LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée le 6 avril 2009 en qualité de téléprospectrice par la société Pro Asset, a été licenciée le 18 septembre 2009 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour préjudice moral distinct, alors, selon le moyen, que la lettre de licenciement fixant les limites du litige, il est interdit au juge de fonder l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement sur des faits non invoqués dans la lettre de licenciement ; qu'en considérant, dès lors, que les erreurs et retards reprochés à la salariée étaient établis par une demande adressée à la salariée le 10 septembre 2009 par le cabinet Bastille immobilier gestion afin d'obtenir un duplicata de facture qui n'a toujours pas été traitée le 24 septembre 2009 cependant que ce grief ne figurait pas dans la lettre de licenciement et ne pouvait pas l'être puisqu'il était postérieur à celle-ci, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1 et L. 1232-6 du code du travail ;
Mais attendu qu'après avoir retenu, par un motif non contesté, que le licenciement avait été prononcé pour insuffisance professionnelle, la cour d'appel, qui a cité le courrier du 10 septembre 2009 à titre d'exemple parmi d'autres, a souverainement décidé que le licenciement était justifié par une cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais, sur le second moyen :
Vu les articles 1134 du code civil et L. 1221-1 du code du travail ;
Attendu que le salarié ne peut être laissé dans l'incertitude quant à l'étendue de sa liberté de travailler ;
Attendu que pour limiter le montant de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, l'arrêt retient que le contrat de travail avait pris fin le 18 septembre 2009 et que la salariée avait été libérée de la clause comprise dans ce contrat par lettre du 18 février 2010, qu'elle était en droit de prétendre au paiement d'une indemnité équivalente aux trois mois durant lesquels elle avait respecté cette obligation ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté l'absence d'une clause contractuelle fixant valablement le délai de renonciation de l'employeur et relevé que celui-ci n'avait renoncé au bénéfice de la clause de non-concurrence qu'après le licenciement, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il limite à 1 043,79 euros le montant de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, l'arrêt rendu le 29 mai 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne la société Pro Asset aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Me Haas la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Haas, avocat aux Conseils, pour Mme X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté Mme X... de ses demandes en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour préjudice moral distinct ;
AUX MOTIFS QUE Mme X... a été licenciée pour insuffisance professionnelle après avoir donné satisfaction dans un premier temps ; que l'employeur n'était nullement tenu de renouveler la période d'essai même si les signes précurseurs d'un certain relâchement sont apparus en fin de période d'essai ; que les erreurs et retards reprochés à la salarié sont établis par les pièces produites aux débats ; qu'ainsi, à titre d'exemples, sont illustrés les événements suivants : - chantier Tagerim : confusion entre les numéros de lots principaux des immeubles dans les arrondissements ; - courrier Foncia Gaude immobilier repris à plus de trois reprises ; - envoi d'un courrier portant avenant (proArchive) sans suppression des mentions indicatives figurant dans le brouillon ; - demande adressée le 10 septembre 2009 par le cabinet Bastille immobilier gestion afin d'obtenir un duplicata de facture qui n'a toujours pas été traitée le 24 septembre ; que Mme X... prétend sans nullement l'étabir que la charge de travail serait à l'origine de ces retards alors qu'il n'est pas démontré que ses tâches se soient accrues depuis le début de la relation de travail quand elle donnait encore satisfaction ; qu'elle ne peut pas davantage soutenir que ces retards résulteraient de son absence du 18 juin au 13 juillet 2009 alors que ses tâches ont été réparties entre les autres salariés et qu'il est surtout justifié de l'embauche d'un salarié en contrat à durée déterminée du 29 juin au 10 juillet ; que Mme X... travaillait sous le contrôle de Mme Y... avec laquelle elle a eu deux entretiens, lors de son retour d'arrêt de travail le 13 juillet puis le 3 août à l'issue duquel était dressé le constat de plusieurs difficultés tenant à l'attitude et au comportement de la salariée ainsi qu'à l'organisation de son travail ; que ce constat n'est pas aussi dithyrambique que les appréciations auxquelles Mme X... fait référence et figurant dans certains courriels concernant certains travaux menés à bonne fin ; que les attestations de Mmes Z..., A... et B... indiquent que Mme X... refusait toute remarque concernant son travail, avait changé d'attitude début juin 2009 tant à l'égard de ses collègues que de sa hiérarchie, évitait de prendre les appels extérieurs qui lui étaient destinés, alourdissant ainsi la tâche de ses collègues, et ne réalisait pas les tâches qui lui étaient confiées ; que, par un courriel du 1er septembre 2009, Mme Y... a à nouveau fait part à Mme X... de ses préoccupations quant aux importants retards accumulés ; que, par un courriel du 3 septembre 2009, Mme C... a déploré les pertes de temps dues à l'attitude de Mme X... ; que par un courriel du 2 septembre 2009, Mme Y... a reproché à la salariée une erreur dans la prise d'un rendez-vous générant ainsi une perte de temps ; que le licenciement procède donc d'une cause réelle et sérieuse ;
ALORS QUE la lettre de licenciement fixant les limites du litige, il est interdit au juge de fonder l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement sur des faits non invoqués dans la lettre de licenciement ; qu'en considérant, dès lors, que les erreurs et retards reprochés à la salariés étaient établis par une demande adressée à la salariée le 10 septembre 2009 par le cabinet Bastille immobilier gestion afin d'obtenir un duplicata de facture qui n'a toujours pas été traitée le 24 septembre2009 cependant que ce grief ne figurait pas dans la lettre de licenciement et ne pouvait pas l'être puisqu'il était postérieur à celle-ci, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1 et L. 1232-6 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR limité la condamnation prononcée à l'encontre de l'employeur au titre de la clause de non-concurrence à la somme de 1.043,79 euros ;
AUX MOTIFS QUE le contrat de travail, qui comprenait une clause de non-concurrence assortie d'une contrepartie financière, précisait que la société serait dispensée de ce versement si elle libérait la salariée de son obligation soit à tout moment au cours de l'exécution du contrat de travail, soit lors de la cessation sous réserve de notifier cette renonciation par lettre recommandée ; qu'en l'espèce, Mme X... a été libérée de cette obligation par courrier du 18 février 2010 alors que son contrat avait pris fin le 18 novembre 2009 ; qu'elle est donc en droit de prétendre au paiement d'une indemnité équivalente aux trois mois durant lesquels elle a respecté son obligation ;
ALORS QUE le salarié ne pouvant être laissé dans l'incertitude quant à l'étendue de sa liberté de travailler, la clause par laquelle l'employeur se réserve la faculté, après la rupture, de renoncer à la clause de non-concurrence à tout moment au cours de l'exécution de celle-ci doit être réputée non écrite ; qu'en l'absence de disposition conventionnelle ou contractuelle fixant valablement le délai de renonciation par l'employeur à la clause de non-concurrence, celui-ci ne peut être dispensé de verser la contrepartie financière de cette clause que s'il libère le salarié de son obligation de non-concurrence au moment du licenciement ; qu'en considérant que la salariée n'avait droit, au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, qu'au paiement d'une indemnité correspondant à la seule période durant laquelle elle avait respecté son obligation, cependant qu'il résultait de ses constatations, d'une part, que le contrat de travail ne fixait pas le délai dans lequel l'employeur pouvait utilement libérer la salariée de son obligation et, d'autre part, que l'employeur n'avait renoncé à la clause de non-concurrence que le 18 février 2010, soit cinq mois après la notification du licenciement et trois mois après la fin du préavis, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 1221-1 du code du travail, ensemble le principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle.