LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 3141-26 du code pénal ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué que Mme X..., engagée le 1er octobre 2000 en qualité de caissière polyvalente par la société Fair point gaz qui exploite une station service, a été licenciée pour faute lourde le 6 décembre 2005 ;
Attendu que pour dire le licenciement fondé sur une faute lourde, l'arrêt retient que des détournements de fonds opérés par de très fréquentes remises en cuve, permettant au responsable de la manipulation d'encaisser la vente pour son propre compte, sont imputables à la salariée qui se trouvait en service et seule chargée de la caisse les jours où ont été réalisées de façon très importante les opérations frauduleuses ; que la faute de la salariée étant clairement établie, c'est à bon droit que l'employeur l'a licenciée pour faute lourde ;
Qu'en statuant ainsi, sans relever l'intention de la salariée de nuire à l'employeur, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 juin 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France ;
Condamne la société Fair point gaz aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Faire point gaz à payer à la SCP Roger, Sevaux et Mathonnet la somme de 3 000 euros et rejette autre demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept décembre deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Roger, Sevaux et Mathonnet, avocat aux Conseils, pour Mme X...
Il est fait grief à l'arrêt affirmatif attaqué d'avoir débouté Madame X... de l'ensemble de ses demandes et de l'avoir condamnée à payer à la société Fair Point Gaz la somme de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Aux motifs que l'expert-comptable relève qu'entre janvier 2004 et septembre 2005, il y aurait eu mentionné sur les tickets de livraison carburant journaliers, dits tickets JC, 299 opérations de remise en cuve, là où il y aurait dû y en avoir moins de quatre, l'expert-comptable expliquant que les contrôles de pompes n'interviennent que deux fois par an au maximum ; qu'il ajoute que ces opérations correspondraient à 79 160,63 litres de carburants pour une valeur de 58 434,40 euros (étalées sur 21 mois, soit en moyenne 2 783 euros par mois) ; que selon le rapport de l'expert-comptable, le rapprochement des plannings entre janvier 2004 et septembre 2005 devait faire apparaître un point commun : la quasi-majorité (296 sur 299) des opérations de remise en cuve avaient été effectuées lorsque Mademoiselle X... était présente ; qu'à la lecture des pièces comptables, on constate que la marge avait diminué de 31,2 % en 2003 à 22,3 % en 2004 et 23,5 % en 2005 mais que suite au départ de Mademoiselle X..., cette marge est remontée à 33,6 % en 2006 ; ¿ que la cour constate que le tableau des permanences de Mademoiselle X... et la liste des jours où ont été opérées des remise s en cuve, de façon très importantes (296 sur 299), révèlent que Mademoiselle X... se trouvait alors en service et seule chargée de la caisse ; que la faute de Madame X... est donc clairement établie et que c'est à bon droit que l'employeur a licencié Mademoiselle X... Adeline pour faute lourde ;
Alors, de première part, que l'employeur est tenu d'énoncer les motifs du licenciement dans la lettre de licenciement ; qu'un motif imprécis équivaut à une absence de motif ; que ne saurait être considéré comme un motif de licenciement la seule expression dans la lettre de licenciement d'un soupçon exprimé au conditionnel ; que la Cour d'appel qui a constaté qu'en l'espèce, le licenciement de Madame X... est motivé par le fait qu'elle « serait » à l'origine de manipulations des cuves ayant entraîné une perte de chiffre d'affaires pour la société, ce dont il résulte que la lettre de licenciement était motivée par l'expression d'un simple soupçon et que le licenciement était de ce fait dépourvu de cause réelle et sérieuse ne pouvait le juger justifié par une faute lourde sans violer l'article L.1232-6 du code du travail ;
Alors, de seconde part, que la faute lourde est celle commise avec l'intention de nuire ; qu'en se déterminant par un motif inopérant déduit du préjudice causé à l'employeur sans caractériser l'intention de nuire prêtée à Madame X..., la Cour d'appel a privé sa décision de bases légales au regard de l'article L.3141-26 du code du travail ;