LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon le jugement attaqué (Conseil de prud'hommes d'Annonay, 9 avril 2013) rendu en dernier ressort, que M. X..., salarié de la société Iveco France sur le site d'Annonay a été mis en chômage technique au cours du mois de décembre 2010, la société imposant une prise de congés sur la période prévisionnelle de chômage partiel au titre des congés payés, des congés d'ancienneté et de l'épargne conventionnelle dans la limite de sept jours ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes de rappel de salaire ;
Sur les premier et troisième moyens, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le deuxième moyen tel que reproduit en annexe :
Attendu qu'ayant décidé par un motif non critiqué que la décision de l'employeur d'utiliser des congés épargnés sur les comptes épargne temps individuels, sans l'accord des salariés bénéficiaires, est contraire aux dispositions en vigueur qui régissent le fonctionnement des comptes épargne temps, et fixé, dans l'exercice de son pouvoir souverain en examinant l'ensemble des éléments produits, la somme à payer au titre des jours de congés payés indûment prélevés sur le compte épargne temps, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Iveco France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Iveco France à payer à M. X... et au syndicat CGT Iveco France la somme globale de 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois décembre deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Iveco France.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Sur les congés payés légaux et conventionnels (congés d'ancienneté)Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR dit que la société IVECO FRANCE n'a pas respecté les textes conventionnels concernant les prises de congés payés et congés d'ancienneté versés dans le Compte Epargne Temps, d'AVOIR, en conséquence, condamné la société IVECO FRANCE à payer à Monsieur X... la somme de 296,78 euros au titre des jours de congés payés prélevés sur le Compte Epargne Temps et d'AVOIR condamné la société IVECO FRANCE à payer au syndicat CGT IVECO FRANCE 100 euros au titre des dommages et intérêts de la partie intervenante ;
AUX MOTIFS QUE « l'article L. 3141-13 du Code du Travail dispose : "La période de prise des congés payés est fixée par les conventions ou accords collectifs de travail. Elle comprend dans tous les cas la période du 1er mai au 31 octobre de chaque année. A défaut de convention ou accord collectif de travail, cette période est fixée par l'employeur en se référant aux usages et après consultation des délégués du personnel et du comité d'entreprise" ; que l'article L. 3141-14 du Code du Travail pour les congés payés et l'article L. 3141-8 du Code du Travail pour les congés d'ancienneté donnent le pouvoir à l'employeur de positionner lesdits congés et il n'existe aucun texte conventionnel ou accord d'entreprise permettant aux salariés de décider eux-mêmes de la période de prise de ces congés ; que le tableau de positionnement des congés payés pour l'année 2010, présenté au Comité d'entreprise, montre que l'entreprise était fermée 4 semaines en août et que 3 jours de la 5ème semaine ont été positionnés par l'entreprise pendant la dernière semaine de décembre 2010 ; que, par conséquent, la décision de la SOCIETE IVECO FRANCE du 29 septembre 2010 concernant la prise des congés payés et les congés d'ancienneté ne concerne que des soldes de congés payés et congés d'ancienneté versés par le salarié dans le compte épargne temps dont il détient dès lors la maîtrise ; qu'en conséquence, la décision de la SOCIETE IVECO FRANCE d'utiliser des congés épargnés sur les Comptes Epargne Temps individuels, sans l'accord des salariés bénéficiaires, est contraire aux dispositions en vigueur qui régissent le fonctionnement des Comptes Epargne Temps ; que la SOCIETE IVECO FRANCE sera condamnée à payer à Monsieur X... Stéphane les jours de congés payés indûment prélevés sur le compte épargne temps » et que « que l'article L.2132-3 du Code du travail dispose : « Les syndicats professionnels ont le droit d'agir en justice. Ils peuvent devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent » ; que la société IVECO France en ne respectant pas les accords collectifs signés avec le syndicat CGT IVECO France a porté un préjudice indirect à l'intérêt collectif qu'il conviendra d'indemniser par des dommages et intérêts d'un montant de 100,00 ¿ par instance et pour chaque organisation syndicale » ;
1. ALORS QU'il résulte des articles L. 3151-1 et L. 3152-2 du Code du travail que l'alimentation du compte épargne temps par des congés payés légaux et conventionnels non-pris n'est pas automatique, mais suppose une initiative de la part du salarié ; que l'accord collectif relatif à la durée et à l'organisation du temps de travail du 12 décembre 2003 prévoit, en son article 5-2, que le salarié doit informer le service des ressources humaines de son établissement deux fois par an, avant le 31 mai et avant le 31 décembre, du nombre et de la nature des congés qu'il entend affecter à son compte épargne temps au titre de la période annuelle de référence ; qu'en l'espèce, pour dire que la décision de la société IVECO FRANCE de positionner le solde des congés payés et congés conventionnels d'ancienneté entre le 15 et le 23 décembre 2010 était contraire aux dispositions qui régissent le fonctionnement du compte épargne temps, le conseil de prud'hommes a retenu que cette décision affectait des congés versés par le salarié dans le compte épargne temps ; qu'en se prononçant de la sorte, sans avoir constaté que le salarié avait effectivement demandé à affecter sur son compte épargne temps ses congés payés et congés conventionnels d'ancienneté non pris et positionnés par l'employeur sur la période du 15 au 23 décembre 2010, le conseil de prud'hommes a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 3151-1 et L. 3152-2 du Code du travail, ensemble l'article 5-2 de l'accord collectif précité ;
2. ALORS, AU SURPLUS, QU' à défaut de convention ou d'accord collectif, la date de prise des congés payés est fixée par l'employeur, auquel il appartient de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à congé ; qu'il en résulte que la possibilité, reconnue au salarié, d'alimenter un compte épargne temps par des congés payés non pris suppose que l'employeur n'ait pas déjà décidé de la date de prise des congés payés légaux et conventionnels ; qu'en se prononçant comme il l'a fait, le conseil de prud'hommes a violé l'article L. 3141-13 du Code du travail et le chapitre 7 de l'accord d'entreprise du 12 décembre 2003 ;
3. ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE l'accord collectif qui institue un compte épargne temps détermine dans quelles conditions et limites le compte épargne temps peut être alimenté à l'initiative du salarié ; qu'en l'espèce, l'article 5-2 de l'accord d'entreprise relatif à la durée et à l'organisation du temps de travail prévoit que le compte épargne temps peut être alimenté par les congés payés légaux excédant 24 jours ouvrables dès lors qu'ils ne sont pas affectés à une fermeture de l'entreprise ; qu'il en résulte que l'employeur peut décider d'affecter les congés payés à une fermeture de l'entreprise, sans heurter les dispositions conventionnelles relatives à l'alimentation du compte épargne temps ; qu'en décidant le contraire, le conseil de prud'hommes a violé les articles L. 3152-2 du Code du travail et 5-2 de l'accord collectif d'entreprise précité.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Sur les congés du Compte Epargne TempsIl est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR dit que la société IVECO FRANCE n'a pas respecté les textes conventionnels concernant les prises de congés au titre du Compte Epargne Temps, d'AVOIR en conséquence condamné la société IVECO FRANCE à verser à Monsieur X... la somme de 296,78 euros au titre des jours de congés payés prélevés sur le compte épargne temps et d'AVOIR condamné la société IVECO FRANCE à payer au syndicat CGT IVECO FRANCE 100 euros au titre des dommages et intérêts de la partie intervenante ;
AUX MOTIFS QUE « la SOCIETE IVECO FRANCE a pris la décision d'utiliser également les autres congés dont bénéficiaient les salariés dans leurs Comptes Epargne Temps individuels pour compléter éventuellement les congés payés et les congés d'ancienneté et éviter ainsi le chômage partiel de 7 jours ; que l'accord collectif d'entreprise relatif à l'organisation du temps de travail en date du 12/12/2003 stipule dans son chapitre 5 : "Les parties au présent accord ont décidé de mettre en place le dispositif du Compte Epargne Temps au sein de la SOCIETE IRIBUS FRANCE. Le dispositif du CET permet à tout salarié qui le souhaite de capitaliser des périodes de repos afin de les utiliser postérieurement pour financer une période de congés. Ainsi les jours crédités au CET permettent aux salariés de disposer de temps rémunéré qu'ils pourront consacrer notamment à l'amélioration de leur formation ou à la réalisation de projets personnels¿" ; que les circulaires DRT n° 9 du 14 avril 2006, fiche n° 1, § 4.2.1 et DRT d u 13 novembre 2008, fiche n° 13, § 3.1 précisent que seules les heures capitalisées à l'initiative de l'employeur, notamment les heures supplémentaires si cela est prévu par l'accord, peuvent être utilisées par l'employeur et imposées aux salariés pour éviter du chômage partiel ; que c'est la seule exception au principe de libre choix du salarié auquel doit obéir tout Compte Epargne Temps ; qu'en revanche les jours affectés individuellement par le salarié sur le Compte Epargne Temps ne peuvent faire l'objet d'une utilisation collective en cas de baisse d'activité ; qu'en conséquence, la décision de la SOCIETE IVECO FRANCE d'utiliser des congés épargnés sur les Comptes Epargne Temps individuels, sans l'accord des salariés bénéficiaires, est contraire aux dispositions en vigueur qui régissent le fonctionnement des Comptes Epargne Temps ; que la SOCIETE IVECO FRANCE sera condamnée à payer à Monsieur Stéphane X... un montant de 266,44 € correspondant aux jours de congés payés prélevés indûment sur le Compte Epargne Temps » et que « que l'article L.2132-3 du Code du travail dispose : « Les syndicats professionnels ont le droit d'agir en justice. Ils peuvent devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent » ; que la société IVECO France en ne respectant pas les accords collectifs signés avec le syndicat CGT IVECO France a porté un préjudice indirect à l'intérêt collectif qu'il conviendra d'indemniser par des dommages et intérêts d'un montant de 100,00 € par instance et pour chaque organisation syndicale » ;
ALORS QUE l'objet du litige est fixé par les prétentions respectives des parties ; que l'accord collectif d'entreprise relatif à la durée et à l'organisation du temps de travail du 12 décembre 2003 a institué, en son chapitre 5, un dispositif de compte épargne temps et, en son chapitre 6, un dispositif d' « épargne conventionnelle des congés » soumis à un régime juridique distinct du précédent ; que la note du 29 septembre 2010, qui informait les salariés de la mesure de chômage partiel et de l'utilisation prioritaire des congés et repos au cours de la semaine du 15 décembre 2010, expliquait que la société IVECO FRANCE positionnerait sur cette période, en dernier lieu, les congés de l' « épargne conventionnelle » , mais ne toucherait pas aux congés crédités sur les comptes épargne temps sans l'accord exprès du salarié ; que dans ses conclusions, la société IVECO FRANCE expliquait qu'elle avait, en dernier lieu, programmé des jours de congés de l'épargne conventionnelle sur la période du 15 au 23 décembre 2010 ; que, dans ses conclusions, le salarié contestait la décision de la société IVECO FRANCE de lui imposer la prise de congés de l'épargne conventionnelle et sollicitait en conséquence un rappel de salaire correspondant aux « congés prélevés de l'épargne conventionnelle » ; qu'en affirmant néanmoins que la société IVECO FRANCE avait imposé la prise de congés affectés individuellement par les salariés sur leur compte épargne temps et en appréciant le bien-fondé de la demande de Monsieur X... au regard des règles applicables à l'utilisation de congés placés dans le compte épargne temps, le conseil de prud'hommes a méconnu l'objet du litige, en violation des articles 4 et 5 du Code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
, SUBSIDIAIREIl est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR condamné la société IVECO FRANCE à verser à Monsieur X... 296,78 euros au titre des jours de congés payés prélevés sur le Compte Epargne Temps ;
AUX MOTIFS QUE « l'article L. 3141-13 du Code du Travail dispose : "La période de prise des congés payés est fixée par les conventions ou accords collectifs de travail. Elle comprend dans tous les cas la période du 1er mai au 31 octobre de chaque année. A défaut de convention ou accord collectif de travail, cette période est fixée par l'employeur en se référant aux usages et après consultation des délégués du personnel et du comité d'entreprise" ; que l'article L. 3141-14 du Code du Travail pour les congés payés et l'article L. 3141-8 du Code du Travail pour les congés d'ancienneté donnent le pouvoir à l'employeur de positionner lesdits congés et il n'existe aucun texte conventionnel ou accord d'entreprise permettant aux salariés de décider eux-mêmes de la période de prise de ces congés ; que le tableau de positionnement des congés payés pour l'année 2010, présenté au Comité d'entreprise, montre que l'entreprise était fermée 4 semaines en août et que 3 jours de la 5ème semaine ont été positionnés par l'entreprise pendant la dernière semaine de décembre 2010 ; que, par conséquent, la décision de la SOCIETE IVECO FRANCE du 29 septembre 2010 concernant la prise des congés payés et les congés d'ancienneté ne concerne que des soldes de congés payés et congés d'ancienneté versés par le salarié dans le compte épargne temps dont il détient dès lors la maîtrise ; qu'en conséquence, la décision de la SOCIETE IVECO FRANCE d'utiliser des congés épargnés sur les Comptes Epargne Temps individuels, sans l'accord des salariés bénéficiaires, est contraire aux dispositions en vigueur qui régissent le fonctionnement des Comptes Epargne Temps ; que la SOCIETE IVECO FRANCE sera condamnée à payer à Monsieur X... Stéphane les jours de congés payés indûment prélevés sur le compte épargne temps » ;
ET QUE « la SOCIETE IVECO FRANCE a pris la décision d'utiliser également les autres congés dont bénéficiaient les salariés dans leurs Comptes Epargne Temps individuels pour compléter éventuellement les congés payés et les congés d'ancienneté et éviter ainsi le chômage partiel de 7 jours ; que l'accord collectif d'entreprise relatif à l'organisation du temps de travail en date du 12/12/2003 stipule dans son chapitre 5 : "Les parties au présent accord ont décidé de mettre en place le dispositif du Compte Epargne Temps au sein de la SOCIETE IRIBUS FRANCE. Le dispositif du CET permet à tout salarié qui le souhaite de capitaliser des périodes de repos afin de les utiliser postérieurement pour financer une période de congés. Ainsi les jours crédités au CET permettent aux salariés de disposer de temps rémunéré qu'ils pourront consacrer notamment à l'amélioration de leur formation ou à la réalisation de projets personnels¿" ; que les circulaires DRT n° 9 du 14 avril 2006, fiche n° 1, § 4.2.1 et DRT du 13 novembre 2008, fiche n° 13, § 3.1 précisent que seules les heures capitalisées à l'initiative de l'employeur, notamment les heures supplémentaires si cela est prévu par l'accord, peuvent être utilisées par l'employeur et imposées aux salariés pour éviter du chômage partiel ; que c'est la seule exception au principe de libre choix du salarié auquel doit obéir tout Compte Epargne Temps ; qu'en revanche les jours affectés individuellement par le salarié sur le Compte Epargne Temps ne peuvent faire l'objet d'une utilisation collective en cas de baisse d'activité ; qu'en conséquence, la décision de la SOCIETE IVECO FRANCE d'utiliser des congés épargnés sur les Comptes Epargne Temps individuels, sans l'accord des salariés bénéficiaires, est contraire aux dispositions en vigueur qui régissent le fonctionnement des Compte Epargne Temps ; que la SOCIETE IVECO FRANCE sera condamnée à payer à Monsieur Stéphane X... un montant de 266,44 € correspondant aux jours de congés payés prélevés indûment sur le Compte Epargne Temps » ;
1. ALORS QUE l'indemnité de congés payés ne peut, au titre d'une même période, se cumuler avec le salaire ; qu'en conséquence, même si la prise de congés payés est imposée par l'employeur de manière irrégulière, elle ne peut donner lieu au paiement d'un rappel de salaire correspondant à la période de prise de congés, en plus de l'indemnité de congés payés déjà versée ; qu'en l'espèce, il est constant que les salariés qui ont pris des congés payés entre le 15 et le 23 décembre 2010, à la demande de l'employeur, ont perçu l'intégralité de leur rémunération, sous forme d'indemnité compensatrice de congés payés ; qu'en conséquence, en accordant au salarié un rappel de salaire correspondant au nombre de jours de congés payés pris sur cette période, le conseil de prud'hommes a violé l'article L. 3141-22 du Code du travail ;
2. ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE la société IVECO FRANCE contestait, de manière subsidiaire, la valorisation des jours de repos et jours de congés effectuée par les salariés et soutenait que le salaire correspondant aux jours positionnés sur la période de chômage partiel devait être déterminé en prenant comme référence une rémunération mensualisée (conclusions, p. 27, 1er al.) ; qu'elle produisait, en conséquence, un décompte précis, salarié par salarié, de la rémunération correspondant aux jours de repos et de jours de congés litigieux ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur le calcul du salaire accordé au titre des jours imposés en congés, le conseil de prud'hommes a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3242-1 du Code du travail.