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20/11/2014 | FRANCE | N°13-24307

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 novembre 2014, 13-24307


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Angers, 29 janvier 2013 et 9 juillet 2013), qu'en 2009, la société coopérative agricole France Champignon a engagé une procédure de licenciement collectif pour motif économique, signé un accord de méthode le 19 février 2009 et élaboré un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) ; qu'après avoir été licenciés pour motif économique, des salariés ont conclu avec l'employeur un « accord transactionnel » par lequel ils déclaraient renoncer à toute action pouvant résulter

de l'exécution ou de la rupture du contrat, en contrepartie du paiement d'une...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Angers, 29 janvier 2013 et 9 juillet 2013), qu'en 2009, la société coopérative agricole France Champignon a engagé une procédure de licenciement collectif pour motif économique, signé un accord de méthode le 19 février 2009 et élaboré un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) ; qu'après avoir été licenciés pour motif économique, des salariés ont conclu avec l'employeur un « accord transactionnel » par lequel ils déclaraient renoncer à toute action pouvant résulter de l'exécution ou de la rupture du contrat, en contrepartie du paiement d'une indemnité complémentaire de 2 500 euros ; qu'ils ont ensuite saisi le juge prud'homal de demandes en annulation de la transaction et en paiement de dommages-intérêts notamment pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt du 29 janvier 2013 de déclarer nuls les accords transactionnels et recevables les demandes des salariés, alors, selon le moyen :
1°/ que la cour d'appel, qui a constaté que l'indemnité transactionnelle complémentaire de 2 500 euros ne faisait pas partie des mesures prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi dont elle a reproduit les termes, et qui a néanmoins jugé que les accords transactionnels litigieux étaient nuls en ce que la concession de l'employeur se bornait au versement d'une indemnité de 2 500 euros à laquelle les salariés auraient d'ores et déjà eu droit en vertu de ce même plan de sauvegarde de l'emploi, a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article 1134 du code civil ;
2°/ qu'au surplus, en considérant que l'indemnité transactionnelle de 2 500 euros constituait une mesure déjà prévue par le plan de sauvegarde de l'emploi, la cour d'appel a dénaturé ce dernier, violant ainsi l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause ;
3°/ qu'en affirmant que l'obligation de verser l'indemnité transactionnelle de 2 500 euros découlait du plan de sauvegarde de l'emploi tout en reproduisant les dispositions dudit plan, faisant ainsi apparaître qu'il ne prévoyait pas le versement d'une indemnité de 2 500 euros, la cour d'appel a statué par des motifs contradictoires, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que l'indemnité transactionnelle proposée en contrepartie de la renonciation à une demande indemnitaire n'a pas à tenir compte de la situation individuelle de chaque salarié, dès lors qu'elle est appréciable ; que dès lors, la circonstance que les indemnités transactionnelles proposées à chacun des salariés licenciés fussent de montants identiques est indifférente à l'appréciation de la validité de chacun de ces accords transactionnels, le juge devant seulement vérifier l'existence et le caractère non dérisoire de la concession de l'employeur ; qu'en se fondant sur le caractère « forfaitaire » de l'indemnité transactionnelle de 2 500 euros pour en déduire qu'elle ne constituait pas une concession sérieuse de la part de la société France champignon, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et a ainsi privé de base légale sa décision au regard des articles 2044 et 1131 du code civil ;
5°/ que la juridiction appelée à statuer sur la validité d'une transaction réglant les conséquences d'un licenciement n'a pas à se prononcer sur la réalité et le sérieux du ou des motifs énoncés dans la lettre de licenciement et doit seulement, pour apprécier si des concessions réciproques ont été faites et si celle de l'employeur n'est pas dérisoire, vérifier que la lettre de licenciement est motivée conformément aux exigences légales ; que pour considérer comme dérisoire la concession de l'employeur constituée par le versement d'une indemnité transactionnelle de 2 500 euros, la cour d'appel a procédé à une estimation du « risque judiciaire » lié à la contestation du licenciement, en se référant aux mentions des lettres de licenciement relatives au contenu des efforts de reclassement effectués par l'employeur, tout en constatant expressément que la rédaction desdites lettres ne permettait pas d'inférer l'absence de cause réelle et sérieuse de licenciement, point sur lequel elle a sursis à statuer ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé l'article 2044 du code civil ;
6°/ que les transactions ne peuvent être attaquées pour cause de lésion ; qu'en procédant à une évaluation du « risque judiciaire » lié à la contestation de la cause du licenciement au regard de l'obligation de reclassement de l'employeur, quand il lui appartenait seulement d'examiner si la concession de l'employeur était réelle, la cour d'appel a violé l'article 2052, alinéa 2, du code civil ;
7°/ que lorsque le licenciement est prononcé pour un motif économique, l'employeur est seulement tenu d'énoncer, dans la lettre de licenciement, les raisons économiques du licenciement et leur incidence sur l'emploi ou le contrat de travail du salarié ; qu'aucune disposition légale ne lui fait obligation de mentionner dans la lettre le contenu des diligences effectuées en vue de reclasser le salarié ; que le juge ne peut, dès lors, se fonder sur les seules mentions contenues dans la lettre de licenciement pour en déduire que l'employeur n'avait pas respecté son obligation de reclassement ; qu'en se fondant sur les seules mentions de la lettre de licenciement relatives au contenu des efforts de reclassement de l'employeur pour apprécier le « risque judiciaire » lié à la contestation du licenciement pour motif économique, cependant que ces mentions ne sont pas légalement exigées et ne fixent pas, sur ce point, les termes du litige, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-16 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant constaté qu'il résultait des termes de l'accord transactionnel, des mentions du PSE renvoyant aux dispositions de l'accord de groupe du 24 juin 2008 ainsi que du contenu du procès-verbal de la réunion extraordinaire du comité central d'entreprise prévue à l'accord de méthode que l'indemnité complémentaire et forfaitaire de 2 500 euros était un avantage résultant du PSE consenti par l'employeur après discussion avec les organisations syndicales au cours de la procédure de consultation, en sorte que l'accord transactionnel signé avec les salariés ne contenait aucune concession de la part de l'employeur, la cour d'appel a, sans dénaturation ni se contredire, et par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
Sur le second moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt du 9 juillet 2013 de dire les licenciements sans cause réelle et sérieuse et de le condamner à payer aux salariés des dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ que le licenciement pour motif économique est justifié lorsque les fonctions du salarié ont été supprimées et qu'aucun poste équivalent n'a pu lui être proposé au sein de la société ou du groupe ; qu'en jugeant que l'employeur ne justifiait pas de recherches précises et personnalisées tout en constatant qu'il avait proposé à plusieurs salariés des offres de reclassement que ceux-ci avaient refusées, la cour d'appel a entaché sa décision de contradiction de motifs et, partant, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que l'employeur avait fait valoir qu'aucun des postes disponibles dans le groupe ne correspondait aux aptitudes professionnelles des salariés licenciés, de sorte qu'il était impossible de leur proposer un poste de reclassement ; qu'en s'abstenant de rechercher si les postes de reclassement disponibles dans l'entreprise n'étaient pas insusceptibles d'être proposés aux salariés concernés, faute pour ceux-ci d'avoir la qualification professionnelle requise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail ;
3°/ que si l'employeur doit rechercher les possibilités de reclassement, cette obligation est respectée dès lors que, ayant proposé des emplois au salarié, ce dernier les a refusés ; qu'en déclarant que l'employeur n'avait pas respecté son obligation de reclassement à l'égard de Mme X... et de M. Y..., cependant qu'elle constatait que l'employeur leur avait proposé des postes de reclassement qu'ils avaient refusés, la cour d'appel a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles L. 1233-2, L. 1233-4 et L. 1235-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'après avoir constaté que l'employeur s'était, pour certains salariés, borné à leur communiquer une liste de postes disponibles au sein du groupe sans offre précise et personnalisée, et pour d'autres, n'avait pas recherché sérieusement d'autres possibilités de reclassement après un essai infructueux ou un refus, la cour d'appel a pu en déduire que l'employeur n'avait pas satisfait à son obligation de reclassement ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société coopérative agricole France champignon aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société coopérative agricole France champignon et condamne celle-ci à payer aux défendeurs la somme globale de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt novembre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société France champignon
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
(dirigé contre l'arrêt du 29 janvier 2013)
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que les accords transactionnels conclus entre la société FRANCE CHAMPIGNON et les salariés défendeurs au pourvoi étaient nuls et d'AVOIR, en conséquence, déclaré recevables les demandes présentées par les salariés ;
AUX MOTIFS QUE « Sur la validité des accords transactionnels et la recevabilité des demandes des salariés : L'article 2044 du code civil énonce que la transaction est un contrat, qui doit être écrit, par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître. Elle a, entre les parties, aux termes de l'article 2052 du code civil, autorité de la chose jugée en dernier ressort. L'accord transactionnel signé par chacun des huit salariés appelants est rédigé dans les mêmes termes, les signatures étant intervenues de juin 2009 à octobre 2009. Celui qui a été signé le 11 juin 2009 par Mme Marina Z... sera pris pour exemple :... « Madame Z... Marina a été licenciée pour motif économique par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 10 avril 2009. Ce licenciement a été effectué dans le cadre d'une procédure collective qui portait sur la suppression nette de 69 postes de travail au sein de la Coopérative. L'accord du 24 juin 2008 relatif à la GPEC prévoyait un certain nombre de dispositions d'accompagnement en cas de mise en oeuvre d'un Plan de Sauvegarde de l'Emploi. Ces dispositions ont été appliquées dans toute leur intégralité. Au nom des salariés licenciés, les organisations syndicales ont jugé insuffisantes les indemnités de licenciement prévues à l'accord de Groupe du 24 juin 2008 au regard du préjudice subi. Après plusieurs rencontres, les parties sont convenues de verser dans le cadre d'un accord transactionnel une somme complémentaire fixée à 2500 € aux salariés dont le licenciement ne peut être évité, qui ne se sont pas portés volontaires au départ et qui ne bénéficient pas de mesure du FNE. C'est dans le respect de cet accord que les parties ont convenu par écrit des conséquences de la rupture du contrat de travail de Madame Z... Marina, ceci dans le but de s'interdire réciproquement tout litige susceptible de naître de l'exécution ou de la rupture du contrat de travail les ayant liés. Article 1 : La Coopérative Agricole France Champignon verse à Madame Z... Marina la somme de 2500 € sur laquelle seront prélevées la CSG et la CRDS à titre d'indemnité transactionnelle de rupture et s'engage à offrir à Madame Z... Marina toutes les autres mesures d'accompagnement prévues au PSE. En sus de ses droits à congés payés et prime de fin d'année proratisée, Madame Z... Marina percevra une indemnité conventionnelle de licenciement d'un montant net de 12378, 94 € à laquelle est ajoutée une indemnité complémentaire fixée à 2000 € dans le respect du PSE. La concession de la salariée est d'accepter les conséquences de la rupture et de s'estimer remplie de ses droits et réparée de son entier préjudice. La concession de la société est d'allouer une indemnité transactionnelle de rupture. Article 2 : Madame Z... Marina est informée que le présent accord transactionnel sera déclaré comme tel auprès des services de l'ASSEDIC et déclare qu'elle en assume toutes les conséquences, notamment en matière de différé d'indemnisation. Article 3 : Madame Z... Marina se déclare remplie de l'intégralité des droits pouvant résulter de l'exécution comme de la rupture de son contrat de travail. En conséquence de quoi les parties renoncent, sous réserve de l'exécution du présent accord, à toute action ou instance de quelque nature que ce soit qui pourrait résulter de l'exécution ou de la rupture du contrat les ayant liés. Article 4 : Le présent accord vaut transaction conformément aux articles 2044 et suivants du code civil. " Il est donc indiqué dans cet accord transactionnel que l'indemnité complémentaire de rupture de 2500 € s'ajoute à l'indemnité complémentaire de 2000 ¿ prévue dans le P. S. E. et que les organisations syndicales ont trouvé insuffisante ; Le P. S. E élaboré par la sca France Champignon et présenté au comité central d'entreprise et aux comités d'établissements dans le cadre de l'accord de méthode du 19 février 2009, présente dans son livre III, au chapitre I, le " projet de licenciement " et au chapitre Il les " mesures d'accompagnement " ; Il y est indiqué que " Les mesures d'accompagnement sont celles prévues par l'accord de groupe en date du 24 juin 2008 ci-dessous nommé : " Protocole relatif aux mesures d'accompagnement en cas de mise en oeuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi au sein du groupe France Champignon " ; Le protocole d'accord du 24 juin 2008 énonce en effet les modalités de reclassement interne au sein du groupe France Champignon, les mesures pour favoriser des reclassements externes au groupe France Champignon, et les " mesures complémentaires ", qui sont :- les conventions de préretraite AS/ FNE pour les salariés âgés de 56 ans et plus,- l'indemnité de licenciement-l'anticipation des départs-le congé de reclassement-la réactivation du bassin d'emploi-l'indemnité complémentaire. Celle-ci est décrite à l'article 7. 8 du protocole : " Indemnité complémentaire. Une indemnité d'incitation à la recherche de solution professionnelle externe au groupe France Champignon, d'un montant net de 2000 €, est versée par l'entreprise à chaque salarié licencié pour motif économique et non reclassé au sein du groupe France Champignon. " Il est acquis qu'une réunion extraordinaire du comité central d'entreprise s'est tenue le 27 mars 2009, dans la continuité de celle du 24 mars 2009, prévue à l'accord de méthode du 19 février 2009, dont le procès-verbal a été rédigé en ces termes : "... Après discussion, il est arrêté les dispositions ci-après : A l'indemnité complémentaire fixée à 2000 € dans l'accord de juin 2008, sera ajoutée une indemnité complémentaire de 2500 ¿ dans le cadre d'un accord transactionnel à tout salarié licencié qui ne bénéficiera pas de mesure de préretraite et qui ne se sera pas porté volontaire au départ. Cette indemnité sera portée à 3000 € pour les volontaires au départ dans les mêmes conditions que précédemment. La réunion se termine par un avis du CCE sur le livre III, seuls 4 membres décident de participer au vote, les autres refusant d'y participer, résultat du vote :-2 bulletins blancs-2 favorables ". Il n'est pas discuté que les accords transactionnels passés entre l'employeur et les huit salariés appelants ont été conclus après la rupture du contrat de travail, soit après la notification du licenciement. L'accord que l'employeur et le salarié passent après le licenciement pour en organiser les conséquences n'a valeur de transaction que dans la mesure où il comporte des concessions réciproques, ainsi que l'exige l'article 2044 du code civil ; il est par conséquent nécessaire que cette convention procure au salarié des avantages autres que ceux qu'il tient du P. S. E.. L'attribution aux salariés d'une indemnité destinée à compenser les conséquences dommageables du licenciement en tenant compte de la situation personnelle de chacun au regard de son âge, de ses charges de famille, ou de ses difficultés de reconversion professionnelle, correspondrait à une concession, puisque l'employeur octroierait alors un avantage qu'il n'a pas l'obligation d'accorder, dès lors par ailleurs que la lettre de licenciement est correctement motivée. L'indemnité complémentaire de 2500 € accordée aux huit salariés est quant à elle d'un montant forfaitaire et il ressort de l'ensemble des éléments susvisés, notamment des mentions du PSE, renvoyant aux dispositions de l'accord de groupe du 24 juin 2008, ainsi que du contenu du procès-verbal de la réunion extraordinaire du comité central d'entreprise du 27 mars 2009, qu'il s'agit d'un avantage résultant du P. S. E, qui a été consenti par l'employeur après discussion avec les organisations syndicales. L'accord transactionnel signé avec chacun des appelants ne contient dès lors pas de concession de l'employeur qui dit d'ailleurs verser l'indemnité complémentaire de 2500 €, et s'engager en même temps à offrir à chacun des salariés signataires de l'accord transactionnel " toutes les autres mesures d'accompagnement prévues au PSE. " ce qui signifie bien que l'indemnité de 2500 € y est incluse ; L'accord transactionnel, dès lors qu'il est dépourvu de concession de l'employeur, doit être dit nul. Au surplus, l'employeur, eut-il l'aval du comité d'entreprise, ne peut disposer du droit individuel de chaque salarié à contester le motif de son licenciement et l'avantage du versement de l'indemnité de 2500 € ne peut être subordonné à la conclusion d'un contrat individuel de transaction. D'autre part, quand bien même le versement de l'indemnité de 2500 € serait retenu comme constituant une concession de l'employeur, il demeurerait nécessaire à la validité de l'accord transactionnel que cette concession soit appréciable. Or, l'accord de groupe du 24 juin 2008 prévoit quant aux reclassements internes en son sein des " modalités de propositions de postes " qui sont : l'affichage dans les locaux de l'antenne emploi, et dans l'entité concernée, ainsi que la remise à chaque salarié concerné par une mesure de licenciement d'une liste des postes disponibles, et ajoute que " le candidat qui aura fait part de son intérêt pour un poste correspondant à ses compétences... recevra une proposition écrite et précise ". Les lettres de licenciement notifiées à chacun des appelants sont libellées, quant au reclassement, dans ces termes : " 3) L'impossibilité d'assurer votre reclassement au sein du groupe. Une liste de postes à pourvoir au sein du groupe est affichée dans votre établissement. Nous avons le regret de constater que votre reclassement s'avère impossible aux motifs que ces postes ne sont pas en rapport avec vos aptitudes professionnelles ou ne vous désignent pas comme prioritaire au regard de l'ordre des licenciements préalablement défini. " A l'exception de Mme X..., qui s'est portée volontaire au départ, les lettres de licenciement notifiées à Mme Danielle A..., Mme Christine Y..., Mme Marina Z..., Mme Evelyne B..., Mme Sophia C..., M. Laurent Y..., M. Patrice D... ne font mention, quant aux recherches de reclassement réalisées par l'employeur, que de l'affichage dans l'établissement de la liste des postes à pourvoir, modalité qui méconnaît les dispositions de l'article L1233-4 du code du travail qui énonce que " les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises " ; Il est d'autre part acquis que la sca France Champignon ayant un effectif d'au moins 11 salariés, et chaque appelant ayant une ancienneté supérieure à 2 ans dans l'entreprise, la reconnaissance judiciaire de l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, résultant du manquement de l'employeur à son obligation de recherche de reclassement, ouvrirait droit aux salariés, aux termes de l'article L1235-3 du code du travail, à une indemnité ne pouvant pas être inférieure aux salaires des six derniers mois, qui vont de 1320 € brut à 1499 € brut, et par conséquent au versement de sommes minimales de 7920 € à 8994 €, susceptibles d'être augmentées notamment en considération de l'ancienneté du salarié dans l'entreprise ; La somme de 2500 € prévue dans l'accord transactionnel, comme concession de l'employeur en contrepartie du renoncement par le salarié à toute action ou instance résultant de la rupture du contrat de travail, est alors dérisoire au regard du risque judiciaire lié à la contestation du bien fondé du licenciement. Pour cette seconde raison et sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens des appelants, les accords transactionnels signés entre la sca France Champignon et Mme Danielle A..., Mme Christine Y..., Mme Marina Z..., Mme Evelyne B..., Mme Chantal X... Mme Sophia C..., M. Laurent Y..., et M. Patrice D... doivent être dits, par voie d'infirmation du jugement entrepris, nuls et leurs demandes, afférentes à l'exécution et à la rupture des contrats de travail, en conséquence de la dite nullité, recevables » ;
1°/ ALORS, DE PREMIÈRE PART, QUE la cour d'appel, qui a constaté que l'indemnité transactionnelle complémentaire de 2. 500 € ne faisait pas partie des mesures prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi dont elle a reproduit les termes, et qui a néanmoins jugé que les accords transactionnels litigieux étaient nuls en ce que la concession de l'employeur se bornait au versement d'une indemnité de 2. 500 € à laquelle les salariés auraient d'ores et déjà eu droit en vertu de ce même plan de sauvegarde de l'emploi, a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article 1134 du Code civil ;
2°/ QU'au surplus, en considérant que l'indemnité transactionnelle de 2. 500 € constituait une mesure déjà prévue par le plan de sauvegarde de l'emploi, la cour d'appel a dénaturé ce dernier, violant ainsi l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause ;
3°/ ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QU'en affirmant que l'obligation de verser l'indemnité transactionnelle de 2. 500 € découlait du plan de sauvegarde de l'emploi tout en reproduisant les dispositions dudit plan, faisant ainsi apparaître qu'il ne prévoyait pas le versement d'une indemnité de 2. 500 €, la cour d'appel a statué par des motifs contradictoires, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;
4°/ ALORS, DE QUATRIÈME PART, QUE l'indemnité transactionnelle proposée en contrepartie de la renonciation à une demande indemnitaire n'a pas à tenir compte de la situation individuelle de chaque salarié, dès lors qu'elle est appréciable ; que dès lors, la circonstance que les indemnités transactionnelles proposées à chacun des salariés licenciés fussent de montants identiques est indifférente à l'appréciation de la validité de chacun de ces accords transactionnels, le juge devant seulement vérifier l'existence et le caractère non dérisoire de la concession de l'employeur ; qu'en se fondant sur le caractère « forfaitaire » de l'indemnité transactionnelle de 2. 500 € pour en déduire qu'elle ne constituait pas une concession sérieuse de la part de la société FRANCE CHAMPIGNON, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et a ainsi privé de base légale sa décision au regard des articles 2044 et 1131 du Code civil ;
5°/ ALORS, DE CINQUIÈME PART, QUE la juridiction appelée à statuer sur la validité d'une transaction réglant les conséquences d'un licenciement n'a pas à se prononcer sur la réalité et le sérieux du ou des motifs énoncés dans la lettre de licenciement et doit seulement, pour apprécier si des concessions réciproques ont été faites et si celle de l'employeur n'est pas dérisoire, vérifier que la lettre de licenciement est motivée conformément aux exigences légales ; que pour considérer comme dérisoire la concession de l'employeur constituée par le versement d'une indemnité transactionnelle de 2. 500 ¿, la cour d'appel a procédé à une estimation du « risque judiciaire » lié à la contestation du licenciement, en se référant aux mentions des lettres de licenciement relatives au contenu des efforts de reclassement effectués par l'employeur, tout en constatant expressément que la rédaction desdites lettres ne permettait pas d'inférer l'absence de cause réelle et sérieuse de licenciement, point sur lequel elle a sursis à statuer ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé l'article 2044 du Code civil ;
6°/ QU'IL EN VA D'AUTANT PLUS AINSI QUE les transactions ne peuvent être attaquées pour cause de lésion ; qu'en procédant à une évaluation du « risque judiciaire » lié à la contestation de la cause du licenciement au regard de l'obligation de reclassement de l'employeur, quand il lui appartenait seulement d'examiner si la concession de l'employeur était réelle, la cour d'appel a violé l'article 2052, alinéa 2 du Code civil ;
7°/ ALORS, ENFIN ET EN TOUTE HYPOTHÈSE, QUE lorsque le licenciement est prononcé pour un motif économique, l'employeur est seulement tenu d'énoncer, dans la lettre de licenciement, les raisons économiques du licenciement et leur incidence sur l'emploi ou le contrat de travail du salarié ; qu'aucune disposition légale ne lui fait obligation de mentionner dans la lettre le contenu des diligences effectuées en vue de reclasser le salarié ; que le juge ne peut, dès lors, se fonder sur les seules mentions contenues dans la lettre de licenciement pour en déduire que l'employeur n'avait pas respecté son obligation de reclassement ; qu'en se fondant sur les seules mentions de la lettre de licenciement relatives au contenu des efforts de reclassement de l'employeur pour apprécier le « risque judiciaire » lié à la contestation du licenciement pour motif économique, cependant que ces mentions ne sont pas légalement exigées et ne fixent pas, sur ce point, les termes du litige, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-16 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE) (dirigé contre l'arrêt du 9 juillet 2013)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que les licenciements des huit salariés défendeurs au pourvoi ne reposaient pas sur une cause réelle et sérieuse, et d'AVOIR en conséquence condamné la société FRANCE CHAMPIGNON à leur payer à chacun une somme à titre de dommages et intérêts pour licenciement injustifié ;
AUX MOTIFS QUE « Sur la recherche de reclassement : L'accord de groupe du 24 juin 2008 prévoit quant aux reclassements internes en son sein des modalités de propositions de postes qui sont l'affichage dans les locaux de l'antenne emploi, et dans l'entité concernée, ainsi que la remise à chaque salarié concerné par une mesure de licenciement d'une liste des postes disponibles, et il ajoute que le candidat qui aura fait part de son intérêt pour un poste correspondant à ses compétences recevra une proposition écrite et précise ; Aux termes de l'article L. 1233-4 du code du travail, un licenciement économique ne peut intervenir que " lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient ". Une obligation de reclassement pèse sur l'employeur, qui, s'il s'agit d'une obligation de moyens et non de résultats, doit se montrer sérieux et loyal dans l'exécution de celle-ci ; S'il existe un plan de sauvegarde de l'emploi, comprenant des mesures concrètes et précises de nature à éviter les licenciements ou à en limiter le nombre, l'employeur n'est pas pour autant dispensé de rechercher s'il existe ou non des possibilités de reclassement des salariés, que celles-ci soient prévues ou non dans le plan, et il lui revient de prouver que le reclassement est impossible ; Il doit chercher à reclasser le salarié sur les emplois disponibles, de même catégorie, ou sur un emploi équivalent assorti d'un rémunération équivalente, à défaut, le reclassement sur un emploi de catégorie inférieure peut être envisagé, si le salarié l'accepte expressément ; Le périmètre des recherches de reclassement est circonscrit à l'entreprise ou, si l'entreprise relève d'un groupe, aux entreprises du groupe dont les activités, l'organisation, ou le lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ; Dans les lettres de licenciement notifiées à Mmes A..., C..., Y..., Z... et B... l'employeur énonce l'impossibilité de reclasser chacune des salariées, dans ces termes : " 3) L'impossibilité d'assurer votre reclassement au sein du groupe. Une liste de postes à pourvoir au sein du groupe est affichée dans votre établissement. Nous avons le regret de constater que votre reclassement s'avère impossible aux motifs que ces postes ne sont pas en rapport avec vos aptitudes professionnelles ou ne vous désignent pas comme prioritaire au regard de l'ordre des licenciements préalablement défini. " Il ressort de cet énoncé qu'une liste des postes disponibles a été affichée dans l'entreprise, ce qui ne correspond pas à une recherche de reclassement individualisée, écrite et précise ; la société France Champignon relève que les salariés ont reçu chacun la liste des postes disponibles dans l'ensemble du groupe, ce qui n'est pas contesté par ceux-ci ; il n'en demeure pas moins que cette liste, adressée dans les mêmes termes à tous les salariés concernés, ne mentionne que la qualification du poste, le service auquel il est rattaché, le coefficient et la catégorie, ce qui ne constitue pas non plus une offre précise et individualisée ; la société France Champignon enfin, tout en affirmant qu'elle a " identifié un certain nombre de solutions de reclassement ", ne produit aucune pièce justifiant d'une telle recherche ; La société France Champignon ne justifie pas d'une recherche sérieuse et loyale de reclassement à l'égard de Mmes A..., C..., Y..., Z... et B... ni de l'impossibilité de les reclasser ; le non respect de l'obligation de recherche de reclassement prive les licenciements de ces salariées de cause réelle et sérieuse. La lettre de licenciement notifiée à M. D... mentionne : " vous avez répondu par la négative à notre offre de reclassement à un poste de manutentionnaire sur le site de Beaufort en Vallée. De plus, une liste des postes à pourvoir au sein du groupe est affichée dans votre établissement, et vous ne vous êtes pas positionné sur un de ces postes ". La société France Champignon ne produit cependant aucune pièce justifiant de la réalité de cette offre de reclassement, ni ne verse aux débats une lettre de refus de M. D... ; le respect de l'obligation de recherche de reclassement n'est pas établi à l'égard de M. D..., dont le licenciement est en conséquence dépourvu de cause réelle et sérieuse ; Mme X..., dont l'employeur soutient qu'elle a opté pour un départ volontaire a bien fait l'objet d'un licenciement économique, qui lui a été notifié par lettre du 15 mai 2009, dans ces termes : " la conséquence directe des causes économiques énoncées ci-dessus entraîne la suppression de postes de travail au sein des établissements de Beaufort en Vallée, Doué La Fontaine, et Thouars, similaires à celui que vous occupiez à ce jour. Le plan de sauvegarde de l'emploi prévoit la possibilité de se porter volontaire au départ, si celui-ci permet d'éviter le licenciement d'un autre salarié désigné comme licenciable par l'application des critères de licenciement... Par courrier, vous nous avez fait part de votre volonté de quitter l'entreprise dans les conditions fixées par le PSE ; Cette demande est acceptée et se traduit par votre licenciement pour motif économique " La société France Champignon ne produit pas le courrier par lequel Mme X... aurait fait part de sa volonté de quitter l'entreprise dans les conditions fixées par le PSE lequel exige qu'il existe une passerelle entre le poste que le salarié occupe et les postes concernés par le projet de licenciement, que ce départ volontaire soit motivé par l'existence d'un projet professionnel réel et sérieux, et prévoit que le salarié bénéficie du versement d'une indemnité exceptionnelle de départ volontaire, correspondant au salaire brut du dernier mois travaillé, venant s'ajouter à l'indemnité de licenciement pour motif économique ; La preuve de l'existence d'un projet professionnel de Mme X... n'est pas rapportée et l'attestation Pôle Emploi établie par l'employeur ne mentionne aucune indemnité exceptionnelle s'ajoutant aux indemnités liées au licenciement ; L'offre d'emploi faite le 29 avril 2009 à Mme X..., qu'elle a refusée, ne suffit en conséquence pas à caractériser le respect par l'employeur de son obligation de recherche de reclassement, et l'impossibilité de la reclasser ; le licenciement est en conséquence dépourvu de cause réelle et sérieuse ; Un poste de contrôleur régleur, situé sur le site de Doué La Fontaine a été proposé à M, Y... le 10 juillet 2009, que celui-ci a refusé après avoir effectué un essai ; la lettre de licenciement qui lui a été notifiée le 24 août 2009 indique : " une liste des postes à pourvoir au sein du groupe est affichée dans votre établissement. Nous avons le regret de constater que votre reclassement s'avère impossible aux motifs que, suite à un " essai ", vous avez refusé notre proposition de reclassement sur le site de Doué La Fontaine (votre courrier du 20 août 2009) " ; Il n'est justifié d'aucune recherche précise et individualisée après cet essai infructueux ; l'employeur ne justifie donc pas de son obligation de recherche de reclassement, ni de l'impossibilité de reclasser le salarié, le licenciement étant dès lors dépourvu de cause réelle et sérieuse » ;
ALORS, TOUT D'ABORD, QUE le licenciement pour motif économique est justifié lorsque les fonctions du salarié ont été supprimées et qu'aucun poste équivalent n'a pu lui être proposé au sein de la société ou du groupe ; qu'en jugeant que l'employeur ne justifiait pas de recherches précises et personnalisées tout en constatant qu'il avait proposé à plusieurs salariés des offres de reclassement que ceux-ci avaient refusées, la cour d'appel a entaché sa décision de contradiction de motifs et, partant, a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS, ENSUITE, QUE l'employeur avait fait valoir qu'aucun des postes disponibles dans le groupe ne correspondait aux aptitudes professionnelles des salariés licenciés, de sorte qu'il était impossible de leur proposer un poste de reclassement ; qu'en s'abstenant de rechercher si les postes de reclassement disponibles dans l'entreprise n'étaient pas insusceptibles d'être proposés aux salariés concernés, faute pour ceux-ci d'avoir la qualification professionnelle requise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du Code du travail ;
ALORS, ENFIN ET SUBSIDIAIREMENT, QUE si l'employeur doit rechercher les possibilités de reclassement, cette obligation est respectée dès lors que, ayant proposé des emplois au salarié, ce dernier les a refusés ; qu'en déclarant que l'employeur n'avait pas respecté son obligation de reclassement à l'égard de Madame X... et de Monsieur Y..., cependant qu'elle constatait que l'employeur leur avait proposé des postes de reclassement qu'ils avaient refusés, la cour d'appel a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles L. 1233-2, L. 1233-4 et L. 1235-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-24307
Date de la décision : 20/11/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Cour d'appel d'Angers, 29 janvier 2013, 11/00420

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 09 juillet 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 nov. 2014, pourvoi n°13-24307


Composition du Tribunal
Président : Mme Lambremon (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.24307
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