame X..., ce qui a choqué madame Y..., la traitant par exemple de « travelo » ; que d'ailleurs, lors de l'enquête menée par la direction, madame Z... a reconnu qu'elle ne s'entendait pas avec madame X..., ne voulant pas travailler avec elle et ajoutant que sa fille de 6 ans était plus intelligente qu'elle ; que madame Z... a dit lui avoir répondu, après que madame X... l'ait insultée, « qu'elle ferait mieux d'aller se faire sauter, que cela lui ferait du bien », et lui avoir donné divers surnoms Barbara Gourde, travelo, Drague Queen ; que monsieur B... confirme que madame Z... traitait madame X... de « travelo » et lui a dit qu'elle lui réglerait son compte en dehors de l'entreprise ; qu'il impute cette mésentente à une histoire de jalousie ; qu'il résulte d'autres témoignages que madame X... était en butte à l'hostilité de certains de ses collègues pour un problème de cadences ; certains travaillaient nettement plus vite que les cadences imposées et pouvaient avoir un temps de pause important en fin de poste mais ne pouvaient pas le faire lorsqu'il travaillaient en binôme avec madame X..., celle-ci ne voulant ou ne pouvant faire que la cadence normale pour le nombre de pièces demandé au cours de l'horaire ; que, sur l'attitude du chef d'équipe : que, lorsque madame X... s'en est plainte à lui, il lui a répondu, selon monsieur C..., que ce n'était pas à l'équipe de s'adapter à elle mais à elle de s'adapter à l'équipe, et qu'elle pouvait aller le dire au directeur, mais qu'il allait alors augmenter les cadences ; que cette réponse était tout à fait inadaptée ; que dès lors que madame X... travaillait à une cadence normale, elle n'avait pas à être en butte à l'hostilité de ceux qui travaillaient plus vite, et monsieur D... aurait dû user de son autorité pour le faire comprendre à ses collègues et les amener à plus de compréhension au lieu de se borner à dire qu'elle n'avait qu'à travailler plus vite pour s'adapter au rythme des plus rapides ; que ce point sera retenu ; que, si la réticence pour lui délivrer une attestation réclamée pour la première fois le 29 juin 2011 ne peut être invoquée à l'appui d'un harcèlement aboutissant à une résiliation prononcée le 18 mars 2011, il n'en reste pas moins que les faits précités, pour lesquels aucune explication objective n'existe, sont suffisants pour caractériser un tel harcèlement : - il sont répétés puisqu'ils ont duré plusieurs mois ; - ils ont eu pour effet une dégradation de ses conditions de travail et de son état de santé, madame X... étant progressivement isolée et arrêtée relativement longtemps pour un syndrome dépressif en rapport avec ses difficultés professionnelles ; que le préjudice matériel et moral en découlant a été justement évalué à 10.000 euros ; que, sur le manquement à l'obligation de sécurité de résultat : que l'employeur doit en assurer l'effectivité ; que la société n'est pas restée inerte elle a eu divers entretiens avec les principaux intéressés et a procédé à leur audition qui a été consignée par écrit ; que toutefois elle n'a impliqué que le secrétaire du CHSCT, et non les membres de celui-ci, qui auraient dû être associés, notamment à l'audition des intéressés ; qu'elle n'a donc pas fait tout ce qui aurait dû l'être pour enquêter sur la plainte de la salariée ; que toutefois madame X... n'a pas elle-même apporté toute la coopération nécessaire en refusant de se rendre à des réunions si elle n'était pas assistée d'un syndicaliste extérieur à l'entreprise, ce qu'à juste titre la société n'a pas accepté ; que ce manquement lui a causé un préjudice moral distinct qui est toutefois très modéré et qui sera évalué à 1.000 euros ; que le seul harcèlement, auquel s'ajoute le manquement à l'obligation de sécurité de résultat, est assez grave pour ne plus permettre la poursuite du contrat et justifier la résiliation aux torts de la société ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE madame X... demande au conseil la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de son employeur en raison de faits de harcèlement qu'elle subit, estimant que l'employeur a manqué à ses obligations légales et contractuelles ; que le travail de madame X... n'a jamais été remis en cause par la société Inteva mais qu'elle a subi des remarques de la part de ses collègues qui considéraient qu'elle n'allait pas assez vite, ce qui empêchait le salarié qui était en binôme avec elle de pouvoir prendre sa pause plus tôt, comme le reste de l'équipe ; qu'en mars 2009, la situation de travail de madame X... commençait à se dégrader avec ses collègues, que le 23 juillet 2009, celle-ci demandait à monsieur D... son chef d'équipe d'intervenir auprès de la personne qui travaillait en binôme avec elle pour lui demander de ne pas chercher à précipiter les cadences de travail ; que madame X... a eu pour réponse « il y en a marre, tous ne veulent plus travailler avec toi, faudrait voir à quitter l'équipe de nuit » en y ajoutant « Véro, même si tu as raison, tu es seule contre tous c'est pas eux qui se plieront à toi » ; que le tout a été notifié dans un courrier en date du 24 août 2009 et confirmé dans l'attestation de monsieur C... ; que depuis cette date, il apparaît incontestable que madame X... a subi de continuelles remarques de la part de ses collègues, qu'elle a écrit plusieurs fois à son employeur, mais aussi au siège de l'entreprise, soit aux Etats Unis, en indiquant qu'elle subissait un harcèlement moral de la part de certains de ses collègues, des menaces verbales de la part de son superviseur, et notamment par madame Z... qui tenait à son encontre des propos vexatoires et humiliants ; que le 26 août 2009 madame X... était contrainte de faire une déposition pour expliquer la source du conflit qu'elle vivait, puis le 27 août alors qu'elle était en arrêt de travail, elle demandait à son employeur d'avoir une rencontre pour qu'elle puisse continuer de travailler en toute sérénité ; qu'en date du 4 septembre 2009, madame X... effectuait une main courante contre l'une de ses collègue madame Z... puis dans un courrier du 9 septembre 2009, elle sollicitait une rencontre avec monsieur E..., directeur de l'usine de Sully et monsieur D... ; que madame F..., DRH, proposait une rencontre à laquelle participerait aussi monsieur G... délégué du personnel et membre du CHSCT ainsi qu'elle-même ; qu' à cette occasion, madame X... pouvait se faire assister par une personne de son choix appartenant obligatoirement à l'entreprise ; que madame X... souhaitant se faire assister par un représentant syndical extérieur à l'entreprise, l'entretien n'a pas eu lieu ; que madame X... a été en arrêt de travail ; qu'à l'occasion de sa reprise, elle a rencontré le médecin du travail le 21 septembre 2009 qui l'a déclarée apte mais souhaitait la revoir le 23 octobre 2009 dans le cadre des visites périodiques ; qu'en date du 14 octobre 2009, madame X... demandait par courrier auprès de la DRH la raison pour laquelle son salaire lié au coefficient 170 était inférieur aux minima retranscrits dans les accords d'entreprise de 2009 et demandait une régularisation de son salaire depuis 2003 ; que madame X... a continué de travailler malgré la continuité des actes de harcèlement et l'absence de rencontre avec la direction afin de se faire entendre ; que se sentant isolée professionnellement, elle demandait à monsieur H..., délégué du personnel de l'assister, insistant sur une rencontre entre la direction, la DRH et le responsable de l'équipe de nuit ; qu'il est établi que celui-ci a refusé craignant des représailles à son encontre ; que madame X... a su qu'une enquête avait été réalisée par la direction ; que, par courrier du 17 novembre 2009, elle demandait le rapport qui avait été établi suite à l'enquête effectuée auprès de l'équipe de nuit le 27 octobre 2009 qu'elle redemandait une nouvelle fois à être entendue en présence de monsieur C... qui avait été témoin des menaces faites par monsieur D... ; qu'en date du 17 décembre 2009, la société Inteva écrivait à madame X... en ces termes : « je reviens vers vous pour mettre définitivement un terme à vos échanges innombrables ces derniers mois au sujet d'un prétendu harcèlement ... Il va de soi que nous avons pris très au sérieux les graves accusations que vous avez dirigées à plusieurs reprises contre divers collaborateurs ... nous avons été jusqu'à diligenter de nuit une enquête très complète afin de recueillir individuellement les observations de chaque salarié de l'équipe de nuit dont vous faites partie. ¿ Tant vos déclarations que celles de vos collègues nous amènent à conclure que vous n'avez été victime ni de harcèlement moral, ni de discrimination. ... Depuis que vous avez dénoncé des faits litigieux à vos yeux, nous pouvons vous assurer que nous avons été particulièrement vigilants sur ce qui se passe au sein de l'équipe de nuit ... Toutefois, nous veillerons à ce que de nouvelles accusations aussi graves et préjudiciables tant à la dignité de nos collaborateurs qu'à notre image ne se renouvellent pas ; nous attachons en effet la plus haute importance à la bonne foi dont doivent faire preuve tous nos salariés. Dans le cas contraire, c'est à dire en cas d'accusation mal fondée portée contre l'un d'eux, nous serions alors contraints de prendre des mesures disciplinaires. Nous tenions à vous livrer ces quelques observations afin de clôturer la plainte que vous aviez formulée et ainsi vous faire part personnellement des résultats de notre enquête ... ; que le 17 juin 2010, une réunion s'était tenue avec monsieur E... au cours de laquelle madame X... indiquait que monsieur C... finissait son travail à 3 heures pour utiliser le poste internet à des fins personnelles et ce jusqu'à 5 heures que monsieur E... lui a répondu que monsieur C... était plus habile ; qu'elle en a référé à monsieur I... le directeur européen ; que c'est en date du 6 juillet 2010 que madame F... répondait à madame X... en lui indiquant qu'elle outrepassait sa liberté d'expression et la prévenait que les exigences de son poste et en particulier ses cadences de travail seraient particulièrement surveillées ; qu'il apparaît au Conseil que tous les faits relatés par madame X... n'ont pas été contredits par la défenderesse, que la société indique avoir fait une enquête, laquelle n'a pas spécialement relevé un harcèlement à l'encontre de madame X... ; qu'à la lecture de l'enquête établie par l'employeur, le conseil constate que madame Z... indique clairement : - ne pas vouloir travailler avec madame X... ; - avoir déclaré que saline de 6 ans est plus intelligente qu'elle ; - reconnaître avoir insulté l'intéressée : notamment en disant qu'elle ferait mieux de se faire sauter que cela lui ferait du bien ; - avoir donné plusieurs surnoms : travelo, Barbara Gourde, Drague Queen ; - dit qu'il faut enlever madame X... de l'équipe de nuit monsieur B... stipule : - avoir entendu madame X... se faire traiter de travelo ; - que madame X... a du mal à faire ses cadences ; - ne plus savoir avec qui la mettre car personne ne veut plus travailler avec elle, que madame Z... lui a dit qu'elle lui réglerait son compte en dehors de l'entreprise ; que monsieur D... expose que plusieurs salariés n'étaient pas ravis dé travailler avec madame X... mais sans dire pourquoi, qu'en août 2008 entre madame Z... et madame X... cela a failli en arriver aux mains ; que monsieur J... explique que le responsable monsieur D... n'a pas assez d'autorité, qu'il manqué d'impartialité envers madame X... ; que madame Y... ajoute qu'il est difficile de travailler avec certaines personnes car elles vont trop vite, qu'elle a entendu beaucoup de critique vis à vis de madame X... ; que monsieur K... précise que l'ambiance de travail s'est dégradée, les gens se méfient les uns des autres, il y a des postes plus faciles que d'autres ; que monsieur L... indique qu'il a des cadences de fou, qu'il n'y a que madame X... qui n'atteint pas la cadence suite au problème de harcèlement ; que monsieur C... ajoute quant à lui que monsieur D... est venu sur la ligne et a dit à madame X... : ce n'est pas l'équipe qui va s'adapter à toi mais à toi de t'adapter à l'équipe, qu'il n'a pas entendis le reste de leur conversation, il a demandé à ne pas travailler avec madame X... ; que messieurs K..., M... et N... quant à eux n'apportent pas d'éléments particuliers ; qu'il est surprenant que la société qui dispose d'un CHSCT n'ait pas fait intervenir ses membres dans le cadre de l'enquête, qu'il est incontestable au vu du résultat de cette enquête que madame X... subissait bel et bien un harcèlement, que l'employeur en laissant la situation perdurer sans intervenir n'a pas respecté le principe général d'exécution de bonne foi du contrat de travail conformément aux dispositions de l'article L. 1222-1 du code du travail, le conseil fait droit à sa demande de rupture à l'initiative de l'employeur, et prononce la résiliation judiciaire à effet de ce jour ;
1°) ALORS QUE la mésentente entre salariés ne laisse pas présumer l'existence d'un harcèlement moral ; qu'en retenant dès lors que madame X... était en butte à l'hostilité de certains de ses collègues pour un problème de cadence, dans la mesure où certains salariés travaillaient nettement plus vite que les cadences imposées et pouvaient alors avoir un temps de pause plus important en fin de poste, ce qu'ils ne pouvaient pas faire lorsqu'ils travaillaient en binôme avec elle ; quand la simple mésentente entre collègues ne laisse pas supposer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a violé l'article L. 1152-1 du code du travail ;
2°) ALORS QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu'en affirmant « qu'il résulte d'autres témoignages que madame X... était en butte à l'hostilité de certains de ses collègues pour un problème de cadence », sans préciser les auteurs de ces « autres témoignages » ni indiquer le ou les éléments de preuve établissant cette prétendue « hostilité », la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE la simple réponse apportée par le supérieur hiérarchique à une plainte du salarié ne laisse pas supposer l'existence d'un harcèlement moral ; qu'en décidant, au contraire, que la réponse apportée par monsieur D... à la plainte de madame X..., selon laquelle ce n'était pas à l'équipe de s'adapter à elle mais à elle de s'adapter à l'équipe et qu'elle pouvait aller le dire au directeur mais qu'il allait alors augmenter les cadences de travail, laissait présumer cette qualification, la cour d'appel a violé l'article L. 1152-1 du code du travail ;
4)° ET ALORS QUE lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis, circonstanciés et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en retenant, à titre de présomptions de harcèlement moral, que monsieur J... rapporte que monsieur D... manque d'impartialité envers madame X..., que madame Y... a entendu beaucoup de critiques à l'endroit de la salariée, que monsieur K... atteste que l'ambiance de travail s'est dégradée et que les gens se méfient les uns des autres et que monsieur L... rapporte « qu'il n'y a que madame X... qui n'atteint pas la cadence suite au problème de harcèlement moral », quand ces éléments, dont aucune date n'est précisée, n'étaient ni précis ni circonstanciés, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-27643
Date de la décision : 20/05/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 10 octobre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 mai. 2015, pourvoi n°13-27643


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.27643
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