LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 27 juin 2013), que Mme X... et M. Y... ont contracté mariage en 1996 sans contrat préalable, que M. Y... a assigné son épouse en divorce sur le fondement de l'article 237 du code civil ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de limiter à la somme de 85 000 euros le montant de la prestation compensatoire ;
Atendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel, qui a pris en considération les éléments dont elle disposait, a fixé comme elle l'a fait le montant de la prestation compensatoire allouée à l'épouse ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme X... et la condamne à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Copper-Royer, avocat aux Conseils, pour Mme X....
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité à la somme de 85.000 ¿ le montant de la prestation compensatoire due à Madame X....
AUX MOTIFS PROPRES QUE « selon l'article 270 du code civil, la prestation compensatoire est destinée à compenser autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives. Cette prestation est forfaitaire et prend la forme la forme d'un capital.
L'article 271 du code civil dispose que la prestation compensatoire doit être fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible.
A cet effet, il est tenu compte de :- la durée du mariage - l'âge et l'état de santé des époux - leur qualification et leur situation professionnelle -les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne,-le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu après la liquidation du régime matrimonial,- leurs droits existants ou prévisibles,- leur situation respective en matière de retraite en ayant estimé autant qu'il est possible, la diminution des droits à retraite qui aura pu être causée, pour l'époux créancier de la prestation compensatoire.
En l'espèce, les époux se sont mariés en 1996, les deux enfants du couple étant nés antérieurement, seule la durée du mariage devant être prise en compte pour l'évaluation de la prestation compensatoire dont le principe n'est pas contesté.
Ainsi le mariage a duré 16 ans dont 13 années avant la séparation de fait qui est intervenue en 2009.
L'épouse est âgée de 58 ans et l'époux de 57 ans.
Mme Marie-Pierre X... fait valoir qu'elle a privilégié la carrière de médecin de son conjoint qui se déchargeait sur elle de toutes les questions du quotidien de la famille au détriment de ses propres désirs et compétences processionnelles avec une incidence sur ses futurs droits à retraité, ses revenus actuels étant de l'ordre de 1500 à 2000 ¿ bruts alors que son conjoint bénéficie de revenus net imposable de l'ordre de 6000¿ par mois en 2010.
M. Daniel Y... réplique que la disparité évoquée résulte plus des choix personnels de I' épouse qui a pu travailler et percevoir des revenus conséquents mais qui a fait preuve d'une certaine inconstance dans ses emplois, profitant de la situation de son conjoint pour se consacrer à son ambition de devenir écrivain et ce alors qu'elle disposait d'un diplôme et d'une formation qui lui permettaient de faire carrière.
Or, il n'est pas contesté que Mme Marie-Pierre X... qui est titulaire d'un DESS de communication obtenu en 1992 antérieurement au mariage se trouvait sans activité avec deux enfants âgés de 8 ans et 2 ans, lors du mariage, son relevé de carrière démontrant qu'elle a connu des périodes d'emploi entrecoupées de périodes de chômage y compris pendant le mariage à compter de 2001, les dernières années à compter de 2011 étant à justifier auprès de la caisse de retraite qui a procédé à une évaluation des droits a retraite de Mme Marie-Pierre X... sur la base des seuls éléments qu'elle a fournis.
Par ailleurs, Mme Marie-Pierre X... ne produit pas les avis d'imposition des années 2011 et 2012, les éléments relatifs à ses revenus actuels étant partiels alors qu'elle justifie être employée en qualité de pigiste par La SARL Cuisine Collective pour un salaire moyen de l'ordre de 1850 ¿ en 2012, ce qui n'exclut pas d'autres activités rémunérées de Mme Marie-Pierre X....
Pour sa part, M. Daniel Y... produit son avis d'imposition 2012 faisant apparaître un montant de revenus professionnels au titre de l'année 2011 de 81462 ¿ outre 5901 ¿ de revenus fonciers soit en moyenne 7280¿ de revenus mensuels.
Il est rappelé que les époux sont mariés sous le régime légal de la communauté réduite aux acquêts et qu'ils sont propriétaires d'un bien immobilier évalué à la somme de 400.000¿, outre les parts de la SCI au sein de laquelle l'époux dispose de locaux pour son exercice professionnels.
Par ailleurs, la clientèle de l'activité libérale de M. Daniel Y... est évaluée entre 12.000 et 17.000 ¿.
Enfin, Mme Marie-Pierre X... entend qu'il soit tenu compte pour l'évaluation de la prestation compensatoire des droits de M. Daniel Y... dans la succession de son père, même si au vu de la déclaration de succession, la nature du bien reçu en partage n'est pas indiquée.
Ainsi, il y a lieu compte tenu de ce qui précède de confirmer le jugement qui a évalué le montant de la prestation compensatoire due à l'épouse à la somme de 85.000¿ » (arrêt p. 4 alinéa 4 des motifs, p. 5 et p. 6).
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « la prestation compensatoire a pour but d'atténuer autant qu'il est possible la disparité que la rupture du lien conjugal est susceptible de créer dans les conditions de vie respectives des époux.
Son montant doit être déterminé compte tenu de la situation des parties, notamment: l'âge et l'état de santé des époux, la durée du mariage, le temps déjà consacré ou qu'il leur reste à consacrer à l'éducation des enfants, leurs qualifications et leurs situations professionnelles au regard du marché du travail, leurs droits existants et prévisibles, leurs situations respectives en matière de pension de retraite, leur patrimoine, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial.
A titre exceptionnel, lorsque l'âge ou l'état de santé du créancier ne lui permet pas de subvenir à ses besoins, la prestation compensatoire peut être fixée sous forme de rente viagère.
La rente est indexée, et l'indice déterminé comme en matière de pension alimentaire.
En l'espèce, le mariage des époux a duré 16 ans. Leur vie commune a duré 13 ans.
L'épouse est âgée de 58 ans et l'époux de 56ans.
Au cours du mariage, l'épouse s'est consacrée à l'éducation des enfants ; Elle souhaitait exercer une activité d'écrivain ou de journaliste, et était encouragée pour cela par son époux, mais la vie familiale était incompatible avec ses souhaits car elle aurait dû se rendre à Paris. Elle n'a donc pas exercé d'activité lucrative durant la vie commune. La situation de Madame X... est donc le résultat d'un choix de vie du couple. Monsieur Y... qui est quant à lui médecin, était très occupé par son activité professionnelle; C'est ainsi que si Madame X... a pu exercer diverses activités professionnelles pour de courtes durées, elle a toujours cherché à rendre compatible son activité professionnelle avec sa vie de famille. Elle a donc pu avoir différentes activités qui n'ont pas été renouvelées et a poursuivi son activité d'écriture qui lui permettait de rester au domicile ;
Ses droits à la retraite seront donc fortement réduits en raison des choix professionnels de Madame X... pour rester disponible au profit de l'ensemble de la famille et avec l'accord de son mari ;
Actuellement elle travaille et perçoit un salaire brut d'environ 1500 à 2000¿ ;
Dans le cadre de la liquidation de la communauté elle pourra bénéficier de la moitié de la valeur de l'immeuble commun évalué à 400.000 ¿ ;
Monsieur Y... de son côté exerce la profession de médecin. Il perçoit environ un revenu de 6000¿. Ses droits à la retraite seront complets ; il verse à sa mère une somme de 800¿ pour son hébergement, 874¿ d'impôts sur le revenu, 222¿ d'impôts fonciers, le crédit immobilier de 1069¿ et un leasing pour un véhicule de 154¿ ;
II percevra également la moitié de la valeur de l'immeuble de communauté.
Sa clientèle est évaluée entre 0 et 12.OOO¿; et la valeur de ses parts dans la SCI où il exerce sa profession est évaluée 35.558¿.
Eu égard à ces éléments et en considération de la différence de salaire et de situation entre les époux à laquelle correspondra également la différence de leurs retraites, il convient de fixer à 85.OOO¿le montant de la prestation compensatoire due à l'épouse » (jugement p. 3 alinéas 6 à 9 et p. 4 alinéas 1 à 10).
ALORS QUE la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ; que Madame X..., dans ses conclusions, demandait à la cour d'appel de tenir compte pour l'évaluation de la prestation compensatoire, des droits de Monsieur Y... dans la succession de son père ; qu'en se bornant à énoncer que Madame X... entendait « qu'il soit tenu compte pour l'évaluation de la prestation compensatoire des droits de Monsieur Daniel Y... dans la succession de son père, même si au vu de la déclaration de succession, la nature du bien reçu en partage n'est pas indiquée », la Cour d'appel sans s'expliquer sur l'importance de ces droits pourtant rappelés dans les conclusions de Mme X... ou comment leur prises en compte influait sur sa décision, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 271 du code civil.