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16/12/2014 | FRANCE | N°13-16305;13-18912

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 16 décembre 2014, 13-16305 et suivant


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° A 13-18.912 et S 13-16.305 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué statuant en matière de référé (Rennes, 21 février 2013), que, lors de la rénovation d'un bâtiment industriel donné à bail à la société ECA EN, la société civile immobilière Ferca (la SCI) a confié une mission de maîtrise d'oeuvre, sous-traitée en partie à M. X..., à la société C et Cie JL Cousin architectes urbanistes (la société Cousin) et le lot "désamiantage-couverture-étanchéité-isolation" à

la société SMAC Acieroïd, qui a sous-traité la partie charpente à la société Favreau et le...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° A 13-18.912 et S 13-16.305 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué statuant en matière de référé (Rennes, 21 février 2013), que, lors de la rénovation d'un bâtiment industriel donné à bail à la société ECA EN, la société civile immobilière Ferca (la SCI) a confié une mission de maîtrise d'oeuvre, sous-traitée en partie à M. X..., à la société C et Cie JL Cousin architectes urbanistes (la société Cousin) et le lot "désamiantage-couverture-étanchéité-isolation" à la société SMAC Acieroïd, qui a sous-traité la partie charpente à la société Favreau et les calculs de charge à la société Dekra Industrial ; que la locataire, mise en demeure par l'inspection du travail suspectant la persistance de poussières d'amiante sur le site de réaliser les travaux de dépollution, a assigné la SCI afin d'obtenir sa condamnation à réaliser ces travaux et à lui payer une provision ; que la SCI a demandé la garantie de la société Cousin et de son assureur, la Mutuelle des architectes français (la MAF), qui ont demandé à être garantis par la société SMAC Acieroïd et son assureur, la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (la SMABTP) ;
Sur le moyen unique des pourvois n° A 13-18.912 et S 13-16.305, pris en leur première branche :
Attendu que la société Cousin et la MAF, la société SMAC Acieroïd et la SMABTP font grief à l'arrêt de condamner la société Cousin et la MAF, in solidum, à payer certaines sommes à la SCI et de condamner la SMAC Acieroïd et la SMABTP à garantir la société Cousin et la MAF à hauteur de la moitié des condamnations, alors, selon le moyen, que le constructeur d'un ouvrage n'est responsable de plein droit envers le maître de l'ouvrage que des dommages qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination ; que la responsabilité du constructeur suppose donc, lorsque la solidité de l'immeuble n'est pas compromise, des dommages qui, cumulativement, affectent l'ouvrage dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement et le rendent impropres à sa destination ; que pour condamner la société Cousin et la MAF à verser diverses sommes à la SCI, la cour d'appel, après avoir relevé qu'il n'y avait ni désordre matériel sur l'ouvrage existant ni atteinte à la solidité de l'immeuble, s'est bornée à constater un « dommage » résultant de la présence de poussières d'amiante déposées sur la charpente, constituant un danger pour les personnes travaillant dans cette atmosphère polluée et par voie de conséquence une atteinte à la destination de l'immeuble ; qu'en statuant ainsi, sans avoir justifié que ce dommage affectait l'immeuble dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1792 du code civil et 809 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant retenu qu'après les travaux, la charpente neuve réalisée présentait des poussières et des résidus d'amiante toxiques constituant un danger pour les personnes travaillant dans cette atmosphère polluée, la cour d'appel, qui a pu en déduire que l'ouvrage était rendu impropre à sa destination, a légalement justifié sa décision ;
Sur le moyen unique du pourvoi n° A 13-18.912, pris en ses trois dernières branches :
Attendu que la société Cousin et la MAF font grief à l'arrêt de les condamner, in solidum, à payer certaines sommes à la SCI, alors, selon le moyen :
1°/ qu'elles ont soutenu, dans leurs conclusions d'appel, que les normes applicables avaient été respectées ; qu'en décidant que la présence de poussières d'amiante constituait un danger pour les personnes et permettait de retenir la responsabilité de l'architecte sur le fondement de la garantie décennale, sans répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que la société Cousin et la MAF ont fait valoir, en se fondant sur l'avis de l'expert judiciaire, que les poussières d'amiante n'étaient pas seulement la conséquence des travaux entrepris par les constructeurs, mais provenaient aussi de l'usure des ouvrages, de travaux antérieurs et de l'activité du locataire ECA EN ; que la cour d'appel, tout en retenant que les poussières toxiques provenaient « au moins en partie » de l'opération de désamiantage, n'a pas répondu au moyen soutenant que compte tenu de l'impossibilité de préciser la provenance des déchets, l'obligation de l'architecte et de son assureur était sérieusement contestable, méconnaissant ainsi l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que la société Cousin et la MAF ont soutenu, dans leurs écritures d'appel, que le maître d'ouvrage avait engagé sa responsabilité en ayant tardivement averti les constructeurs de la présence d'amiante dans le bâtiment et en ayant fait établir tardivement le dossier technique amiante ; qu'en les condamnant à payer à la SCI maître d'ouvrage diverses sommes à titre de provision, sans s'expliquer sur ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant retenu que, quelle que soit la quantité d'amiante disséminée dans le bâtiment et le niveau normatif atteint, la présence de poussières toxiques, en relation causale directe avec l'intervention des constructeurs et provenant, au moins pour partie de l'opération de désamiantage, constituait un danger et rendait l'ouvrage impropre à sa destination, la cour d'appel a pu en déduire que le maître d'oeuvre ne pouvait invoquer aucune cause d'exonération totale de sa responsabilité ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le moyen unique du pourvoi n° S 13-16.305, pris en ses trois dernières branches :
Attendu que la société SMAC Acieroïd et la SMABTP font grief à l'arrêt de les condamner à garantir la société Cousin et la MAF à hauteur de la moitié des condamnations prononcées contre elle, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en ne répondant pas aux conclusions de la société SMAC faisant valoir que le juge des référés avait excédé sa compétence en statuant au fond sur le principe et la part de sa responsabilité et soutenant que, comme l'avait décidé le premier juge, « les recours et appels en garantie formulés... excèdent les pouvoirs du juge des référés et se heurtent à de sérieuses contestations, dès lors qu'ils nécessitent une appréciation de l'existence et des conséquences des fautes éventuellement commises par les différents intervenants à la construction ; que ce pouvoir est réservé au juge du fond », la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que les appels en garantie excèdent les pouvoirs du juge des référés et se heurtent à de sérieuses contestations lorsqu'ils nécessitent une appréciation de l'existence et des conséquences des fautes éventuellement commises par les différents intervenants à la construction ; qu'en statuant comme il l'a fait, cependant que la question du bien-fondé des appels en garantie formés par la société Cousin et la MAF à l'encontre de la SMAC et de la SMABTP impliquait de trancher des questions de fond, la cour d'appel a violé l'article 809 du code de procédure civile ;
3°/ que la responsabilité de la société SMAC et son assureur la SMABTP envers la société Cousin et son assureur la MAF ne pouvait être recherchée que sur un fondement quasidélictuel ; qu'en statuant comme elle l'a fait, statuant sur une responsabilité de plein droit de la société SMAC, la cour d'appel a violé par fausse application les articles 1792 et suivants du code civil ;
Mais attendu qu'ayant retenu que l'entreprise et l'architecte étaient tenus sur le fondement décennal envers le maître d'ouvrage et que la société SMAC Acieroïd n'avait pas effectué le nettoyage du site avec la diligence nécessaire, la cour d'appel, qui n'a pas excédé les pouvoirs du juge des référés et n'a pas tranché des questions de fond, a pu en déduire que l'obligation de l'entreprise à garantir l'architecte à hauteur de la moitié de la provision mise à sa charge ne se heurtait pas à une constatation sérieuse ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Laisse à chaque demandeur la charge des dépens afférents à son pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Odent et Poulet, avocat aux Conseils, pour les sociétés SMABTP et SMAC, demanderesses au pourvoi n° S 13-16.305
II est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que la SMAC ACIEROID et la SMABTP garantiraient la société C et Cie JL COUSIN architectes urbanistes et la MAF à hauteur de la moitié des condamnations prononcées contre elles par les ordonnances du 6 mai 2010 et 25 novembre 2011 en principal, intérêts et accessoires
AUX MOTIFS QUE sur les demandes de la SCI FERCA (...) les opérations de déconstruction de la toiture et de réhabilitation du bâtiment comportant une phase de désamiantage et faisant intervenir plusieurs entreprises spécialisées dans différents secteurs du bâtiment, constituent un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil ; que si aucun désordre matériel n'a été constaté sur l'ouvrage existant ni aucune atteinte à la solidité de l'immeuble, la seule présence de poussières ou de résidus d'amiante déposés sur une charpente neuve constitue en soi un dommage dès lors qu'une opération de désamiantage a été entreprise et que ces poussières proviennent au moins en partie de cette opération, alors que le nettoyage du site n'a pas été fait avec toute la diligence voulue (arrêt p. 10) ; (...) qu'en appel la SCI FERCA ne forme aucune demande contre la société SMAC ; qu'il lui en sera donné acte ; que néanmoins la société C et Cie JL COUSIN architectes urbanistes et la MAF concluent à titre subsidiaire à la garantie notamment de la SMAC et demandent à titre encore plus subsidiaire qu'elle soit condamnée in solidum avec elle au paiement des provisions ; que la société SMAC était chargée du lot n° 3 « désamiantage couverture étanchéité isolation », constructeur au sens de l'article 1792-1 et responsable de plein droit des poussières d'amiante disséminées dans le bâtiment en application de l'article 1792 ; qu'il importe peu qu'elle soit intervenue sous la maîtrise d'oeuvre de la société C et Cie JL COUSIN architectes urbanistes ni qu'elle n'ait pas été destinataire d'un dossier technique Amiante avant de signer le marché et commencer les travaux, ne pouvant ignorer la présence d'amiante, cette circonstance résultant de la notice descriptive sommaire sur la base de laquelle elle a présenté son devis et du marché qu'elle a signé ; que la société SMAC ne peut faire état d'aucune cause étrangère l'exonérant de sa responsabilité de plein droit, quand bien même sa mission se serait limitée comme elle le prétend à la réfection de la couverture contenant du produit amiante, et non au désamiantage du bâtiment dans son ensemble ; que si aucune demande en paiement n'est faite directement par la SCI FERCA contre la société SMAC, permettant une condamnation in solidum, la société SMAC et son assureur la SMABTP devront néanmoins garantir la société COUSIN des condamnations prononcées contre elle ; que s'agissant des autres intervenants, leur mise en cause suppose préalablement la détermination de leurs engagements contractuels, la précision du déroulement des différentes phases du chantier et que le fondement juridique des demandes soit explicité ; qu'à cet égard, le rapport d'expertise n'est toujours pas déposé et qu'en dépit de la complexité des opérations d'expertise, il est souhaitable d'y mettre un terme dans les délais les plus rapprochés et qu'il n'y a pas lieu à référé du chef des appels en garantie formés par la société SMAC ; que la garantie des sociétés COUSIN et MAP par la SMAC et la SMABTP s'effectuera pour moitié des condamnations prononcées contre les sociétés COUSIN et MAF ; que sur l'ordonnance du 25 novembre 2011 (...) pour les motifs précités, la SMAC et son assureur la SMABTP seront condamnées à garantir la société C et Cie JL COUSIN architectes urbanistes de la moitié des condamnations prononcées contre elles ; que des contestations sérieuses identiques s'opposent à ce qu'une condamnation intervienne à rencontre des autres intervenants, également appelés en garantie par la société SMAC ;
1° ALORS QUE le constructeur d'un ouvrage n'est responsable de plein droit envers le maître de l'ouvrage que des dommages qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination ; que la responsabilité du constructeur suppose donc, lorsque la solidité de l'immeuble n'est pas compromise, des dommages qui, cumulativement, affectent l'ouvrage dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipent et le rendent impropres à sa destination ; que pour condamner la SCI FERCA payer diverses sommes, condamner ensuite la société COUSIN ARCHITECTES ET URBANISME et la MAF à lui verser diverses sommes, et condamner la SMABTP et la SMAC à garantir la société COUSIN ARCHITECTES ET URBANISME et son assureur la MAF « à hauteur de la moitié des condamnations prononcées contre elles par les ordonnances du 6 mai 2010 et 25 novembre 2011 », la cour d'appel, après avoir relevé qu'il n'y avait ni désordre matériel sur l'ouvrage existant ni atteinte à la solidité de l'immeuble, s'est bornée à constater un « dommage » résultant de la présence de poussières d'amiante déposées sur la charpente, constituant un danger pour les personnes travaillant dans cette atmosphère polluée et par voie de conséquence une atteinte à la destination de l'immeuble ; qu'en statuant sans avoir recherché, ainsi qu'elle y était invitée par la société SMAC, si ce dommage affectait l'immeuble dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1792 du code civil et 809 du code de procédure civile ;
2° ALORS QUE en ne répondant pas aux conclusions de la société SMAC faisant valoir que le juge des référés avait excédé sa compétence en statuant au fond sur le principe et la part de sa responsabilité et soutenant que, comme l'avait décidé le premier juge, « les recours et appels en garantie formulés... excèdent les pouvoirs du juge des référés et se heurtent à de sérieuses contestations, dès lors qu'ils nécessitent une appréciation de l'existence et des conséquences des fautes éventuellement commises par les différents intervenants à la construction ; que ce pouvoir est réservé au juge du fond » (conclusions, p. 8), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3° ALORS QUE les appels en garantie excèdent les pouvoirs du juge des référés et se heurtent à de sérieuses contestations lorsqu'ils nécessitent une appréciation de l'existence et des conséquences des fautes éventuellement commises par les différents intervenants à la construction ; qu'en statuant comme il l'a fait, cependant que la question du bien-fondé des appels en garantie formés par la société C et Cie JL COUSIN architectes urbanistes et la MAF à l'encontre de la SMAC et de la SMABTP impliquait de trancher des questions de fond, la cour d'appel a violé l'article 809 du code de procédure civile ;
4° ALORS QUE la responsabilité de la société SMAC et son assureur la SMABTP envers la société C et Cie JL COUSIN architectes urbanistes et son assureur la MAF, ne pouvait être recherchée que sur un fondement quasidélictuel ; qu'en statuant comme elle l'a fait, statuant sur une responsabilité de plein droit de la société SMAC, la cour d'appel a violé par fausse application les articles 1792 et suivants du code civil.Moyen produit par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour la société C et Cie JL Cousin architectes urbanistes, aux droits de laquelle vient M. Y..., ès qualités, et la société MAF, demanderesses au pourvoi n° A 13-18.912
Le moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société COUSIN ARCHITECTES URBANISTES et la MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS, in solidum, à payer à la SCI FERCA les sommes de 510.000 ¿, de 266.728 ¿ HT, de 61.400 ¿ HT et de 81.379 ¿ HT,
Aux motifs que « les travaux pour lesquels la société Cousin a reçu une mission de maîtrise d'oeuvre complète concernent la rénovation de la toiture d'un bâtiment industriel appartenant à la SCI Ferca, d'une surface de 11.408 m², comportant notamment la dépose et le remplacement de la toiture en fibro-ciment amiante de l'immeuble.(¿)Que les opérations de déconstruction de la toiture et de réhabilitation du bâtiment, comportant une phase de désamiantage et faisant intervenir plusieurs entreprises spécialisées dans différents secteurs du bâtiment, constituent un ouvrage, au sens de l'article 1792 du Code civil.Considérant que si aucun désordre matériel n'a été constaté sur l'ouvrage existant, ni aucune atteinte à la solidité de l¿immeuble, il n'en demeure pas moins que la seule présence de poussières ou de résidus d'amiante déposés sur la charpente neuve constitue en soi un dommage, dès lors qu'une opération de désamiantage a été entreprise et que ces poussières toxiques proviennent, au moins en partie, de cette opération, et ceci alors que le nettoyage du site n'a pas été fait avec toute la diligence voulue ;Que quelle que soit la quantité d'amiante disséminée dans le bâtiment, et le niveau normatif atteint, il n'en demeure pas moins que la présence de ces poussières d'amiante, qui a justifié les mises en demeure de l'inspection du travail et de la CRAM, constitue un danger pour les personnes travaillant dans cette atmosphère polluée et, par voie de conséquence, une atteinte à la destination de l'immeuble.Que ce désordre est en relation causale directe avec l'intervention des différents constructeurs sur le site.Considérant qu'aucune réserve concernant ce désordre n'a été émise lors de la réception, le 7 décembre 2006, et ceci alors même que la société Cousin était chargée de l'assistance du maître de l'ouvrage lors de la réception.Que le désordre était d'autant moins apparent qu'il a fallu procéder à des analyses par un laboratoire spécialisé de la poussière ramassée pour constater l'existence et l'importance des traces de poussières d'amiante.Considérant que les conditions d'application de l'article 1792 du code civil sont donc réunies en l'espèce, le désordre dénoncé présentant bien un caractère décennal » (arrêt p. 10 et 11) ;
Alors que, d'une part, le constructeur d'un ouvrage n'est responsable de plein droit envers le maître de l'ouvrage que des dommages qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination ; que la responsabilité du constructeur suppose donc, lorsque la solidité de l'immeuble n'est pas compromise, des dommages qui, cumulativement, affectent l'ouvrage dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement et le rendent impropres à sa destination ; que pour condamner la société COUSIN ARCHITECTES ET URBANISME et la MAF à verser diverses sommes à la SCI FERCA, la cour d'appel, après avoir relevé qu'il n'y avait ni désordre matériel sur l'ouvrage existant ni atteinte à la solidité de l'immeuble, s'est bornée à constater un « dommage » résultant de la présence de poussières d'amiante déposées sur la charpente, constituant un danger pour les personnes travaillant dans cette atmosphère polluée et par voie de conséquence une atteinte à la destination de l'immeuble ; qu'en statuant ainsi, sans avoir justifié que ce dommage affectait l'immeuble dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1792 du code civil et 809 du code de procédure civile ;
Alors que, d'autre part, la société COUSIN ARCHITECTES ET URBANISME et la MAF ont soutenu, dans leurs conclusions d'appel (p. 16 à 18, et 21), que les normes applicables avaient été respectées ; qu'en décidant que la présence de poussières d'amiante constituait un danger pour les personnes et permettait de retenir la responsabilité de l'architecte sur le fondement de la garantie décennale, sans répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors qu'en troisième lieu, la société COUSIN ARCHITECTES ET URBANISME et la MAF ont également fait valoir, en se fondant sur l'avis de l'expert judiciaire, que les poussières d'amiante n'étaient pas seulement la conséquence des travaux entrepris par les constructeurs, mais provenaient aussi de l'usure des ouvrages, de travaux antérieurs et de l'activité du locataire ECA EN (concl. p. 17, 22 et 23) ; que la cour d'appel, tout en retenant que les poussières toxiques provenaient « au moins en partie » de l'opération de désamiantage, n'a pas répondu au moyen soutenant que compte tenu de l'impossibilité de préciser la provenance des déchets, l'obligation de l'architecte et de son assureur était sérieusement contestable, méconnaissant ainsi l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors qu'enfin, la société COUSIN ARCHITECTES ET URBANISME et la MAF ont soutenu, dans leurs écritures d'appel (p. 23 et 24), que le maître d'ouvrage avait engagé sa responsabilité en ayant tardivement averti les constructeurs de la présence d'amiante dans le bâtiment et en ayant fait établir tardivement le dossier technique amiante ; qu'en les condamnant à payer à la SCI maître d'ouvrage diverses sommes à titre de provision, sans s'expliquer sur ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 13-16305;13-18912
Date de la décision : 16/12/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 21 février 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 16 déc. 2014, pourvoi n°13-16305;13-18912


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard et Poupot, SCP Boulloche, SCP Le Bret-Desaché, SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Odent et Poulet, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.16305
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