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12/03/2015 | FRANCE | N°14-13485

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 12 mars 2015, 14-13485


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 411-1, L. 433-1, R. 441-11, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, du code de la sécurité sociale et L. 1110-4 du code de la santé publique ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que M. X..., docker professionnel salarié de la société Gemfos, a été victime, le 13 juin 2005, d'un accident, déclaré sans réserves le 14 juin suivant par l'employeur et pris en charge au titre de la législation professionnell

e, sans mesure d'instruction, par la caisse primaire centrale d'assurance malad...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 411-1, L. 433-1, R. 441-11, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, du code de la sécurité sociale et L. 1110-4 du code de la santé publique ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que M. X..., docker professionnel salarié de la société Gemfos, a été victime, le 13 juin 2005, d'un accident, déclaré sans réserves le 14 juin suivant par l'employeur et pris en charge au titre de la législation professionnelle, sans mesure d'instruction, par la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône (la caisse) ; que l'employeur a contesté devant une juridiction de sécurité sociale l'opposabilité de l'ensemble des prestations afférentes à cet accident ;
Attendu que, pour accueillir le recours, l'arrêt énonce qu'il résulte du droit de toute personne à un procès équitable ainsi qu'au respect de ses biens que l'employeur doit avoir connaissance de l'ensemble des pièces, y compris des pièces médicales que la caisse a eu en sa possession pour prendre les décisions de prise en charge et d'arrêts de travail, de sorte qu'il appartient aux organismes de sécurité sociale, à peine d'inopposabilité des prestations litigieuses à l'employeur, de produire tous les éléments médicaux communiqués par le salarié à l'appui de sa demande portant sur ces prestations, ce qui, en l'espèce, n'a pas été fait ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'aucun texte n'obligeait la caisse à une telle communication, contraire à la protection du secret médical et au respect de la vie privée, la cour d'appel, à laquelle il appartenait de recourir à une mesure d'instruction en commettant un médecin-expert si elle s'estimait insuffisamment informée, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 janvier 2014, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne la société Gemfos aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Gemfos ; la condamne à payer à la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône la somme de 2 800 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze mars deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Boutet-Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône.
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que les soins et arrêts de travail pris en charge par la caisse primaire centrale des Bouches du Rhône au titre professionnel suite à l'accident du travail de Monsieur X... du 13 juin 2005, ne sont pas opposables à la société GEMFOS, et ce, avec toutes conséquences de droit,
AUX MOTIFS QUE « Didier X..., docker professionnel mensualisé, a subi un accident du travail le 13 juin 2005 qui a fait l'objet d'une déclaration d'accident du 14juin 2005 mentionnant «en montant à bord de la péniche, je me suis tordu la cheville sur la coupée» ; que le certificat médical initial du 13 juin 2005 atteste : « Entorse de la cheville gauche» ; que pour autant, il est constant que la consolidation n'est intervenue que le 10 juillet 2006, soit 354 jours plus tard ; qu'il ressort des pièces du dossier que la Caisse a, sans instruction préalable, reconnu le caractère professionnel de l'accident de Monsieur X... ; que c'est à la date du 24 septembre 2008 que la société employeur a saisi la CRA de la caisse aux fins de contestation de la prise en charge au titre professionnel par la caisse, de l'ensemble des prestations ayant fait suite à cet accident ; que plus précisément la société employeur a saisi la commission de recours amiable en inopposabilité de l'ensemble des indemnités journalières versées à Monsieur X... ; que l'employeur fait ainsi valoir que les indemnités journalières versées au salarié ne sauraient lui être opposables, car les lésions initiales étaient bénignes et ne pouvaient entraîner une incapacité professionnelle de longue durée; que le traumatisme dont s'agit entraîne habituellement une incapacité de quelques semaines et non d'une durée de 354 jours comme en l'espèce, selon lui ; qu'à l'appui de ses affirmations l'employeur produit comme document, l'avis du docteur Y... ; que cet avis médico légal rendu le 9 mai 2012 fait ressortir: «il existait une pathologie intriquée pré ou post traumatique à l'accident survenu le 13 juin 2005 ... l'état de santé de Monsieur X... était stabilisé au plus tard 3 mois après la date de l'accident du travail, et les soins et arrêts de travail n'étaient pas contributifs à l'amélioration de son état de santé» ; qu'ainsi, il apparaît que c'est la durée totale de la prise en charge qui, selon l'employeur, ne saurait être imputée en son entier à l'accident de travail initial ; que la société GEMFOS fait valoir par ailleurs qu'elle n'a pas eu un procès équitable, car n'ayant eu aucunement possession des éléments médicaux successifs de son salarié ; que subsidiairement, la société sollicite qu'une expertise médicale judiciaire soit ordonnée aux fins notamment de déterminer les lésions initiales provoquées par l'accident du travail, et de fixer la durée des arrêts de travail et des soins en relation directe et exclusive avec ces lésions ; que la caisse répond que l'employeur ne peut remettre en cause la prise en charge des soins et arrêts de travail consécutifs à un accident de travail, qu'à condition de détruire la présomption d'imputabilité de ceux-ci à l'accident; que tel n'est pas le cas en l'espèce ; que le premier juge, pour rejeter le recours de l'employeur, a entériné cette démonstration de l'organisme social ; toutefois que l'employeur fait valoir que la caisse n'a procédé à aucune communication de pièces ; qu'il ressort effectivement de la rédaction même de la décision du 2 décembre 2008 de la CRA, que «la caisse, après sa décision de prise en charge de l'accident, au titre de l'accident du travail, n'est plus tenue de communiquer à l'employeur le dossier constitué» ; qu'ainsi l'employeur démontre à juste titre qu'il n'a pas eu accès au dossier de l'assuré et n'a pas été placé à égalité vis-à-vis de la caisse dans le débat sur la destruction de la présomption d'imputabilité, alors qu'il soulève des moyens sérieux de contestation en raison de la longueur de l'arrêt de travail ; que l'employeur met alors en évidence les principes sur le droit de toute personne à un procès équitable et au respect de ses biens, principes dégagés par application notamment de l'article 6 § 1 de la convention européenne des droits de l'homme (CEDH) ; qu'indubitablement, il en résulte que l'employeur doit avoir connaissance de l'ensemble des pièces, y compris des pièces médicales que la caisse a eu en sa possession pour prendre les décisions de prise en charge, et d'arrêts de travail ; qu'en l'espèce, l'employeur démontre qu'il a été dans l'impossibilité de connaître la nature des prestations versées par la sécurité sociale à son salarié et imputées à son compte, et ce, de manière à pouvoir en vérifier le bien fondé ; qu'ainsi, il appartient aux organismes de sécurité sociale, sous peine d'inopposabilité des prestations litigieuses à l'employeur, de produire tous les éléments médicaux communiqués par le salarié à l'appui de sa demande portant sur ces prestations ; qu'en l'espèce, comme rappelé ci-dessus, la caisse n'a pas procédé à la communication de ces pièces, et dans ses écritures, se borne à affirmer que l'employeur n'avait ni contesté la matérialité du fait accidentel, ni démontré l'existence d'une cause étrangère au travail du salarié ; qu'il résulte de tout ce qui précède, que les soins et arrêts de travail pris en charge par la caisse au titre professionnel suite à l'accident du travail de Monsieur X..., ne doivent pas être considérés, dans les rapports entre l'employeur et la caisse, comme la conséquence de cet accident du travail, et qu'ils ne sont pas opposables à la société GEMFOS ; qu'il résulte également de ce qui précède, que la demande de mise en place d'une expertise devient sans objet. »
ALORS QUE la présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident du travail dont la matérialité n'est pas contestée s'étend pendant toute la période d'incapacité de travail précédant la consolidation ou la guérison de sorte que, dans ses rapports avec l'organisme social, c'est à l'employeur qu'il appartient de détruire cette présomption en démontrant que les prestations et soins pris en charge ont une cause totalement étrangère au travail ; qu'en l'espèce il n'était pas contesté que la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches du Rhône n'avait initialement été tenue d'aucune obligation d'information vis-à-vis de la société GEMFOS pour avoir reconnu la nature professionnelle de l'accident au seul vu de la déclaration effectuée sans réserve par cet employeur ; qu'aussi, même si la cour d'appel considérait qu'en l'espèce, l'employeur soulevait « des moyens sérieux de contestation en raison de la longueur de l'arrêt de travail » elle n'a pu, faute d'avoir ordonné une quelconque mesure d'instruction, pour dire inopposable à la société GEMFOS la décision de la caisse de prendre en charge à titre professionnel les soins et arrêts de travail litigieux à la suite à l'accident du travail de Monsieur X... du 13 juin 2005, reprocher à la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches du Rhône de n'avoir pas communiqué à l'employeur le dossier médical de l'assuré sans violer ensemble les articles L.411-1, L.433-1 et L.443-1 du Code de la sécurité sociale et 1315 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 14-13485
Date de la décision : 12/03/2015
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 08 janvier 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 12 mar. 2015, pourvoi n°14-13485


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Boutet-Hourdeaux, SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.13485
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