LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé à compter du 10 janvier 2005 en qualité de directeur des achats et des approvisionnements par la société Jean Y... ; que le 30 décembre 2009, il a saisi la juridiction prud'homale en demandant d'une part, le paiement de diverses sommes au titre du bonus 2009, des jours travaillés au-delà de son forfait et au titre du remboursement forfaitaire des frais, et en sollicitant, d'autre part, la résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur et le versement des indemnités de rupture et de dommages-intérêts ; que par lettre du 3 février 2010, M. X... a été licencié pour motif économique et a contesté subsidiairement ce licenciement devant la juridiction prud'homale ;
Sur les premier, deuxième, troisième et quatrième moyens du pourvoi incident du salarié :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal de l'employeur :
Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;
Attendu que pour dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur à verser au salarié diverses indemnités de rupture, l'arrêt retient que la société ne produit aucun budget prévisionnel fondant la crainte d'une perte de compétitivité ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le « dossier d'information Livre II du code du travail » relatif au « projet de restructuration de l'entreprise et projet de licenciement pour motif économique », auquel la cour d'appel s'est référé par ailleurs, comprend un budget prévisionnel pour l'exercice 2010 et des prévisions d'activité pour 2010-2011 et 2012, la cour d'appel qui a dénaturé, par omission, les termes clairs et précis de ce document, a violé le principe susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamné la société Jean Y... à verser à M. X... des sommes au titre du solde d'indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés afférents, ainsi que des dommages-intérêts avec capitalisation des intérêts, et à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage éventuellement versées à M. X... dans la limite de six mois sous déduction de la contribution versée en application de l'article L. 1233-69 du code du travail, l'arrêt rendu le 17 mai 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept décembre deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Jean Y...
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit sans cause réelle et sérieuse le licenciement de Monsieur X..., d'avoir condamné la société JEAN Y... à verser à Monsieur X... des sommes de 70. 000 ¿ de dommagesintérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 27. 133, 78 ¿ à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 2. 713, 37 ¿ de congés payés afférents et d'avoir condamné la société JEAN Y... à rembourser à Pôle Emploi les allocations chômage éventuellement versées à Monsieur X... dans la limite de six mois et sous déduction de la contribution versée en application de l'article L. 1233-69 du code du travail ;
AUX MOTIFS QUE « Sur le motif économique : la SAS Jean Y... fait valoir que la réorganisation de l'entreprise se justifiait par la nécessité de sauvegarder sa compétitivité et non à raison de difficultés économiques. C'est donc la réalité de ce motif qu'il convient d'examiner. Il convient de noter que la SAS Jean Y... ne produit aucun budget prévisionnel qui fonderait la crainte d'une perte de compétitivité. En outre, il ressort de ses propres données que " l'effondrement " du " marché du véhicule frigorifique " entre avril et décembre 2008 a touché tous les acteurs du marché et qu'elle-même sur le marché français avait sur les 9 premiers mois de 2009 " limité sa baisse d'activité en prenant plus de 10 points de part de marché à ses concurrents " tandis que ses parts de marché à l'export se sont " maintenues voire améliorées en 2009 par rapport à 2008 " (dossier d'information livre II du code du travail cote 44). Cette crise a donc amélioré sa compétitivité. La SAS Jean Y... estime elle-même " historique " son carnet de commande en 2007 et 2008. Elle ne saurait donc utilement s'y référer comme référence ce qu'elle indique d'ailleurs elle-même dans le document précité ni se référer aux chiffres d'affaires généré en 2007 et 2008 pour évaluer celui réalisé en 2009. En utilisant comme base de référence l'année 2006, la SAS Jean Y... estimait lorsqu'elle a établi ce document que cette activité serait retrouvée en 2012. Or, la reprise d'activité a manifestement été plus rapide puisque dès juillet 2010, la SAS Jean Y... a dû recourir à des heures supplémentaires pour faire face à ses commandes. Dès lors, la SAS Jean Y... à qui cette preuve incombe, n'établit nullement que sa compétitivité était en péril, les éléments produits tendant au contraire à démontrer que celle-ci s'est améliorée par rapport à ses concurrents. Le licenciement prononcé est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse. 2-2-3) Sur les conséquences du licenciement M. X... réclame d'une part un solde au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, d'autre part, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Sur le solde d'indemnité compensatrice de préavis En l'absence de motif économique de licenciement, la CRP devient sans cause de sorte que l'employeur est alors tenu à l'obligation de préavis et aux congés payés afférents sauf à tenir compte des sommes déjà versées à ce titre en vertu de la convention. En 2009, M. X... a perçu 110150, 51 ¿. Doivent se déduire de ce montant sa participation (7926, 49 ¿ perçus en avril) et le bonus perçu au titre du deuxième trimestre 2008 (12250 ¿ perçus en février 2009) et s'y ajouter le bonus 2009 (24990 ¿). Au total, le montant de ses rémunérations s'établit à 114964, 02 ¿ soit une moyenne de 9580, 33 ¿ mensuels. La durée du préavis est de six mois selon les indications non contestées de M. X.... L'indemnité compensatrice correspondante'ést de 57481, 98 ¿. La SAS Jean Y... a versé à M. X... 30348, 20 ¿. Restent dus 27133, 78 ¿ auxquels s'ajoutent 2713, 38 ¿ au titre des congés payés afférents. Sur les dommages et intérêts M. X... est fondé à obtenir des dommages et intérêts au moins égaux au salaire de ses six derniers mois (57481, 98 ¿). M. X... justifie avoir travaillé en contrat à durée déterminée les 4 et 5/ 7/ 11 et avoir été inscrit à Pôle Emploi de mai 2011 à juillet 2012. Il n'établit toutefois pas avoir, pour autant, perçu des allocations de chômage. Compte tenu de ces renseignements, des autres éléments connus : son âge (54 ans) son ancienneté (5 ans) son salaire moyen (9580, 33 ¿), il y a lieu de lui allouer 70000 ¿ de dommages et intérêts » ;
ALORS, D'UNE PART, QU'il est interdit au juge de dénaturer les éléments produits aux débats ; qu'au cas présent, pour établir la menace pesant sur sa compétitivité et la nécessité de prévenir des difficultés économiques prévisibles la société JEAN Y... produisait aux débats le « dossier d'information Livre II du code du travail » relatif au « projet de restructuration de l'entreprise et projet de licenciement pour motif économique » dans lequel elle établissait notamment in extenso un budget prévisionnel pour l'exercice 2010 (« 3. 1, Prévisions d'évolution d'activité pour 2010-2011 et 2012 » (p. 17) ; « 3. 3 prévisions d'activité » (p. 24), bilan prévisionnel pour 2010 (p. 24) ; que le résultat opérationnel prévisionnel pour 2010 faisait apparaître une nouvelle baisse de chiffre d'affaires, après celle subie en 2009, ainsi qu'une perte financière prévisionnelle de 2, 475 millions d'euros (p. 26) ; qu'elle reproduisait des extraits de ce document dans ses écritures d'appel (p. 40) ; qu'en reprochant à la société JEAN Y... de ne produire « aucun budget prévisionnel qui fonderait la crainte d'une perte de compétitivité », la cour d'appel a dénaturé par omission les termes clairs et précis du dossier d'information produit aux débats qu'elle visait par ailleurs, en violation du principe susvisé, ensemble les articles 4, 5 et 7 du Code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'une réorganisation constitue un motif économique de licenciement si elle est nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise ; qu'est nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise, la réorganisation mise en oeuvre pour anticiper des difficultés économiques à venir et leurs conséquences sur l'emploi ; que l'inadaptation des moyens de production et des effectifs de l'entreprise à son activité réelle au regard du marché sur lequel elle évolue constitue une menace pour la compétitivité de l'entreprise rendant nécessaire une réorganisation ; qu'au cas présent, la société JEAN Y... exposait que le marché du véhicule frigorifique connaissait un effondrement au niveau mondial depuis 2008, que cette crise s'était traduite par un effondrement de ses commandes qui étaient passées de 4. 000 véhicules fin juillet 2008 à 516 véhicules au 31 octobre 2009, de sa production passée de 3. 755 véhicules en 2008 à 2. 255 véhicules en 2009 et de son chiffre d'affaires passé de 168. 681 millions d'euros en 2008 à 108. 676 millions d'euros en 2009, soit une baisse de 35 % ; qu'elle exposait que cette évolution du marché était durable et que sa production allait continuer à baisser pour atteindre 1971 véhicules en 2010, que les comptes prévisionnels pour 2010 faisait apparaître une nouvelle baisse de chiffre d'affaires de 23, 5 % par rapport à 2009 et de 50 % par rapport à 2008, ainsi qu'une perte financière de 2, 475 millions d'euros ; qu'elle exposait que, dans ces conditions, elle se trouvait dans la nécessité d'adapter son appareil de production et son effectif pour pouvoir faire face à un faible niveau d'activité et éviter ainsi des difficultés économiques prévisibles ; que, pour estimer que la réorganisation n'était pas nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de la société JEAN Y..., la cour d'appel s'est bornée à relever que l'effondrement du marché du véhicule frigorifique en 2008 avait touché tous les acteurs du marché et que les parts de marché de la société JEAN Y... par rapport à ses concurrents s'étaient améliorées (arrêt p. 9) ; qu'en statuant de la sorte, sans rechercher, comme cela lui était demandé (conclusions de l'exposante p. 39-41), si, au regard du caractère durable de l'effondrement du marché intervenu en 2008 et ayant conduit l'ensemble de ses concurrents à réduire leurs effectifs, la société JEAN Y... ne se trouvait pas, compte tenu de la faiblesse de son carnet de commandes et de sa production, dans l'obligation d'adapter son organisation et de réduire ses effectifs pour prévenir des difficultés économiques prévisibles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QU'en déduisant l'existence d'une reprise d'activité plus rapide que celle résultant des prévisions de l'employeur du seul accomplissement d'heures supplémentaires à compter du mois de juillet 2010 sans comparer, comme cela lui était demandé (Conclusions p. 41-42), le volume d'activité réelle de l'entreprise à compter de juillet 2010 et le volume d'activité résultant des prévisions de l'entreprise pour les exercices 2010 et 2011 au moment de la réorganisation, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail ;
ALORS, ENFIN ET EN TOUTE HYPOTHESE, QUE la société JEAN Y... exposait dans ses écritures que l'accomplissement d'heures supplémentaires à compter de juillet 2010 était dû à des pics ponctuels d'activité et non à une reprise durable de celle-ci ; qu'elle produisait des tableaux dans lesquels elle démontrait que sa production réelle au cours des exercices 2010 et 2011 était proche des chiffres prévisionnels sur lesquels elle s'était basée pour mettre en oeuvre sa réorganisation ; qu'elle établissait ainsi que le nombre de véhicules réellement produits en 2010 n'avait été que très légèrement supérieur aux prévisions et que le nombre de véhicule réellement produits en 2011 était inférieur aux prévisions (conclusions p. 41-42) ; qu'en se fondant sur le seul accomplissement d'heures supplémentaires à partir de juillet 2010 pour considérer que la reprise d'activité aurait été plus rapide que ce qui avait été prévu par l'employeur, sans répondre à ce moyen déterminant d'où il s'évinçait que l'évolution de l'activité au cours de exercices 2010 et 2011 avait été conforme aux prévisions de l'employeur lors de la mise en oeuvre de la réorganisation, la cour d'appel a méconnu les exigences articles 455 et 458 du code de procédure civile.
Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le pourvoi fait grief à l'arrêt d'avoir débouté Monsieur X... de sa demande de rappel de rémunération variable au titre de l'année 2009.
AUX MOTIFS QUE Sur la rémunération variable Le contrat de travail prévoit, outre un salaire brut forfaitaire fixe, un bonus variant selon les résultats. Chaque année, un avenant définissait les conditions d'attribution de ce bonus. Les réclamations de M. X... concernent le bonus de 2008 et celui de 2009. 2008 : L'avenant a prévu pour 2008 un bonus potentiel de 28000 ¿ conditionné à hauteur de 75 % par le gain sur achats 2008 par rapport au 31/ 12/ 07 et à hauteur de 25 % par le report des effets sur les gains générés par le projet " Rolling costs ". M. X... reproche à la SAS Jean Y... de ne rien lui avoir versé à ce second titre et, faute d'un quelconque justificatif permettant, selon lui, de confirmer que l'objectif n'aurait pas été atteint, réclame la totalité de ce bonus (7000 ¿). La SAS Jean Y... soutient, quant à elle, que rien n'est dû puisque l'objectif n'aurait pas été atteint. L'avenant précise que cette partie du bonus (25 % du total) est calculé au prorata des gains cumulés en 2008 sur les références entrant dans le projet " Rolling costs " à partir d'un seuil de 500000 ¿ et jusqu'à 1 million d'euros. Le budget 2009 (pièce 31 produite par la SAS Jean Y...) concernant l'évolution de la productivité " Rolling costs ", qu'aucun document ne vient contredire, mentionne un sous-total pour 2008 de 504004 ¿. Le seuil de déclenchement du bonus a, au vu de ce document, été dépassé de 4004 ¿. L'obtention d'un gain d'un million d'euros aurait permis l'obtention d'un bonus de 7000 ¿. Sachant que rien n'est dû en-dessous d'un gain de 500000 ¿, chaque gain d'un euro au-dessus de 500000 ¿ ouvre droit à un bonus de 0, 014 ¿ (7000 ¿ : 500000 ¿). En conséquence, le gain réalisé (4004 ¿ au-dessus du seuil) ouvre droit à un bonus de 56, 06 ¿ (4004 ¿ x0, 014 ¿). Un rappel de ce montant, outre 5, 61 ¿ au titre des congés payés afférents, sera alloué à M. X.... 2009 : M. X... fait valoir que faute d'avenant pour 2009, les modalités d'octroi et le montant du bonus 2008 doivent être appliquées et soutient avoir droit à l'intégralité de ce bonus puisque les objectifs auraient, selon lui, été atteints (28000 ¿ outre 350 ¿ au titre de la prime d'ancienneté et 750 ¿ au titre des congés payés afférents soit au total 32340 ¿). Compte tenu du versement d'une somme de 27838, 66 ¿ à ce titre, resteraient dus 4501, 34 ¿. Il est constant qu'aucun avenant n'a été signé par M. X.... Toutefois, rien n'interdit à l'employeur de fixer unilatéralement les objectifs à atteindre. Ainsi, en juillet 2009, la SAS Jean Y... a effectivement fixé le bonus potentiel 2009 à 28000 ¿ mais selon des modalités différentes de 2008. Ces modalités ont certes été longuement discutées par M. X... mais ont été maintenues par la SAS Jean Y... comme elle pouvait légitimement le faire. Sur cette base, ce bonus a été fixé à 24990 ¿ bruts versés en juillet 2010. M. X... ne conteste pas les résultats qui ont servi de base au calcul de ce bonus. Dès lors, il n'est pas fondé à réclamer un rappel à ce titre.
ALORS QUE si l'employeur peut fixer unilatéralement les objectifs du salarié, il ne peut modifier la structure de sa rémunération et donc le mode de calcul de sa rémunération variable ; que lorsque le droit à une rémunération variable résulte du contrat de travail, à défaut d'accord entre l'employeur et le salarié sur son calcul, il incombe au juge de le déterminer en fonction notamment des éléments qu'il peut trouver dans le contrat et des accords expressément ou implicitement conclus entre les parties les années précédentes ; qu'en l'espèce, les parties n'ont pas trouvé d'accord sur le mode de calcul de la rémunération variable 2009 ; que la cour d'appel a pourtant débouté Monsieur X... au motif que rien n'interdit à l'employeur de fixer unilatéralement les objectifs à atteindre ; qu'en statuant ainsi, elle a violé les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Le pourvoi fait grief à l'arrêt d'avoir débouté Monsieur X... de sa demande de rappel de salaire au titre du non-respect du forfait-jour.
AUX MOTIFS QUE Sur le forfait-jour Le contrat de travail prévoit une durée de travail de 217 jours annuels. Selon M. X..., ce nombre de jours de travail a été dépassé toutes les années, au total, 63 jours supplémentaires auraient ainsi été travaillés dont il réclame le paiement au taux majoré de 10 %. La SAS Jean Y... soutient, quant à elle, que le forfait jour n'a, en fait, jamais été appliqué et conclut au principal au débouté. Les bulletins de paie établissent que dès janvier 2005, date de l'embauche et jusqu'au 31/ 5/ 09, le salaire mensuel a été payé sur la base d'un horaire de 169H comprenant 17, 33 heures supplémentaires. M. X... n'a, au vu des pièces produites, émis aucune protestation à ce propos avant un courriel envoyé le 27/ 4/ 09. Il a, en outre, fait, au cours de ces années, des demandes de congés conformes aux droits à congés payés des salariés dont le temps de travail est décompté hebdomadairement soit 2, 5 jours par mois outre les jours de congé liés à l'ancienneté conformément au " régime std (standard)
Y...
" comme il l'indique dans ce premier mail d'avril 2009. En outre, lors du comité de direction du 24/ 9/ 07, a été envisagée la mise en place d'un forfait mensuel pour les cadres car il avait été constaté qu'ils exécutaient des heures supplémentaires sans récupération ni variation de salaires. Or, M. X... présent à ce comité de direction n'a pas fait valoir à cette occasion ou dans les jours qui ont suivi que son propre contrat de travail prévoyait un forfait annuel et n'a pas demandé son application. Ces divers éléments établissent que les parties ont tacitement convenu de ne pas appliquer la clause de forfait-jour M. X... n'établit pas au demeurant avoir subi un préjudice à raison de l'application du régime " standard ". Il a ainsi perçu en 2005 plus que la rémunération fixe contractuellement prévue (85009 ¿ pour une année commencée le 10/ 1 alors que le salaire annuel fixe pour une année complète était fixé à 85000 ¿). Il n'établit pas avoir effectué, dans le cadre du décompte hebdomadaire du temps de travail, des heures supplémentaires non payées. Dès lors, ni quant à sa rémunération ni quant à son temps de travail, l'application du régime " standard " ne lui a, au vu des éléments produits, préjudicié. En conséquence, M. X... sera débouté de sa demande de paiement des jours qui, depuis son embauche, auraient, selon lui, dépassé le forfait annuel initialement prévu. Sa demande est en toute hypothèse contestable en ce qu'elle porte sur l'intégralité de la période travaillée et non sur la seule année en cours.
ALORS QUE l'acceptation d'une modification du contrat de travail ne peut résulter de la poursuite du travail aux conditions modifiées par le salarié ; que la modification de la durée du travail est constitutive d'une modification du contrat de travail ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté d'une part que les parties ont stipulé une convention de forfait-jour fixant à 217 jours annuels la durée de travail du salarié dans le contrat de travail, et d'autre part que l'employeur n'avait pas appliqué cette convention de forfait jour ; qu'elle a pourtant débouté le salarié de sa demande de rappel de salaire fondée sur la non-application de la convention de forfait jour au motif que les parties auraient tacitement convenu de ne pas appliquer cette clause ; qu'en statuant ainsi, elle a violé les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil.
ET ALORS QUE le contrat de travail ne peut être modifié sans l'accord du salarié, peu important que la modification proposée soit prétendument plus avantageuse pour lui ; que la modification de la durée du travail est constitutive d'une modification du contrat de travail ; que la cour d'appel a constaté d'une part que les parties ont stipulé une convention de forfait-jour fixant à 217 jours annuels la durée de travail du salarié dans le contrat de travail, et d'autre part que l'employeur n'avait pas appliqué cette convention de forfait jour ; qu'elle a pourtant débouté le salarié de sa demande de rappel de salaire fondée sur la non-application de la convention de forfait jour au motif qu'il n'établit pas avoir subi un préjudice du fait de la non-application de cette convention ; qu'en statuant ainsi par des motifs inopérants, elle a violé les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil.
ALORS ENFIN QU'au moment où l'instance a été introduite, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrivait par cinq ans ; qu'en l'espèce, la demande de rappel de salaire de Monsieur X..., introduite en 2010, et portant sur les années 2005, 2006, 2007 et 2008, n'était pas prescrite ; que la cour d'appel l'a pourtant rejetée au motif qu'elle porte sur l'intégralité de la période travaillée et non sur la seule année en cours ; qu'en statuant ainsi, elle a violé l'article L. 3245-1 du code du travail dans sa version en vigueur au jour de l'introduction de l'instance.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Le pourvoi fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté la demande de Monsieur X... au titre d'un rappel de salaire pour un montant de 300 ¿ par mois à compter de mai 2009 et jusqu'à la fin de son contrat.
AUX MOTIFS QUE Sur le remboursement des frais Le contrat de travail prévoit que pour l'année 2005, le salarié pourra effectuer deux allers-retours mensuels Avranches/ Grenoble qui lui seront remboursés sur justificatifs pour un montant maximal mensuel de 1300 ¿. Le 1e ` juin 2006, le président du conseil d'administration, M. Guermeur lui a adressé le courrier suivant ; : " Vous m'avez informé que votre situationfamiliale n'avait pas évolué et que votre famille habitait toujours à Grenoble. A titre exceptionnel pour l'année 2006, je vous propose que l'entreprise
Y...
participe à hauteur de 3600 ¿ en remboursement de vos frais professionnels liés à cette situation ". Selon M. X..., ce remboursement, qui se serait poursuivi jusqu'en avril 2009, constituait, en fait, une rémunération déguisée remplaçant l'augmentation de 3 % de son salaire de base qui aurait dû intervenir en 2006. Cet engagement unilatéral de l'employeur ayant cessé sans avoir été valablement dénoncé il serait bien fondé à demander qu'il continue à lui être versé à compter de mai 2009 et jusqu'à la fin de son contrat. La SAS Jean Y... conteste tout versement de frais à ce titre après la fin dê l'année 2006 comme, contrairement aux allégations de M. X..., elle le contestait déjà dans ses conclusions déposées devant le conseil de prud'hommes le 6/ 8/ 10. M. X... n'établit pas que ce versement motivé pour 2005 et 2006 par sa situation familiale se serait poursuivi après décembre 2006 et pourrait dès lors s'analyser comme un complément de salaire. En toute hypothèse, il aurait s'agit alors d'une simple gratification à laquelle l'employeur pouvait librement mettre fin et non d'un engagement unilatéral supposant une dénonciation. En effet, M. X... ne prétend ni que d'autres salariés auraient été concernés par le versement de frais à titre de compléments de salaire, ni que la SAS Jean Y... aurait manifesté explicitement une telle volonté. M. X... sera donc débouté de sa demande à ce titre.
ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; que pour demander un rappel de salaire pour la période de mai 2009 à la fin de son contrat Monsieur X... invoquait notamment l'augmentation de salaire de 3 % qui avait eu lieu au sein de l'entreprise en 2006 ; que la cour d'appel en négligeant de répondre à ce moyen a violé l'article 455 du code de procédure civile.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
Le pourvoi fait grief à l'arrêt d'avoir dit non fondée la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail formée par Monsieur X... et de l'avoir débouté en conséquence de sa demande de dommages et intérêts formée à ce titre.
AUX MOTIFS QUE Sur la résiliation du contrat de travail M. X... fait valoir qu'il a été porté atteinte à ses fonctions, que sa rémunération variable ne lui a pas été versée totalement ni en temps voulu, que le forfait jour a été dépassé sans régularisation des jours travaillés en plus enfin, que ses frais ne lui ont pas été remboursés. Les deux derniers griefs, relatifs au forfait jour et au remboursement des frais, ne sont pas réels comme exposé ci-dessus (paragraphes 1-2 et 1-3). Il est exact, comme exposé au paragraphe 1-1 que lui restent dus 56, 06 ¿ au titre de sa rémunération variable pour 2008. En ce qui concerne sa rémunération variable 2009, rien ne lui reste dû. M. X... ne saurait reprocher à la SAS Jean Y... de ne pas lui avoir versé un acompte semestriel en juin. En effet, c'est en vertu de l'avenant signé chaque année et non en application du contrat de travail que le bonus avait été versé de manière fractionnée les années précédentes, de manière trimestrielle en 2006, semestrielle en 2007 et 2008. Faute de tout avenant signé pour 2009 rien n'obligerait la SAS Jean Y... à procéder au versement d'un acompte en juin 2009. En revanche, le versement de ce bonus 2009 en juillet 2010 est tardif. En effet, dès lors qu'après négociations avec M. X..., la SAS Jean Y... s'est résolue à lui imposer le 22/ 7/ 09 le mode de calcul du bonus, elle pouvait dès la fin de l'exercice le calculer ; c'est d'ailleurs ce qui avait été annoncé à ce dernier dans un courrier du 30/ 10/ 09 (pièce 32 de M. X...). Si les difficultés de l'entreprise (dépôt de bilan entre août et décembre 2009 des sociétés mères, création d'une holding fin décembre 2009 pour reprendre les parts de la SAS Jean Y..., restructuration et mise en place d'un PSE) peuvent expliquer ce retard, elles ne le justifient pas. Il convient toutefois de noter qu'au moment où M. X... a saisi le conseil de prud'hommes en demandant la résiliation de son contrat de travail le 24/ 12/ 09, ce manquement n'existait pas encore puisque l'exercice n'était pas fini. Le contrat de travail prévoit que M. X... fait partie du comité de direction (CODIR) en sa qualité de directeur des achats et des approvisionnements. Ce comité réunit l'ensemble des directeurs. En février 2009, la société a créé une nouvelle instance, le comité exécutif (COMEX) comprenant outre le président trois directeurs. Cette nouvelle instance constituait, selon la note interne du 19/ 6/ 09, " un niveau hiérarchique nouveau chapeautant le comité de direction " et ayant pour rôle " d'arbitrer et de prendre des décisions touchant aux questions stratégiques de l'entreprise ", le CODIR gardant, selon cette note, un rôle de partage de réflexions et d'analyse, de conception et de mise en oeuvre de projets. Dans les faits toutefois, le CODIR a cessé de se réunir, les 7 réunions prévues entre 31/ 8/ 09 et le 14/ 12 étant annulées, selon la SAS Jean Y..., à raison des difficultés économiques qu'elle a connues. M. X... s'est donc trouvé, comme les 5 autres directeurs qui étaient pas membres du COMEX, exclu d'une instance de direction. Toutefois, sa rémunération, ses fonctions et ses responsabilités n'ont pas changé ni son rattachement hiérarchique au président de la société. En conséquence, la disparition de fait de l'instance de direction à laquelle il participait et son remplacement par une instance plus restreinte dont il ne faisait pas partie ne saurait s'analyser, comme soutient M. X... en une modification de son contrat de travail car il ne constitue pas une atteint significative à ses fonctions. Le seul grief réel est constitué par le paiement en 2008 d'un bonus inférieur de 56, 06 ¿ à ce qu'il aurait dû être et le versement du bonus 2009 avec un retard de six mois environ à un moment où M. X... avait déjà réclamé la résiliation de son contrat de travail et se trouvait en litige avec son employeur. Ces griefs ne sont pas d'une gravité suffisante pour justifier la résiliation du contrat de travail. M. X... sera donc débouté de sa demande de ce chef.
Et AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE CONCERNANT LA RÉSILIATION JUDICIAIRE DU CONTRAT DE TRAVAIL Au vu des éléments ci-dessus, il n'y a pas de modification substantielle du contrat de travail et notamment non atteinte aux fonctions de responsabilités de Monsieur X.... Les autres points (rémunération liée au forfait jours, rémunération variable, remboursement de frais) constituent des litiges qui ne peuvent justifier la rupture du contrat au torts et griefs de l'employeur, De plus certaines des demandes sont intervenues très tardivement après que Monsieur X... ait eu connaissance des difficultés économiques de l'entreprise. Pour ces motifs le CONSEIL DE PRUD'HOMMES ne prononce pas la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur X... aux torts de l'employeur.
ALORS QUE l'article 625 du code de procédure civile dispose que la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ; qu'en l'espèce la cour d'appel a rejeté la demande de résiliation judiciaire en considérant que les griefs tirés du non remboursement des frais, et du non respect du forfait jour n'étaient pas réels ; que la cassation à intervenir sur le deuxième ou le troisième moyen emportera en application de l'article 625 du code de procédure civile la cassation par voie de conséquence de l'arrêt en ce qu'il a jugé non fondée la demande de résiliation judiciaire.
ET ALORS QUE lorsqu'un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, il appartient au juge de vérifier si les faits invoqués par le salarié à l'appui de sa demande sont établis et, dans l'affirmative, si ces manquements présentent une gravité suffisante pour en justifier la résiliation aux torts de l'employeur ; que le versement tardif de la rémunération est un manquement suffisamment grave pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur : que la cour d'appel a constaté le versement du bonus 2009 avec un retard de six mois environ ; qu'elle a néanmoins jugé qu'il n'y avait pas lieu de prononcer la résiliation judiciaire aux torts de l'employeur au motif que le versement tardif était intervenu à un moment où M. X... avait déjà réclamé la résiliation de son contrat de travail et se trouvait en litige avec son employeur ; que la circonstance que les parties aient été en litige ne saurait justifier le manquement de l'employeur à ses obligations ; qu'en déboutant le salarié alors qu'elle avait constaté un retard de plus de six mois dans le versement du bonus 2009, la cour d'appel n'a pas tiré pas de ces constatations les conséquences juridiques qui s'en évinçaient, et violé les articles 1134 et 1184 du code civil, ensemble l'article L. 1221-1 du code du travail.
ALORS QUE lorsqu'un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, il appartient au juge de vérifier si les faits invoqués par le salarié à l'appui de sa demande sont établis et, dans l'affirmative, si ces manquements présentent une gravité suffisante pour en justifier la résiliation aux torts de l'employeur ; que le fait de modifier les fonctions d'un salarié prévues au contrat est un manquement grave de l'employeur à ses obligations ; qu'en rejetant la demande de résiliation judiciaire du salarié, au motif que les fonctions et les responsabilités du salarié n'ont pas changé alors qu'elle avait constaté que l'employeur l'avait exclu d'un organe de direction auquel sa participation était contractuellement prévue, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1184 du code civil, ensemble l'article L. 1221-1 du code du travail.
ALORS à tout le moins qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a statué par des motifs contradictoires et violé l'article 455 du code de procédure civile.