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14/01/2015 | FRANCE | N°13-25767

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 14 janvier 2015, 13-25767


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur la recevabilité du moyen unique, contestée par la défense :
Attendu que, contrairement à ce que soutient l'employeur, l'arrêt énonce que le salarié a fait valoir que la modification d'horaire décidée par l'employeur entraînait un passage à un horaire de nuit constituant une modification de son contrat de travail nécessitant son accord ; que le moyen, qui n'est pas nouveau, est recevable ;
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 3122-29 du code du travail, ensemble les articles L. 1221-1 du même

code et 1134 du code civil ;
Attendu, selon le premier de ces textes, qu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur la recevabilité du moyen unique, contestée par la défense :
Attendu que, contrairement à ce que soutient l'employeur, l'arrêt énonce que le salarié a fait valoir que la modification d'horaire décidée par l'employeur entraînait un passage à un horaire de nuit constituant une modification de son contrat de travail nécessitant son accord ; que le moyen, qui n'est pas nouveau, est recevable ;
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 3122-29 du code du travail, ensemble les articles L. 1221-1 du même code et 1134 du code civil ;
Attendu, selon le premier de ces textes, que tout travail entre 21 heures et 6 heures est considéré comme travail de nuit ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé en octobre 2003 en qualité d'ouvrier agricole par M. Y... ; qu'il a pris acte de la rupture de son contrat de travail le 8 septembre 2009 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale pour voir juger que la rupture produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et obtenir le paiement de diverses sommes ;
Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que l'employeur a modifié les horaires de travail sans remettre en cause la durée du temps de travail ; que cette mesure relève de l'exercice de son pouvoir de direction et ne constitue pas une modification unilatérale du contrat de travail ; qu'aucun manquement de nature à justifier la prise d'acte ne peut lui être reproché à ce titre ;
Attendu, cependant, que le passage, même partiel, d'un horaire de jour à un horaire de nuit constitue une modification du contrat de travail qui doit être acceptée par le salarié ; qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté, par motifs adoptés, que le nouvel horaire comportait un travail avant 6 heures et qu'il lui appartenait de rechercher s'il n'en résultait pas un manquement de l'employeur rendant impossible la poursuite du contrat de travail, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de ses demandes tendant à ce que la prise d'acte produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et à la condamnation de M. Y... à lui verser certaines sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité de préavis et de congés payés afférents à cette indemnité, l'arrêt rendu le 14 novembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur les points restant en litige, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être faire droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze janvier deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement qui a débouté M. X... de sa demande visant à voir juger que sa prise d'acte de rupture s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de ses demandes subséquentes de condamnation de M. Y... à lui payer une indemnité de préavis, une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE par des motifs précis, pertinents et complets, adoptés par la cour, le conseil de prud'hommes a dit qu'il n'y a pas de manquements graves de la part de l'employeur de nature à fonder une prise d'acte dans le fait d'avoir usé de son pouvoir de direction pour changer l'horaire de travail, ce changement n'étant pas constitutif d'une modification du contrat de travail nécessitant l'accord préalable du salarié d'une part et d'autre part dans le fait d'avoir modifié les dates de congés eu égard à la situation difficile rencontrée par l'entreprise, dès lors que par courrier du 11 mai 2009 l'employeur a clairement dit que cela se ferait sur la base du volontariat ; quant aux indemnités de panier, elles ont été versées conformément à l'article 21 de la convention collective applicable dans l'entreprise prévoyant le cas où le salarié ne peut pas retourner à son domicile pour déjeuner du fait de son éloignement ; que ces indemnités ont été régulièrement portées sur le bulletin de paie du salarié et payées, elles ne correspondent pas au paiement d'heures supplémentaires ni à l'exécution d'un travail dissimulé ; que dès lors M. X... ne disposait pas de griefs suffisamment graves pour justifier sa décision de mettre fin unilatéralement au contrat de travail ;
Et aux motifs adoptés des premiers juges qu'en l'espèce, le 8 septembre 2009, M. X... informe l'employeur de son souhait de mettre fin à la relation de travail les unissant dénonçant ainsi une modification abusive des horaires de travail, une fixation arbitraire des congés payés, ainsi que le paiement d'heures supplémentaires sous forme de paniers et de frais professionnels ; que pour finir, il fait état d'une dégradation des relations de travail en lien avec la procédure engagée devant le conseil de prud'hommes par son épouse à l'encontre de M. Y... ; que sur les congés et les horaires, au soutien de ses demandes, M. X... produit les courriers adressés par l'employeur :-11 mai 2009 : demande de l'employeur de solder les congés (24 jours) à compter du 22 mai 2009 pour faire face aux difficultés rencontrées par l'entreprise (congés pris du 25 mai au 22 juin) ;-16 juin 2009 pour un changement d'horaires à compter du 22 juin (6 heures à 9 heures et 10 heures à 13 heures) ;-8 juillet 2009 : avertissement pour non-respect des horaires donnés de manière verbale par l'employeur demandant aux salariés de se présenter non plus à 6 heures mais à 5 heures.-17 août 2009 : fixation des congés à compter du 24 août jusqu'au 1er septembre ; que sur les congés payés et la modification des horaires, l'employeur met en avant son pouvoir de direction mais également la nécessité de gérer des difficultés financières rencontrées par l'exploitation agricole ; qu'ainsi, il explique faire face à une diminution de son chiffre d'affaires de 25 % de 2008 à 2009 ; qu'il dénonce au contraire le refus du salarié de débuter l'activité à 5 heures du matin alors même que cette mesure concerne l'ensemble du personnel et se justifie pas la gestion même des chantiers ; qu'en l'état, la jurisprudence admet que lorsque l'employeur modifie le contrat de travail d'un salarié sans obtenir son accord préalable, ce dernier peut se considérer comme licencié de manière irrégulière voir abusive ; que par contre, lorsqu'il se contente, dans l'exercice de son pouvoir de direction, de modifier les conditions de travail d'un salarié, celui-ci ne saurait refuser de poursuivre l'exécution de son travail sans commettre de faute ; qu'en l'espèce, en l'absence de remise en cause de la durée du temps de travail, la modification de l'horaire de travail (5 heures au lieu de 6 heures) ne constitue pas une modification du contrat de travail nécessitant l'accord préalable du salarié ; qu'à ce titre, M. Y... n'a fait qu'user de son pouvoir de direction et n'a commis aucune faute de nature à justifier la rupture du contrat à ses torts alors même que d'autres salariés sont concernés par cette mesure tel que cela ressort des attestations produites au débat (...) ;

ALORS QUE le passage, même partiel, d'un horaire de jour à un horaire de nuit constitue une modification du contrat de travail qui doit être acceptée par le salarié ; qu'à défaut d'un tel accord, cette modification fait produire à la prise d'acte du salarié les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'ayant constaté que le nouvel horaire imposé par M. Y... à M. X... débutait à 5 heures au lieu de 6 heures, ce dont il s'évince que l'employeur a fait passer le salarié d'un horaire de jour à un horaire de nuit et en considérant cependant, pour en déduire que M. X... ne justifiait pas de faits graveS de nature à motiver une rupture du contrat aux torts de l'employeur, qu'un tel changement d'horaire n'était pas constitutif d'une modification du contrat de travail nécessitant l'accord préalable du salarié au motif inopérant que la durée du temps de travail n'avait pas été remise en cause, la cour d'appel a violé les articles L. 3122-29, L. 1221-1, 1231-1 du code du travail ensemble l'article 1134 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-25767
Date de la décision : 14/01/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 14 novembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 14 jan. 2015, pourvoi n°13-25767


Composition du Tribunal
Président : Mme Vallée (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Ricard, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.25767
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