La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/04/2015 | FRANCE | N°13-27464

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 09 avril 2015, 13-27464


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Vu l'article 4, ensemble l'article 386 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que la société Charaf Corporation (la société Charaf), propriétaire d'une cargaison endommagée lors d'un transport maritime, et son assureur, la société Axa assurances Maroc (la société Axa), ont obtenu en référé la désignation d'un expert au contradictoire des sociétés Mahoney Shipping et Marine services (la s

ociété Mahoney), propriétaire armateur du navire, Cotesworth insurance services (...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Vu l'article 4, ensemble l'article 386 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que la société Charaf Corporation (la société Charaf), propriétaire d'une cargaison endommagée lors d'un transport maritime, et son assureur, la société Axa assurances Maroc (la société Axa), ont obtenu en référé la désignation d'un expert au contradictoire des sociétés Mahoney Shipping et Marine services (la société Mahoney), propriétaire armateur du navire, Cotesworth insurance services (la société Cotesworth), assureur, Lloyd's Register of Shipping, société de classification du navire, puis ont assigné au fond ces sociétés et la société HIH Corporate Syndicate 1688 (la société HIH), assureur, aux droits de laquelle se trouve la société Syndicate 5678 (la société Syndicate) ; que les sociétés HIH et Cotesworth ont soulevé la péremption de l'instance ;
Attendu que, pour accueillir l'incident, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que le délai de péremption courant à compter du 30 mars 2004 n'a pu être interrompu par les conclusions du 27 mars 2006 qui ne sont que la reprise de celles antérieures du 25 mai 2004 et ne sauraient constituer en tant que telles une diligence procédurale de nature à faire évoluer le dossier ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'en précisant que les opérations d'expertise n'étaient pas terminées, qu'une réunion contradictoire se tiendrait le 10 avril 2006 et qu'elles étaient dans l'attente du rapport d'expertise, les sociétés Charaf et Axa ne s'étaient pas bornées à reprendre leurs précédentes écritures et avaient manifesté clairement leur volonté de poursuivre l'instance, la cour d'appel a dénaturé leurs conclusions et violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 juillet 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;
Condamne les sociétés Mahoney, Cotesworth, Lloyd's Register of Shipping et Syndicate aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Syndicate, condamne in solidum les sociétés Mahoney, Cotesworth, Lloyd's Register of Shipping et Syndicate à payer à la société Charaf et à la société Axa la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf avril deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour la société Axa assurances Maroc et la société Charaf Corporation.
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir constaté la péremption des instances introduites par les sociétés Charaf Corporation et AXA Assurances Maroc, enrôlées devant le tribunal de commerce sous les numéros 200/002700 et 2001/002239 ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'aux termes de l'article 386 du code de procédure civile, l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans ; que pour être interruptif de péremption, un acte doit faire partie de l'instance et manifester la volonté de la partie qui l'accomplit, de la faire progresser ; que le premier juge a relevé à bon droit qu'aucune diligence de nature à interrompre la péremption de l'instance n'avait été accomplie, dans le dossier de fond, depuis le prononcé de l'arrêt confirmatif rendu par la cour d'appel le 30 mars 2004 ; qu'en effet, les conclusions en date du 27 mars 2006 ne sont que la reprise de conclusions antérieure et ne sauraient constituer en tant que telles une diligence procédurale de nature à faire évoluer le dossier et donc à interrompre la péremption ; que toutefois, les actes effectués dans le cadre d'une expertise dont dépend l'instance au fond, eût-elle été ordonnée en référé, sont susceptibles d'interrompre la péremption, à l'encontre des parties appelées aux opérations d'expertise ; qu'il est constant que HIH n'a pas été appelé aux opérations de M. X... ; que les actes accomplis dans le cadre de l'expertise ne peuvent donc avoir eu aucun effet interruptif vis-à-vis de cette partie ; que la péremption d'instance étant par nature indivisible, et cette péremption, demandée par l'une quelconque des parties étant de droit, Syndicate 5678, qui intervient à la présente procédure en représentation de HIH, qui avait lui-même soulevé cette exception devant le premier juge par conclusions du 7 septembre 2007 est fondé à s'en prévaloir ; que le jugement querellé doit donc être confirmé en ce qu'il a constaté la péremption de l'instance ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'aucune diligence de nature à interrompre la péremption de l'instance n'a été accomplie depuis le prononcé de l'arrêt d'appel confirmatif rendu par la cour d'appel de Rennes le 30 mars 2004 ; que les conclusions du 27 mars 2006 reçues au greffe le 29 mars 2006 sont la reprise des conclusions antérieures ; que ce n'est que le 24 juin 2006 que la société Charaf a déposé de nouvelles conclusions ; que les conclusions déposées le 29 mars ne constituent pas en tant que telles une diligence procédure de nature à interrompre la péremption ; qu'elle n'était pas de nature à faire évoluer le dossier ; que la société Charaf n'était pas elle-même manifestement convaincue puisqu'elle a notifié de nouvelles conclusions en date du 24 mai 2004 et reçues au greffe le 25 mai 2004 ; qu'il est de jurisprudence constante que, dans ce cas de figure, la prescription de l'instance est acquise ;
ALORS QUE, D'UNE PART, dans le cas où le dénouement de l'instance au fond dépend du résultat d'une expertise judiciaire, la partie qui, tout en faisant parallèlement diligence à l'égard de l'expert judiciaire, a conclu au fond avant l'expiration du délai de deux ans, à l'effet de réitérer les demandes précédemment formulées dans l'attente du résultat de l'expertise judiciaire, manifeste par-là même sa volonté de poursuivre l'instance en cours et ne saurait dès lors s'exposer à la sanction de l'absence de toute diligence que constitue la péremption ; qu'en déniant néanmoins tout effet interruptif aux conclusions prises par les sociétés Charaf Corporation et Axa Assurances Maroc le 27 mars 2006, au motif qu'elles ne seraient que la reprise de leurs conclusions antérieures et ne constitueraient pas une diligence procédurale de nature à faire évoluer le dossier, cependant qu'aucune autre diligence de nature à faire progresser l'affaire au fond ne pouvait être mise à la charge des demanderesses dès lors que la progression et le dénouement de la procédure étaient subordonnés au résultat de l'expertise judiciaire en cours, la cour viole les articles 386 du code de procédure civile et 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, les conclusions déposées le 27 mars 2006 étaient nettement plus développées et ajoutaient à maints égards aux conclusions que les sociétés Charaf Corporation et Axa Assurances Maroc avaient précédemment fait notifier en mai 2004 ; que notamment, tout en rappelant que les demanderesses maintenaient l'intégralité de leurs demandes dans l'attente du rapport d'expertise judiciaire, demandes reprises dans le dispositif des écritures, elles rendaient compte au tribunal de l'évolution de l'expertise en cours, précisant que le rapport d'expertise n'était pas encore disponible et qu'une nouvelle réunion d'expertise contradictoire devait encore se tenir à Brest le 10 avril 2006 (v. notamment lesdites écritures du 27 mars 2006, page 3, § n° 6 et 7 et p.4) ; qu'en considérant néanmoins que les conclusions du 27 mars 2006 ne constituaient que la reprise des conclusions antérieures, la cour statue au prix d'une éclatante dénaturation desdites écritures, violant ce faisant l'article 4 du code de procédure civile ;
ET ALORS QUE, ENFIN, en raison même du caractère indivisible de la péremption, les actes interruptifs accomplis à l'égard de certaines parties suffisent à tenir en échec la péremption à l'égard de toutes ; qu'en considérant au contraire que les actes interruptifs accomplis dans le cadre de la procédure d'expertise à l'égard des autres parties n'étaient pas opposables à la société Syndicate 5678, venant aux droits de la société HIH, qui elle-même n'était pas partie à la procédure d'expertise, pour en déduire que la péremption était acquise à l'égard de cette dernière et qu'elle contaminait l'instance tout entière, la cour attache à l'indivisibilité de la péremption, qui a pour corollaire l'indivisibilité des actes interruptifs de péremption, des conséquences inverses à celles que cette indivisibilité emportait, violant derechef les articles 386 du code de procédure civile et 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.


Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 04 juillet 2013


Publications
Proposition de citation: Cass. Civ. 2e, 09 avr. 2015, pourvoi n°13-27464

RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : Me Blondel, Me Foussard, SCP Delaporte, Briard et Trichet

Origine de la décision
Formation : Chambre civile 2
Date de la décision : 09/04/2015
Date de l'import : 15/09/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 13-27464
Numéro NOR : JURITEXT000030471350 ?
Numéro d'affaire : 13-27464
Numéro de décision : 21500575
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2015-04-09;13.27464 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award