LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 7 décembre 2012), que M. X..., qui cultive des parcelles de terre appartenant à M. Y... et Mme Y..., épouse Z..., a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux pour se voir reconnaître le bénéfice d'un bail rural sur ces parcelles ;
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé que M. X... produisait aux débats des éléments concordants établissant que Mme Z... avait reçu régulièrement, chaque année, de celui-ci des paiements en espèces au titre du fermage pour les terres qu'il occupait, la cour d'appel a pu en déduire, par une appréciation souveraine des éléments de preuve et sans inverser la charge de la preuve, l'existence d'une contrepartie onéreuse à cette occupation et par suite d'un bail rural liant les parties ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... et Mme Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Y... et Mme Z... ; les condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept février deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Foussard, avocat aux Conseils, pour M. Y... et autre
L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a décidé que Monsieur X... était titulaire d'un bail rural sur les parcelles appartenant à M. Y... et à Madame Y... épouse Z... ;
AUX MOTIFS QUE « M. Y... et Mme Z... ne contestent pas que Monsieur X... et ses parents et ses grands-parents avant lui exploitaient effectivement ces parcelles à titre agricole mais indiquent qu'il s'agit d'une mise à disposition à titre gratuit ; que M. X... précise qu'à la demande de M. Y... et Mme Z... et de ses parents le paiement se faisait en espèces sans remise de reçu si bien qu'il n'est pas en mesure d'apporter la preuve de ces paiements par copies de chèques ou quittances ; qu'il produit toutefois au soutien de sa demande quatre attestations et deux courriers en ce sens ; que trois des attestations qu'il produit se contente de certifier que M. X... Didier (voire ses ascendants) règle (réglaient) le fermage à Mme Z... en espèces ; qu'un autre attestant mécanicien au garage Z..., atteste avoir vu « tous les ans » M. X... venir régler la location d'une parcelle de terrain en espèces à Madame Z... ; qu'aucun de ces quatre attestants n'explique les circonstances dans lesquelles ils ont pu constater ces paiements ; que l'un de ces attestants, M. A... a rédigé un document complémentaire ne valant pas attestation dans lequel il précise qu'étant exploitant agricole et ayant travaillé avec la famille X..., il « les (a) vu donner la somme de 1500 F (228.31 ¿) en espèces à Mme Z... régulièrement chaque année à la Saint Michel pour le paiement d'un fermage de terre qu'ils exploitent à Beauregard ; que ce document également peu circonstancié est néanmoins plus détaillé ; que M. X... verse enfin aux débats un document émanant de m. B..., directeur adjoint de l'association de gestion et de comptabilité du Calvados ; que ce dernier indique avoir rencontré le 21 novembre 2005 M. X... afin de finaliser son bilant comptable du 1/10/04 au 30/09/2005 ; qu'à cette occasion, écrit-il, M. X... lui a fait part de sa difficulté à justifier d'un fermage réglé en espèces ; que M. B... lui a conseillé d'envoyer un chèque en recommandé à M. Y... et à Mme Z... ; que l'année suivante, dit-il M. X... lui a indiqué que Mme Z... n'était pas allée chercher ce recommandé ; qu'il indique lui avoir recommandé d'écrire à nouveau ; que M. X... justifie des courriers envoyés en ces deux occasions ; que face à ces éléments concordants, M. Y... et Mme Z... n'apportent aucun élément contraire faisant état d'une mise à disposition à titre gratuit des parcelles litigieuses ; qu'en conséquence, l'existence d'un bail rural sera reconnu sur ces parcelles sans qu'il y ait lieu de préciser la date à laquelle ce bail a débuté faute d'éléments précis donnés sur ce point. »
ALORS QUE, premièrement, il incombe à celui qui entend se prévaloir d'un bail rural et en faire reconnaître l'existence, d'établir que le propriétaire du bail l'a mis à sa disposition pour qu'il l'exploite et ce moyennant une contrepartie financière fixée d'un commun accord ; qu'en énonçant que «face à ses éléments concordants, M. Y... et Mme Z... n'apportent aucun élément contraire faisant état d'une mise à disposition gratuite des parcelles litigieuse » et qu'en exigeant de ces derniers qu'ils apportent la preuve que la mise à disposition était gratuite, les juges du fond ont violé les règles de la charge de la preuve, ensemble l'article 1315 du code civile ;
ALORS QUE, deuxièmement, et en tout cas, le bail rural est une convention conclut à titre onéreux ; que cette condition suppose elle-même que les parties aient décidé, dans le cadre d'une volonté commune, de fixer une contrepartie financière ; qu'en reconnaissant l'existence d'un bail rural, sans constater que les parties étaient convenues d'une mise à disposition contre une obligation de contrepartie financière mise à la charge de l'occupant, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles L.411-1 et L.411-31 du code rural ;
ET ALORS QUE, troisièmement, l'évocation de paiements, d'ailleurs en termes très circonspects, eu égard à la manière dont les attestations produites par M. X... ont été établies, ne pouvait en tout état de cause, établir que des initiatives unilatérales de M. X..., sans caractériser à elles seules l'existence d'une volonté commune ; que de ce point de vue, l'arrêt doit à tout le moins être censuré pour violation des articles L.411-1 et L.411-31 du code rural .