LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 14 septembre 2012), que Mme X... a été engagée le 18 novembre 2005 par la société G4 Security Training, aux droits de laquelle vient la société Action formation, en qualité d'assistante d'agence ; que celle-ci l'a informée, invoquant la clause de mobilité insérée dans le contrat de travail de sa mutation, à compter du 2 novembre 2009, sur le site de Montgeron sur lequel la société avait décidé de regrouper l'ensemble de ses activités ; que face au refus de la salariée, l'employeur, par une lettre du 23 février 2010, lui a notifié son licenciement pour motif personnel en raison du non-respect de la clause de mobilité ; que la salariée a saisi la juridiction prud'homale pour contester son licenciement et obtenir une indemnisation du harcèlement moral, dont elle prétendait avoir été victime ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement procédait d'une cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ qu'une clause de mobilité, pour être valide, doit définir de façon précise sa zone géographique d'application ; qu'en l'espèce, la salariée soutenait expressément qu'est nulle, faute de préciser sa zone géographique d'application, la clause de mobilité insérée à son contrat de travail qui lui fait obligation d'accepter sa mutation en tout lieu en France métropolitaine où la société employeur exerce ou exercera ses activités ; que la cour d'appel, qui s'est bornée à considérer que le transfert du lieu de travail de la salariée résulte de l'application de la clause de mobilité et est conforme aux intérêts de l'entreprise, pour en déduire que son licenciement, motivé par le refus de cette mutation, est fondé sur une cause réelle et sérieuse, sans se prononcer sur la validité de la clause litigieuse au regard de l'imprécision de la définition de sa zone géographique, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail, ensemble l'article L. 1235-1 du même code ;
2°/ qu'en tout état de cause, la mise en oeuvre de la clause de mobilité ne doit pas porter atteinte au droit de la salariée à sa vie personnelle et familiale ; qu'en se bornant à considérer que le transfert du lieu de travail de la salariée résulte de l'application de la clause de mobilité et est conforme aux intérêts de l'entreprise, pour en déduire que son licenciement, motivé par le refus de cette mutation, est fondé sur une cause réelle et sérieuse, sans aucunement rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si la mise en oeuvre de cette clause ne portait pas atteinte au droit de la salariée à sa vie personnelle et familiale, notamment en raison de l'allongement très important de la durée des trajets entre le domicile de la salariée et son nouveau lieu de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, ensemble l'article L. 1235-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'à défaut de clause contractuelle claire et précise stipulant que le salarié exécutera son travail exclusivement dans un lieu, le changement de lieu de travail intervenu dans le même secteur géographique constitue un simple changement des conditions de travail et non une modification du contrat de travail ;
Attendu qu'abstraction faite du motif surabondant visé par la première branche du moyen, la cour d'appel a constaté d'une part que le nouveau lieu de travail de la salariée était situé dans le même secteur géographique que le précédent et que d'autre part, celle-ci ne justifiait pas d'un bouleversement des conditions de sa vie familiale ; qu'elle a, par ces seuls motifs, justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral, alors, selon le moyen, que les juges sont tenus de se prononcer sur l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, afin de déterminer s'ils laissent présumer, pris dans leur ensemble, l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, d'apprécier les éléments de preuve fournis par l'employeur pour démontrer que les mesures en cause étaient étrangères à tout harcèlement moral ; qu'en l'espèce, en se bornant à considérer que la demande de mutation de l'employeur est justifiée pour débouter la salariée de sa demande au titre du harcèlement moral, sans même examiner les éléments invoqués par celle-ci, démontrant pourtant une dégradation de ses conditions de travail et de son état de santé, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a examiné l'ensemble des faits allégués par la salariée à l'appui de sa demande, a constaté que ceux-ci ne permettaient pas de présumer l'existence d'un harcèlement ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf octobre deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour Mme X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir décidé que le licenciement de Mme X... est fondé sur une cause réelle et sérieuse et de l'avoir en conséquence déboutée de toutes ses demandes à ce titre ;
Aux motifs que « La lettre de licenciement du 25 février 2010 qui fixe les limites du litige est fondée sur le non-respect de la clause de mobilité prévue par le contrat de travail et le refus de Madame X... de travailler à Montgeron dans les locaux regroupant l'ensemble des services administratifs de la société ACTION FORMATION.
Madame X... conteste à la fois la régularité de la clause de mobilité, la nécessité de lui imposer une modification de son lieu de travail, et invoque les bouleversements engendrés dans sa vie familiale par l'éloignement géographique.
Or, il convient de constater d'une part que le contrat initial du 9 mars 2007 fixe le lieu de travail à « Nanterre ¿ Ile de France » ; que d'autre part l'employeur établit que le regroupement des services administratifs a été décidé suite à la cession des parts sociales IFFIS détenues par NEO SECURITY HOLDINGS à la société ACTION FORMATION, cette dernière ayant son siège social situé à Montgeron.
La société ACTION FORMATION démontre également que les locaux administratifs situés à Puteaux ont été restitués à leur propriétaire, seuls ayant été conservés des locaux permettant de maintenir des formations qui ne duraient que quelques jours par semaine.
Il a été précisé à la salariée lors de l'entretien préalable du 17 février 2010, qu'elle ne pouvait pas être maintenue seule dans les locaux destinés aux formations, pour des raisons de sécurité, et que son éloignement des autres services administratifs était susceptible d'engendrer des pertes de dossiers.
Enfin, l'activité exercée à Sotteville-lès-Rouen concernait la société IFFIS, qui a été cédée, Madame X... ne réclamant pas son maintien au sein de cette société, mais s'opposant à son transfert à Montgeron.
Par suite, au vu de l'ensemble de ces éléments, il convient de constater que le transfert du lieu de travail de Puteaux dans les Hauts-de-Seine à Montgeron dans l'Essonne, au sein de la région Ile de France, constituait un simple changement des conditions de travail, relevant du pouvoir de direction, et résultait en outre de l'application de la clause de mobilité stipulée par le contrat de travail du 9 mars 2007, clause qui s'imposait à Mme X..., sans pouvoir opposer un bouleversement engendré dans sa vie familiale, lequel reste en outre non établi.
Le licenciement de Mme X... se trouvant motivé par une cause réelle et sérieuse, il convient de confirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de Nanterre qui a rejeté l'ensemble des demandes présentées à ce titre » ;
Et aux motifs éventuellement adoptés que « La société ACTION FORMATION qui avait son siège à Montgeron a donc à bon droit dû regrouper tous ses services administratifs : comptabilité, ressources humaines et planification des formations.
Le poste d'assistante de Madame X..., seule employée à Puteaux, ne pouvait donc être maintenu sur ce lieu.
La société ACTION FORMATION a informé Madame X... de sa prochaine affectation à Montgeron par deux courriers des 15 octobre et 14 décembre 2009 en application de sa clause de mobilité.
Le refus de Madame X... justifie son licenciement.
L'employeur n'a fait qu'exercer son pouvoir de direction et Madame X... ne démontre pas un quelconque détournement de pouvoir » ;
Alors qu'une clause de mobilité, pour être valide, doit définir de façon précise sa zone géographique d'application ; qu'en l'espèce, la salariée soutenait expressément qu'est nulle, faute de préciser sa zone géographique d'application, la clause de mobilité insérée à son contrat de travail qui lui fait obligation d'accepter sa mutation en tout lieu en France métropolitaine où la société employeur exerce ou exercera ses activités ; que la Cour d'appel, qui s'est bornée à considérer que le transfert du lieu de travail de la salariée résulte de l'application de la clause de mobilité et est conforme aux intérêts de l'entreprise, pour en déduire que son licenciement, motivé par le refus de cette mutation, est fondé sur une cause réelle et sérieuse, sans se prononcer sur la validité de la clause litigieuse au regard de l'imprécision de la définition de sa zone géographique, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L.1221-1 du code du travail, ensemble l'article L.1235-1 du même code ;
Alors, en tout état de cause, que la mise en oeuvre de la clause de mobilité ne doit pas porter atteinte au droit de la salariée à sa vie personnelle et familiale ; qu'en se bornant à considérer que le transfert du lieu de travail de la salariée résulte de l'application de la clause de mobilité et est conforme aux intérêts de l'entreprise, pour en déduire que son licenciement, motivé par le refus de cette mutation, est fondé sur une cause réelle et sérieuse, sans aucunement rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si la mise en oeuvre de cette clause ne portait pas atteinte au droit de la salariée à sa vie personnelle et familiale, notamment en raison de l'allongement très important de la durée des trajets entre le domicile de la salariée et son nouveau lieu de travail, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1221-1 du code du travail et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, ensemble l'article L.1235-1 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme X... de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;
Aux motifs que « Il ressort des pièces produites que Madame X... s'est plaint du retrait de son matériel de travail et de la fermeture des locaux administratifs de Puteaux pour invoquer un prétendu harcèlement moral.
Or, le non-respect de la décision légitime de son employeur de transférer son lieu de travail à Montgeron ne peut pas fonder cette demande de dommages et intérêts qui devait être rejetée.
Le jugement sera également confirmé sur ce plan » ;
Alors que les juges sont tenus de se prononcer sur l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, afin de déterminer s'ils laissent présumer, pris dans leur ensemble, l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, d'apprécier les éléments de preuve fournis par l'employeur pour démontrer que les mesures en cause étaient étrangères à tout harcèlement moral ; qu'en l'espèce, en se bornant à considérer que la demande de mutation de l'employeur est justifiée pour débouter la salariée de sa demande au titre du harcèlement moral, sans même examiner les éléments invoqués par celle-ci, démontrant pourtant une dégradation de ses conditions de travail et de son état de santé, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L.1152-1 et L.1154-1 du code du travail.