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06/05/2015 | FRANCE | N°13-24035

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 mai 2015, 13-24035


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 3 juillet 2013), que M. X..., engagé à compter du 15 octobre 2007, en qualité de chauffeur poids lourds, par la société Altead Augizeau, avait été victime, le 24 janvier précédent, d'un accident du travail chez son précédent employeur ; qu'à la suite d'arrêts de travail et à l'issue de deux examens médicaux les 6 et 20 avril 2010, le salarié a été déclaré inapte par le médecin du travail, puis licencié le 18 mai suivant pour inaptitude et impossibilité de rec

lassement ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 3 juillet 2013), que M. X..., engagé à compter du 15 octobre 2007, en qualité de chauffeur poids lourds, par la société Altead Augizeau, avait été victime, le 24 janvier précédent, d'un accident du travail chez son précédent employeur ; qu'à la suite d'arrêts de travail et à l'issue de deux examens médicaux les 6 et 20 avril 2010, le salarié a été déclaré inapte par le médecin du travail, puis licencié le 18 mai suivant pour inaptitude et impossibilité de reclassement ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de décider que M. X... devait bénéficier de la protection spécifique prévue pour un salarié victime d'un accident du travail et de le condamner au paiement de sommes en application des articles L. 1226-14 et L. 1226-15 du code du travail, alors, selon le moyen :
1°/ que les dispositions relatives aux accidents du travail ne sont pas applicables aux rapports entre un employeur et son salarié victime d'un accident du travail survenu au service d'un autre employeur ; que ces dispositions sont, par exception, opposables au nouvel employeur à la condition qu'il soit établi que la rechute de l'accident du travail trouve sa cause dans ses conditions de travail ou tout autre événement inhérent à des fonctions au service du nouvel employeur ; qu'il appartient au juge de caractériser le lien de causalité entre la rechute et les conditions de travail effectives du salarié ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, pour décider que M. X... pouvait se prévaloir du régime de protection applicable aux salariés victimes d'accident du travail au titre de l'accident survenu chez son précédent employeur, a retenu que la société Altead Augizeau s'était abstenue de faire passer au salarié la visite médicale d'embauche qui aurait permis de vérifier l'adéquation de son état de santé avec son nouveau poste, voire d'aménager celui-ci pour assurer cette adéquation ; qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, après avoir elle-même constaté que le salarié avait été déclaré apte à ses fonctions lors de la visite de reprise du 2 février 2009, ce qui était de nature à établir l'absence d'une quelconque incidence de l'absence de visite médicale d'embauche sur l'existence alléguée d'un lien causal entre les fonctions chez le nouvel employeur et l'accident survenu chez le précédent employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-6 du code du travail ;
2°/ que le défaut de réponse à conclusions équivaut au défaut de motifs ; que la société Altead Augizeau indiquait précisément dans ses écritures d'appel qu'aucun lien de causalité ne pouvait exister entre la rechute d'accident du travail et les conditions de travail de M. X... puisque le médecin du travail l'avait déclaré apte en février 2009 à la suite de la première suspension du contrat de travail ; qu'en décidant, sans répondre à ce chef pertinent des conclusions de l'exposante, qui était pourtant de nature à influer sur la solution du litige, que M. X... pouvait prétendre au régime de protection spéciale attaché aux accidents du travail, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que le juge a l'obligation d'indiquer l'origine des constatations de fait prises hors des conclusions des parties ; qu'en retenant, pour faire application à la rupture du contrat de travail de M. X... le régime du licenciement des salariés victimes d'un accident du travail, que l'arrêt de travail en date du 30 janvier 2008 avait donné lieu à une déclaration d'accident du travail, sans expliquer d'où elle tirait ce fait qui ne ressortait nullement des conclusions des parties, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-6 du code du travail ;
Mais attendu que si l'article L. 1226-6 du code du travail exclut l'application de la législation protectrice des victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle aux rapports entre un employeur et un salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle survenu ou contractée au service d'un autre employeur, le salarié peut prétendre au bénéfice de la protection légale dès lors qu'il existe un lien de causalité entre la rechute de l'accident du travail initial et ses conditions de travail ou tout autre événement inhérent à ses fonctions au service du nouvel employeur ;
Et attendu qu'après avoir relevé que les certificats d'arrêts de travail délivrés à partir du 30 avril 2009 mentionnaient une rechute et visaient expressément l'accident du travail du 24 janvier 2007 et les deux employeurs, la cour d'appel, qui a constaté que le salarié s'était à nouveau blessé à la cheville gauche, en 2008 et en 2009, en descendant de son camion, dans des circonstances et avec des blessures similaires à celles de l'accident du travail survenu chez le précédent employeur, a, sans encourir les griefs du moyen, légalement justifié sa décision ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Altead Augizeau aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Altead Augizeau et condamne celle-ci à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six mai deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Altead Augizeau
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que, dans le cadre de la rupture du contrat de travail, M. Philippe X... aurait dû bénéficier de la protection spécifique prévue pour un salarié victime d'un accident du travail et d'AVOIR, en conséquence, condamné la société Altead Augizeau à verser au salarié la somme de 957, 19 euros nets au titre de l'indemnité spéciale de licenciement, en application de l'article L 1226-14 du code du travail et la somme de 22. 462, 30 € au titre de l'article L. 1226-15 du code du travail, outre des indemnités compensatrices de préavis et les congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QUE « contrairement à ce que soutient la société Altead Auzigeau le lien de causalité est suffisamment établi entre l'accident du travail subi pat M. X... le 24 janvier 2007 et son inaptitude constatée aux termes des deux visites de reprises en avril 2010, dès lors que, d'une part, les certificats d'arrêt de travail délivrés à partir du 30 avril 2009 mentionnent une rechute, et visent expressément l'accident du travail du 24 janvier 2007, en désignant le précédent employeur actuel et, d'autre part, la précédente rechute en date du 30 janvier 2008, avait justifié un arrêt de travail mais aussi une déclaration d'accident du travail, non contestée par l'employeur ; qu'en outre, la société Altead Auzigeau s'est abstenue de faire passer une visite médicale préalable à l'embauche de M. X..., ce qui n'a pas permis, comme prévu par l'article R 4624-11 du code du travail, de vérifier son état de santé, ses éventuelles fragilités, son aptitude au poste de travail envisagé et de limiter ainsi certaines de ses fonctions ; qu'or le salarié s'est à nouveau blessé à la cheville gauche, en 2008 et en 2009, en descendant de son camion, circonstances et blessures similaires à celles de l'accident de 2007 ; qu'en conséquence, la cour confirmera la décision déférée en ce qu'elle a retenu la réalité d'une rechute de l'accident du travail du 24 janvier 2007 » ;
ET AUX MOTIFS éventuellement ADOPTES QU'« après vérification du certificat d'arrêt de travail de rechute établi le 31 janvier 2008 par le Docteur Y... de la Clinique Sud Vendée, le Conseil relève que Monsieur X... a de nouveau été victime d'un accident du travail qui s'est traduit par une rechute de précédentes blessures à la jambe survenues le 24 janvier 2007 chez un précédent employeur ; que l'indication portée sur ce certificat par ce Docteur sur le caractère professionnel de l'accident (rechute) n'a jamais fait l'objet d'une quelconque contestation de la part de la société AUGIZEAU, sauf en ce qu'elle considère que le lien de causalité n'a jamais été établi par le salarié entre l'accident du travail survenu chez un précédent employeur et les fonctions occupées par ce conducteur au sein de ladite société AUGIZEAU ; que cependant si, selon l'article L. 1226-6 du code du travail, les dispositions relatives à l'accident du travail ou maladie professionnelle ne sont pas applicables aux rapports entre un employeur et son salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, survenue ou contractée au service d'un autre employeur, il n'en demeure pas moins vrai que d'une part, la société AUGIZEAU a cru bon devoir s'exonérer de l'obligation de faire passer la visite médicale d'embauche à Monsieur X... et que d'autre part, elle ne conteste pas non plus, que la nature de l'accident de son conducteur, survenu dans le cadre stricte d'une journée normale de travail au cours de l'exercice de ses fonctions, est d'origine professionnelle ; qu'au terme de l'arrêt de travail du 31 janvier 2008, Monsieur X..., sur convocation de la médecine du travail, a effectué consécutivement les 6 et 20 avril 2010, les deux visites médicales obligatoires de reprises du travail, aux termes desquelles, le médecin du travail a conclu (fiche d'aptitude du 20/ 04), " Inapte à tous les postes-de conducteur PL " confirmation de l'avis d'inaptitude du 06/ 04/ 2010 " ; qu'il appartenait dès lors à la société ALTEAD AUGIZEAU, parfaitement informée de la situation professionnelle et personnelle à laquelle son conducteur routier se trouvait de nouveau confronté, de tout mettre en oeuvre pour reclasser ou tenter de reclasser son salarié dans les conditions prévues par les dispositions de l'article L. 1226-10 du code du travail, étant ici précisé que l'employeur est en la matière, tenu par une obligation de moyens mais pas de résultat ; mais qu'en l'espèce, le Conseil, après s'être attaché à vérifier scrupuleusement le contenu des courriers échangés entre le représentant de la société AUGIZEAU et le Docteur Z..., du service médical de santé au travail, entre les 6 et 20 avril 2010, période des deux semaines réglementaires entre les deux examens médicaux obligatoires de reprise devant leur permettre de rechercher à reclasser Monsieur X..., constate que, contrairement à ce qu'elle a toujours soutenu, la société ALTEAD AUGIZEAU n'a à aucun moment manifesté sa volonté d'essayer par tous moyens, de tenter de reclasser son salarié au sein de ses effectifs tel que le prouve le contenu du courrier du 15 avril 2010 de Madame A... du Service des Ressources Humaines directement adressé au Service Médical du Travail, selon lequel : « suite à la réception de votre courrier concernant votre avis d'inaptitude temporaire comme chauffeur poids lourds pour M. X... Philippe et préconisant un poste sédentaire, nous vous informons que compte tenu de la conjoncture économique incertaine, nous sommes dans l'impossibilité d'augmenter nos charge de structures, aucun poste de sédentaire n'est disponible. En cas d'inaptitude sur un poste de conduite PL ou VP, nous serons contraints d'engager une procédure de licenciement pour inaptitude physique en l'absence de toute possibilité de reclassement ; qu'en invoquant ainsi et de façon particulièrement maladroite son impossibilité de reclasser son conducteur en raison d'un motif lié à la conjoncture économique ainsi qu'à l'impossibilité d'augmenter les charges de structures, la société de transport ALTEAD AUGIZEAU à marquer sa volonté de se soustraire intentionnellement à son obligation de recherche active et sérieuse de reclassement de son salarié devenu inapte à tous postes de conducteur et à manquer gravement à son obligation de loyauté envers ce dernier, en voulant échapper à toute contrainte relatives à la mise en oeuvre des dispositions de l'article L. 1226-10 du code du travail, ainsi que de la jurisprudence en découlant : " Un employeur ne peut pas licencier pour motif économique un salarié déclaré inapte par le médecin du travail à tenir son emploi " il doit respecter les obligations résultant de l'article L. 1226-1 a du Code du travail (cass. soc. 14 mars 2000, n° 98-41. 556, BC V n° 103) " ; que dès lors, il apparaît clairement pour le Conseil que la société ALTEAD AUGIZEAU a volontairement méconnu les dispositions de l'article L. 1226-12 du code du travail en son second alinéa, selon lesquelles : " L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un autre emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions. " ; qu'en l'espèce, force est de constater que cet employeur est dans l'incapacité de justifier de son impossibilité de proposer un emploi, puisqu'il a violé les textes de loi susvisés en se détournant de ses responsabilités, peu important les constatations et autres recommandations faites par le médecin du travail ; qu'au vu de tout ce qui précède et compte tenu de l'inobservation de l'obligation de reclassement et à tout le moins de tentative de recherche de reclassement de cet employeur au regard de la situation de Monsieur X..., son salarié, le Conseil s'accorde pour dire que la rupture du contrat de travail de Monsieur X... notifiée par courrier recommandé le 18 mai 2010 est intervenue au mépris des règles applicables édictées par les articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du code du travail et juger Monsieur Philippe X... parfaitement fondé dans sa demande au bénéfice de la protection spécifique liée aux victimes d'accident du travail et/ ou maladie professionnelle en cas de rupture abusive du contrat de travail ; que par une juste application des dispositions des articles L. 1226-14 et L. 1226-15 du code du travail, le Conseil de Prud'hommes de la Roche sur Yon y fera droit et lui accordera au titre de ces dispositions légales, l'intégralité des sommes demandées ainsi chiffrées au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, soit la somme de 3. 743, 80 € bruts, à laquelle il conviendra d'y ajouter les congés payés ainsi que celle résultant du calcul de l'indemnité spéciale de licenciement, soit la somme de 957, 19 € nets et enfin lui allouera par application des dispositions de l'article L. 1226-15 du code du travail, en son alinéa 3, l'indemnité prévue équivalent à 12 mois de salaires, soit la somme de 22. 462, 30 € nets ainsi chiffrée » ;
1°) ALORS QUE les dispositions relatives aux accidents du travail ne sont pas applicables aux rapports entre un employeur et son salarié victime d'un accident du travail survenu au service d'un autre employeur ; que ces dispositions sont, par exception, opposables au nouvel employeur à la condition qu'il soit établi que la rechute de l'accident du travail trouve sa cause dans ses conditions de travail ou tout autre événement inhérent à des fonctions au service du nouvel employeur ; qu'il appartient au juge de caractériser le lien de causalité entre la rechute et les conditions de travail effectives du salarié ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, pour décider que M. X... pouvait se prévaloir du régime de protection applicable aux salariés victimes d'accident du travail au titre de l'accident survenu chez son précédent employeur, a retenu que la société Altead Augizeau s'était abstenue de faire passer au salarié la visite médicale d'embauche qui aurait permis de vérifier l'adéquation de son état de santé avec son nouveau poste, voire d'aménager celui-ci pour assurer cette adéquation ; qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, après avoir elle-même constaté que le salarié avait été déclaré apte à ses fonctions lors de la visite de reprise du 2 février 2009, ce qui étai de nature à établir l'absence d'une quelconque incidence de l'absence de visite médicale d'embauche sur l'existence alléguée d'un lien causal entre les fonctions chez le nouvel employeur et l'accident survenu chez le précédent employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 1226-6 du code du travail ;
2°) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut au défaut de motifs ; que la société Altead Augizeau indiquait précisément dans ses écritures d'appel (page 4 § 3) qu'aucun lien de causalité ne pouvait exister entre la rechute d'accident du travail et les conditions de travail de M. X... puisque le médecin du travail l'avait déclaré apte en février 2009 à la suite de la première suspension du contrat de travail ; qu'en décidant, sans répondre à ce chef pertinent des conclusions de l'exposante, qui était pourtant de nature à influer sur la solution du litige, que M. X... pouvait prétendre au régime de protection spéciale attaché aux accidents du travail, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
3°) ET ALORS QUE le juge a l'obligation d'indiquer l'origine des constatations de fait prises hors des conclusions des parties ; qu'en retenant, pour faire application à la rupture du contrat de travail de M. X... le régime du licenciement des salariés victimes d'un accident du travail, que l'arrêt de travail en date du 30 janvier 2008 avait donné lieu à une déclaration d'accident du travail, sans expliquer d'où elle tirait ce fait qui ne ressortait nullement des conclusions des parties, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 1226-6 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit qu'en raison du manquement de la société Altead Augizeau à son obligation de reclassement de M. X..., le licenciement pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'AVOIR, en conséquence, condamné la société Altead Augizeau à verser au salarié les sommes de 22. 462, 30 euros au titre du manquement à l'obligation de reclassement, 3. 743, 80 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents et 957, 19 euros au titre de l'indemnité spéciale de licenciement en application de l'article L 1226-14 du code du travail ;
AUX MOTIFS QUE « l'article L 1226-2 du code du travail prévoit notamment que lorsque le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait antérieurement à ses arrêts de travail, l'employeur lui propose un autre poste approprié à ses capacités ; que cette obligation de reclassement de droit commun à la charge de l'employeur est renforcée lorsque l'inaptitude résulte d'un accident du travail ou d'une rechute, cas de l'espèce, et c'est donc à juste titre que les premiers juges ont fait application du régime protecteur défini par les articles L 1226-10 et L 1226-12 du code du travail ; qu'en l'espèce, la société Altead Augizeau a effectivement consulté le médecin du travail et est fondée à relever certaines contradictions dans les réponses apportées par ce dernier ; qu'en effet, si l'inaptitude a été limitée à la conduite des véhicules poids lourds dans les avis exprimés après les visites médicales du 6 avril et 20 avril 2010, le même médecin a, par courriers du 7 avril 2010, 13 avril 2010 et 29 avril 2010, de manière constante et réitérée, répondu à la société Altead Augizeau que M. X... était inapte à la conduite de tout véhicule, poids lourds et véhicule d'accompagnement, mais aussi à toute activité de mécanique automobile ou poids lourd, à savoir entretien, réparation et dépannage, et à toute activité obligeant à des déambulations importantes ; que le médecin du travail a expressément informé l'employeur que seul un emploi sédentaire, concernant un poste de travail assis, ou à des déambulations réduites, pouvait être envisagé, type affrètement ou poste administratif ; qu'il ne peut donc être reproché à la société Altead Augizeau confrontée à des recommandations du médecin du travail, beaucoup plus restrictives que l'avis d'inaptitude, d'avoir recherché un reclassement uniquement sur un poste sédentaire, le choix inverse ayant été de nature à méconnaître les intérêts du salarié et l'obligation de sécurité et de résultat due par l'employeur ; qu'en revanche, pour établir la réalité des recherches de reclassement sur un poste sédentaire, la société Altead Augizeau produit seulement un mail en date du 8 avril 2010, adressé à vingt six personnes dont la cour n'est pas en mesure de vérifier les fonctions ni même l'appartenance au groupe Altead ; qu'en outre, les termes de ce mail sont très généraux, dès lors qu'ils ne précisent pas notamment l'âge, le salaire et les compétences professionnelles de M. X... et mentionnent de manière très lapidaire « la recherche d'un reclassement sur un poste sédentaire et/ ou administratif pour un chauffeur poids lourds en cours de reconnaissance d'inaptitude », ce qui ne peut constituer une recherche de reclassement précise et personnalisée ; que de même, de manière insuffisante, la société Altead Augizeau ne communique que deux réponses à ce mail, sans démontrer qu'aucun poste sédentaire et/ ou administratif n'était disponible dans le groupe ; enfin, dans ce contexte peu probant, la directrice des ressources humaines de la société Altead Augizeau a fait valoir auprès de la médecine du travail, par lettre en date du 15 avril 2010, l'impossibilité d'augmenter les charges de structure, compte tenu de la conjoncture économique et de l'absence de poste sédentaire disponible, pour conclure à l'impossibilité de reclassement sur un poste sédentaire, ce qui caractérise une méconnaissance des obligations de l'employeur dans l'hypothèse d'une invalidité consécutive à un accident du travail ou une rechute ; qu'en conséquence, la cour confirmera la décision déférée sur l'appréciation du licenciement sauf à dire que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et non fallacieux » ;
ET AUX MOTIFS éventuellement ADOPTES QU'« après vérification du certificat d'arrêt de travail de rechute établi le 31 janvier 2008 par le Docteur Y... de la Clinique Sud Vendée, le Conseil relève que Monsieur X... a de nouveau été victime d'un accident du travail qui s'est traduit par une rechute de précédentes blessures à la jambe survenues le 24 janvier 2007 chez un précédent employeur ; que l'indication portée sur ce certificat par ce Docteur sur le caractère professionnel de l'accident (rechute) n'a jamais fait l'objet d'une quelconque contestation de la part de la société AUGIZEAU, sauf en ce qu'elle considère que le lien de causalité n'a jamais été établi par le salarié entre l'accident du travail survenu chez un précédent employeur et les fonctions occupées par ce conducteur au sein de ladite société AUGIZEAU ; que cependant si, selon l'article L. 1226-6 du code du travail, les dispositions relatives à l'accident du travail ou maladie professionnelle ne sont pas applicables aux rapports entre un employeur et son salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, survenue ou contractée au service d'un autre employeur, il n'en demeure pas moins vrai que d'une part, la société AUGIZEAU a cru bon devoir s'exonérer de l'obligation de faire passer la visite médicale d'embauche à Monsieur X... et que d'autre part, elle ne conteste pas non plus, que la nature de l'accident de son conducteur, survenu dans le cadre stricte d'une journée normale de travail au cours de l'exercice de ses fonctions, est d'origine professionnelle ; qu'au terme de l'arrêt de travail du 31 janvier 2008, Monsieur X..., sur convocation de la médecine du travail, a effectué consécutivement les 6 et 20 avril 2010, les deux visites médicales obligatoires de reprises du travail, aux termes desquelles, le médecin du travail a conclu (fiche d'aptitude du 20/ 04), " Inapte à tous les postes-de conducteur PL " confirmation de l'avis d'inaptitude du 06/ 04/ 2010 " ; qu'il appartenait dès lors à la société ALTEAD AUGIZEAU, parfaitement informée de la situation professionnelle et personnelle à laquelle son conducteur routier se trouvait de nouveau confronté, de tout mettre en oeuvre pour reclasser ou tenter de reclasser son salarié dans les conditions prévues par les dispositions de l'article L. 1226-10 du code du travail, étant ici précisé que l'employeur est en la matière, tenu par une obligation de moyens mais pas de résultat ; mais qu'en l'espèce, le Conseil, après s'être attaché à vérifier scrupuleusement le contenu des courriers échangés entre le représentant de la société AUGIZEAU et le Docteur Z..., du service médical de santé au travail, entre les 6 et 20 avril 2010, période des deux semaines réglementaires entre les deux examens médicaux obligatoires de reprise devant leur permettre de rechercher à reclasser Monsieur X..., constate que, contrairement à ce qu'elle a toujours soutenu, la société ALTEAD AUGIZEAU n'a à aucun moment manifesté sa volonté d'essayer par tous moyens, de tenter de reclasser son salarié au sein de ses effectifs tel que le prouve le contenu du courrier du 15 avril 2010 de Madame A... du Service des Ressources Humaines directement adressé au Service Médical du Travail, selon lequel : « suite à la réception de votre courrier concernant votre avis d'inaptitude temporaire comme chauffeur poids lourds pour M. X... Philippe et préconisant un poste sédentaire, nous vous informons que compte tenu de la conjoncture économique incertaine, nous sommes dans l'impossibilité d'augmenter nos charge de structures, aucun poste de sédentaire n'est disponible. En cas d'inaptitude sur un poste de conduite PL ou VP, nous serons contraints d'engager une procédure de licenciement pour inaptitude physique en l'absence de toute possibilité de reclassement ; qu'en invoquant ainsi et de façon particulièrement maladroite son impossibilité de reclasser son conducteur en raison d'un motif lié à la conjoncture économique ainsi qu'à l'impossibilité d'augmenter les charges de structures, la société de transport ALTEAD AUGIZEAU à marquer sa volonté de se soustraire intentionnellement à son obligation de recherche active et sérieuse de reclassement de son salarié devenu inapte à tous postes de conducteur et à manquer gravement à son obligation de loyauté envers ce dernier, en voulant échapper à toute contrainte relatives à la mise en oeuvre des dispositions de l'article L. 1226-10 du code du travail, ainsi que de la jurisprudence en découlant : " Un employeur ne peut pas licencier pour motif économique un salarié déclaré inapte par le médecin du travail à tenir son emploi " il doit respecter les obligations résultant de l'article L. 1226-1 a du Code du travail (cass. soc. 14 mars 2000, n° 98-41. 556, BC V n° 103) " ; que dès lors, il apparaît clairement pour le Conseil que la société ALTEAD AUGIZEAU a volontairement méconnu les dispositions de l'article L. 1226-12 du code du travail en son second alinéa, selon lesquelles : " L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un autre emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions. " ; qu'en l'espèce, force est de constater que cet employeur est dans l'incapacité de justifier de son impossibilité de proposer un emploi, puisqu'il a violé les textes de loi susvisés en se détournant de ses responsabilités, peu important les constatations et autres recommandations faites par le médecin du travail ; qu'au vu de tout ce qui précède et compte tenu de l'inobservation de l'obligation de reclassement et à tout le moins de tentative de recherche de reclassement de cet employeur au regard de la situation de Monsieur X..., son salarié, le Conseil s'accorde pour dire que la rupture du contrat de travail de Monsieur X... notifiée par courrier recommandé le 18 mai 2010 est intervenue au mépris des règles applicables édictées par les articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du code du travail et juger Monsieur Philippe X... parfaitement fondé dans sa demande au bénéfice de la protection spécifique liée aux victimes d'accident du travail et/ ou maladie professionnelle en cas de rupture abusive du contrat de travail ; que par une juste application des dispositions des articles L. 1226-14 et L. 1226-15 du code du travail, le Conseil de Prud'hommes de la Roche sur Yon y fera droit et lui accordera au titre de ces dispositions légales, l'intégralité des sommes demandées ainsi chiffrées au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, soit la somme de 3. 743, 80 € bruts, à laquelle il conviendra d'y ajouter les congés payés ainsi que celle résultant du calcul de l'indemnité spéciale de licenciement, soit la somme de 957, 19 € nets et enfin lui allouera par application des dispositions de J'article L. 1226-15 du code du travail, en son alinéa 3, l'indemnité prévue équivalent à 12 mois de salaires, soit la somme de 22. 462, 30 € nets ainsi chiffrée » ;
1°) ALORS QUE l'employeur confronté à l'inaptitude du salarié doit procéder à une recherche personnalisée, précise et loyale des possibilités de reclassement dans un poste conforme à ses capacités ; que la preuve est libre en matière prud'homale ; que pour démontrer la réalité et le sérieux des recherches de reclassement de M. X..., l'employeur produisait aux débats un mail en date du 8 avril 2010 par lequel le directeur des ressources humaines sollicitait les responsables d'agence à des fins de reclassement dans leurs unités ; qu'en jugeant dénuée de force probante ce mail au prétexte qu'il ne permettait pas d'identifier les fonctions de ses destinataires et leur appartenance au groupe Altead, la cour d'appel, qui a subordonné le caractère probant de cette pièce à des exigences de fond, a violé le principe de liberté de la preuve en matière prud'homale ;
2°) ALORS QUE l'employeur confronté à l'inaptitude du salarié doit procéder à une recherche personnalisée et loyale des possibilités de reclassement dans un poste conforme à ses capacités ; que la preuve est libre en matière prud'homale ; que pour démontrer la réalité et le sérieux des recherches de reclassement de M. X..., l'employeur produisait aux débats un mail en date du 8 avril 2010 par lequel le directeur des ressources humaines sollicitait les responsables d'agence à des fins de reclassement de M. X... dans leurs unités ; qu'en jugeant dénuée de force probante ce mail au prétexte qu'il ne comportait aucune mention de l'âge, du salaire et des compétences professionnelles du salarié, la cour d'appel qui a subordonné le caractère probant de cette pièce à des exigences de fond, a violé le principe de liberté de la preuve en matière prud'homale ;
3°) ALORS QUE les juges ne peuvent écarter les prétentions d'une partie sans analyser l'ensemble des documents fournis par elle à l'appui de ses prétentions ; qu'en l'espèce, la société Altead Augizeau faisait valoir qu'il ressortait notamment de la convocation à un entretien personnel par lettre en date du 23 avril 2010 qu'elle avait mis tout en oeuvre pour reclasser M. X... à la suite de l'avis d'inaptitude ; qu'en affirmant péremptoirement, pour décider que l'employeur n'avait pas exécuté son obligation de reclassement et faire droit, en conséquence, aux demandes du salarié, que l'employeur n'avait procédé à aucune recherche précise et personnalisée de reclassement, sans à aucun moment analyser, ne serait-ce que sommairement, le courrier en date du 23 avril 2010, régulièrement produit aux débats par l'exposante, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°) ALORS QUE les juges ne peuvent écarter les prétentions d'une partie sans analyser l'ensemble des documents fournis par elle à l'appui de ses prétentions ; qu'en l'espèce, la société Altead Augizeau faisait valoir qu'il ressortait notamment d'un mail en date du 12 mai 2010 que le directeur des ressources humaines avait relancé par téléphone les responsables d'agence en l'absence de réponse aux précédentes sollicitations en vue du reclassement de M. X... ; qu'en affirmant péremptoirement, pour décider que l'employeur n'avait pas exécuté son obligation de reclassement et faire droit, en conséquence, aux demandes du salarié, que l'employeur n'avait procédé à aucune recherche précise et personnalisée de reclassement, sans à aucun moment analyser, ne serait-ce que sommairement, le mail en date du 12 mai 2010, régulièrement produit aux débats par l'exposante, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5°) ALORS QUE les juges ne peuvent écarter les prétentions d'une partie sans analyser l'ensemble des documents fournis par elle à l'appui de ses prétentions ; qu'en l'espèce, l'exposante produisait, pour démontrer l'absence de poste disponible aux fins de reclasser M. X..., un mail du directeur général en date du 22 avril 2010 indiquant qu'aucune solution de reclassement n'existait sur un poste sédentaire ou administratif ; qu'en affirmant péremptoirement, pour décider que l'employeur n'avait pas exécuté son obligation de reclassement et faire droit, en conséquence, aux demandes du salarié, que la société Altead Augizeau ne justifiait pas de l'absence de poste sédentaire ou administratif disponible dans le groupe aux fins de reclassement de M. X..., sans à aucun moment analyser, ne serait-ce que sommairement, le mail du 22 avril 2010, régulièrement produit aux débats par l'exposante, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
6°) ALORS QUE l'obligation qui incombe à l'employeur de rechercher un reclassement pour le salarié déclaré définitivement inapte à son poste de travail ne peut le contraindre à créer un emploi sans utilité pour l'entreprise ou ne correspondant pas à ses besoins fonctionnels ; qu'en l'espèce, eu égard à la situation économique de l'entreprise et du secteur d'activité, la société Altead Augizeau avait fait savoir, notamment par la voix de sa directrice des ressources humaines, qu'en l'absence de poste disponible correspondant aux capacités du salarié elle ne pourrait, au regard de ses besoins et de ses charges de structure, créer un tel poste uniquement à des fins de reclassement de M. X... ; que la cour d'appel, en jugeant que la société Altead Augizeau avait manqué à son obligation de reclassement en indiquant qu'elle ne pouvait augmenter ses charges de structure, sans prendre en considération la circonstance déterminante tirée de ce que la création d'un poste sédentaire ou administratif ne correspondait pas aux besoins fonctionnels de l'entreprise et n'était pas compatible avec sa situation économique, a violé l'article L. 1226-10 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-24035
Date de la décision : 06/05/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 03 juillet 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 mai. 2015, pourvoi n°13-24035


Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.24035
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