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07/01/2015 | FRANCE | N°14-86850

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 07 janvier 2015, 14-86850


Statuant sur les pourvois formés par :

- M. Tite X..., - M. Octavien Y...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 1re section, en date du 25 septembre 2014, qui les a renvoyés devant la cour d'assises de Paris sous l'accusation de génocide et autres crimes contre l'humanité ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'après l'attentat du 6 avril 199

4, dans lequel le président de la République du Rwanda, M. Z..., a trouvé la mort, la ...

Statuant sur les pourvois formés par :

- M. Tite X..., - M. Octavien Y...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 1re section, en date du 25 septembre 2014, qui les a renvoyés devant la cour d'assises de Paris sous l'accusation de génocide et autres crimes contre l'humanité ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'après l'attentat du 6 avril 1994, dans lequel le président de la République du Rwanda, M. Z..., a trouvé la mort, la commune de Karabondo a été l'objet d'attaques ciblées visant la population civile tutsie ; que M. Y..., bourgmestre de la commune, et M. X..., ancien bourgmestre et responsable local du parti présidentiel, ont été reconnus comme présents sur les lieux de plusieurs exactions, notamment, le 13 avril 1994, lors du massacre d'environ 3 500 personnes d'origine tutsi réfugiées dans l'église de Karabondo ;
Attendu que, des demandes d'extradition concernant M. Y...et M. X... ont été adressées par les autorités rwandaises ; que, sur plainte du Collectif des parties civiles pour le Rwanda, M. Y...a été interpellé à Mamoudzou, sous une fausse identité, le 31 mai 2010 ; qu'une information a été ouverte contre lui des chefs de génocide, crimes contre l'humanité, entente ou groupement formé en vue de la préparation de ces crimes ; que le procureur de la République de Toulouse a ouvert, le 28 mars 2011, une information des mêmes chefs contre M. X..., interpellé dans le ressort de cette juridiction ; qu'en effet, la loi du 22 mai 1996, portant adaptation de la législation française aux dispositions de la résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies instituant un tribunal international en vue de juger les personnes présumées responsables d'actes de génocide ou d'autres violations graves du droit international humanitaire commises en 1994 au Rwanda, a donné compétence aux juridictions françaises pour instruire et juger les auteurs ou complices de telles infractions découverts sur le territoire national ; qu'après rejet des demandes d'extradition, la Cour de cassation a dessaisi, par arrêts des 23 juin 2010 et 25 mai 2011, les juges d'instruction de droit commun et renvoyé la procédure au juge d'instruction du pôle spécialisé du tribunal de grande instance de Paris ; que la jonction des deux procédures a été ordonnée le 16 juillet 2013 ;
Attendu qu'au terme de l'information, les juges d'instruction ont prononcé, le 28 mai 2014, un non-lieu partiel du chef de participation à un groupement formé ou à une entente établie en vue de la préparation des crimes de génocide et autres crimes contre l'humanité et mis en accusation MM. Y...et X... pour génocide et autres crimes contre l'humanité commis en avril 1994 ; que, sur leur appel, la chambre de l'instruction a, par arrêt du 25 septembre 2014, confirmé l'ordonnance des juges d'instruction ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation proposé pour M. X..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 211-1, 212-1 du code pénal, préliminaire, 181, 184, 214, 215, 327, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé la mise en accusation de M. X... des chefs de génocide et crime contre l'humanité ;
" aux motifs qu'il ressort clairement des termes de l'ordonnance intimée qui viennent d'être cités que les magistrats instructeurs (¿) font à juste titre ressortir des pièces versées au dossier charges suffisantes à l'encontre des mis en examen au titre des éléments constitutifs des infractions retenues à leur encontre, et y compris sur le plan intentionnel ; qu'en application des dispositions de l'article 211 du code de procédure pénale, s'agissant du rôle incombant à la chambre de l'instruction dans le cadre de l'appel d'une décision de mise en accusation : " Elle examine s'il existe contre la personne mise en examen des charges suffisantes " ; que l'examen de la culpabilité de la personne mise en examen au regard des charges existantes à son encontre est du seul ressort de la juridiction de jugement susceptible d'être saisie ; qu'il résulte des mémoires produits au nom des mis en examen appelants que la mise en cause des témoignages versés au dossier a trait aux conditions dans lesquelles ils ont été recueillis au regard des exigences du contradictoire alléguées par la défense et à la crédibilité de leurs auteurs en raison du climat institutionnel attribué aux autorités rwandaises ; que ne sont en revanche nullement contestés ni l'existence ni le contenu même de ces témoignages figurant au dossier, les termes de leur reprise par les magistrats instructeurs dans la décision querellée n'étant donc pas en jeu ; que de surcroît les magistrats instructeurs, qui exposent clairement que " L'analyse des faits objet de la présente information repose principalement sur les très nombreux témoignages recueillis au Rwanda par les enquêteurs de la Section de Recherches de la gendarmerie de Paris et par les magistrats instructeurs ", indiquent expressément : " A titre liminaire, il y a donc lieu de préciser que le poids du temps sur la mémoire et le fait que la majorité des témoins ne disposait pas de véritables repères pour situer tel ou tel événement (montre, calendrier ¿) est susceptible d'avoir occasionné des inexactitudes dans la relation des faits vécus ou subis. Il ne saurait en conséquence être reproché aux personnes entendues de ne pas avoir conservé le souvenir de chaque détail des événements et il apparaîtrait pour le moins disproportionné de disqualifier, dans cette hypothèse, l'ensemble d'une déposition en raison de divergences avec tel ou tel autre témoignage, ou de variations non significatives avec une précédente audition. Autrement dit, les récits portés par les témoignages peuvent conserver une réelle authenticité, malgré des imprécisions ou des contradictions mineures relatives notamment aux dates, heures, lieux et évaluations chiffrées. Evidemment, si certaines variations dans les déclarations successives peuvent être admises comme inhérentes au temps écoulé, à l'évolution et à la sélectivité de la mémoire, les dépositions affectées par trop de modifications ou d'invraisemblances ¿ particulièrement lorsqu'elles concernent le comportement des mis en cause ¿ ne sauraient être retenues ; que par ailleurs, il ne saurait être considéré, comme le suggère le conseil de M. Y...dans ses récentes conclusions, que les témoignages recueillis sont entachés ¿ par principe et dans leur globalité ¿ d'un défaut de crédibilité, en raison d'un " contexte " qui empêcherait toute relation sincère des faits ; que seul un examen attentif du contenu des dépositions et leur recoupement avec les autres éléments objectifs du dossier, doit permettre d'asseoir, ou non, leur crédibilité ; qu'aussi, en dépit de divergences inhérentes à l'écoulement du temps et au climat souvent confus des crimes de masse, l'information devait permettre de dégager une chronologie globale des différents événements survenus dans le ressort de la commune de Kabarondo à partir du 6 avril 1994 " ; que les jurisprudences citées par le conseil de M. X... au soutien de sa mise en cause des conditions de fonctionnement des autorités rwandaises par rapport à la présente procédure ont principalement trait à des procédures d'extradition alors que la chambre de l'instruction a à connaître de cette affaire dans un cadre sans commune mesure avec de telles procédures, ayant simplement à se prononcer sur l'existence de charges suffisantes par rapport à l'éventualité de la mise en accusation des appelants devant la juridiction française de jugement que représente la cour d'assises ; que la mise en cause de la validité des auditions a déjà été soumise à la chambre de l'instruction dans le cadre d'une requête en nullité ; que la chambre de l'instruction a dit n'y avoir lieu à annulation à ce titre ; que le pourvoi formé à l'encontre de cette décision a été rejeté ; que la mise en cause d'une prétendue collusion entre les membres du pôle crime contre l'humanité ne relève pas du présent contentieux ; que la demande subsidiaire aux fins de voir ordonner une liste d'auditions en présence du conseil de la personne mise en examen et un transport sur les lieux, toujours en présence du conseil de la personne mise en examen, ne saurait prospérer au stade du présent contentieux devant la chambre de l'instruction, les actes demandés ayant fait l'objet d'une ordonnance motivée de refus de la part des magistrats instructeurs et ce refus ayant été confirmé par le président de la chambre de l'instruction qui, dans le cadre de ses attributions au titre de l'article 186-1 du code de procédure pénale, a dit n'y avoir lieu de saisir la chambre de l'instruction de l'appel formé à l'encontre de ce refus, le recours formé à l'encontre de l'ordonnance du président n'ayant pas été admis ; que la référence aux termes de la décision de la Cour de cassation du 20 juin 2012 au soutien de cette demande subsidiaire, outre le fait qu'il s'agit d'une interprétation de ces termes, peut d'autant moins constituer un argument dirimant pour une telle demande devant la chambre de l'instruction au mépris des décisions déjà intervenues au stade de la procédure d'instruction que les actes sollicités ont toute faculté d'être demandés devant la juridiction de jugement, s'agissant de surcroît de la cour d'assises devant laquelle l'instruction se poursuit oralement jusqu'à la clôture des débats ; qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a donc lieu de confirmer dans tous ses termes l'ordonnance entreprise ;

" 1°) alors que nul ne peut être jugé ni mis en accusation au terme d'une procédure ne garantissant pas le droit à un procès équitable ; qu'en refusant d'exercer un contrôle sur ce point au motif qu'elle avait simplement à se prononcer sur l'existence de charges suffisantes par rapport à l'éventualité de la mise en accusation devant la juridiction de jugement, la chambre de l'instruction a méconnu son office ;
" 2°) alors que tout en évoquant, pièces à l'appui, l'existence connue, documentée et judiciairement constatée, tant par le TPIR que par les juges français saisis de demandes d'extradition, de pressions sur les personnes appelées à témoigner dans les affaires de génocide au Rwanda ne permettant pas de garantir le droit à un procès équitable, M. X..., qui n'invoquait pas qu'un « climat institutionnel » ou un « contexte », offrait de prouver que de telles pressions avaient été subies dans le cadre de la présente procédure (procédure « bâtie » sur des témoignages de témoins préalablement auditionnés par les autorités rwandaises par un seul officier rwandais d'un service de police spécialement créé pour enquêter sur le génocide rwandais ; déformation des déclarations ainsi recueillies des témoins Mmes et MM. Joas C..., D...alias Kagingi E..., Berthilde F..., Célestin G...et Marie H..., apparues lors des auditions devant les enquêteurs français, révélant les pressions subies ; témoins ne répondant pas aux questions posés par les enquêteurs français, comme s'ils avaient été « conditionnés » préalablement, tel le cas de Florian I...) ; qu'en outre, il faisait valoir que la défense avait été totalement exclue des investigations réalisées au Rwanda (absence de convocation des avocats lors des transports sur les lieux ; impossibilité pour les avocats de pouvoir bénéficier d'une autorisation de se rendre au Rwanda ; traitement de faveur réservé à l'association plaignante par les autorités rwandaises dans le recollement de preuves) ; qu'en s'abstenant de rechercher si l'équité de la procédure ne s'en trouvait pas irrémédiablement compromise, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision ;
" 3°) alors qu'en motivant sa décision par voie de référence prohibée à une décision de la chambre de l'instruction intervenue sur une requête en nullité déposée par M. Y..., avant jonction des procédures, la chambre de l'instruction n'a pas mieux justifié sa décision ;
" 4°) alors que la défense de M. X..., qui soulignait le caractère inhabituellement contradictoire des déclarations (sur des éléments aussi essentiels que la date des faits, le rôle du demandeur ou le fait qu'il fût armé) et le traitement déséquilibré réservé par l'ordonnance entreprise aux témoignages à décharge par rapport aux témoignages à charge (aussi contradictoires et confus soient-ils), invitait la chambre de l'instruction à s'interroger sur la crédibilité d'une quinzaine de témoins, lourdement condamnés au titre du génocide rwandais, encore détenus et en attente de pouvoir bénéficier d'aménagement ou de remise de peine, de sorte que même si ces témoins avaient été ré-auditionnés par les enquêteurs spécialisés français et/ ou les juges d'instruction, leur parole ne pouvait être considérée comme libre ; qu'en se fondant sur ces témoignages sans répondre à ce chef péremptoire des écritures, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision " ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé pour M. X..., pris de la violation des articles 6, § 1 et § 3, a), de la Convention européenne des droits de l'homme, 214, 215 et 231 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé la mise en accusation de M. X... pour avoir, dans le ressort de la commune de Kabarondo (préfecture de Kibungo), en avril 1994, en tous cas au Rwanda, commis ou fait commettre des atteintes volontaires à la vie et des atteintes graves à l'intégrité physique ou psychique des personnes, en exécution d'un plan concerté tendant à la destruction totale ou partielle d'un groupe national, ethnique, racial ou religieux, ou d'un groupe déterminé à partir de tout autre critère arbitraire, en l'espèce le groupe ethnique tutsi et pour avoir, dans le ressort de la commune de Kabarondo (préfecture de Kibungo), en avril 1994, en tous cas au Rwanda, participé à une pratique massive et systématique d'exécutions sommaires, inspirée par des motifs politiques, philosophiques, raciaux ou religieux, et organisée en exécution d'un plan de concerté à l'encontre d'un groupe de population civile, en l'espèce la population civile tutsi ;
" alors que seuls les faits, qualifiés crimes, pour lesquels l'existence de charges suffisantes au sens de l'article 211 du code de procédure pénale est constatée, peuvent justifier la mise en accusation ; que l'arrêt attaqué, qui ne retient à l'encontre de M. X... que des charges relatives à des faits commis le 13 avril 1994, et constate l'absence de charges suffisantes pour les autres faits dont le juge d'instruction avait été saisi, qui se sont déroulés du 7 au 12 avril 1994 et après le 13 avril 1994, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations en procédant, dans son dispositif, à la mise en accusation dans les termes susvisés " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que les juges d'instruction cosaisis ont délivré plusieurs commissions rogatoires aux services d'enquête français aux fins, en se transportant sur place dans le cadre de l'entraide pénale internationale, de recueillir des documents sur le déroulement des faits dénoncés, d'assister aux constatations effectuées par les policiers rwandais et de procéder à des auditions ; que les juges d'instruction ont eux-mêmes effectué, à leur propre initiative, après accord des autorités rwandaises et avis donnés au procureur de la République et à l'avocat de M. X..., quatre transports sur les lieux afin d'entendre directement des témoins dénommés ; qu'au cours de ces transports, certains des témoins ont notamment pu être confrontés à la personne mise en examen par visio-conférence ;
Attendu que, pour rejeter la demande d'infirmation de l'ordonnance fondée sur le caractère inéquitable de la procédure suivie, laquelle dépendrait de témoignages, parfois contradictoires, obtenus sous la pression des autorités rwandaises et hors la présence de la défense de M. X..., l'arrêt prononce par les motifs repris aux moyens ;
Attendu qu'en cet état, la chambre de l'instruction a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquée ;
Que, d'une part, les actes d'investigation et d'auditions des témoins, accomplis au Rwanda par les juges d'instruction, dans les formes définies, en l'absence de convention d'entraide liant la République du Rwanda et la France, par l'autorité judiciaire de l'Etat requis, respectant les dispositions de l'article 102 du code de procédure pénale, ne portent atteinte ni au principe d'égalité des armes ni aux droits de la défense, le demandeur ayant eu la possibilité, au cours des interrogatoires, de contester la valeur probante ou la crédibilité des déclarations recueillies et de demander, par application des dispositions de l'article 82-1 du code de procédure pénale, tout acte lui paraissant nécessaire ;
Que, d'autre part, il appartiendra, le cas échéant, au demandeur de discuter devant la juridiction de jugement le contenu des témoignages recueillis ;
Qu'enfin, les juridictions d'instruction apprécient souverainement si les faits résultant de l'entier dossier et relevés à la charge de la personne mise en examen sont, aux dates retenues, constitutifs d'une infraction, la Cour de cassation n'ayant d'autre pouvoir que de vérifier si, à supposer ces faits établis, la qualification justifie la saisine de la juridiction de jugement ;
D'où il suit que les moyens ne peuvent qu'être écartés ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé pour M. X..., pris de la violation du principe non bis in idem, des articles 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, 132-2, 211-1 et 212-1 (dans leur rédaction en vigueur au 1er mars 1994) du code pénal, 214, 215, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé la mise en accusation de M. X... pour avoir, dans le ressort de la commune de Kabarondo (préfecture de Kibungo), en avril 1994, en tous cas au Rwanda, commis ou fait commettre des atteintes volontaires à la vie et des atteinte graves à l'intégrité physique ou psychique des personnes, en exécution d'un plan concerté tendant à la destruction totale ou partielle d'un groupe national, ethnique, racial ou religieux, ou d'un groupe déterminé à partir de tout autre critère arbitraire, en l'espèce le groupe ethnique tutsi et pour avoir, dans le ressort de la commune de Kabarondo (préfecture de Kibungo), en avril 1994, en tous cas au Rwanda, participé à une pratique massive et systématique d'exécutions sommaires, inspirée par des motifs politiques, philosophiques, raciaux ou religieux, et organisée en exécution d'un plan de concerté à l'encontre d'un groupe de population civile, en l'espèce la population civile tutsi ;
" aux motifs qu'en vertu du principe du cumul idéal d'infractions, lorsqu'un même fait a porté atteinte à plusieurs valeurs sociales différentes ou lorsque plusieurs intentions différentes ont animé l'auteur d'un seul comportement matériel, une jurisprudence constante et déjà ancienne admet que plusieurs qualifications soient susceptibles d'être retenues (cf. notamment crim., 3 mars 1960, 21 septembre 1999) ; qu'en l'espèce, les deux incriminations présentent des éléments constitutifs distincts, visent des valeurs protégées distinctes et des intentions criminelles différentes ; que le crime de génocide vise à protéger des groupes déterminés de leur destruction totale ou partielle ; que les autres crimes contre l'humanité visent quant à eux à protéger " un groupe de population civile " contre des atteintes à leur intégrité physique ou psychique, sans qu'il ne soit requis que les actes visés mettent à exécution un plan dont la finalité est sa destruction totale ou partielle ; qu'ainsi, les faits reprochés dans le présent dossier, s'ils sont constitués, pourront être poursuivis sous les qualifications de génocide et de crimes contre l'humanité " ; (¿) que c'est à juste titre que le procureur général relève que : " En application des principes relatifs au concours d'infraction, le crime de génocide et les crimes contre l'humanité tels que définis à l'article 212-1 du code pénal présentent des éléments constitutifs distincts, et diffèrent quant aux valeurs protégées. Ainsi, les deux qualifications peuvent être retenues pour les mêmes faits (Cass. Crim., 19 avril 1956). Le crime de génocide vise à protéger des groupes déterminés de leur destruction totale ou partielle. Les autres crimes contre l'humanité visent quant à eux à protéger " un groupe de population civile " contre des atteintes à son intégrité physique ou psychique, sans qu'il soit requis que les actes visés mettent à exécution un plan dont la finalité est sa destruction totale ou partielle ;
" 1°) alors qu'il y a cumul idéal d'infractions lorsqu'un fait unique est susceptible de deux qualifications différentes, la qualification la plus haute devant alors seule être retenue ; que, dans leur version applicable en 1994, les articles 211-1 et 212-1, figurant tous deux au titre des crimes contre l'humanité, visaient chacun à protéger un groupe de population donné, visé en tant que tel, pour un motif discriminatoire, en exécution d'un plan concerté dirigé contre ladite population ; qu'une pratique massive et systématique d'exécutions sommaires, inspirée par un motif racial, en exécution d'un plan concerté visant un certain groupe rejoint, en termes d'intention, la mise à exécution d'un plan concerté tendant à la destruction totale ou partielle du même groupe pour ce même motif ; qu'en jugeant néanmoins que ces textes, dans leur version alors en vigueur, visent à protéger des valeurs distinctes et des intentions criminelles distinctes pour écarter tout cumul idéal d'infraction, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés ;
" 2°) alors que l'élément déterminant dans l'appréciation du cumul idéal d'infractions doit être l'identité du comportement adopté par un individu ; que les faits objet de la mise en accusation, qualifiés par l'arrêt d'atteintes volontaires à la vie en exécution d'un plan concerté tendant à la destruction totale ou partielle du groupe ethnique tutsi et de participation à une pratique massive et systématique d'exécutions sommaires, inspirée par des motifs politiques, philosophiques, raciaux ou religieux, et organisée en exécution d'un plan de concerté à l'encontre de la population civile tutsi, sont identiques et réalisent un cumul idéal d'infraction ; que l'arrêt retient le dessein criminel commun des comportements incriminés ; qu'en mettant M. X... en accusation pour ces mêmes faits sous la double qualification de génocide et crime contre l'humanité au sens de l'article 212-1 dans sa version applicable en 1994, la chambre de l'instruction a derechef violé les textes visés au moyen " ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé pour M. Y..., auquel se réfère M. X..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 111-3 et 111-4, 211-1 et 212-1 du code pénal, de l'article préliminaire, des articles 214, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble violation du principe non bis in idem et des droits de la défense ;
" en ce que la cour a prononcé la mise en accusation du requérant des chefs de génocide et de crimes contre l'humanité à raison des massacres commis en avril 1994 dans le ressort de la commune de Kabarondo sur des citoyens rwandais ;
" aux motifs que M. Y...conteste inutilement l'application de deux qualifications distinctes de génocide et de crimes contre l'humanité pour des faits qu'il considère comme identiques ; qu'en vertu en effet du principe du cumul illégal d'infractions, lorsqu'un même fait a porté atteinte à plusieurs valeurs sociales différentes ou lorsque plusieurs intentions différentes ont animé l'auteur d'un seul comportement matériel, une jurisprudence constante et déjà ancienne admet que plusieurs qualifications soient susceptibles d'être retenues ; qu'en l'espèce, les deux incriminations présentent des éléments constitutifs distincts, visant des valeurs protégées différentes et des intentions criminelles différentes ; que le crime de génocide vise à protéger des groupes déterminés de leur destruction totale ou partielle ; que les autres crimes contre l'humanité visent quant à eux à protéger « un groupe de population civile » contre des atteintes à leur intégrité physique ou psychique, sans qu'il soit requis que les actes visés mettent en exécution un plan dont la finalité est sa destruction totale ou partielle ; qu'ainsi, les faits reprochés dans le présent dossier, s'ils sont constitués, pourront être poursuivis sous la qualification de génocide et de crimes contre l'humanité ; que la notion de « plan concerté » retenue par l'article 211-1 du code pénal incriminant le génocide et distincte de la notion d'« entente » réprimée par le statut du TPIR ; qu'il y a lieu de distinguer le mode de participation à une infraction du cadre dans lequel l'infraction est commise ; que le « plan concerté » est en droit interne le cadre dans lequel les actes matériels ont été commis ; qu'en outre, le droit pénal incrimine de façon distincte en son article 212-3 l'entente établie en vue de la préparation du crime de génocide ; qu'il serait contraire aux textes de loi d'exiger du « plan concerté » qu'il ait en outre un caractère étatique ; que l'incrimination n'est pas restrictive, le « plan concerté » pouvant se déduire du caractère organisé des actes matériels d'exécution, la concertation étant ici synonyme d'action collective associant dans un dessein commun plusieurs individus ; qu'il n'est nullement indispensable que ces derniers aient reçu des instructions d'autorité ou d'autres personnes pour exécuter ce plan ; que par ailleurs, pour la période postérieure au 6 avril 1994, contrairement à ce que semble indiquer la défense du requérant, les décisions du TPIR ont toujours rejeté la thèse du chao généralisé basé sur une colère populaire incontrôlable pour retenir à l'inverse l'existence d'une campagne savamment orchestrée et terriblement efficace conduisant au massacre de la population tutsis ; qu'entre le 6 avril et le 17 juillet 1994, ont été commis au Rwanda des atteintes volontaires à la vie et des atteintes graves à l'intégrité physique ou psychique, en exécution d'un « plan concerté » tendant à la destruction totale ou partielle d'un groupe national, en l'espèce l'ethnie Tutsis, au sens de l'article 211-1 du code pénal français ; que selon l'article 212-1 du code pénal, le crime contre l'humanité, dans sa version en vigueur en 1994, consiste en « la déportation, la réduction d'esclavage ou la pratique massive et systématique d'exécutions sommaires, d'enlèvement de personnes suivies de leur disparition, de la torture ou d'actes inhumains, inspirés par des motifs politiques, philosophiques, raciaux ou religieux et organisés en fonction d'un « plan concerté » à l'encontre d'un groupe de population civile » ; que concernant les actes matériels, les exécutions sommaires s'entendent comme des atteintes volontaires à la vie ; qu'il s'agit d'atteintes injustifiées en ce qu'elles visent des personnes dites protégées, comme des civils ou des personnes placées hors de combat ; que les actes inhumains incluent tout autre acte de violence ; que, bien que rédigés différemment, les éléments contextuels tels que définis et établis par le TPIR recoupent les éléments de la définition française des crimes contre l'humanité prévus à l'article 212-1 du code pénal ; que se retrouvent dans les deux incriminations le caractère discriminatoire, la cible visée et le caractère massif et systématique de l'attaque (article 3 du statut du TPIR) ou de l'acte (article 212-1 du code pénal) ; que les caractéristiques marquantes des événements qui se sont déroulés au Rwanda en 1994 démontrent le caractère massif et systématique des exécutions sommaires et des actes inhumains commis contre les civils en raison de leur appartenance à l'ethnie Tutsis ou de leur lien avec ces derniers ; que pour être constitutive de crimes contre l'humanité en droit français, la pratique massive et systématique d'exécutions sommaires et d'actes inhumains doit également être organisée en exécution d'un plan concerté à l'encontre d'un groupe de population civile ; qu'à cet égard, il suffit de se référer au développement précédent qui rappelle que les comportements incriminés, actes organisés et non fortuits, s'inscrivaient dans une action collective visant un dessein criminel commun dirigé contre les Tutsis ; qu'il en résulte donc l'existence au Rwanda, entre le 6 avril et le 17 juillet 1994, d'une pratique massive d'exécution sommaire et d'actes inhumains organisés en exécution d'un « plan concerté » à l'encontre d'une populaire civile en raison de son appartenance à l'ethnie Tutsis ou en raison de son soutien réel ou présumé aux Tutsis, au sens de l'article 212-1 du code civil français ;
" 1°) alors qu'un même fait ne peut être poursuivi sous deux qualifications distinctes ; que l'incrimination spéciale du génocide au sens de l'article 211-1 du code pénal, en tant qu'elle est une catégorie spéciale de crimes contre l'humanité, prime sur l'incrimination générale prévue à l'article 212-1 ; que cette hiérarchie, si elle n'existe pas en droit international qui regarde lesdites incriminations comme indépendantes, s'impose en revanche au juge français dans le cadre de la loi interne en vertu du principe de légalité et de la règle non bis in idem imposant la primauté du texte spécial sur le texte général ;
" 2°) alors que le « plan concerté » en exécution duquel sont commis les crimes visés par les articles 211-1 et 212-1 du code pénal est de nature différente pour le crime de génocide (destruction totale ou partielle d'un groupe humaine) et pour les crimes contre l'humanité (attaque généralisée ou systématique) ; que l'accusation portant sur les mêmes faits pris sous deux qualifications différentes est imprécise sous le rapport de la nature du plan concerté en exécution duquel auraient été commis les faits reprochés au requérant ; que la cour devait en conséquence choisir et préciser les éléments du « plan concerté » objet de l'accusation, sauf à interdire au requérant de connaître avec précision la cause et l'objet de son renvoi criminel " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que l'information a notamment mis en évidence des ordres de sélection et de tri dans les populations tutsie et hutue, lesdits ordres, déterminant également le sort des couples mixtes et de leurs enfants, ayant été suivis d'exécutions sommaires des personnes concernées ;
Attendu que, pour renvoyer devant la cour d'assises les accusés des chefs de crime de génocide par atteintes volontaires à la vie et à l'intégrité physique et crime contre l'humanité par pratiques massives et systématiques d'exécutions sommaires à l'encontre d'un groupe de population civile, l'arrêt retient que ces deux incriminations présentent des éléments constitutifs distincts et visent des valeurs protégées et des intentions criminelles différentes ;
Attendu que les faits commis au mois d'avril 1994 peuvent recevoir plusieurs qualifications pénales différentes, dès lors que celles-ci ne présentent entre elles aucune incompatibilité et sont susceptibles, d'être appliquées concurremment, comme sanctionnant des comportements distincts tels que ceux prévus par les articles 211-1 et 212-1 du code pénal dans leur rédaction en vigueur au moment des faits ;
D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;
Sur le premier moyen de cassation proposé pour M. Y..., auquel se réfère M. X..., pris de la violation des articles 6, § 1, et 6, § 3, d, de la Convention européenne des droits de l'homme, 201 et suivants, 485, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que la chambre de l'instruction a rejeté l'appel formé par le requérant et n'a pas fait droit au complément d'information sollicité par sa défense à l'effet d'obtenir un transport sur les lieux et l'audition contradictoire de treize témoins à charge ;
" aux motifs que la mise en cause de la validité des auditions a déjà été soumise à la chambre de l'instruction dans le cadre d'une requête en nullité ; que la chambre de l'instruction a dit n'y avoir lieu à annulation à ce titre ; que le pourvoi formé à l'encontre de cette décision a été rejetée (¿) ; que la demande subsidiaire aux fins de voir ordonner une liste d'audition en présence du conseil de la personne mise en examen et un transport sur les lieux, toujours en présence de la personne mise en examen, ne saurait prospérer au stade du présent contentieux devant la chambre de l'instruction, les actes demandés ayant fait l'objet d'une ordonnance motivée de refus de la part des magistrats instructeurs et ce refus ayant été confirmé par le président de la chambre de l'instruction qui, dans le cadre de ses attributions au titre de l'article 186-1 du code de procédure pénale, a dit n'y avoir lieu de saisir la chambre de l'instruction de l'appel formé à l'encontre de ce refus, le recours formé à l'encontre de l'ordonnance du président n'ayant pas été admis ; que la référence au terme de la décision de la cour de cassation du 20 juin 2012 au soutien de cette demande, subsidiaire, outre le fait qu'il s'agit d'une interprétation de ces termes, peut d'autant moins constituer un argument dirimant (sic) pour une telle demande devant la chambre de l'instruction au mépris des décisions déjà intervenues au stade de la procédure d'instruction que les actes sollicités ont toute faculté d'être demandés devant la juridiction de jugement, s'agissant de surcroît de la cour d'assises devant laquelle l'instruction se poursuit oralement jusqu'à la clôture des débats ;
" 1°) alors que la cour n'a ni examiné ni statué sur la demande de transport sur les lieux dont elle avait été saisie, violant ainsi l'article 485 du code de procédure pénale ;
" 2°) alors que la cour dans le dispositif de son arrêt n'a pas statué sur la demande d'audition dont elle avait été expressément saisie ; que l'arrêt encourt également ainsi la nullité pour violation de l'article 485 ;
" 3°) alors que le droit fondamental de l'accusé d'interroger et de faire interroger les témoins à charge doit être garanti en temps utile, c'est-à-dire durant l'instruction dès lors que les déclarations contestées servent de soutien à la mise en accusation du requérant ; que l'ineffectivité de la garantie correspondante durant l'instruction préparatoire, lors même que lesdits témoins avaient seulement été entendus auparavant par le juge d'instruction et le parquet, réalise un déséquilibre de l'ensemble de la procédure préparatoire au préjudice de la défense, en violation des exigences d'un procès équitable " ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé pour M. Y..., auquel se réfère M. X..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 201 et suivants, 485, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que la chambre de l'instruction a refusé d'ordonner le versement au dossier des éléments figurant dans le réseau numérique virtuel du pôle crimes contre l'humanité ¿ crimes de guerre du tribunal de grande instance de Paris relatif au Rwanda ;
" aux motifs que la mise en cause d'une prétendue collusion entre les membres du pôle crimes contre l'humanité ne relève pas du présent contentieux ;
" 1°) alors que la cour dans le dispositif de son arrêt n'a pas statué sur la demande d'audition dont elle avait été expressément saisie ; que l'arrêt encourt ainsi la nullité pour violation de l'article 485 du code de procédure pénale ;
" 2°) alors que le requérant sollicitait le versement dans la procédure du dossier numérisé constitué par les assistants spécialisés du siège et mis à disposition du seul parquet à l'exclusion de la défense, lors même que les éléments de ce dossier étaient utiles à la manifestation de la vérité et pouvaient comprendre des éléments à décharge en faveur du mis en examen ; qu'en cet état, la cour n'a pu écarter cette demande légitime sans autrement s'en expliquer, violant ainsi de plus fort l'égalité des armes et les exigences du procès équitable " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il est vainement fait grief à l'arrêt d'avoir refusé d'ordonner les mesures sollicitées, dès lors que l'opportunité d'ordonner un supplément d'information est une question de pur fait qui échappe au contrôle de la Cour de cassation ;
D'où il suit que les moyens ne peuvent être admis ;
Et attendu que la procédure est régulière et que les faits, objet de l'accusation, sont qualifiés crimes par la loi ;
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 2 000 euros la somme que M. X... devra payer à l'association Collectif des parties civiles pour le Rwanda en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
FIXE à 2 000 euros la somme que M. Y...devra payer à l'association Collectif des parties civiles pour le Rwanda en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Guérin, président, M. Moreau, conseiller rapporteur, MM. Foulquié, Moignard, Castel, Raybaud, Mme Caron, conseillers de la chambre, M. Laurent, Mme Carbonaro, M. Beghin, conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Bonnet ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 14-86850
Date de la décision : 07/01/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 25 septembre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 07 jan. 2015, pourvoi n°14-86850


Composition du Tribunal
Président : M. Guérin (président)
Avocat(s) : Me Bouthors, Me Haas, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.86850
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