Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Mustapha X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de TOULOUSE, chambre correctionnelle, en date du 23 janvier 2014, qui, pour violences, l'a condamné à la peine de douze mois d'emprisonnement dont six mois avec sursis, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 18 novembre 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Mirguet, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de Mme le conseiller MIRGUET, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DESPORTES ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 111-4, 121-3 et 222-13 du code pénal, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que la cour d'appel a condamné le prévenu du chef de violences ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à huit jours ;
" aux motifs qu'à l'issue de l'enquête et des débats il est constant : que M. X...était bien, dans la soirée du 21 avril 2012, vêtu d'une chemise à carreaux de couleur orangée ; que si une bagarre générale a eu lieu, M. X...et M. Y...se sont retrouvés face à face à deux reprises ; que M. X...reconnaît avoir projeté M. Thomas Y...entre deux voitures, s'être retrouvé sur lui et lui avoir porté plusieurs coups de poing au visage ; qu'avant ces coups, M. Thomas Y...ne présentait aucune blessure à l'oreille, personne et pas même M. X...n'ayant constaté qu'il saignait ; que si les blessures médicalement constatées ne peuvent résulter de coups de poing, aucun des témoins faisant partie du groupe de M. Thomas Y...n'a indiqué avoir vu M. X...porteur d'une bouteille alors que celle qui a été retrouvée et dont seule une photographie figure au dossier était plus qu'un tesson et ne pouvait passer inaperçue notamment de M. Cyril A... qui ne parle que de coups de poing ; que la découverte sur les lieux d'une bouteille de vodka brisée au niveau du goulot et présentant des traces rougeâtres qui n'ont pas été analysées est insuffisante pour établir qu'elle a été utilisée par M. X...pour frapper M. Thomas Y...d'autant qu'elle ne supportait aucune empreinte ; qu'ainsi, s'il ne peut être retenu à l'encontre de M. X...la circonstance aggravante d'usage d'une arme par destination, il est suffisamment établi qu'il a commis volontairement sur la personne de M. Thomas Y...des violences qui, au regard de leur concomitance, ont occasionné les blessures constatées y compris à l'oreille, peu important qu'elles n'aient pas été recherchées ; que sa culpabilité sera donc retenue du chef de violences ayant entraîné une incapacité totale de travail excédent huit jours » ;
" 1°) alors que tout jugement ou arrêt en matière correctionnelle doit énoncer les faits dont le prévenu est jugé coupable et constater l'existence de tous les éléments constitutifs de l'infraction ; que dès lors, en se bornant à constater que la circonstance aggravante d'usage d'une arme ne pouvait être retenue sans caractériser les éléments constitutifs de l'infraction de violences volontaires reprochée à M. X..., la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
" 2°) alors qu'en tout état de cause, la cour d'appel ne pouvait, sans se contredire, entrer en voie de condamnation à l'encontre du prévenu du chef de violences sur la victime sans usage d'une arme et, partant, avec seul usage de ses poings tout en relevant que « les blessures médicalement constatées ne peuvent résulter de coups de poing " ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;
D'où il suit que le moyen, qui revient à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Mais sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 132-19, 132-24 du code pénal, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que la cour d'appel a condamné M. X...à la peine de douze mois d'emprisonnement dont six mois assortis du sursis ;
" aux motifs que les circonstances des faits et leurs conséquences et la personnalité du prévenu qui est délinquant primaire justifient le prononcé d'une peine mixte afin de prévenir le renouvellement d'un tel dérapage manifestement lié à l'alcool ; qu'en l'absence de renseignement vérifié sur sa situation actuelle, aucune mesure d'aménagement de la partie ferme de la peine ne peut être, en l'état, envisagé » ;
" 1°) alors qu'en matière correctionnelle, en dehors des condamnations en récidive légale prononcées en application de l'article 132-19-1 du code pénal, une peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ; qu'en se bornant à juger, pour condamner M. X...à la peine de douze mois d'emprisonnement dont six avec sursis, que « les circonstances des faits et leurs conséquences et la personnalité du prévenu qui est délinquant primaire justifient le prononcé d'une peine mixte afin de prévenir le renouvellement d'un tel dérapage manifestement lié à l'alcool » sans indiquer les raisons pour lesquelles cette peine était nécessaire tout en mentionnant que le prévenu n'avait aucun antécédent judiciaire, la cour d'appel a méconnu les dispositions de l'article 132-24 du code pénal ;
" 2°) alors que d'autre part, la cour d'appel ne pouvait valablement se contenter d'indiquer qu'« en l'absence de renseignement vérifié sur sa situation actuelle, aucune mesure d'aménagement de la partie ferme de la peine ne peut être, en l'état, envisagé » sans se prononcer précisément sur le caractère manifestement inadéquat de toute autre sanction lorsqu'il résultait de ses énonciations mêmes que cette même juridiction avait, par arrêt rendu sur le siège le 19 décembre 2013, donné mainlevée du mandat d'arrêt décerné à l'encontre de M. X...le 5 novembre 2013 par le tribunal correctionnel de Toulouse et que la situation actuelle de celui-ci était largement précisée dans les conclusions et pièces régulièrement déposées dans son intérêt " ;
Vu l'article 132-24 du code pénal, dans sa rédaction alors en vigueur ;
Attendu qu'il résulte de ce texte qu'en matière correctionnelle, en dehors des condamnations en récidive légale prononcées en application de l'article 132-19-1 du code pénal, une peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ;
Attendu que, pour condamner M. X...à la peine de douze mois d'emprisonnement dont six mois avec sursis, l'arrêt retient que les circonstances des faits et leurs conséquences et la personnalité du prévenu qui est délinquant primaire justifient le prononcé d'une peine mixte afin de prévenir le renouvellement d'un tel dérapage manifestement lié à l'alcool ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans indiquer les raisons pour lesquelles toute autre sanction était manifestement inadéquate, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; qu'elle sera limitée à la peine, dès lors que la déclaration de culpabilité n'encourt pas la censure ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en ses seules dispositions relatives aux peines, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Toulouse, en date du 23 janvier 2014, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, dans les limites de la cassation ainsi prononcée, conformément à la loi, et, le cas échéant, à l'article 132-19 du code pénal, dans sa rédaction applicable à partir du 1er octobre 2014 ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Toulouse autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Toulouse et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le seize décembre deux mille quatorze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;