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13/05/2015 | FRANCE | N°14-10854

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 mai 2015, 14-10854


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée par la société Coating industries en qualité d'opératrice-masquage ; que courant 2005, son contrat de travail a été repris par la société Médical Coating venant aux droits de la société Coating industries ; qu'elle occupait, en dernier lieu, le poste de responsable technique finition et contrôle final ; qu'elle a été placée en arrêt maladie sur plusieurs périodes en 2007 et 2008 ; qu'à l'issue de deux examens médicaux, le médecin du trav

ail l'a déclarée inapte à son poste ; que licenciée le 16 décembre 2008, elle a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée par la société Coating industries en qualité d'opératrice-masquage ; que courant 2005, son contrat de travail a été repris par la société Médical Coating venant aux droits de la société Coating industries ; qu'elle occupait, en dernier lieu, le poste de responsable technique finition et contrôle final ; qu'elle a été placée en arrêt maladie sur plusieurs périodes en 2007 et 2008 ; qu'à l'issue de deux examens médicaux, le médecin du travail l'a déclarée inapte à son poste ; que licenciée le 16 décembre 2008, elle a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Vu les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
Attendu que pour débouter la salariée de ses demandes au titre du harcèlement moral, l'arrêt retient que l'intéressée soutient avoir été mise à l'écart à partir de juillet 2007, avoir été privée de primes et avoir subi des changements arbitraires d'horaires de travail, qu'il ressort des pièces versées que celle-ci s'entendait mal avec certaines collègues nouvellement arrivées dans les premiers mois de 2007, qu'elle se désinvestissait de son travail, qu'elle manifestait le 9 juillet 2007 son désir de quitter l'entreprise mais souhaitait en fait percevoir des indemnités de départ, que par la suite l'ambiance de travail s'était dégradée progressivement, ce, en partie du fait de la salariée, que les changements d'horaires, conformes au contrat de travail et à ses avenants, concernaient l'ensemble de l'équipe et répondaient à des impératifs de la production ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait de se prononcer sur l'ensemble des éléments retenus afin de dire s'ils laissaient présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, d'apprécier les éléments de preuve fournis par l'employeur pour démontrer que les mesures en cause étaient étrangères à tout harcèlement moral, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Sur le troisième moyen :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour débouter la salariée de sa demande au titre du complément de salaire pour l'année 2008, l'arrêt retient que l'intéressée fonde sa demande sur l'article 40 de la convention collective des mensuels de la métallurgie du Rhône selon lequel le salarié en arrêt maladie comptant une ancienneté comprise entre cinq et dix ans a droit à une garantie de ressources de 100 % pendant les soixante premiers jours et de 75 % pendant les quarante jours suivants, que ces périodes s'entendent sur l'année civile, que l'intéressée totalisait cent quatre-vingt douze jours d'absence en 2008, ce qui épuisait ses droits conventionnels à garantie de ressources ;
Qu'en statuant ainsi, sans préciser le calcul duquel elle déduisait que la salariée était remplie de ses droits, la cour d'appel, qui n'a pas permis à la Cour de cassation d'exercer son contrôle, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Sur le quatrième moyen :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour débouter la salariée de sa demande au titre de la prime exceptionnelle de production pour les années 2007 et 2008, l'arrêt retient que cette prime ne constituait pas un élément de salaire, ce qui ne conférait aucun droit à la salariée ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la salariée qui invoquait la violation du principe « à travail égal, salaire égal » et faisait valoir que l'employeur ne justifiait pas d'éléments objectifs lui permettant de l'exclure du bénéfice de cette prime, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Et sur le cinquième moyen :
Vu l'article 16 du code de procédure civile ;
Attendu que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que si, lorsque la procédure est orale, les moyens soulevés d'office sont présumés avoir été
débattus contradictoirement à l'audience, il peut être apporté la preuve contraire ;
Attendu que pour limiter la somme à verser à la salariée au titre de la prime mensuelle d'encadrement, l'arrêt retient que la salariée qui était responsable technique finition et contrôle final depuis le 1er juillet 2005, percevait cette prime à compter de cette date, que du fait de son arrêt maladie, elle a cessé toute fonction d'encadrement à compter de mai 2008, qu'elle ne se trouve donc fondée en sa demande que pour la période de sept mois ayant couru d'octobre 2007 à avril 2008 ;
Qu'en statuant ainsi, sans inviter les parties à s'expliquer sur le moyen qu'elle relevait d'office, tiré de l'absence de droit à la prime mensuelle d'encadrement pendant les périodes de maladie, la cour d'appel a violé le texte et le principe susvisés ;
Et attendu que la cassation prononcée sur le premier moyen, entraîne par voie de conséquence la cassation du chef de l'arrêt qui dit le licenciement de la salariée, fondé sur une cause réelle et sérieuse ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que Mme X... n'a pas subi un harcèlement moral, la déboute en conséquence de sa demande de dommages-intérêts et d'annulation du licenciement, dit son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, la déboute en conséquence de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, la déboute de ses demandes en paiement d'un complément de salaire pour l'année 2008, d'un rappel de prime exceptionnelle au titre des années 2007 et 2008, d'un rappel de prime d'encadrement de mai à décembre 2008, l'arrêt rendu le 15 mai 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;
Condamne la société Médical Coating aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Médical Coating à payer à la SCP Rousseau et Tapie la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize mai deux mille quinze et signé par M. Chollet, président, et Mme Piquot, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de la décision.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que Mme X... n'avait pas été victime de harcèlement moral et décidé par voie de conséquence que son licenciement n'était pas nul ;
Aux motifs que Mme X... soutient avoir été mise à l'écart à partir de juillet 2007, s'être vue privée de primes et avoir subi des changements arbitraires d'horaires de travail ; qu'il ressort des pièces versées aux débats qu'elle s'entendait mal avec certaines de ses collègues nouvellement arrivées dans les premiers mois de 2007 ; que parallèlement elle se désinvestissait de son travail, manifestait le 9 juillet 2007 son désir de quitter l'entreprise et qu'en fait elle souhaitait percevoir des indemnités de départ ; que par la suite l'ambiance de travail se dégradait progressivement, en partie du fait de Virginie X... ; que les changements d'horaires étaient conformes au contrat et à ses avenants et répondaient à des impératifs de production ; qu'ils ne concernaient pas Virginie X... seule mais l'ensemble de son équipe ; qu'elle est ainsi mal fondée à invoquer avoir subi un harcèlement moral ;
Alors 1°) que le juge ne peut se déterminer par la seule référence aux pièces versées aux débats, sans les assortir de la moindre analyse, même sommaire, ni indiquer les pièces sur lesquelles il se fonde ; qu'en ayant affirmé « qu'il ressort des pièces versées aux débats qu'elle s'entendait mal avec certaines de ses collègues nouvellement arrivées dans les premiers mois de 2007 » ; que « parallèlement elle se désinvestissait de son travail», « qu'elle manifestait le 9 juillet 2007 son désir de quitter l'entreprise et qu'en fait elle souhaitait percevoir des indemnités de départ » ; que par la suite « l'ambiance de travail se dégradait progressivement, en partie du fait de Virginie X... », sans préciser, même sommairement, sur quelles pièces du dossier elle se fondait, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors 2°) qu'en cas de litige portant sur un harcèlement moral, le juge doit s'expliquer sur toutes les circonstances invoquées par le salarié, y compris les éléments médicaux produits, et rechercher si, dans leur ensemble, elles sont de nature à faire présumer un harcèlement moral ; que Mme X... a dénoncé que, sous le prétexte qu'elle aurait annoncé son souhait de quitter l'entreprise, elle avait « été immédiatement rétrogradée au poste d'opératrice finition contrôle final et expédition », tandis que « Madame Y... a été promue au poste de responsable précédemment occupé par Madame X... pour devenir son supérieur hiérarchique direct », qu'« en parallèle de cette rétrogradation abusive, sa rémunération a été abusivement diminuée », qu'elle avait ensuite été systématiquement mise à l'écart des réunions de son service, que Mmes Z... et Y... ne lui adressaient plus la parole (p. 12), avait été à plusieurs reprises en 2007 et 2008 en arrêt de travail et avait produit un certificat du 16 août 2008 du Dr A... attestant qu'elle présentait des troubles anxio-dépressifs en relation avec un harcèlement professionnel ; qu'en ne recherchant pas si ces éléments, dans leur ensemble, n'étaient pas de nature à faire présumer un harcèlement moral, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(Subsidiaire)
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir décidé que le licenciement de Mme X... reposait sur une cause réelle et sérieuse ;
Aux motifs que la lettre de licenciement qui circonscrit les termes du litige contient les motifs suivants : inaptitude déclarée par le médecin du travail et refus de tout reclassement ; que Virginie X... était constamment en arrêt de travail à compter du 5 mai 2008 ; que le médecin du travail la déclarait inapte à son poste les 13 et 28 octobre 2008 ; que le 28 novembre 2008, la société lui proposait en reclassement deux postes au conditionnement, refusés par la salariée le 12 décembre 2008 ; que dans ces conditions le licenciement se fonde sur une cause réelle et sérieuse ;
Alors 1°) que ne constitue pas l'énoncé d'un motif de licenciement l'inaptitude physique du salarié et le refus de postes de reclassement, sans mention de l'impossibilité de reclassement ; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses propres constatations selon lesquelles la lettre de licenciement fixant les termes du litige était motivée par l'inaptitude déclarée par le médecin du travail et le refus de tout reclassement, ce dont il résultait qu'elle n'était pas motivée et que le licenciement était nécessairement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-2 et L. 1232-6 du code du travail ;
Alors 2°) et en tout état de cause que le refus par le salarié d'une proposition de reclassement faite par l'employeur ne constitue pas une cause réelle et sérieuse de licenciement lorsqu'elle emporte modification du contrat de travail ; qu'après avoir constaté que Mme X... avait été licenciée pour inaptitude et refus de reclassement, la cour d'appel, qui n'a pas recherché, ainsi qu'elle y était invitée, si les propositions de l'employeur ne modifiaient pas son contrat de travail, a violé l'article L. 1226-2 du code du travail ;
Alors 3°) et en tout état de cause, que le refus par le salarié d'un poste proposé par l'employeur dans le cadre de son obligation de reclassement, même s'il n'emporte pas de modification du contrat de travail, n'implique pas à lui seul le respect par celui-ci de son obligation et qu'il lui appartient d'établir qu'il ne dispose d'aucun autre poste compatible avec l'aptitude du salarié ; que pour débouter la salariée de ses demandes, l'arrêt retient que le médecin du travail l'a déclarée inapte à son poste, que la société lui a proposé deux postes refusés par la salariée le 12 décembre 2008 ; qu'en statuant ainsi, cependant que le refus de ces deux propositions ne dispensait pas l'employeur de prouver qu'il ne disposait d'aucune autre possibilité de reclassement, la cour d'appel a violé l'article L. 1226-2 du code du travail ;
Alors 4°) que lorsque le salarié conteste la compatibilité du poste proposé avec les recommandations du médecin du travail, l'employeur doit solliciter à nouveau l'avis de ce dernier ; que Mme X..., le 12 décembre 2008, a contesté la compatibilité des propositions formulées avec l'avis du médecin du travail et a soutenu que l'employeur n'avait pas interrogé le médecin du travail (conclusions d'appel p. 4, 16 et 17) ; qu'en n'ayant pas recherché, ainsi qu'elle y était invitée, si l'employeur, tenu de justifier de propositions de reclassement appropriées, avait lui-même sollicité un nouvel avis du médecin du travail comme il y était tenu, la cour d'appel a violé l'article L. 1226-2 du code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Mme X... de sa demande de complément de rémunération pendant ses arrêts maladie de 2008 ;
Aux motifs qu'elle fonde sa demande sur l'article 40 de la convention collective des mensuels des industries métallurgiques du Rhône, selon lequel le salarié ayant entre et 10 ans d'ancienneté absent pour cause de maladie a droit au maintien de son salaire à 100% pendant les 60 premiers jours et 75% les 40 jours suivants ; que Mme X... totalisant 55 jours d'absence en 2007, elle avait droit à une garantie de ressources à 100% et la société ne pouvait opérer de retenues ; qu'elle totalisait 192 jours d'absence en 2008, ce qui épuisait ses droits conventionnels à garantie de ressources ;
Alors que l'article 40 de la convention collective des mensuels des industries métallurgiques du Rhône prévoit que le salarié ayant entre 5 et 10 ans d'ancienneté absent pour cause de maladie a droit au maintien de son salaire à 100% pendant les premiers jours et 75% les 40 jours suivants ; qu'en n'ayant pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations selon lesquelles Mme X... totalisait 192 jours d'absence en 2008, ce dont il résultait que la garantie étant due en intégralité pour les 60 premiers jours et partiellement pour les 40 jours suivants, ses droits à garantie n'étaient épuisés qu'au-delà du 100ème jour pour les 92 jours de maladie restant, la cour d'appel a violé le texte précité.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Mme X... de sa demande de rappel de prime exceptionnelle pour 2007 et 2008 ;
Aux motifs que cette prime ne constituait pas un élément de salaire, ce qui ne lui conférait aucun droit ;
Alors qu'en n'ayant pas répondu aux conclusions de la salariée qui dénonçait une différence de traitement par rapport aux autres salariés de l'équipe sans que l'employeur ne la justifie par des éléments objectifs, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir limité à 560 € la prime mensuelle d'encadrement allouée à Mme X... ;
Aux motifs que le 1er juillet 2005 elle devenait responsable technique finition et contrôle final TSM ; qu'elle percevait à compter de cette date une prime mensuelle d'encadrement de 80 ¿ par mois ; que du fait de son arrêt maladie elle cessait toute fonction d'encadrement à compter de mai 2008 ; qu'elle n'était fondée en sa demande que pour la période de 7 mois ayant couru d'octobre 2007 à avril 2008 et que la société était redevable de la somme de 560 € ;
Alors qu'en ayant soulevé d'office et sans avoir invité les parties à présenter leurs observations, un moyen tiré de ce que la prime n'était pas due en période d'arrêt maladie, la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction et violé l'article 16 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-10854
Date de la décision : 13/05/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 15 mai 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 mai. 2015, pourvoi n°14-10854


Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Coutard et Munier-Apaire, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.10854
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