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23/10/2014 | FRANCE | N°13-19727

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 octobre 2014, 13-19727


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1224-1 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé le 7 février 2005 par la société Damm, M. X... était chargé, en qualité de voyageur-représentant-placier, de promouvoir les produits de cette société sur le territoire français ; que la société Damm a concédé le 29 mars 2007, à la société Brasserie Milles, le droit de distribuer et de commercialiser les bières qu'elle produit sous les marques Estrela Damm et Voll Damm ; que le

2 août 2007, le salarié a été licencié pour motif économique ;

Attendu que pour dire ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1224-1 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé le 7 février 2005 par la société Damm, M. X... était chargé, en qualité de voyageur-représentant-placier, de promouvoir les produits de cette société sur le territoire français ; que la société Damm a concédé le 29 mars 2007, à la société Brasserie Milles, le droit de distribuer et de commercialiser les bières qu'elle produit sous les marques Estrela Damm et Voll Damm ; que le 2 août 2007, le salarié a été licencié pour motif économique ;

Attendu que pour dire que le contrat du salarié n'avait pas été transféré à la société Brasserie Milles, l'arrêt retient que la concession d'une marque ne transfère pas une entité économique autonome à défaut du transfert des facteurs de production, tel que le lieu d'exploitation ou des moyens d'exploitation, que le contrat stipule que la société Brasserie Milles a l'obligation de réaliser la distribution et la vente des produits sur le territoire au travers de ses propres canaux de distribution et par ses moyens propres, qu'il n'y a pas eu vente de clientèle et que le salarié a continué à travailler pour le compte de la société Damm ;

Attendu cependant, que la reprise de la commercialisation des produits d'une marque et de la clientèle qui y est attachée, entraîne en principe le transfert d'une entité économique autonome, qui poursuit un objectif propre, conserve son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher si du fait de la conclusion par la société Damm, d'un contrat de distribution exclusive de ses bières avec la société Brasserie Milles, cette société n'avait pas repris la clientèle prospectée par le salarié, ce qui aurait été de nature à caractériser un transfert de l'entité économique exploitée par ce dernier, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 juillet 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;

Condamne la société Brasserie Milles aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Brasserie Milles et condamne celle-ci à payer à Me Spinosi
la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois octobre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour M. X....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir décidé que le contrat de M. X... n'avait pas été transféré de plein droit à la société BRASSERIE MILLES en application de l'article L.1224-1 du code du travail et de l'avoir en conséquence débouté de toutes ses demandes et de l'avoir condamné au paiement d'une somme de 1.000 sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Aux motifs que « L'article L.1224-1 du code du travail pose le principe du maintien des contrats de travail en cours en cas de transfert d'une entité économique conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise.

Constitue une « entité économique » un ensemble organisé de personne et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objet propre.

Ces dispositions sont d'ordre public et les employeurs successifs ne peuvent y déroger par des conventions particulières.

Aux termes d'un contrat de distribution conclu le 29 mars 2007, la société DAMM (dénommée la brasserie) a concédé à la société BRASSERIE MILLES (dénommée le distributeur) le droit de distribuer et de commercialiser, pour une durée de cinq ans commençant à courir le 1er juillet 2007 pour se terminer le 30 juin 2012, des bières produites par elle sous les marques « ESTRALLA DAMM » et « VOLL DAMM » et ce sur une partie du territoire français.

Ce contrat de distribution conclu pour une durée déterminée par lequel la SAS BRASSERIE MILLES achetait à la Brasserie DAMM de la bière aux tarifs négociés dans le contrat pour la revendre en France, ne peut valoir en soi transfert d'une entité économique.

La concession d'une marque pour sa distribution ne transfère pas une entité économique autonome à défaut du transfert des facteurs de production, tel que le lieu d'exploitation ou des moyens d'exploitation.

En l'espèce, le contrat stipule que la société BRASSERIE MILLES a l'obligation de réaliser la distribution et la vente des produits sur le territoire au travers de ses propres canaux de distribution et par ses moyens propres.

Il n'y a pas eu de vente de clientèle : la conclusion du contrat entre la SAS BRASSERIE MILLES et la société DAMM n'a pas ajouté de client à la société BRASSERIE MILLES. Aux termes du contrat, la SAS BRASSERIE MILLES a revendu à son réseau habituel de distributeurs la bière achetée à des tarifs préférentiels à la société DAMM, sans que celle-ci, seulement tenue d'une exclusivité, ne fournisse aucun moyen.

Au surplus, il ressort des pièces du dossier que M. X... a continué à travailler pour le compte de la société DAMM alors même que le contrat de distribution avec la SAS BRASSERIE MILLES était en cours ; il en résulte la coexistence des deux sociétés, sans transfert d'une entité économique autonome.

Il n'est justifié d'aucune modification dans la situation juridique de la société DAMM employeur de M. X....

Il s'évince de ces éléments qu'il n'est pas établi que le contrat de distribution en cause ait entraîné transfert d'une entité économique autonome.

Il en résulte que M. X... n'est pas fondé à solliciter l'application des dispositions de l'article L.1224-1 du code du travail et que la décision déférée doit être confirmée en ce qu'elle l'a débouté de l'ensemble de ses demandes » ;

Alors que la reprise de la représentation d'une marque, portant sur la même clientèle ou son développement, entraîne nécessairement le transfert d'une entité économique et, de plein droit, la poursuite du contrat de travail du salarié affecté à son exploitation ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que l'employeur initial avait, par un contrat de distribution exclusive, attribué au distributeur français la représentation et la commercialisation sur une partie du territoire français de deux marques auxquelles était affecté le salarié, portant sur la même clientèle ; qu'en décidant néanmoins que le contrat de travail du salarié n'avait pas été transféré de plein droit au distributeur, après avoir relevé de manière inopérante que le transfert de la représentation des deux marques ne s'était pas accompagné du transfert des moyens de production, ni de la transmission des moyens de distribution, la Cour d'appel a violé l'article L.1224-1 du code du travail ;

Alors, en tout état de cause, que la reprise d'une clientèle attachée à une marque dans le cadre de l'exécution d'un contrat de distribution est de nature à caractériser le transfert d'une entité économique autonome au bénéfice du distributeur ; qu'en l'espèce, le salarié soutenait et démontrait qu'en exécution du contrat de distribution, la clientèle qu'il avait acquise dans l'exercice de ses fonctions pour le compte de la société DAMM avait été transférée à la société BRASSERIE MILLES, les ventes réalisées par celle-ci correspondant à celles qu'il réalisait lui-même, de sorte qu'était caractérisé le transfert d'une entité économique autonome ; qu'en se bornant à retenir que le salarié a continué à travailler pour le compte de sa société DAMM au cours de l'exécution du contrat de distribution entre cette société et la société BRASSERIE MILLES, après avoir estimé que la conclusion de ce contrat n'a pas ajouté de client à la société BRASSERIE MILLES, la Cour d'appel n'a pas recherché, comme l'y invitaient les conclusions du salarié, si les ventes réalisées par cette dernière société ne correspondaient pas à celles réalisées par l'intéressé lui-même et, partant, l'existence d'un transfert de clientèle entre les deux sociétés de nature à caractériser le transfert d'une entité économique autonome, et a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1224-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-19727
Date de la décision : 23/10/2014
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 04 juillet 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 23 oct. 2014, pourvoi n°13-19727


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.19727
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