LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 10 octobre 2013), que le 29 septembre 2004, Mme X... et la société Les Constructions d'Aquitaine (LCA) ont signé un contrat de construction de deux maisons individuelles ; que Mme X... ayant refusé de signer la réception, a assigné la société LCA en indemnisation ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société LCA fait grief à l'arrêt de retenir qu'elle était redevable d'une somme de 10 089,10 euros au titre des branchements pour les eaux pluviales, les eaux usées et l'eau potable et de condamner Mme X..., après compensation entre les dettes réciproques des parties, à lui payer la seule somme de 9 218,14 euros, alors, selon le moyen :
1°/ que la notice descriptive annexée au contrat de construction du 29 septembre 2004 prévoyait que les raccordements des différents réseaux de la maison à la limite de propriété étaient compris dans le prix mais stipulait expressément au titre « branchements aux réseaux publics » que « les branchements et raccordements du terrain aux divers réseaux sont exécutés par les services concessionnaires des collectivités locales du lieu de la construction et sont à la charge du vendeur du terrain ou du maître de l'ouvrage, que le coût de cette viabilisation est indiqué par les divers services, EDF, GDF, Lyonnaise des eaux, Mairie, France telecom » ; qu'en condamnant la société LCA à rembourser à Mme X... la somme de 10 089,10 euros réglée à la Lyonnaise des eaux au titre des branchements pour les eaux pluviales, les eaux usées et l'eau potable, motif pris que la notice descriptive annexée au contrat de construction n'indiquait pas que le coût des raccordements de la limite de propriété au réseau devait être supporté par le maître de l'ouvrage, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la notice descriptive et violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ que l'obligation faite au constructeur de maison individuelle de chiffrer le coût des travaux dont le maître de l'ouvrage se réserve l'exécution ne saurait porter sur la part des travaux de raccordement aux infrastructures de service public devant être exécutés en dehors du terrain appartenant au maître de l'ouvrage qui, quoique nécessaires à l'implantation et à l'utilisation de l'immeuble, ne peuvent être réalisés que par l'autorité publique ou son concessionnaire, aux conditions et au prix qu'ils fixent ; qu'en imputant à faute de la société LCA de n'avoir pas chiffré le coût supplémentaire de raccordement au réseau d'eau quand les travaux correspondants, devant être réalisés à l'extérieur du terrain d'implantation de la construction par la seule Lyonnaise des eaux, concessionnaire du réseau, au prix qu'elle fixait, ne pouvaient être chiffrés par le constructeur de maison individuelle, la cour d'appel a violé par fausse application les articles L. 231-2 et R. 231-4 du code de la construction et de l'habitation ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la notice descriptive annexée au contrat de construction prévoyait que le prix forfaitaire comprenait le raccordement des eaux usées et des eaux vannes à l'antenne en attente en limite de propriété, sans chiffrer le coût du raccordement au réseau public ni préciser sur qui devait peser la charge de ces travaux, la cour d'appel en a exactement déduit qu'en l'absence de chiffrage des travaux de branchement nécessaires à l'utilisation de l'immeuble, ceux-ci étaient réputés compris dans le prix forfaitaire convenu et que le constructeur devait en supporter le coût ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le deuxième moyen :
Vu les articles L. 231-2 et R. 231-4 du code de la construction et de l'habitation ;
Attendu que pour mettre à la charge de la société LCA une somme de 8 096,77 euros au titre de coûts des clôtures et condamner, après compensation entre les dettes réciproques des parties, Mme X... à payer à la société LCA la seule somme de 9 218,14 euros, l'arrêt retient que les clôtures ayant été mentionnées dans des pièces complémentaires déposées le 12 avril 2005 en additif au permis de construire et en l'absence d'avenant signé à ce sujet par Mme X..., le coût de ces ouvrages, payé par celle-ci, doit nécessairement être inclus dans le prix forfaitaire de l'immeuble et pris en charge par la société LCA ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le constructeur de maison individuelle n'était pas tenu de réaliser des équipements qui n'étaient ni prévus par le contrat de construction et ses annexes ni indispensables à l'implantation et à l'utilisation de l'immeuble, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le troisième moyen :
Vu l'article 624 du code de procédure civile ;
Attendu que la cassation sur le deuxième moyen entraîne la cassation par voie de conséquence de la disposition qui est critiquée par le troisième moyen ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il met à la charge de la société LCA une somme de 8 096,77 euros au titre de coûts des clôtures et en conséquence constate que Mme X... demeure redevable, au titre du contrat de construction d'une somme de 42 235,50 euros envers la société LCA, que la société LCA est redevable d'une somme de 33 017,36 euros envers Mme X... au titre de ce même contrat et après compensation entre les dettes réciproques des parties, condamne Mme X... à payer à la société LCA la somme 9 218,14 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 7 mars 2008 et confirme le jugement rendu le 27 janvier 2010 par le tribunal de grande instance de Bordeaux en ce qu'il a réduit à la somme de 1 euro le montant des indemnités contractuelles de retard dû à la société LCA par Mme X..., l'arrêt rendu le 10 octobre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze mars deux mille quinze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la société Les Constructions d'Aquitaine
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR jugé que la société LCA était redevable d'une somme de 33.017,36 euros envers Mme X... au titre du contrat de construction conclu le 28 septembre 2004, en ce compris la somme de 10.089,10 euros TTC au titre des branchements pour les eaux pluviales, les eaux usées et l'eau potable et d'AVOIR en conséquence condamné, après compensation entre les dettes réciproques des parties, Mme X... à payer à la société LCA la seule somme de 9.218,14 euros ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « dans la mesure où la notice descriptive annexée au contrat de construction prévoit que le prix forfaitaire comprend le "raccordement des eaux usées et eaux vannes, à l'antenne en attente en limite de propriété" (page 8), sans chiffrer de coût supplémentaire de raccordement au réseau ni indiquer qu'un tel coût devra être supporté par le maître de l'ouvrage, ledit coût est nécessairement compris dans le prix convenu ; qu'en effet, il résulte des dispositions d'ordre public des articles L.231-2 et R. 231-4 du code de la construction et de l'habitation, que la notice descriptive, qui doit être obligatoirement annexée à tout contrat de construction d'une maison individuelle, doit informer de manière précise, complète et exacte le maître de l'ouvrage sur ce qu'il aura à débourser pour obtenir la maison commandée ; qu'il s'ensuit qu'en l'absence de chiffrage des travaux de branchement nécessaires à l'utilisation de l'immeuble, ces travaux sont réputés compris dans le prix forfaitaire convenu, de sorte que le constructeur doit en supporter le coût ; qu'en l'espèce, Sandrine X... justifie avoir réglé à la société Lyonnaise des eaux une somme totale de 10.089,10 euros TTC au titre des branchements pour les eaux pluviales, les eaux usées et l'eau potable (pièces 107 à 110 de sa production) ; qu'il y a donc lieu de condamner la société LCA à lui rembourser ce montant » ;
1°) ALORS QUE la notice descriptive annexée au contrat de construction du 29 septembre 2004 prévoyait que les raccordements des différents réseaux de la maison à la limite de propriété étaient compris dans le prix mais stipulait expressément au titre « branchements aux réseaux publics » que « les branchements et raccordements du terrain aux divers réseaux sont exécutés par les services concessionnaires des collectivités locales du lieu de la construction et sont à la charge du vendeur du terrain ou du maître de l'ouvrage. Le coût de cette viabilisation est indiqué par les divers services (EDF, GDF, LYONNAISES DES EAUX, MAIRIE, FRANCE TELECOM » ; qu'en condamnant la société LCA à rembourser à Mme X... la somme de 10.089,10 euros réglée à la Lyonnaise des eaux au titre des branchements pour les eaux pluviale, les eaux usées et l'eau potable, motif pris que la notice descriptive annexée au contrat de construction n'indiquait pas que le coût des raccordements de la limite de propriété au réseau devait être supporté par le maître de l'ouvrage, la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la notice descriptive et violé l'article 1134 du Code civil ;
2°) ALORS QUE l'obligation faite au constructeur de maison individuelle de chiffrer le coût des travaux dont le maître de l'ouvrage se réserve l'exécution ne saurait porter sur la part des travaux de raccordement aux infrastructures de service public devant être exécutés en dehors du terrain appartenant au maître de l'ouvrage qui, quoique nécessaires à l'implantation et à l'utilisation de l'immeuble, ne peuvent être réalisés que par l'autorité publique ou son concessionnaire, aux conditions et au prix qu'ils fixent ; qu'en imputant à faute de la société LCA de n'avoir pas chiffré le coût supplémentaire de raccordement au réseau d'eau quand les travaux correspondants, devant être réalisés à l'extérieur du terrain d'implantation de la construction par la seule Lyonnaise des eaux, concessionnaire du réseau, au prix qu'elle fixait, ne pouvaient être chiffrés par le constructeur de maison individuelle, la Cour d'appel a violé par fausse application les articles L. 231-2 et R. 231-4 du Code de la construction et de l'habitation.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR jugé que la société LCA était redevable d'une somme de 33.017,36 euros envers Mme X... au titre du contrat de construction du 28 septembre 2004, en ce compris la somme de 8.096,77 euros au titre de coûts des clôtures et d'AVOIR en conséquence condamné, après compensation entre les dettes réciproques des parties, Mme X... à payer à la société LCE la seule somme de 9.218,14 euros ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « des clôtures ayant été mentionnées dans des pièces complémentaires déposées le 12 avril 2005 en additif au permis de construire (annexe A 2b du rapport de l'expert judiciaire) et aucun avenant n'ayant été signé à ce sujet par Sandrine X..., le coût de ces ouvrages, s'élevant à la somme de 8.096,77 euros payée par l'intéressée (pièces 63 et 64 de sa production), doit nécessairement être inclus dans le prix forfaitaire de l'immeuble ; que ce montant sera donc mis à la charge de la société LCA » ;
ALORS QUE le constructeur de maison individuelle n'est pas de tenu de réaliser des équipements qui n'avaient pas été prévus par le contrat de construction et ses annexes, et qui ne sont pas indispensables à l'implantation et à l'utilisation de l'immeuble ; qu'en jugeant que la société LCA était tenue de prendre en charge le coût de réalisation des clôtures figurant sur un additif au permis de construire sans rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si la mention de murs de clôture sur ces plans ne répondait pas à une demande spécifique des services d'urbanisme sans pour autant que les clôtures soient nécessaires à l'habitabilité de l'immeuble, de sorte que leur coût n'incombait pas au constructeur dès lors qu'elles ne figuraient pas dans la notice descriptive, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 231-2 et R. 231-4 du Code de la construction et de l'habitation.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement rendu le 27 janvier 2010 par le Tribunal de grande instance de Bordeaux en ce qu'il avait réduit à la somme de 1 euro le montant des indemnités contractuelles de retard dû à la société LCA par Mme X..., d'AVOIR en conséquence jugé que Mme X... demeurait redevable, au titre du contrat de construction du 28 septembre 2004 de la seule somme de 42.235,50 euros envers la société LCA, en ce compris l'indemnité réduite à 1 euro et d'AVOIR en conséquence condamné, après compensation entre les dettes réciproques des parties, Mme X... à payer à la société LCE la seule somme de 9.218,14 euros ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « l'article 7.6 des conditions générales du contrat de construction énonce que le maître de l'ouvrage qui ne respecte pas les délais de paiement contractuellement fixés devra payer une indemnité de 1 % par mois, calculée sur les montants non réglés ; que la société LCA prie la cour de réformer le jugement en ce qu'il a réduit à "1euro symbolique" les indemnités de retard qu'elle réclamait, et de condamner Sandrine X... à lui payer à ce titre une somme de 26 329,79 euros ; que toutefois, dans la mesure où les demandes en paiement de la société LCA excédaient ce qui était contractuellement dû, l'application de la clause contractuelle aurait des conséquences manifestement excessives pour Sandrine X..., dont la résistance au paiement était en grande partie justifiée ; qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement en sa disposition critiquée, et de rajouter la somme de 1,00 euros à la dette de l'intéressée » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « les pénalités réclamées par la société LCA à laquelle le présent jugement permet de rentrer dans ses droits auraient des conséquences manifestement excessives pour Mme X... au regard des sommes dont elle est déjà redevables ; que celles-ci seront ramenées à 1 euro symbolique »
1°) ALORS QUE le caractère excessif du montant de la clause pénale résulte de la disproportion manifeste entre l'importance du préjudice subi et le montant conventionnellement fixé ; qu'en jugeant excessive la clause pénale sans établir son montant ni celui du préjudice subi par la société LCA, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1152, alinéa 2, du Code civil ;
2°) ALORS QU'en tout état de cause, la cassation qui ne manquera pas d'intervenir du chef du premier, ou du deuxième moyen, entrainera en application de l'article 625 du Code de procédure civile la cassation par voie de conséquence de l'arrêt en ce qu'il a jugé que Mme X... demeurait redevable, au titre du contrat de construction du 28 septembre 2004 de la seule somme de 42.235,50 euros envers la société LCA, en ce compris l'indemnité réduite à 1 euro, dès lors que la Cour d'appel a fondé cette réduction sur le fait que les demandes en paiement de la société LCA excédaient ce qui était contractuellement dû.