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22/01/2015 | FRANCE | N°14-10600

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 22 janvier 2015, 14-10600


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 5 décembre 2012), que M. X..., salarié de la société Sapa Profilés Puget (l'employeur), a été victime, le 11décembre 2005, d'un accident pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie du Var ; qu'il a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une action en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter s

a demande, alors, selon le moyen :
1°/ que tenu d'une obligation de sécurité...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 5 décembre 2012), que M. X..., salarié de la société Sapa Profilés Puget (l'employeur), a été victime, le 11décembre 2005, d'un accident pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie du Var ; qu'il a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une action en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors, selon le moyen :
1°/ que tenu d'une obligation de sécurité de résultat, l'employeur doit en assurer l'effectivité et prendre toutes les mesures utiles pour préserver le salarié ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations des juges du fond que M. X... a été blessé à la tête par la « chute d'une traverse d'un poids d'environ 30 kilos qui s'est décrochée d'un portique », lorsqu'il rangeait des chandelles sur un chariot ; que la seule survenance de cet accident démontrait que l'employeur avait méconnu son obligation de sécurité de résultat et qu'il n'avait pas pris toutes les mesures nécessaires pour éviter l'accident, ce qui caractérisait sa faute inexcusable ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 4121-1du code du travail et L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;
2°/ qu'ayant démontré, en se fondant sur des témoignages de salariés de l'entreprise, corroborés par des photos, que l'employeur avait été averti depuis plus de deux ans que la poutrelle latérale des chariots n'était pas fixée sur les portants, et qu'elle avait chuté provoquant l'accident ; qu'il en résultait que M. X... avait caractérisé une situation dangereuse que l'employeur ne devait pas ignorer, et que l'absence de mesures prises pour protéger le salarié et éviter l'accident constituait la faute inexcusable de l'employeur ; qu'en décidant le contraire, sans s'expliquer sur ce point et aux motifs inopérants que l'employeur aurait été averti précisément du danger particulier des traverses lorsqu'elles sont « à cheval sur le reposoir », la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 4121-1 du code du travail et L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;
3°/ qu'ayant démontré qu'avant l'accident, l'employeur n'avait pas satisfait à son obligation de sécurité de résultat puisqu'il avait attendu sa survenance pour mettre en ¿uvre les mesures propres à l'éviter, ce qui caractérisait sa faute inexcusable ; qu'en décidant le contraire aux motifs inopérants que les « traverses ont été ultérieurement soudées sur les chariots » en raison « du changement d'utilisation des chariots et de leurs traverses », sans rechercher si un tel changement n'avait pas été dû à l'accident et à la prise de conscience de l'employeur qui n'avait pas satisfait auparavant à ses obligations, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 4121-1 du code du travail et L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu que l'arrêt, par motifs propres et adoptés, relève l'absence de preuve que la traverse ayant blessé M. X... lors de sa chute soit affectée d'un défaut ou ait présenté un problème technique connu de l'employeur, le caractère peu probant des attestations versées aux débats sur le déroulement précis de l'accident et de ses causes, les témoins se contentant de décrire la matérialité de l'accident et les blessures en résultant, l'absence d'élément matériel corroborant le témoignage du chef d'équipe sur l'existence d'un signalement antérieur du danger encouru et la défaillance de M. X... dans l'administration de la preuve lui incombant, le nombre suffisant de salariés présents sur site le jour de l'accident pour accomplir le travail demandé, la formation de sécurité reçue par M. X... portant sur la manipulation des différents matériels ;
Que de ces constatations procédant de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve débattus devant elle, la cour d'appel a pu déduire que l'accident du travail, dont M. X... avait été victime, n'était pas dû à la faute inexcusable de son employeur ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux janvier deux mille quinze et signé par Mme Flise, président, et par Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de la décision.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.
Moyen produit par la SCP Tiffreau, Marlange et de La Burgade, avocat aux Conseils, pour M. X....
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que M. X... ne démontrait pas la faute inexcusable de l'employeur et de l'AVOIR débouté en conséquence de l'ensemble de ses demandes.
AUX MOTIFS QUE : « la Cour rappelle que, dans le cadre de l'application de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque le salarié, victime d'un accident du travail invoque la faute inexcusable de l'employeur, il doit rapporter la preuve de l'existence de cette faute ; que l'appelant fait valoir que son employeur avait été prévenu depuis longtemps du risque d'accident que présentait le chariot lorsque les traverses n'étaient pas fixées en 'partie haute, que M. Y..., chef d'équipe avait signalé ce risque dont il attestait, et que ces traverses étaient d'ailleurs tombées à plusieurs reprises depuis 2002 ; que l'employeur conteste formellement ces affirmations et précise que d'une part il existe un doute sérieux sur les circonstances de l'accident, que d'autre part le risque de chute des traverses ne lui avait jamais été signalé, et qu'enfin il était impossible de les fixer en partie haute puisqu'elles devaient être écartées en fonction de l'épaisseur des chandelles qui s'accrochaient aux traverses pour y sécher ; que la Cour rappelle que, d'après ses propres déclarations, M. X... qui manoeuvrait le chariot de chandelles, avait reçu sur la tête une traverse qui s'était retrouvée « à cheval sur son reposoir ». que cet accident n'a eu aucun témoin immédiat, même si M. Y... est cité comme témoin dans la déclaration d'accident du travail : d'après ses déclarations, il est arrivé sur place alors que M. X... était déjà blessé ; que les photos versées par les parties permettent de constater que les traverses sont en fer, qu'elles sont légèrement plus longues que les montants du chariot et qu'à chaque extrémité elles se terminent par un « retour » à angle droit qui permet de les caler sur la partie haute du chariot (à environ 2.50-3.00 mètres du sol). Il apparaît évident que la fonction de ce type de chariot est d'y accrocher des pièces d'une hauteur correspondant à celle des traverses, donc environ 2.50 mètres ; que dans la mesure où il n'y a pratiquement pas de « jeu » entre les montants du chariot et les « retours » des traverses, pour qu'une traverse « se retrouve à cheval sur son reposoir », il faut que soient réunies un certain nombre de conditions ; que l'employeur ne voit qu'une seule possibilité à ce déplacement « en porte à faux » de la traverse : M. X... aurait manoeuvré le chariot en passant sous un convoyeur qui a accroché la traverse et l'a sortie de son emplacement ; que l'employeur précise que dans cette hypothèse, M. X... aurait alors effectué une manoeuvre fautive dont il était parfaitement informé car il avait suivi des cours de formation « gestes et postures de travail » en 2004 ; que l'appelant a contesté cette explication ; que toutefois, la Cour constate que l'appelant n'explique pas pour quelle raison il a manoeuvré le chariot vidé de ses chandelles, en restant à l'intérieur, donc sous les poutrelles, ni de quelle manière une pièce aussi lourde que la traverse IPN (20 kilos, précise-trip a pu se retrouver en porte à faux sans aucune intervention extérieure, puisqu'il conteste être passé sous le convoyeur, et sans qu'il s'en aperçoive, ni dans quelles circonstances cette traverse est tombée sur lui ; que la Cour considère, en conséquence, que l'employeur est fondé à soutenir que les circonstances de l'accident sont indéterminées ; que par ailleurs, la Cour constate qu'aucune pièce du dossier ne permet de dire que l'employeur aurait été averti d'un danger quelconque en relation avec le transport d'un tel chariot lorsqu'une des traverses serait « à cheval sur son reposoir » ; que la Cour ne saurait donc retenir que, Y..., chef d'équipe, aurait constaté, de longue date, l'existence d'un danger pour les salariés dans cette circonstance si particulière, et qu'il n'en aurait jamais parlé ni à l'employeur ni devant le CHSCT ; que le fait que ces traverses ont été ultérieurement soudées sur les chariots a été expliqué par le changement d'utilisation des chariots et de leurs traverses ; que l'appelant n'a pas démenti sérieusement cette explication fournie par l'employeur ; que la Cour constate que l'appelant n'a pas rapporté la preuve que son employeur l'aurait exposé à un danger dont il aurait dû avoir conscience et qu'il n'avait pris aucune mesure pour l'en préserver » (arrêt attaqué p. 3 et 4)
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE : « vu les articles L 452- 1 et suivants du Code de la sécurité sociale ; que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable au sens de l'article L 452-1 du Code de la Sécurité Sociale lorsque l'employeur avait ou aurait du avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris toutes les mesures nécessaires pour l'en préserver ; que par ailleurs il n'existe pas de présomption de faute inexcusable ; qu'en conséquence il incombe, selon le régime commun de la charge de la preuve de l'article 1315 du Code Civil, à la victime de prouver que l'employeur qui avait ou aurait du avoir conscience du danger auquel il était exposé, n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ; qu'en l'espèce, le Tribunal est forcé de constater que les circonstances et les causes exactes de l'accident dont a été victime M. X... Eric le 11 décembre 2005 ne sont pas clairement déterminées ; qu'il est en effet, seulement constant qu'il s'agit d'une chute d'une traverse d'un poids d'environ 30 kilos qui s'est décrochée d'un portique lorsque M. X... a rangé les chandelles ; que la preuve que celle-ci soit affectée d'un défaut n'est pas rapportée ; qu'au surplus et en dépit du fait que cet accident se soit déroulé en présence de témoins les collègues de travail de M. X..., le Tribunal constate que les attestations produites aux débats n'éclairent pas davantage sur le déroulement précis de l'accident et sur les causes exactes de ce dernier ; celle-ci se contentant de décrire la matérialité de l'accident qui n'est pas discutée et les blessures incontestables qui en sont résultées ; que le Tribunal estime en outre que le requérant n'a versé aucune pièce lui permettant de démontrer en fait et en droit en quoi l'employeur a eu ou aurait du avoir conscience du danger auquel était exposé son salarié et en quoi il n'a pas pris toutes les mesures de sécurité nécessaires pour l'en préserver ; qu'en effet en l'occurrence Monsieur X... se contente d'alléguer l'existence d'un problème technique sur la traverse qui s'est décrochée lorsqu'il a exercé sa manoeuvre de rangement dont son employeur avait ou aurait du avoir conscience et qui aurait été à l'origine certaine de l'accident dont il a été victime sans toutefois démontrer ni l'existence de ce problème technique, ni la connaissance par son employeur de l'existence d'un danger, ni son rôle certain dans l'accident qu'il a subi le 11 décembre 2005 ; que les dires de M. Y..., chef d'équipe, sur l'antériorité d'un problème technique affectant le matériel et sur le fait qu'il aurait déjà signalé à sa hiérarchie l'existence de ce danger avant l'accident litigieux ne sont corroborés par aucun élément matériel tels que par exemple, la production d'un écrit dans un cahier de liaison ou le signalement de ce problème au CHSCT ; que par contre qu'il n'est pas contestable que le nombre d'employés présents était au moment de l'accident était suffisant pour la tâche demandée et que M. X... avait reçu une formation de sécurité en rapport avec la manipulation des différents matériels selon l'attestation produite par l'employeur ; qu'en conséquence M. X... ne démontre pas la conscience qu'avait ou qu'aurait du avoir son employeur d'un danger auquel son salarié était exposé et qui aurait constitué en l'espèce à laisser manipuler son salarié un matériel qu'il savait défectueux et dangereux sans prendre de mesure de protection ; qu'en l'occurrence le Tribunal constate que M. X... est défaillant dans l'administration de la preuve des éléments constitutifs de la faute inexcusable de la SAPA PROFILES PUGET ; que dans ces circonstances aucune faute inexcusable ne peut être retenue à l'encontre de l'employeur ; qu'en conséquence M. X... doit être débouté de l'ensemble de ses demandes » (jugement entrepris p. 4 et 5)
ALORS QUE 1°) tenu d'une obligation de sécurité de résultat, l'employeur doit en assurer l'effectivité et prendre toutes les mesures utiles pour préserver le salarié ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations des juges du fond (arrêt attaqué p. 3 et jugement entrepris p. 4) que M. X... a été blessé à la tête par la « chute d'une traverse d'un poids d'environ 30 kilos qui s'est décrochée d'un portique », lorsqu'il rangeait des chandelles sur un chariot ; que la seule survenance de cet accident démontrait que l'employeur avait méconnu son obligation de sécurité de résultat et qu'il n'avait pas pris toutes les mesures nécessaires pour éviter l'accident, ce qui caractérisait sa faute inexcusable ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles L. 4121-I du Code du travail et L. 452-I du Code de la sécurité sociale.
ALORS QUE 2°) au surplus, dans ses conclusions d'appel du 7 novembre 2012, M. X... avait démontré (p. 3 et 4), en se fondant sur des témoignages de salariés de l'entreprise, corroborés par des photos, que l'employeur avait été averti depuis plus de deux ans que la poutrelle latérale des chariots n'était pas fixée sur les portants, et qu'elle avait chuté provoquant l'accident ; qu'il en résultait que M. X... avait caractérisé une situation dangereuse que l'employeur ne devait pas ignorer, et que l'absence de mesures prises pour protéger le salarié et éviter l'accident constituait la faute inexcusable de l'employeur ; qu'en décidant le contraire, sans s'expliquer sur ce point et aux motifs inopérants que l'employeur aurait été averti précisément du danger particulier des traverses lorsqu'elles sont « à cheval sur le reposoir », la Cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 4121-I du Code du travail et L. 452-I du Code de la sécurité sociale.
ALORS QUE 3°) et en toute hypothèse, dans ses mêmes conclusions d'appel (p.4) M. X... avait démontré qu'avant l'accident, l'employeur n'avait pas satisfait à son obligation de sécurité de résultat puisqu'il avait attendu sa survenance pour mettre en oeuvre les mesures propres à l'éviter, ce qui caractérisait sa faute inexcusable ; qu'en décidant le contraire aux motifs inopérants que les « traverses ont été ultérieurement soudées sur les chariots » en raison « du changement d'utilisation des chariots et de leurs traverses », sans rechercher si un tel changement n'avait pas été dû à l'accident et à la prise de conscience de l'employeur qui n'avait pas satisfait auparavant à ses obligations, la Cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 4121-I du Code du travail et L. 452-I du Code de la Sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 14-10600
Date de la décision : 22/01/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 05 décembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 22 jan. 2015, pourvoi n°14-10600


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Tiffreau, Marlange et de La Burgade

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.10600
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