LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 1844-7, 5° et 1315 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que MM. X... et Y..., médecins, se sont associés au sein d'une société civile professionnelle dont M. X..., suite à la dégradation de leurs relations, a sollicité la dissolution sur le fondement de l'article 1844-7, 5° du code civil ;
Attendu que, pour accueillir la demande, l'arrêt, après avoir relevé que la mésentente entre associés est profonde et irréversible, retient que les éléments invoqués par M. X... sont insuffisants pour caractériser la paralysie du fonctionnement de la société, mais que M. Y... ne fournit aucun élément sur le fonctionnement de la société, de sorte que sa paralysie ne peut qu'être constatée ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la mésentente entre associés ne peut constituer un juste motif de dissolution que si elle conduit à la paralysie du fonctionnement de la société, et qu'il appartient à celui qui réclame la dissolution de rapporter la preuve d'une telle paralysie, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 septembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre février deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Bouthors, avocat aux Conseils, pour M. Y...
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la dissolution pour justes motifs au sens de l'article 1844-7 du code civil de la SCP X..., Y... et désigné en conséquence Maître Z...comme liquidateur ;
aux motifs que la mésentente existant entre les associés et par suite la disparition de l'affectio societatis ne peut constituer un juste motif de dissolution qu'à la condition de se traduire par une paralysie du fonctionnement de la société ; que les plaintes déposées par les parties, les procédures judiciaires diligentées par elles, ne serait-ce que par la longueur de leurs écritures, signent une profonde et irréversible mésentente, une médiation judiciaire n'ayant pas abouti ; que, pour caractériser la paralysie de la SCP, M. X... invoque pour l'année 2011 la disproportion des recettes, du simple au double au cours du premier trimestre et du simple au triple au cours du second semestre ; que, cependant, cet élément ne suffit pas dans la mesure où les statuts prévoient dans l'article 25 une clause de sauvegarde pouvant s'appliquer à partir de l'année 2014 si la comparaison de l'activité de chacun des associés faisait apparaître une inégalité supérieur à 20 % de la moitié de la masse globale des honoraires ; que, dans une correspondance du 25 mai 2011, M. X... invoque la résiliation du contrat d'assurance de M.
Y...
lui reprochant de lui avoir dissimulé sa forte sinistralité ; que, cependant, la lettre du 26 octobre 2010 par laquelle ce dernier en a été informé a été remise le 30 octobre 2010 alors que la SCP était immatriculée à compter du 22 février 2010, les statuts ayant fait l'objet d'avenants courant janvier 2010, étant observé que le taux de sinistralité de M. Y... sur la période de 2005 à 2009 n'apparaît pas anormalement élevé ; que, de plus, une lettre datée du 30 novembre 2010 a annulé celle du 26 octobre 2010, à la suite d'une correspondance de M. Y..., en date du 9 novembre 2010, s'étonnant d'une décision de résiliation sans contact téléphonique ou écrit préalable ; que, d'ailleurs, par des attestations des 20 septembre et 3 janvier 2012, M. Y... justifie avoir bénéficié d'une assurance pour les années 2010 et 2011 ; que M. X... invoque aussi une utilisation qui serait discutable du compte commun de la SCP, sans établir par une attestation du cabinet d'expertise comptable la réalité du grief ; que M. X... invoque également des surcotations d'actes reprochés à M. Y... à la suite d'une information communiquée par trois médecins anesthésistes de la clinique dans laquelle la SCP exerçait son activité ; qu'à la suite d'une plainte déposée par M. X..., la chambre disciplinaire de première instance de Midi-Pyrénées a prononcé le 12 mars 2013, une sanction à l'encontre de M. Y... qui en a interjeté appel ; que ce recours étant suspensif, cette sanction ne suffit pas à caractériser la paralysie de la SCP ; que, de même, la procédure judiciaire concernant le disque dur de sauvegarde, initiée par M. Y... sous la forme d'une requête non contradictoire ayant donné lieu à une ordonnance présidentielle, qui a fait l'objet d'une rétractation par le juge des référés, à la demande de M. X..., ne suffit pas à établir la paralysie de la SCP ; qu'en revanche, pour justifier du fonctionnement de la SCP immatriculée à compter du 22 février 2010, M. Y..., qui a la qualité de cogérant, ne fournit strictement aucun élément sur la tenue d'assemblées générales annuelles dans les deux mois qui suivent la clôture de l'exercice, réunions prévues par l'article 18 des statuts, jusqu'à la désignation, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, d'un mandataire liquidateur par le tribunal de grande instance de Toulouse ; qu'il ne fournit pas plus d'éléments sur l'activité de la SCP depuis novembre 2011 jusqu'au prononcé de la dissolution ; que l'article 14 des statuts dispose notamment que les gérants doivent consacrer à la société tout le temps et les soins nécessaires ; que, si les cogérants consacrent beaucoup de temps à la SCP, c'est surtout en ferraillant devant diverses juridictions ordinales ou judiciaires ; que, de plus, il est à relever que les parties ont signé le 30 août 2011, un procès-verbal de conciliation à l'initiative du conseil départemental de l'ordre des médecins de la Haute-Garonne mentionnant leur accord pour une séparation d'activité ainsi que le maintien d'activité à la clinique et leur désaccord sur les modalités pratiques de la séparation ; qu'en l'absence du moindre élément sur le fonctionnement de la SCP, dans le respect des statuts, ainsi que depuis décembre 2011, sa paralysie ne peut qu'être constatée ; qu'il convient donc de prononcer la dissolution de la SCP et de nommer un mandataire liquidateur comme l'a décidé le tribunal de grande instance, sans qu'il soit nécessaire de préciser la mission classique du mandataire liquidateur sur l'apurement des comptes, la restitution du matériel et le partage des frais de dissolution ainsi que du matériel acquis par la SCP ;
1°) alors que, d'une part, la société prend fin par la dissolution anticipée prononcée par le tribunal à la demande d'un associé, notamment en cas d'inexécution de ses obligations par un associé, ou de mésentente entre associés paralysant le fonctionnement de la société ; qu'en prononçant la dissolution de la SCP X...-Y... après avoir cependant constaté que le docteur X..., demandeur à l'action, avait succombé à la charge de la preuve d'une violation par son associé de ses obligations professionnelles et de la paralysie de la société à la suite de leur mésentente, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé 1844-7, 5, du code civil ;
2°) alors que, d'autre part, la charge de la preuve pèse sur le demandeur à l'allégation ; qu'en prononçant dissolution de la SCP X...-Y... au seul motif que le docteur Y..., défendeur à l'action, ne rapportait pas la preuve que la société n'était pas paralysée, la cour d'appel a inversé charge de la preuve en violation de l'article 1315 du code civil.