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04/02/2015 | FRANCE | N°13-21645

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 février 2015, 13-21645


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé verbalement en qualité de magasinier par la société Exacompta pour travailler sur le site de Paris ; que jusqu'en mars 2007, il travaillait de 18 heures à 6 heures et percevait une prime de nuit ; qu'à la suite de son transfert sur le site de Mitry, son horaire de travail est passé de 15 heures à 1 heure du matin ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le deuxième moyen du pourvoi principal du salarié, ci-après annexé :
Attendu que la c

our d'appel n'avait pas à s'expliquer sur la nécessité d'un accord des pa...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé verbalement en qualité de magasinier par la société Exacompta pour travailler sur le site de Paris ; que jusqu'en mars 2007, il travaillait de 18 heures à 6 heures et percevait une prime de nuit ; qu'à la suite de son transfert sur le site de Mitry, son horaire de travail est passé de 15 heures à 1 heure du matin ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le deuxième moyen du pourvoi principal du salarié, ci-après annexé :
Attendu que la cour d'appel n'avait pas à s'expliquer sur la nécessité d'un accord des parties au contrat de travail alors qu'elle faisait application des seules dispositions de la convention collective ;
Sur le troisième moyen du même pourvoi, ci-après annexé :
Attendu que sous le couvert d'une méconnaissance des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, le moyen ne tend qu'à contester l'appréciation souveraine par la cour d'appel du fait que les autres salariés n'étaient pas dans une situation comparable à celle de l'intéressé ;
Sur le quatrième moyen du même pourvoi, ci-après annexé :
Attendu que la cour d'appel, qui a souverainement retenu que n'était pas établie la réalité de faits de nature à laisser présumer un harcèlement moral, n'était pas tenue de s'expliquer sur de simples allégations et arguments ou sur les conséquences d'un fait dont elle avait exclu l'existence ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal :
Vu l'article 12 du code de procédure civile ;
Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes au titre de la prime de nuit, l'arrêt, après avoir écarté l'existence tant d'une modification de son contrat de travail que d'un bouleversement de ses conditions d'existence qui porterait atteinte à sa vie personnelle, retient que la prime de nuit résultait d'une sujétion ayant cessé en mars 2007, de sorte que le versement de celle-ci n'était plus justifié et que l'usage, à le supposer établi, avait été dénoncé par l'employeur avec un délai de prévenance suffisant ;
Qu'en se déterminant ainsi, alors que si le passage d'un horaire de 18 heures à 6 heures à celui de 15 heures à 1 heure ne constitue pas, à lui seul, une modification du contrat de travail, la cour d'appel, qui n'a pas précisé, autrement que par un motif hypothétique, le fondement juridique des demandes relatives à la prime en cause, n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident de l'employeur :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que pour décider que le salarié devait être classé au coefficient 135 de la convention collective nationale de travail des ouvriers, employés et cadres des fabriques d'articles de papeterie et de bureau du 24 novembre 1992 et condamner la société Exacompta à payer au salarié la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que si la qualification attribuée par l'employeur est celle de magasinier M2 coefficient 128, correspondant à celle d'un paqueteur-emballeur, les tâches décrites correspondent à celles d'OS2, soit préparateur de commandes ou emballeur vérificateur ;
Qu'en statuant ainsi, pour la totalité de la période en cause, par application de la convention collective du 24 novembre 1992, alors que les deux parties retenaient ensemble l'application, à partir du 1er janvier 2012, de la convention collective de la cartonnerie, ne s'opposant que sur le coefficient 185 ou 195 applicable au regard de celle-ci, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de ses demandes au titre de la prime de nuit, en ce qu'il dit que le salarié devait être classé au coefficient 135 de la convention collective nationale de travail des ouvriers, employés et cadres des fabriques d'articles de papeterie et de bureau du 24 novembre 1992 et en ce qu'il condamne la société Exacompta à payer au salarié la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 23 mai 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur les points restant en litige, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre février deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. M'Hamed X..., demandeur au pourvoi principal
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande tendant à voir dire que le salarié avait droit au maintien de la prime de nuit ;
AUX MOTIFS QUE « le passage d'un horaire de nuit à un horaire décalé ne procède pas d'une modification du contrat de travail mais relève du pouvoir de direction de l'employeur ; qu'en l'espèce, il ne peut être soutenu que la nouvelle répartition des horaires constituerait un bouleversement des horaires de travail et porterait, de quelque manière que ce soit, atteinte à la vie personnelle et familiale de l'appelant ; qu'il est établi que les changements d'horaire du salarié n'ont pas eu pour effet de faire passer le salarié à un horaire exclusivement de jour, ont avancé la prise de fonction de quelques heures seulement, présentaient des plages horaires communes avec les anciens horaires effectués, comportaient des horaires de nuit ; que le décalage de quelques heures d'activité qui diminue la sujétion du travail de nuit ne présente pas, en soi, le caractère d'une modification substantielle du contrat de travail ; que le salarié ne justifie d'aucun préjudice lié à la modification des horaires de travail ; que par ailleurs, la prime de nuit résultait d'une sujétion ayant cessé en mars 2007, de sorte que le versement de celle-ci n'était plus justifiée ; que l'usage, à le supposer établi, a été dénoncé par l'employeur avec un délai de prévenance suffisant ; qu'il convient donc d'infirmer le jugement déféré et de débouter le salarié de ce chef de demande » ;
ALORS QUE le passage, même partiel, d'un horaire de nuit à un horaire de jour constitue une modification du contrat de travail ; qu'il requiert en conséquence l'accord du salarié, tant sur la modification elle-même des horaires que sur les conséquences financières que l'employeur entend y attacher et, notamment, sur la suppression de la prime conventionnelle de nuit ; qu'en décidant que le passage partiel d'un horaire de nuit à un horaire de jour avait seulement modifié les conditions de travail du salarié, lequel était en conséquence mal fondé selon elle à s'opposer à la suppression de la prime de nuit, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
ALORS aussi QU'en tout état de cause, la modification des conditions de travail, si elle ne requiert pas l'accord du salarié, ne peut de toute façon intervenir qu'à rémunération au moins égale ; qu'en conséquence, le passage d'un horaire de nuit à un horaire de jour ne peut s'accompagner de la suppression de la prime conventionnelle de nuit, peu important à cet égard que la sujétion que cette prime avait pour fonction de compenser ait disparu ; qu'en décidant que la société EXACOMPTA avait pu unilatéralement décider du passage partiel d'un horaire de nuit à un horaire de jour et de la suppression de la prime de nuit, aux motifs erronés qu'une telle suppression était justifiée par la fin de la sujétion et le fait que le salaire annuel cumulé avait augmenté, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
ALORS et plus subsidiairement QUE la Cour d'appel a constaté que les nouveaux horaires du salarié comportaient des horaires de nuit, ce dont il résultait que la sujétion liée au travail de nuit n'avait pas totalement disparu ; qu'en décidant néanmoins qu'était justifiée la suppression totale de cette prime conventionnelle de nuit, la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1134 du code civil ;
ALORS encore QUE c'est à l'employeur, qui prétend qu'une prime ne procéderait pas du contrat mais d'un simple usage, d'en apporter la preuve ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a supposé qu'était établi l'usage allégué par l'employeur, lequel ce faisant contestait la source contractuelle de la prime en qualifiant celle-ci d'usage sans pour autant en démontrer l'existence ; qu'en statuant de la sorte, elle a retenu un motif hypothétique en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS enfin, et de toute façon, QU'un usage n'est régulièrement dénoncé que si cette décision est précédée d'une information donnée, en plus de celle donnée aux intéressés, aux institutions représentatives du personnel, dans un délai permettant d'éventuelles négociations ; qu'en décidant que la prime d'emploi résultait d'un usage que l'employeur avait dénoncé dans un délai de prévenance suffisant, sans constater que les institutions représentatives du personnel avaient été informées, circonstance que le salarié contestait dans ses écritures, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des règles régissant la dénonciation des usages.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté le salarié de sa demande relative à l'obtention d'une indemnité conventionnelle de repas ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « aux termes de l'article 39 de la convention collective applicable, l'indemnité de repas est due ¿ aux membres du personnel dont l'horaire de travail comporte une infraction encadrant minuit ou partant de minuit'; que le salarié n'étant plus soumis en raison de la modification des horaires de travail à une quelconque sujétion, ce dernier n'est pas fondé à solliciter une indemnité spéciale de repas » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES « qu'il s'agit d'une indemnité de repas conventionnelle pour les personnes dont l'horaire encadre minuit ; dès lors que le salarié n'est plus contraint aux dépenses de repas afférentes à une modalité particulière d'exercice de son travail que cette indemnité est supposer dédommager, il ne peut y prétendre ; que l'employeur justifie avoir régularisé (tardivement en novembre 20009) pour la période où le salarié y était assujetti » ;
ALORS QUE la rémunération contractuelle d'un salarié constitue un élément de travail qui ne peut être modifié sans son accord à la faveur d'un passage partiel d'un horaire de nuit à un horaire de jour qui constitue une modification du contrat de travail ; qu'en conséquence, la prime conventionnelle de repas versée aux salariés travaillant à un horaire encadrant minuit ne peut être supprimée sans l'accord du salarié, peu important à cet égard que l'employeur, ayant ensuite unilatéralement modifié les horaires de travail, le salarié n'ait plus travaillé à des horaires encadrant minuit, et peu important encore que la sujétion ait ainsi pris fin ; qu'en décidant l'inverse, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
ET ALORS et en tout état de cause QU'à supposer que le passage partiel d'un horaire de nuit à un horaire de jour ait constitué une simple modification des conditions de travail, il ne pouvait de toute façon intervenir qu'à rémunération égale ; qu'en conséquence, la prime conventionnelle de repas versée aux salariés travaillant à un horaire encadrant minuit ne peut être supprimée sans l'accord du salarié, peu important à cet égard que l'employeur, ayant ensuite unilatéralement modifié les horaires de travail, le salarié n'ait plus travaillé à des horaires encadrant minuit, et peu important encore que la sujétion ait ainsi pris ; qu'en décidant l'inverse, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté le salarié de sa demande relative à l'obtention d'une prime de production ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « le salarié occupant un emploi de préparateur de commande ¿ emballeur vérificateur, et qui prétend occuper des fonctions de valeur égale à certains des salariés qui perçoivent une prime de production et qui invoque par là-même le principe d'égalité de traitement se compare à une opératrice sur machines, un conducteur de machine façonnage, un guitariste, un opérateur photocomposition, à une conductrice offset, à un massicotier et un monteur relieur ; que l'employeur établit que la prime de production litigieuse est attribuée à des salariés de l'atelier ou du laboratoire, qui conduisent bien sont aptes à bien conduire une ou plusieurs machines, savent les régler, les maintenir en bon état, effectuer le changement de format, former de nouveaux conducteurs sur ce type de machines et encadrer les personnes qui travaillent avec eux sur ses machines ; que le salarié appelant ne satisfait pas à son obligation d'étayer sa demande et procède par une simple allégation de discrimination salariale non assortie d'offre de preuve d'éléments de faits susceptibles d'établir une atteinte au principe d'égalité de traitement ; qu'en effet, la simple mise en perspective des fonctions du salarié, dont il n'est pas démontré qu'elle requiert une technicité poussée, et les fonctions auxquelles se compare l'appelant ne permet pas de caractériser un grief d'inégalité de traitement, étant précisé que l'ensemble des magasiniers ne perçoit pas ladite prime de production ; que la société intimée s'explique précisément sur les critères posés pour bénéficier de la prime de production, et notamment ceux relatifs à la formation et à l'encadrement d'autres salariés ; que le salarié appelant ne justifie pas remplir, notamment, ces derniers critères ; qu'il convient donc de débouter le salarié de cette demande nouvelle en cause d'appel » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « selon les explications données par les parties et un constat d'huissier diligenté par le défendeur, le travail de M. X... consiste à scanner, vérifier, mettre en cartons, en registrer sur ordinateur pour expédition conforme les articles commandés par les clients, lesquels ont été préalablement fabriqués, la conformité contrôlée sur le site de fabrication à Paris avant d'être acheminés sur le site de stockage de Mitry ; que M. X... ne justifie pas d'autres salariés exerçant des tâches identiques ou comparables qui perçoivent une prime de production, celle-ci étant allouée, selon les critères communiqués au personnel le 24/ 9/ 0 à certains conducteurs ou opérateurs très qualifiés de grande ancienneté, encadrant, formant d'autres salariés ou exerçant des métiers de haute technicité ;
ALORS QUE les juges ne peuvent rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, et pour étayer sa demande fondée sur une inégalité de traitement, le salarié, en réponse à l'employeur qui prétendait que la prime de production était réservée aux conducteurs de machines ou opérateurs très qualifiés, établissait, pièces à l'appui, et notamment en produisant des bulletins de salaires, que nombre de salariés percevaient cette prime alors qu'ils n'étaient ni conducteurs de machines, ni n'exerçaient de fonctions de plus haute technicité que lui, tels par exemple que les opératrices photo, les monteurs relieurs, les massicotiers et les opératrices sur machine à paqueter ; qu'en retenant néanmoins que le salarié procédait par simple allégation de discrimination salariale, sans analyser, ne serait-ce que sommairement, les documents précités, la Cour d'appel a méconnu l'article 455 du code de procédure civile ;
ET ALORS encore QUE l'employeur doit démontrer, et non pas seulement expliquer, que la différence de traitement repose sur des raisons objectives et matériellement vérifiables, dont le juge doit contrôler la réalité et la pertinence ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel s'est bornée à énoncer que la société EXACOMPTA s'expliquait sur les critères posés pour bénéficier de la prime de production, et notamment ceux relatifs à la formation et à l'encadrement, mais elle n'a nullement vérifié que ces critères étaient réellement appliqués, ni qu'ils étaient pertinents, c'est-à-dire qu'ils étaient de nature à caractériser le fait que ceux des salariés qui percevaient ladite prime exerçaient des fonctions de valeur réellement supérieure aux autres ; qu'elle a, ce faisant, méconnu de nouveau l'article 455 du code de procédure civile.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté le salarié de sa demande relative au harcèlement moral ;
AUX MOTIFS QUE « aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;
que l'article L. 1154-1 du même code prévoit qu'en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe à l'employeur au vu de ces éléments de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;
qu'en l'espèce, le salarié soutient que le harcèlement serait constitué par les faits suivants :
- la modification unilatérale de son contrat de travail relative à sa qualification professionnelle consécutive à sa mutation sur le site de VEMARS-la méconnaissance par l'employeur des recommandations du médecin du travail-la pression exercée en ce qui concerne la prime de rendement et la modification de ses modalités de calcul-la mise en place d'un système de vidéo-surveillance détournée de sa finalité première ;

que les litiges nés des conditions d'application du contrat de travail et donnant lieu à l'exercice de recours juridictionnels ne sauraient constituer en eux-mêmes des agissements laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral ;
que s'agissant de la méconnaissance par l'employeur des recommandations du médecin du travail, l'appelant ne donne aucune précision sur les circonstances actuelles et précises et concrète, les dates et les moments auxquels l'employeur aurait dérogé aux préconisations du médecin du travail et aurait mis le salarié en danger ; qu'il convient de noter que dans son dernier avis d'aptitude en date du 12 juillet 2012, le médecin du travail ne mentionne plus aucune restriction relative à des ports de charge ;
qu'enfin, s'agissant de la mise en place d'un système de vidéosurveillance, que la société EXACOMPTA justifie que la mise en place de ce système a été discutée devant le comité d'entreprise et le CHSCT à l'occasion des séances des 29 mars et 30 mars 2012 et que les deux instances ont rendu un avis favorable à cette installation ; qu'en outre, les salariés ont été informés de l'installation dudit système par une note du mois d'avril 2012 ; qu'en conséquence, l'appelant n'établit pas de présomption de harcèlement à l'encontre de son employeur » ;
ALORS QUE le fait pour un employeur d'appliquer le contrat de travail dans des conditions irrégulières obligeant le salarié à introduire systématiquement des recours juridictionnels pour être rempli de ses droits constitue un harcèlement moral ; qu'en décidant, pour retenir que l'exposant ne pouvait se prévaloir de la modification unilatérale de son contrat de travail relative à sa qualification professionnelle consécutive à sa mutation sur le site de Vemars, ni de la pression exercée en ce qui concerne la prime de rendement et la modification de ses modalités de calcul, que les litiges nés des conditions d'applications d'application du contrat de travail et donnant lieu à l'exercice de recours juridictionnels ne sauraient constituer en eux-mêmes des agissements laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral, la Cour d'appel a violé l'article L. 1152-1 du code du travail ;
ALORS aussi QUE dans ses écritures d'appel, le salarié établissait, pièces datées à l'appui (conclusions, p. 21) que le médecin du travail lui avait préconisé différentes recommandations, telles que l'interdiction de port de charges de plus de 24 kg, alternance des stations assise et débout et alternance d'une semaine sur huit s'agissant du poste de rangement ; qu'il faisait encore valoir que la qualité de travailleur handicapé lui avait été reconnue à compter du 5 juillet 2011, et que la méconnaissance par l'employeur de ces prescriptions avait abouti à un accident du travail le 10 janvier 2013 ; qu'en s'abstenant de prendre en considérations ces circonstances essentielles, au motif erroné que le salarié ne donnait pas de précision de date, et au motif inopérant qu'un avis d'aptitude antérieur à l'accident du travail ne mentionnait plus de restriction relative à des ports de charge, la Cour d'appel a méconnu l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS encore QUE la pose d'une caméra de vidéo surveillance dans une entreprise est légitime pour assurer la sécurité des biens et des personnes mais de tels outils ne peuvent en aucun cas, sous peine de caractériser un harcèlement moral, conduire à placer sous surveillance les employés et le travail qu'ils effectuent ; qu'en l'espèce, le salarié faisait valoir que si la société EXACOMPTA prétendait avoir recueilli l'avis du CE et du CHSCT pour installer dans l'entreprise des caméras, elle avait ensuite ajouté quatre autres caméras destinées à détecter les erreurs commises par les salariés ; qu'en s'abstenant de rechercher, bien qu'elle y ait été invitée, si cette circonstance, qui démontrait que le système de vidéo surveillance avait été détourné de son objectif initial, ne caractérisait pas un harcèlement moral, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1152-1 du code du travail ;
ET ALORS enfin QUE saisi d'une demande de reconnaissance de harcèlement moral, le juge doit appréhender les faits qui lui sont soumis dans leur ensemble et rechercher, même si l'employeur fournit au cas par s'ils permettent de présumer l'existence d'un tel harcèlement ; qu'au cas présent, en s'abstenant de prendre en considération comme un ensemble unique la multiplicité des faits constitutifs du harcèlement moral dont le salarié a fait l'objet de la part de son employeur, et en se bornant à ne les envisager qu'individuellement sans les intégrer dans un contexte général, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1152-1 du code du travail.
Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils, pour la société Exacompta, demanderesse au pourvoi incident
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il avait dit que Monsieur X... devait être classé au coefficient 135 dans le barème de la Convention collective nationale de travail des ouvriers, employés, agents de maîtrise et cadres des fabriques d'articles de papeterie et de bureau du 24 novembre 1992 et d'AVOIR condamné la société EXACOMPTA à lui payer la somme de 1. 000 € à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « les moyens développés par la société EXACOMPTA ne font que réitérer, sous une forme nouvelle, mais sans justification complémentaire utile, ceux dont les premiers juges ont connu et auxquels, se livrant à une exacte appréciation des faits de la cause, et à une juste application des règles de droit s'y rapportant, ils ont répondu par des motifs pertinents et exacts que la cour adopte, sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation ; qu'il sera seulement ajouté que le non respect de la classification collective, s'agissant de la classification du salarié, a occasionné à ce dernier un préjudice qui sera réparé par la location d'une indemnité de 1. 000 € à titre de dommages et intérêts » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS DES PREMIERS JUGES QUE « la qualification qui lui est attribuée par l'employeur est magasinier M2, coefficient 128 ; que selon la convention collective cette qualification est celle d'un paqueteur emballeur ; que les tâches décrites comme étant celles de M. X... correspondent à celles d'OS2 soit préparateur de commandes ou emballeur vérificateur ; qu'il sera fait droit à la demande de classification à ce niveau ».
ALORS QU'il était constant aux débats qu'à la date à laquelle la cour d'appel statuait, la Convention collective applicable dans l'entreprise n'était plus la Convention collective nationale de travail des ouvriers, employés, agents de maîtrise et cadres des fabriques d'articles de papeterie et de bureau du 24 novembre 1992 mais la Convention collective nationale pour le personnel des industries du cartonnage du 9 janvier 1969 ; qu'en confirmant purement et simplement le jugement, qui avait ordonné une requalification dans le barème d'une convention collective dont les parties s'accordaient à reconnaître qu'elle n'était plus applicable, cependant qu'il lui incombait d'examiner quelle devait être la classification du salarié dans le barème de la convention collective applicable à la date où elle statuait, la cour d'appel a violé par fausse application le premier texte précité et par refus d'application, le second de ces textes.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-21645
Date de la décision : 04/02/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 23 mai 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 fév. 2015, pourvoi n°13-21645


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.21645
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