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27/01/2015 | FRANCE | N°13-21945

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 27 janvier 2015, 13-21945


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 18 avril 2013), que la société civile immobilière Les Acacias (la SCI), qui a donné à bail divers locaux à la société Dika, a confié à la société Lesnier et Bernard des travaux de pose d'une cuve à carburant et tous les réseaux de canalisation afférents, à la société Carimalo les ouvrages de gros-oeuvre, dont la dalle support de la cuve et la dalle de couverture au niveau chaussée, et à la société Eurovia les ouvrages de voirie et réseaux divers

; qu'après réception, se plaignant d'une fuite de gasoil, la SCI et la société D...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 18 avril 2013), que la société civile immobilière Les Acacias (la SCI), qui a donné à bail divers locaux à la société Dika, a confié à la société Lesnier et Bernard des travaux de pose d'une cuve à carburant et tous les réseaux de canalisation afférents, à la société Carimalo les ouvrages de gros-oeuvre, dont la dalle support de la cuve et la dalle de couverture au niveau chaussée, et à la société Eurovia les ouvrages de voirie et réseaux divers ; qu'après réception, se plaignant d'une fuite de gasoil, la SCI et la société Dika ont assigné, après expertise, les sociétés Carimalo et Lesnier et Bernard aux fins d'obtenir réparation de leurs préjudices ;
Sur le moyen unique, pris en ce qu'il fait grief à l'arrêt de débouter la société Dika de sa demande fondée sur l'article 1792 du code civil :
Attendu que la cour d'appel n'ayant pas, dans le dispositif de l'arrêt, débouté la société Dika mais l'ayant dite irrecevable à agir sur le fondement de l'article 1792 du code civil, le moyen manque en fait de ce chef ;
Mais sur le moyen unique, pris en ce qu'il fait grief à l'arrêt de débouter la SCI de son action en responsabilité décennale contre les sociétés Carimalo et Lesnier et Bernard :
Vu l'article 1792 du code civil ;
Attendu que pour statuer comme il l'a fait, l'arrêt retient que la SCI n'établit pas l'imputabilité du désordre aux sociétés Carimalo et Lesnier et Bernard, que l'expert judiciaire n'a pu déterminer l'auteur de la déformation accidentelle et ponctuelle de la conduite, chacune des sociétés intervenantes ayant réalisé une prestation spécifique et distincte, que ce même expert indique que les intervenants ayant pu créer l'événement sont les sociétés Eurovia Bretagne et Carimalo par ses travaux de maçonnerie et que la responsabilité de la société Lesnier et Bernard est peu probable, qu'on n'explique pas comment la société Lesnier et Bernard aurait pu casser un tel conduit lors de sa pose en raison de la solidité du conduit, qu'il a fallu une charge lourde (engin de chantier) pour y parvenir, que les essais sous pression n'ont pu être à l'origine de la fissure, que la société Carimalo, en construisant la dalle en béton, a oeuvré au-dessus de la canalisation de fuel et a donc pu la rompre pendant ses travaux, que la société Eurovia est aussi intervenue sur le site, non pas en réalisant l'enrobé, mais lors du remblai autour de la cuve, qu'en conséquence, l'origine du désordre reste indéterminée ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs insuffisants à exclure la responsabilité de plein droit des constructeurs, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute la SCI Les Acacias de sa demande sur le fondement de l'article 1792 du code civil, l'arrêt rendu le 18 avril 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;
Condamne les sociétés Carimalo et Lesnier et Bernard aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne in solidum les sociétés Carimalo et Lesnier et Bernard à payer la somme de 3 000 euros à la SCI Les Acacias ; rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept janvier deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour les sociétés Les Acacias et Dika
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté les sociétés Les Acacias et Dika de leur action en responsabilité décennale dirigée contre les sociétés Carimalo et Lesnier et Bernard ;
Aux motifs que, « Considérant tout d'abord que la cuve enterrée en béton armée et maçonnée, à destination de cuve de carburant, réalisée, chacune pour leur part, par les sociétés Carimalo et Lesnier et Bernard, constitue bien un ouvrage, au sens de l'article 1792 du Code civil.
Que par ailleurs, le chantier a bien été réceptionné sans réserve le 12 novembre 2001.
Qu'enfin, il ressort clairement du rapport d'expertise que l'incident d'écrasement de la conduite de gasoil a eu lieu en cours de chantier, avant que la canalisation soit recouverte et protégée en surface par une dalle en béton.
Mais considérant que pas plus qu'en première instance, les sociétés appelantes n'établissent en cause d'appel l'imputabilité du désordre à l'une ou l'autre des sociétés intimées.
Considérant que selon l'expert judiciaire, le désordre dénoncé tient à une "déformation accidentelle et ponctuelle de la conduite" dont il est résulté une fissuration.
Considérant que l'expert n'a pu déterminer qui a pu provoquer l'événement, chacune des sociétés intervenantes ayant réalisé une prestation spécifique et distincte.
Considérant que l'expert judiciaire émet l'avis suivant :
"Les intervenants sur cet ouvrage ayant pu créer l'événement sont Eurovia Bretagne (qui n'est pas dans la cause), et Carimalo par ses travaux de maçonnerie. La responsabilité de Lesnier et Bernard est peu probable, leur intervention ne comprenant pas les travaux de génie civil, ni de terrassement, et donc qui n'est pas intervenu après la pose de son matériel. Celle de l'architecte n'est pas non plus envisageable pour un incident ponctuel ne concernant pas sa mission.
"Rien ne permet aujourd'hui de trancher sur la responsabilité de l'un ou l'autre intervenant et nous ne voyons pas comment cette position pourrait évoluer a posteriori,"
Considérant que répondant à un dire de Maître Le Blanc du 2 janvier 2007, l'expert reprend sa position :
"Il est probable que ce responsable soit à choisir entre Eurovia et Carimalo.
"Carimalo en construisant la dalle en béton a oeuvré au-dessus de la canalisation de fuel et a donc pu la rompre pendant ses travaux.
"Mais Eurovia est aussi intervenue sur le site non pas en réalisant l'enrobé comme le précise le dire, mais avant, lors du remblai autour de la cuve.
"Quant à Lesnier et Bernard, on ne voit pas comment on peut casser un tel conduit lors de sa pose en raison de la solidité du conduit. Il a fallu une charge lourde (engin de chantier) pour y parvenir. Ce ne sont pas non plus les essais sous pression qui ont pu être à l'origine de la fissure."
Considérant qu'en l'état de ces éléments, l'origine du désordre reste indéterminée.
Considérant que les sociétés appelantes seront donc déboutées de leurs demandes fondées sur la responsabilité décennale » ;
Alors que, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination ; qu'en l'espèce, en jugeant que la responsabilité des sociétés Carimalo et Lesnier et Bernard ne pouvait être engagée sur le fondement de la garantie décennale, faute de pouvoir démontrer l'imputabilité du désordre à l'une ou l'autre des sociétés, après avoir pourtant constaté que le dommage était bien intervenu en cours de chantier, sur lequel étaient intervenues ces deux sociétés, la Cour d'appel, qui a ajouté une condition à la loi que celle-ci ne comporte pas, a violé l'article 1792 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 13-21945
Date de la décision : 27/01/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 18 avril 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 27 jan. 2015, pourvoi n°13-21945


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau, SCP Vincent et Ohl

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.21945
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