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27/11/2014 | FRANCE | N°13-15831

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 novembre 2014, 13-15831


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée à compter du 2 novembre 2000 par la société Midex (la société) en qualité d'opératrice de saisie ; qu'elle a été licenciée pour motif économique par lettre du 3 février 2009 ; qu'estimant subir une inégalité de traitement par rapport à une collègue de travail exerçant les même tâches qu'elle, l'intéressée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de

le condamner à verser diverses sommes à la salariée en réparation du préjudice causé...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée à compter du 2 novembre 2000 par la société Midex (la société) en qualité d'opératrice de saisie ; qu'elle a été licenciée pour motif économique par lettre du 3 février 2009 ; qu'estimant subir une inégalité de traitement par rapport à une collègue de travail exerçant les même tâches qu'elle, l'intéressée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à verser diverses sommes à la salariée en réparation du préjudice causé par la différence de traitement qu'elle aurait subie, alors, selon le moyen :
1°/ que l'expérience et l'ancienneté peuvent justifier une différence de rémunération entre deux salariés qui exercent les mêmes fonctions ; qu'en l'espèce, la société Midex soutenait que la différence de rémunération constatée entre Mme Y... et Mme X... était justifiée notamment par le fait que Mme Y... disposait d'une expérience professionnelle antérieure plus en adéquation avec les fonctions de son emploi et d'une ancienneté supérieure dans l'entreprise ; qu'en se bornant à relever, pour accorder à Mme X... un rappel de salaire, que l'inégalité de rémunération entre les deux salariées ne repose pas sur un critère objectif tenant à la différence de travail fourni, sans rechercher si la différence d'expérience et d'ancienneté entre les deux salariées ne justifiait pas cette inégalité de rémunération, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe « à travail égal, salaire égal » ;
2°/ que le juge doit apprécier l'ensemble des éléments objectifs produits par l'employeur pour justifier l'inégalité de rémunération dénoncée par le salarié ; qu'en l'espèce, pour établir la lenteur de Mme X..., la société Midex produisait notamment la liste des bordereaux d'expédition saisis, au cours d'une journée, par Mme X... et par Mme Y... lorsque ces dernières étaient seules à leur poste ; qu'il en ressortait que Mme Y... parvenait à saisir quatre cent dix expéditions, quand Mme X... n'en saisissait que cent cinquante-quatre dans le même temps ; qu'en s'abstenant de se prononcer sur cet élément objectif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe « à travail égal, salaire égal » ;
3°/ en tout état de cause, que le juge a l'interdiction de dénaturer les conclusions des parties ; que la société Midex soutenait, dans ses conclusions d'appel (p. 6) que les calculs proposés par la salariée étaient approximatifs et que sa demande de rappel de salaire portait en partie sur une période couverte par la prescription ; qu'en affirmant cependant que les modalités de calcul des rappels de salaire proposées par la salariée n'étaient pas remises en cause par l'employeur, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la société Midex, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir constaté que Mme X... et Mme Y... exerçaient les mêmes fonctions et que la différence de qualité de travail invoquée par l'employeur était contredite par diverses attestations précises produites en réplique, la cour d'appel, qui a pu en déduire que l'employeur ne justifiait pas de raisons objectives à la différence de traitement entre les deux salariées, a, hors toute dénaturation, légalement justifié sa décision ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour condamner l'employeur au paiement des primes, l'arrêt retient que la société sera tenue au versement prorata temporis des primes d'ancienneté et de gratification prévues toutes deux par la convention collective des transports aériens appliquée par la société Midex à compter du mois d'avril 2007 ;
Qu'en statuant ainsi, en se bornant à affirmer que la convention collective des transports aériens était applicable à compter d'avril 2007 sans préciser sur quel élément de preuve elle se fondait, alors que l'employeur faisait valoir que cette convention n'était appliquée dans l'entreprise qu'à compter de mars 2008 comme en attestent les mentions sur les bulletins de paie, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne l'employeur au versement des primes d'ancienneté et de gratification au titre de l'année 2007, l'arrêt rendu le 14 mars 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept novembre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Midex et la société SMJ, ès qualités.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société MIDEX à verser à Madame X... 20. 627, 40 euros de rappel de salaires au titre des années 2004 à 2009, 2. 062, 74 euros au titre des congés payés afférents et 1. 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par la différence de traitement subie par Madame X... ;
AUX MOTIFS QUE : « Marie-Rose Z... fait valoir que par courrier en date du 21 octobre 2008, invoquant le principe « à travail égal salaire égal », elle s'est étonnée d'occuper la même fonction que Madame Y... embauchée en 1997 et de percevoir un salaire inférieur, que la S. AR. L Midex lui a répondu le 10 novembre suivant en indiquant qu'il n'y avait aucune discrimination entre elles deux et que la différence de rémunération se justifiait par des éléments objectifs, qu'elle a fait l'objet d'un avertissement une semaine avant le début de la procédure de licenciement économique dans le but selon elle de la discréditer et de la déstabiliser ; qu'elle souligne le fait que Madame Y... et elle assuraient le même travail, avec les mêmes tâches et les mêmes horaires et qu'en l'absence d'évaluation annuelle, l'employeur ne dispose pas d'élément objectif lui permettant d'affirmer que sa collègue aurait été plus performante qu'elle ; que la S. AR. L Midex réplique que Madame Y... était plus expérimentée que Marie-Rose Z..., qu'elle était plus autonome et responsable, que le travail de Marie-Rose Z... était bien plus lent que celui de Madame Y... et de moindre qualité, ce qui justifiait la différence dénoncée par l'appelante ; que Marie-Rose Z... verse aux débats ses bulletins de salaires et ceux de Madame Y... ; que selon les bulletins de paie de chacune d'elles,- Marie-Rose Z... avait une ancienneté remontant au 2 novembre 2000, occupait un emploi de saisie, qualification « employé », niveau 1 coefficient 160, percevait un salaire de 1 485, 05 €,- Madame Y..., engagée le 1er mars 1997, occupait le même emploi, avait les mêmes qualification et coefficient (160), son salaire étant fixé à la somme de 1 727, 57 € ; que Marie-Rose Z... communique également une attestation émanant de Madame Y... indiquant qu'elles effectuaient toutes deux les mêmes tâches, y compris celle consistant à former les nouvelles opératrices de saisie, ce que confirment Mesdames A... et X... ; que Madame Y... atteste en ces termes : " J'ai été embauchée en mars 1997 comme opératrice de saisie pour saisir des bordereaux de différents clients pour diverses destinations. Ce poste ne nécessite aucun diplôme juste la connaissance du clavier. Celui-ci n'a pas évolué ni subi de changement depuis mon arrivée dans la société ni d'avoir bénéficié d'aucune promotion. Finalement la formation des employés amenés à nous aider ou de nouveaux embauchés est incombé sur Mme X... et moi-même suivant notre disponibilité. Je n'ai aucune responsabilité d'une entreprise ni le statut de formatrice du personnel et que je n'ai pas assuré la formation de Mme X..., c'est Mlle B... qui l'a assuré. Nous avons exactement le même travail et nous assurons les mêmes tâches avec les mêmes horaires (Mme X... et moi-même) " ; que la S. AR. L Midex, quant à elle, communique des attestations de cadres de la société qui dénoncent la lenteur de Marie-Rose Z... ; que Monsieur C..., responsable tri expéditions évoque de manière non circonstanciée la lenteur et les erreurs de saisie commises par Marie-Rose Z... ; que Monsieur D..., comptable de la société, affirme que la différence constatée entre Marie-Rose Z... et Madame Y... est justifiée par l'incapacité de la première d'entre elles à terminer son travail et à l'effectuer correctement ; qu'or ce témoignage est contredit par l'attestation de Madame E..., également opératrice de saisie, dont les propos ne sont pas expressément remis en cause notamment en ce qui concerne le lieu de travail de ce témoin, et la fréquence limitée de ses passages, une fois par semaine, dans la société ; que cette dernière précise en effet : " Concernant l'attestation de Monsieur D..., il est impossible qu'il ait pu constater ni même apprécier le travail des salariés car il est juste le comptable de la société et qu'il ne se rendait dans les locaux de la société, dans des bureaux à part, une seule journée par semaine à savoir le mercredi... " ; que s'agissant du témoignage de Madame Micheline G..., responsable des opératrices qui atteste de la différence de qualité et de rapidité de travail entre les deux salariées, Madame E... ajoute : " Les témoignages de la partie adverse attestent d'une différence objective qui tiendrait à la qualité et notamment la rapidité d'exécution du travail de Mme X... Marie-Rose. Tout d'abord ayant travaillé aux côtés de mes deux collègues j'atteste que Mme Y... et Mme X... avaient les même qualités et rapidité d'exécution de leurs tâches. L'affirmation de Mme G... Micheline rapportant que je ne supportais plus les erreurs de Mme est un mensonge... Enfin concernant l'activité de l'entreprise, le nombre de colis reçus chaque jour est aléatoire très variable les périodes de noël étant la période pendant laquelle il y a le plus de travail. Les colis arrivent chaque matin, les bordereaux saisis le plus rapidement possible pour ne pas rater les vols qui sont prévus le matin. Or Mme Sylvie Y... et Mme X... Marie-Rose pratiquaient des horaires alternés ce qui leur permettaient de quitter plus tôt une semaine sur deux... Les allégations sur la lenteur supposée de Mme X... Marie-Rose sont en contradiction avec la pratique des horaires alternés. Si Mme X... avait été plus lente et moins compétente la direction n'aurait pas permis ce système d'horaires décalés au risque de louper les vols et que les marchandise ne puisse pas partir le matin. La quantité de colis étant très variable si la lenteur de Mme X... avait été avérée seule, Mme Y... aurait assuré les vols du matin, pour ne prendre aucun risque " ; que force est de constater que la S.A.R.L Midex ne conteste pas l'organisation de travail ci-dessus décrite ; qu'or la S. AR. L Midex n'invoque pas et encore moins ne démontre que des colis n'ont pu partir du fait d'un quelconque retard imputable à Marie-Rose Z... ; qu'elle ne justifie pas plus de plaintes de clients ; que dès lors, la prétendue médiocrité du travail accompli par Marie-Rose Z... est insuffisante à apporter la preuve que l'inégalité de traitement dont elle a été victime repose sur un critère objectif tenant à la différence du travail fourni ; qu'il convient donc d'infirmer le jugement entrepris et de faire droit à la demande de rappels de salaires et congés payés afférents formée par l'appelante et dont les Modalités de calcul ne sont pas remises en cause par l'employeur ; que la différence de traitement subie par Marie-Rose Z... lui a de plus nécessairement occasionné un préjudice qui sera justement réparé par l'allocation de la somme de 1 000 € de dommages-intérêts » ;
1. ALORS, D'UNE PART, QUE l'expérience et l'ancienneté peuvent justifier une différence de rémunération entre deux salariés qui exercent les mêmes fonctions ; qu'en l'espèce, la société MIDEX soutenait que la différence de rémunération constatée entre Madame Y... et Madame X... était justifiée notamment par le fait que Madame Y... disposait d'une expérience professionnelle antérieure plus en adéquation avec les fonctions de son emploi et d'une ancienneté supérieure dans l'entreprise ; qu'en se bornant à relever, pour accorder à Madame X... un rappel de salaire, que l'inégalité de rémunération entre les deux salariées ne repose pas sur un critère objectif tenant à la différence de travail fourni, sans rechercher si la différence d'expérience et d'ancienneté entre les deux salariées ne justifiait pas cette inégalité de rémunération, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe « à travail égal, salaire égal » ;
2. ALORS, D'AUTRE PART, QUE le juge doit apprécier l'ensemble des éléments objectifs produits par l'employeur pour justifier l'inégalité de rémunération dénoncée par le salarié ; qu'en l'espèce, pour établir la lenteur de Madame X..., la société MIDEX produisait notamment la liste des bordereaux d'expédition saisis, au cours d'une journée, par Madame X... et par Madame Y... lorsque ces dernières étaient seules à leur poste ; qu'il en ressortait que Madame Y... parvenait à saisir 410 expéditions, quand Madame X... n'en saisissait que 154 dans le même temps ; qu'en s'abstenant de se prononcer sur cet élément objectif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe « à travail égal, salaire égal » ;
3. ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE le juge a l'interdiction de dénaturer les conclusions des parties ; que la société MIDEX soutenait, dans ses conclusions d'appel (p. 6) que les calculs proposés par la salariée étaient approximatifs et que sa demande de rappel de salaire portait en partie sur une période couverte par la prescription ; qu'en affirmant cependant que les modalités de calcul des rappels de salaire proposées par la salariée n'étaient pas remises en cause par l'employeur, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la société
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société MIDEX à verser à Madame X... 1. 087, 10 euros à titre de prime d'ancienneté 2007, outre les congés payés afférents et 1. 290, 40 euros à titre de prime de gratification 2007, outre les congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QU'« il y a lieu de condamner la S. A. R. L. Midex à lui verser le montant prorata temporis des primes d'ancienneté et de gratification, prévues toutes deux par la convention collective des transports aériens appliquée par la S. A. R. L. Midex à compter du mois d'avril 2007 » ;
ALORS QUE toute décision doit être motivée et que méconnaît cette exigence de motivation le juge qui se détermine sans identifier, ni analyser les éléments de preuve sur lesquels il fonde ses affirmations ; qu'en l'espèce, la société MIDEX soutenait que la Convention collective du travail aérien n'était applicable qu'à compter du mois de mars 2008 et qu'avant cette date, elle appliquait la seule Convention collective des transports routiers, comme en attestaient les mentions des bulletins de paie de la salariée ; qu'après avoir constaté que les relations entre les parties étaient régies par la Convention collective des transports routiers et auxiliaires de transport, la cour d'appel s'est cependant bornée à affirmer que la Convention collective des transports aériens était appliquée à compter du mois d'avril 2007 pour faire droit aux demandes de la salarié en paiement de primes pour l'année 2007 ; qu'en se prononçant de la sorte, sans préciser sur quel élément de preuve elle fondait cette affirmation péremptoire, la cour d'appel a méconnu les exigences de motivation de l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-15831
Date de la décision : 27/11/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 14 mars 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 nov. 2014, pourvoi n°13-15831


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.15831
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