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12/05/2015 | FRANCE | N°11-14770

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 12 mai 2015, 11-14770


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 21 janvier 2011), que par acte authentique du 23 avril 2004, M. Bernard et Mme Carole X... (les consorts X...) ont cédé les parts représentant l'intégralité du capital de la société Centre étanchéité à la société Holding Mecadev ; que l'acte déterminait le prix en considération de l'actif et du passif de la société à la date de situation du bilan arrêté au 30 avril 2004 ; qu'estimant que les comptes fournis lors de la cession, qui avaient été établis par la s

ociété d'expertise-comptable Scape, aux droits de laquelle vient la société ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 21 janvier 2011), que par acte authentique du 23 avril 2004, M. Bernard et Mme Carole X... (les consorts X...) ont cédé les parts représentant l'intégralité du capital de la société Centre étanchéité à la société Holding Mecadev ; que l'acte déterminait le prix en considération de l'actif et du passif de la société à la date de situation du bilan arrêté au 30 avril 2004 ; qu'estimant que les comptes fournis lors de la cession, qui avaient été établis par la société d'expertise-comptable Scape, aux droits de laquelle vient la société Sogep, n'étaient pas sincères, la société Holding Mecadev a assigné les consorts X... en annulation du contrat de cession pour dol et restitution du prix ; que par jugement du 22 novembre 2005, la société Holding Mecadev a été mise en liquidation judiciaire ; que les consorts X... ont appelé en garantie la société Scape ;
Sur le premier moyen :
Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt d'annuler le contrat et de les condamner au remboursement du prix de cession ainsi que des frais d'acquisition alors, selon le moyen :
1°/ qu'en retenant, pour considérer que les consorts X... avaient eu l'intention délibérée de présenter la société Centre d'étanchéité sous un jour favorable et ne pouvaient se retrancher derrière la comptabilité tenue par leur expert-comptable la société Scape, que celle-ci n'avait qu'une simple mission de présentation des comptes et non une fonction d'audit, tout en constatant expressément que celle-ci était intervenue comme « conseil des parties » lors de la cession et avait suggéré une évaluation de la société de l'ordre de 255 000 euros, la cour d'appel a entaché sa décision de contradiction de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que comme le faisaient valoir les consorts X... dans leurs conclusions d'appel, la lettre de mission de la société Scape du 24 septembre 2001 prévoyait que sa mission incluait, outre la présentation formelle de la comptabilité, la vérification de « la cohérence et la vraisemblance des comptes annuels », en s'appuyant notamment sur « des contrôles par épreuves des pièces justificatives » et « un examen critique de cohérence et de vraisemblance des comptes annuels » ; qu'en retenant que la société Scape n'avait qu'une simple mission de présentation des comptes et qu'elle n'avait fait que reprendre les chiffres présentés par M. Bernard X..., la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la lettre de mission de la société Scape, et violé l'article 1134 du code civil ;
3°/ que les consorts X... faisaient encore valoir dans leurs conclusions d'appel que l'expert judiciaire n'avait pas remis en cause la valeur des travaux en cours mais seulement leur méthode de comptabilisation, que cette erreur aurait dû être rectifiée par l'expert-comptable et ne procédait nullement d'une manoeuvre délibérée de leur part ; qu'en retenant, pour considérer que les consorts X... avaient commis un dol, que les comptes de la société Centre d'étanchéité faisaient apparaître une majoration fictive des travaux en cours, que leur évaluation avait été faite par M. Bernard X... lui-même et que la comptabilité ne faisait que reprendre les chiffres qui lui étaient transmis, sans rechercher, comme il était soutenu, si cette majoration des travaux en cours ne procédait pas d'une erreur exclusivement comptable qu'il appartenait à l'expert-comptable Scape de rectifier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1116 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt constate que les résultats comptables de la société Centre étanchéité étaient grossièrement inexacts et faisaient apparaître un actif fictif résultant d'inscriptions de créances douteuses ainsi que d'une majoration de la valorisation des travaux en cours, laquelle avait pour origine les chiffres fixés par M. X..., que la comptabilité ne faisait que reprendre ; qu'il retient que l'écart existant entre la situation réelle de l'entreprise et les sommes figurant au bilan était d'une telle ampleur qu'il ne pouvait résulter d'inadvertances, de négligences ou d'approximations et traduisait une volonté délibérée de présenter l'entreprise sous un jour favorable, sans aucune mesure avec sa situation réelle ; qu'en l'état de ces motifs et abstraction faite de ceux, surabondants, critiqués par les première et deuxième branches, et dès lors que l'intervention de l'expert comptable n'était pas de nature à exonérer les consorts X... des agissements ainsi relevés, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de faire une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Et sur le second moyen :
Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt de rejeter leur recours en garantie contre la société Scape alors, selon le moyen :
1°/ que comme le faisaient valoir les consorts X... dans leurs conclusions d'appel, la lettre de mission de la société Scape du 24 septembre 2001 prévoyait que sa mission incluait, outre la présentation formelle de la comptabilité, la vérification de « la cohérence et la vraisemblance des comptes annuels », en s'appuyant notamment sur « des contrôles par épreuves des pièces justificatives » et « un examen critique de cohérence et de vraisemblance des comptes annuels » ; qu'en retenant, pour écarter toute responsabilité de la société Scape, que celle-ci n'avait qu'une simple mission de présentation des comptes, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la lettre de mission de la société Scape, et violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ que l'expert-comptable chargé de la présentation des comptes est tenu d'un devoir d'efficacité et de diligence lui imposant d'obtenir de son client et d'examiner les pièces justificatives nécessaires à l'établissement d'une comptabilité régulière et sincère ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la société Scape, chargée de l'établissement des comptes sociaux, se serait contentée de simples déclarations de son client ; qu'en écartant toute responsabilité de la société Scape, quand il ressortait de ses propres constatations que celle-ci avait commis une faute de négligence dans l'exercice de sa mission, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1147 du code civil ;
3°/ que l'expert-comptable chargé de la présentation des comptes est tenu à un devoir de conseil à l'égard de son client ; qu'en l'espèce, comme le faisaient valoir les consorts X... dans leurs conclusions d'appel, à supposer même que la société Scape n'ait eu qu'une mission de présentation des comptes, elle aurait dû l'avertir des éléments qu'elle n'avait pas pu contrôler (stocks et encours) et de l'incohérence des comptes clients, et refuser d'attester les comptes ; qu'en se bornant à retenir, pour écarter la responsabilité de la société Scape, que celle-ci n'était chargée que de la présentation des comptes, sans rechercher si elle n'avait pas, dans l'exercice de cette mission, manqué à son devoir de conseil, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu que la restitution totale du prix, des intérêts et des frais de vente indus, consécutive à l'annulation de la vente, ne vise qu'à replacer les parties dans l'état où elles se trouvaient avant la vente et n'ont pas un caractère indemnitaire, de sorte que le vendeur tenu à cette restitution ne peut demander la garantie de l'expert comptable ayant établi les documents comptables, déclarés non sincères, et ayant servi à la fixation du prix ; que, par ce motif de pur droit, invoqué par la défense, la décision se trouve justifiée ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Bernard X... et Mme Carole X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à M. Raynaud, en qualité de liquidateur de la société Holding Mecadev, la somme globale de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour les consorts X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré Monsieur Bernard X... et Mademoiselle Carole X... responsables d'une faute dolosive, d'AVOIR prononcé la nullité de la vente des parts sociales de la SARL Centre étanchéité intervenue le 23 avril 2004 entre Monsieur Bernard X... et Mademoiselle Carole X... et la SARL Holding Mecadev, et d'AVOIR condamné solidairement Monsieur Bernard X... et Mademoiselle Carole X... à payer à la SARL Holding Mecadev, représentée par son liquidateur Maître Raynaud la somme de 320. 000 € en principal, outre une somme de 5. 000 € au titre des frais ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE : « il est acquis que, le 3 février 2004, un compromis notarié est intervenu entre la société HOLDING MECADEV, constituée deux mois auparavant (le 23 décembre 2003) pour cette acquisition et les consorts X..., Bernard X... et sa fille Carole, détenant la totalité des parts de la SARL Centre étanchéité, le premier étant gérant et fondateur de la société et entendant, soi-disant, faire valoir ses droits à la retraite ; que l'acte de cession de parts sociales a été régularisé en la forme authentique, le 23 avril 2004, pour un prix total de 320. 000 ¿, fixé en considération de l'actif et du passif de la société, à la date de la situation du bilan, arrêté au 30 avril 2004 ; que l'acte prévoyait une clause de révision du prix, si le bilan de l'exercice se clôturant le 30 avril 2004 révélait une perte supérieure à 20. 000 ¿ et comprenait, également, une garantie d'actif et de passif et un cautionnement bancaire par le cédant, à hauteur de 61. 000 ¿ ; Attendu que l'expert a relevé trois points essentiels à l'origine du conflit, à savoir la valorisation des travaux en cours, la réalité du probable recouvrement des créances clients et les conséquences d'un contrôle fiscal, intervenu en août 2004 ; qu'il a relevé qu'au 30 avril 2004, les travaux en cours avaient été valorisés à hauteur de 161. 651, 74 ¿ et que le total des écarts avec la comptabilité ressortait à 108. 275 ¿ ; qu'il a estimé à 275. 000 ¿ l'absence de provision pour dépréciation des comptes clients et donc l'existence d'un actif fictif, à cette hauteur ; qu'au regard, également, de l'incidence du redressement fiscal, il a estimé que l'actif net réel de la société aurait dû être diminué de 387. 998 ¿, l'actif net réel s'appréciant ainsi à 58, 930 ¿ ; que l'expert a, ainsi, conclu que la valeur réelle de la société ne pouvait, guère, se situer au-delà de ses capitaux propres, soit 58, 930 ¿ plus une valeur de fonds de commerce, susceptible d'être évaluée subjectivement entre 30. 000 et 50. 000 ¿ ; qu'une valorisation de la société au 30 avril 2004 lui paraissait donc s'établir dans une fourchette comprise entre 60. 000 ¿ et 110. 000 ¿ ; Attendu que de manière classique et comme il était, au reste, expressément indiqué dans l'acte de cession, la valeur des parts sociales a été calculée sur la base des résultats comptables obtenus par la SARI CENTRE ÉTANCHÉITÉ les dernières années ; que c'est d'ailleurs dans cette optique et sur ce fondement que la Société SCAPE, intervenant comme conseil des parties, avait suggéré une évaluation de l'ordre de 255. 000 ¿ qui a été finalement portée, à l'occasion des négociations ultimes, à la somme de 320, 000 ¿, somme qu'il convient de rapprocher de la valorisation préconisée par l'expert, soit entre 60. 000 ¿ et 110. 000 ¿ ; que la différence de valeur, des plus substantielle, montre aisément l'opération exceptionnelle qu'ont réalisée les consorts X... à l'occasion de cette vente, puisqu'ils ont obtenu, au bas mot, une plus-value supérieure à 200. 000 ¿ par rapport au juste prix ; Attendu, certes, que la réalisation d'une opération financière exceptionnelle n'implique pas, à elle seule, l'existence de manoeuvres dolosives ; qu'il convient toutefois de relever que les résultats comptables de la SARL CENTRE ETANCHEITE étaient grossièrement inexacts, faisant apparaître un actif totalement fictif à hauteur de 387. 998 ¿, actif obtenu artificiellement, de manière classique, par l'inscription de créances douteuses voire franchement irrécouvrables ainsi que par une majoration totalement fictive de la valorisation des travaux en cours ; que l'écart existant entre la situation réelle de l'entreprise et les sommes figurant au bilan se trouve d'une telle ampleur qu'il est impossible de l'attribuer à des inadvertances, des négligences ou des approximations et qu'il faut bien y voir une volonté délibérée de présenter l'entreprise sous un jour favorable, sans aucune commune mesure avec sa situation réelle ; que c'est vainement que les consorts X... se retranchent derrière la comptabilité tenue par leur expert-comptable, qui serait, à leurs yeux, responsable de présentation de bilans inexacts, dans la mesure où ce dernier, comme il en est justifié au dossier, n'avait qu'une simple mission de présentation des comptes et, en aucun cas, une fonction d'audit ; qu'il convient de noter que l'expert, en son rapport, a expressément relevé que l'évaluation des travaux en cours était faite par Bernard X... lui-même et que la comptabilité ne faisait que reprendre les chiffres qui lui étaient transmis ; que si la cession est intervenue théoriquement pour permettre à ce dernier de prendre sa retraite, il ressort du dossier et des pièces communiquées que, dès le mois d'août 2005, le cédant a repris une activité voisine et concurrente, au mépris d'ailleurs de son engagement de non rétablissement stipulé à l'acte de cession ; que l'expert a encore noté que si, au jour de la cession, la SARL CENTRE ETANCHEITE n'était pas dans une situation financière désespérée, comme le liquidateur l'a avancé un temps, elle ne connaissait malgré tout qu'une bonne santé relative et que, au vu d'une comptabilité réelle faisant état de chiffres exacts, sa vente aurait été problématique, l'acquéreur peinant vraisemblablement à trouver des concours bancaires pour financer l'opération et devant faire usage, substantiellement, de fonds propres ; qu'encore, il convient de relativiser les fautes de gestion imputées à M. C... par la société SCAPE, dans la mesure où elles ne représentent, financièrement, qu'une dépense supplémentaire de 26. 000 ¿ environ, à rapprocher des 400. 000 ¿ qui manquent à l'actif, du fait des cédants ; attendu qu'au regard de ces éléments, il apparaît à la Cour que c'est à juste titre que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle adopte en tant que de besoin, a procédé à une juste appréciation des faits de la cause et en a exactement déduit les conséquences juridiques qui s'imposaient, en retenant l'existence de manoeuvres dolosive de la part des consorts X... entraînant la nullité de la vente des parts sociales, sans qu'on puisse mettre en cause la société SCAPE qui n'avait qu'un rôle de présentation des comptes et s'est, au pire, contentée légèrement des simples déclarations de son client au moment de l'établissement des bilans » (arrêt p. 3-5) ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE : « La demande de nullité de la vente des parts sociales de la SARL CENTRE ETANCHEITE intervenue le 23 avril 2004 doit être examinée au travers de l'expertise comptable qui a été confiée à Monsieur Philippe D.... Cette expertise aboutit à un constat très proche de celui de Monsieur E... expert comptable sollicité par le demandeur. Les conclusions de ces experts ne sont pas contestées par les consorts X... qui ne proposent aucune autre estimation. Le 3 février 2004, un compromis a été signé devant Maître A... Notaire à Cusset entre la SARL HOLDING MECADEV constituée deux mois auparavant pour cette acquisition et Monsieur Bernard X... et Mademoiselle Carole X... les actionnaires de la SARL CENTRE ETANCHEITE. L'acte de cession de parts sociales a été régularisé en la forme authentique le 23 avril 2004 devant Maître B... Notaire à Saint-Yorre pour un prix total de 320. 000 euros fixé en considération de l'actif et du passif de la société à la date de la situation bilancielle qui sera arrêtée à la date du 30 avril 2004. Cet acte prévoit une clause de révision du prix si le bilan de l'exercice clôturant le 30 avril 2004 révèle une perte supérieure à 20. 000 euros. L'acte comprend surtout une garantie d'actif et de passif, et il est énoncé dans l'acte que la présente cession représente la totalité du capital social de la société CENTRE ETANCHEITE et que c'est le passif inscrit au bilan arrêté à la date du 30 avril 2004 qui sera pris en considération. Le cédant s'engage à indemniser le cessionnaire en cas d'apparition avant le 31 décembre 2007 de tout passif ou diminution d'actif n'apparaissant pas au bilan arrêté à la date du 30 avril 2004 et ayant une cause antérieure. Un cautionnement bancaire devait être produit par le cédant pour une somme de 61. 000 euros entre les mains du Notaire qui devait entre temps consigner une somme équivalente. Cette garantie ne semble pas avoir été donnée avant le déblocage des fonds. La garantie de passif est plafonnée à hauteur du prix de la cession. Il ressort clairement de cette transaction que la vente de la société CENTRE ETANCHEITE s'est opérée à partir de la comptabilité transmise par les cédants et au regard des garanties fournies pour le passif et l'actif de cette société traduits dans la comptabilité. Il résulte clairement de l'expertise judiciaire de Monsieur Philippe D... que la comptabilité ne peut pas être considérée comme sincère. D'une part l'expert relève une majoration fictive des travaux en cours pour 108. 275 euros. Les travaux en cours pour trois chantiers ont été valorisés par Monsieur X... au 30 avril 2004 à 161. 651, 74 euros, sans aucun détail notamment sur la méthode dans les annexes. L'écart apparaît ainsi considérable et constitue un manquement délibéré dans l'obligation de transcrire avec sincérité et prudence les opérations économiques dans la comptabilité. D'autre part les créances clients autres que les créances douteuses sont évaluées à 933. 286, 67 euros dans les comptes du 30 avril 2004. L'expert énonce qu'une simple consultation du grand livre client permet de noter l'absence de révision des comptes clients et constate que certaines sommes réglées ne correspondent à aucune facture. Le compte client a été rectifié et donc déprécié par l'expert après pointage de l'ensemble des règlements au 31 décembre 2004 pour un montant de 275. 775 euros. Cette négligence du dirigeant dans le recouvrement des créances ou dans l'établissement de la facturation aurait dû être retranscrite dans la comptabilité, ces créances douteuses auraient dû faire l'objet de provision dans la comptabilité pour un montant estimé par l'expert à 275. 000 euros. Il en résulte que l'importance des écarts sur les comptes est de nature à diminuer l'actif net réel de la société et à rendre la comptabilité produite dans le cadre de la vente non sincère. Le prix de vente de 320. 000 euros a été fixé de manière anormale pour le vendeur au-dessous de la valeur des capitaux propres estimés dans les comptes établis au 30 avril 2004 à euros mais également de l'évaluation faite par la SCAPE à 255. 000 euros sur la base des comptes établis de 2000 à 2002 et du potentiel de cette société en progression. Ce prix est en revanche largement supérieur à la valeur en réalité des capitaux propres tels que rectifiés par l'expert judiciaire pour 58. 930 euros. Cette présentation consistant à majorer de manière significative les actifs de la société est ainsi constitutive d'une faute dolosive à l'égard de la SARL HOLDING MECADEV qui a fait l'acquisition de l'intégralité des parts sociales et qui était en droit d'attendre une comptabilité sincère pour se décider à opérer un tel investissement. Il y a lieu d'ordonner la nullité de la vente des parts sociales de la SARL CENTRE ETANCHEITE intervenue le 23 avril 2004. La SARL HOLDING MECADEV représentée par Maître RAYNAUD ne formule aucune demande à l'encontre de la SCAPE qui a établi les comptes erronés et qui a participé à la négociation entre les parties et à l'évaluation de la société. Monsieur Bernard X... et Mademoiselle Carole X... doivent être déclarés responsables des conséquences dommageables de l'annulation de l'acte de vente » (jugement p. 4-6) ;
ALORS 1°) QU'en retenant, pour considérer que les consorts X... avaient eu l'intention délibérée de présenter la société Centre d'étanchéité sous un jour favorable et ne pouvaient se retrancher derrière la comptabilité tenue par leur expert-comptable la société Scape, que celle-ci n'avait qu'une simple mission de présentation des comptes et non une fonction d'audit, tout en constatant expressément que celle-ci était intervenue comme « conseil des parties » lors de la cession et avait suggéré une évaluation de la société de l'ordre de 255. 000 ¿, la cour d'appel a entaché sa décision de contradiction de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS 2°) QUE comme le faisaient valoir les consorts X... dans leurs conclusions d'appel, la lettre de mission de la société Scape du 24 septembre 2001 prévoyait que sa mission incluait, outre la présentation formelle de la comptabilité, la vérification de « la cohérence et la vraisemblance des comptes annuels », en s'appuyant notamment sur « des contrôles par épreuves des pièces justificatives » et « un examen critique de cohérence et de vraisemblance des comptes annuels » ; qu'en retenant que la société Scape n'avait qu'une simple mission de présentation des comptes et qu'elle n'avait fait que reprendre les chiffres présentés par M. Bernard X..., la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la lettre de mission de la société Scape, et violé l'article 1134 du code civil ;
ALORS 3°) QUE les consorts X... faisaient encore valoir dans leurs conclusions d'appel que l'expert judiciaire n'avait pas remis en cause la valeur des travaux en cours mais seulement leur méthode de comptabilisation, que cette erreur aurait dû être rectifiée par l'expert-comptable et ne procédait nullement d'une manoeuvre délibérée de leur part ; qu'en retenant, pour considérer que les consorts X... avaient commis un dol, que les comptes de la société Centre d'étanchéité faisaient apparaître une majoration fictive des travaux en cours, que leur évaluation avait été faite par M. Bernard X... luimême et que la comptabilité ne faisait que reprendre les chiffres qui lui étaient transmis, sans rechercher, comme il était soutenu, si cette majoration des travaux en cours ne procédait pas d'une erreur exclusivement comptable qu'il appartenait à l'expert-comptable Scape de rectifier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1116 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Bernard X... et Mademoiselle Carole X... de leur recours en garantie contre la société Scape aux droits de laquelle vient la société COGEP ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « c'est vainement que les consorts X... se retranchent derrière la comptabilité tenue par leur expert-comptable, qui serait, à leurs yeux, responsable de présentation de bilans inexacts, dans la mesure où ce dernier, comme il en est justifié au dossier, n'avait qu'une simple mission de présentation des comptes et, en aucun cas, une fonction d'audit ; qu'il convient de noter que l'expert, en son rapport, a expressément relevé que l'évaluation des travaux en cours était faite par Bernard X... lui-même et que la comptabilité ne faisait que reprendre les chiffres qui lui étaient transmis ; que si la cession est intervenue théoriquement pour permettre à ce dernier de prendre sa retraite, il ressort du dossier et des pièces communiquées que, dès le mois d'août 2005, le cédant a repris une activité voisine et concurrente, au mépris d'ailleurs de son engagement de non rétablissement stipulé à l'acte de cession ; que l'expert a encore noté que si, au jour de la cession, la SARL CENTRE ETANCHEITE n'était pas dans une situation financière désespérée, comme le liquidateur l'a avancé un temps, elle ne connaissait malgré tout qu'une bonne santé relative et que, au vu d'une comptabilité réelle faisant état de chiffres exacts, sa vente aurait été problématique, l'acquéreur peinant vraisemblablement à trouver des concours bancaires pour financer l'opération et devant faire usage, substantiellement, de fonds propres ; qu'encore, il convient de relativiser les fautes de gestion imputées à M. C... par la société SCAPE, dans la mesure où elles ne représentent, financièrement, qu'une dépense supplémentaire de 26. 000 ¿ environ, à rapprocher des 400. 000 ¿ qui manquent à l'actif, du fait des cédants ; attendu qu'au regard de ces éléments, il apparaît à la Cour que c'est à juste titre que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle adopte en tant que de besoin, a procédé à une juste appréciation des faits de la cause et en a exactement déduit les conséquences juridiques qui s'imposaient, en retenant l'existence de manoeuvres dolosive de la part des consorts X... entraînant la nullité de la vente des parts sociales, sans qu'on puisse mettre en cause la société SCAPE qui n'avait qu'un rôle de présentation des comptes et s'est, au pire, contentée légèrement des simples déclarations de son client au moment de l'établissement des bilans » (arrêt p. 4-5) ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE : « La demande de nullité de la vente des parts sociales de la SARL CENTRE ETANCHEITE intervenue le 23 avril 2004 doit être examinée au travers de l'expertise comptable qui a été confiée à Monsieur Philippe D.... Cette expertise aboutit à un constat très proche de celui de Monsieur E... expert comptable sollicité par le demandeur. Les conclusions de ces experts ne sont pas contestées par les consorts X... qui ne proposent aucune autre estimation. Le 3 14 février 2004, un compromis a été signé devant Maître A... Notaire à Cusset entre la SARL HOLDING MECADEV constituée deux mois auparavant pour cette acquisition et Monsieur Bernard X... et Mademoiselle Carole X... les actionnaires de la SARL CENTRE ETANCHEITE. L'acte de cession de parts sociales a été régularisé en la forme authentique le 23 avril 2004 devant Maître B... Notaire à Saint-Yorre pour un prix total de 320. 000 euros fixé en considération de l'actif et du passif de la société à la date de la situation bilancielle qui sera arrêtée à la date du 30 avril 2004. Cet acte prévoit une clause de révision du prix si le bilan de l'exercice clôturant le 30 avril 2004 révèle une perte supérieure à 20. 000 euros. L'acte comprend surtout une garantie d'actif et de passif, et il est énoncé dans l'acte que la présente cession représente la totalité du capital social de la société CENTRE ETANCHEITE et que c'est le passif inscrit au bilan arrêté à la date du 30 avril 2004 qui sera pris en considération. Le cédant s'engage à indemniser le cessionnaire en cas d'apparition avant le 31 décembre 2007 de tout passif ou diminution d'actif n'apparaissant pas au bilan arrêté à la date du 30 avril 2004 et ayant une cause antérieure. Un cautionnement bancaire devait être produit par le cédant pour une somme de 61. 000 euros entre les mains du Notaire qui devait entre temps consigner une somme équivalente. Cette garantie ne semble pas avoir été donnée avant le déblocage des fonds. La garantie de passif est plafonnée à hauteur du prix de la cession. Il ressort clairement de cette transaction que la vente de la société CENTRE ETANCHEITE s'est opérée à partir de la comptabilité transmise par les cédants et au regard des garanties fournies pour le passif et l'actif de cette société traduits dans la comptabilité. Il résulte clairement de l'expertise judiciaire de Monsieur Philippe D... que la comptabilité ne peut pas être considérée comme sincère. D'une part l'expert relève une majoration fictive des travaux en cours pour 108. 275 euros. Les travaux en cours pour trois chantiers ont été valorisés par Monsieur X... au 30 avril 2004 à 161. 651, 74 euros, sans aucun détail notamment sur la méthode dans les annexes. L'écart apparaît ainsi considérable et constitue un manquement délibéré dans l'obligation de transcrire avec sincérité et prudence les opérations économiques dans la comptabilité. D'autre part les créances clients autres que les créances douteuses sont évaluées à 933. 286, 67 euros dans les comptes du 30 avril 2004. L'expert énonce qu'une simple consultation du grand livre client permet de noter l'absence de révision des comptes clients et constate que certaines sommes réglées ne correspondent à aucune facture. Le compte client a été rectifié et donc déprécié par l'expert après pointage de l'ensemble des règlements au 31 décembre 2004 pour un montant de 275. 775 euros. Cette négligence du dirigeant dans le recouvrement des créances ou dans l'établissement de la facturation aurait dû être retranscrite dans la comptabilité, ces créances douteuses auraient dû faire l'objet de provision dans la comptabilité pour un montant estimé par l'expert à 275. 000 euros. Il en résulte que l'importance des écarts sur les comptes est de nature à diminuer l'actif net réel de la société et à rendre la comptabilité produite dans le cadre de la vente non sincère. Le prix de vente de 320. 000 euros a été fixé de manière anormale pour le vendeur au-dessous de la valeur des capitaux propres estimés dans les comptes établis au 30 avril 2004 à euros mais également de l'évaluation faite par la SCAPE à 255. 000 euros sur la base des comptes établis de 2000 à 2002 et du potentiel de cette société en progression. Ce prix est en revanche largement supérieur à la valeur en réalité des capitaux propres tels que rectifiés par l'expert judiciaire pour 58. 930 euros. Cette présentation consistant à majorer de manière significative les actifs de la société est ainsi constitutive d'une faute dolosive à l'égard de la SARL HOLDING MECADEV qui a fait l'acquisition de l'intégralité des parts sociales et qui était en droit d'attendre une comptabilité sincère pour se décider à opérer un tel investissement. Il y a lieu d'ordonner la nullité de la vente des parts sociales de la SARL CENTRE ETANCHEITE intervenue le 23 avril 2004. La SARL HOLDING MECADEV représentée par Maître RAYNAUD ne formule aucune demande à l'encontre de la SCAPE qui a établi les comptes erronés et qui a participé à la négociation entre les parties et à l'évaluation de la société. Monsieur Bernard X... et Mademoiselle Carole X... doivent être déclarés responsables des conséquences dommageables de l'annulation de l'acte de vente » (jugement p. 4-6) ;
ALORS 1°) QUE comme le faisaient valoir les consorts X... dans leurs conclusions d'appel, la lettre de mission de la société Scape du 24 septembre 2001 prévoyait que sa mission incluait, outre la présentation formelle de la comptabilité, la vérification de « la cohérence et la vraisemblance des comptes annuels », en s'appuyant notamment sur « des contrôles par épreuves des pièces justificatives » et « un examen critique de cohérence et de vraisemblance des comptes annuels » ; qu'en retenant, pour écarter toute responsabilité de la société Scape, que celle-ci n'avait qu'une simple mission de présentation des comptes, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la lettre de mission de la société Scape, et violé l'article 1134 du code civil ;
ALORS 2°) QU'en toute hypothèse, l'expert-comptable chargé de la présentation des comptes est tenu d'un devoir d'efficacité et de diligence lui imposant d'obtenir de son client et d'examiner les pièces justificatives nécessaires à l'établissement d'une comptabilité régulière et sincère ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la société Scape, chargée de l'établissement des comptes sociaux, se serait contentée de simples déclarations de son client ; qu'en écartant toute responsabilité de la société Scape, quand il ressortait de ses propres constatations que celle-ci avait commis une faute de négligence dans l'exercice de sa mission, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1147 du code civil ;
ALORS 3°) QUE l'expert-comptable chargé de la présentation des comptes est tenu à un devoir de conseil à l'égard de son client ; qu'en l'espèce, comme le faisaient valoir les consorts X... dans leurs conclusions d'appel, à supposer même que la société Scape n'ait eu qu'une mission de présentation des comptes, elle aurait dû l'avertir des éléments qu'elle n'avait pas pu contrôler (stocks et encours) et de l'incohérence des comptes clients, et refuser d'attester les comptes ; qu'en se bornant à retenir, pour écarter la responsabilité de la société Scape, que celle-ci n'était chargée que de la présentation des comptes, sans rechercher si elle n'avait pas, dans l'exercice de cette mission, manqué à son devoir de conseil, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 11-14770
Date de la décision : 12/05/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, 20 janvier 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 12 mai. 2015, pourvoi n°11-14770


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : Me Bertrand, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:11.14770
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