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22/10/2014 | FRANCE | N°12-23390;12-23391;12-23392;12-23393;12-23394;12-23395;12-23396;12-23397;12-23398;12-23399;12-23400;12-23401;12-23402;12-23403;12-23404;12-23405;12-23406;12-23407;12-23408;12-23409;12-23410;12-23411;12-23412;12-23413;12-23414;12-23415;12-23416;12-23417;12-23418;12-23419;12-23420;12-23421;12-23422;12-23423;12-23424;12-23425

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 22 octobre 2014, 12-23390 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° X 12-23. 390 à K 12-23. 425 ;
Attendu, selon les jugements attaqués, que trente-six salariés de la société Ugitech (la société) ont saisi la juridiction prud'homale pour obtenir le paiement de primes de panier de jour et de nuit durant les jours d'absence résultant de leurs congés payés, de leurs journées de temps libre et de certains jours d'absence consécutifs à des arrêts maladie ;
Sur la recevabilité des pourvois principaux de l'employeur contestée par la

défense, après avis de la deuxième chambre civile en date du 28 mai 2014 :...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° X 12-23. 390 à K 12-23. 425 ;
Attendu, selon les jugements attaqués, que trente-six salariés de la société Ugitech (la société) ont saisi la juridiction prud'homale pour obtenir le paiement de primes de panier de jour et de nuit durant les jours d'absence résultant de leurs congés payés, de leurs journées de temps libre et de certains jours d'absence consécutifs à des arrêts maladie ;
Sur la recevabilité des pourvois principaux de l'employeur contestée par la défense, après avis de la deuxième chambre civile en date du 28 mai 2014 :
Attendu que les salariés soutiennent que les pourvois formés par la société sont irrecevables en application des articles 40 et 605 du code de procédure civile ; qu'en effet, l'un des chefs de demande tendant au paiement d'un rappel de salaire sous astreinte présentait un caractère indéterminé ; que les jugements attaqués, inexactement qualifiés en dernier ressort, sont susceptibles d'appel ;
Mais attendu que l'astreinte, mesure de contrainte destinée à vaincre la résistance opposée à l'exécution d'une injonction, en est l'accessoire ; que le jugement rendu sur une demande en paiement d'une somme dont le montant est inférieur au taux du dernier ressort, n'est pas susceptible d'appel lorsque celle-ci est assortie d'une demande d'astreinte ; que les demandes en rappel de salaire ne dépassaient pas le taux de compétence en dernier ressort du conseil de prud'hommes ; qu'en conséquence les pourvois sont recevables ;
Sur le moyen unique des pourvois principaux de l'employeur :
Attendu que la société fait grief aux jugements de dire que la prime de panier de nuit prévue à l'article 18 de la convention collective de la métallurgie de la Nièvre a la nature d'un complément de salaire et de la condamner à payer aux salariés un rappel de salaire au titre de ladite prime durant les jours d'absence, alors, selon le moyen :
1°/ qu'une indemnité forfaitaire revêt le caractère d'un remboursement de frais et non d'un élément de salaire si son versement est subordonné à des conditions de travail impliquant l'engagement de dépenses spécifiques de la part du salarié qui la perçoit et si son montant correspond à une estimation raisonnable desdites dépenses ; que l'article 18 de la convention collective de la métallurgie de la Nièvre institue une « indemnité de panier de nuit » pour les ouvriers ou ATAM qui travaillent au moins huit heures consécutives et sont « présents dans l'établissement de 23 heures à 2 heures », en précisant que « les ouvriers ou ATAM qui travaillent huit heures en une seule séance seront autorisés à prendre un repos dit « casse-croûte » ; que l'employeur avait fait valoir que les salariés qui remplissaient ces conditions étaient conduits à engager des frais pour financer ledit « casse-croûte » et que le montant de l'indemnité de panier de nuit litigieuse, qui était pour l'essentiel inclus dans le seuil en-deçà duquel l'indemnité est considérée comme un remboursement de frais au regard du droit de la sécurité sociale, correspondait dès lors à une estimation raisonnable de ces frais ; qu'en décidant que l'indemnité de panier de nuit litigieuse n'avait pas la nature d'un remboursement de frais, au motif inopérant qu'elle avait un caractère forfaitaire et qu'elle était fixée dans le cadre de la convention collective départementale, cependant qu'elle constatait les conditions spécifiques de travail des salariés les contraignaient à engager des dépenses supplémentaires de nourriture et que le montant remboursé, fût-il forfaitaire, correspondait à une estimation raisonnable du montant de ces dépenses, le conseil de prud'hommes a violé l'article 18 de la convention collective de la métallurgie de la Nièvre, ensemble les articles L. 1221-1 et L. 3211-1 du code du travail ;
2°/ que, subsidiairement, l'article 18 de la convention collective de la métallurgie de la Nièvre institue une « indemnité de panier de nuit » pour les ouvriers ou ATAM qui travaillent au moins huit heures consécutives et sont « présents dans l'établissement de 23 heures à 2 heures » ; qu'un salarié absent pour quelque cause que ce soit et qui ne travaille pas n'est, par définition, pas présent dans l'établissement de 23 heures à 2 heures et n'est pas appelé à travailler en poste continu de 8 heures ; qu'il s'ensuit que c'est en violation des dispositions conventionnelles susvisées et des articles L. 1221-1 et L. 3211-1 du code du travail que les jugements attaqués ont admis que les salariés postés avaient droit au paiement de l'indemnité de panier de nuit pendant leurs jours d'absence ;
Mais attendu qu'ayant relevé qu'en application de l'article 4 de l'accord d'établissement des Aciéries d'Imphy du 26 juin 1969, la prime de panier de nuit, fixée de manière forfaitaire à une somme évoluant en fonction de la valeur de la prime de panier déterminée par la convention collective départementale, compensait une sujétion particulière de l'emploi, le conseil de prud'hommes a exactement décidé que cette prime constituait un complément de salaire ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident des salariés :
Vu l'article 5 de l'accord d'établissement des Aciéries d'Imphy du 26 juin 1969 ;
Attendu, selon ce texte, que la prime de panier de jour concerne exclusivement le personnel qui, pour des motifs de service, est appelé à travailler en poste continu de 8 heures, soit de 5 heures à 13 heures, soit de 13 heures à 21 heures ; qu'il en résulte que cette prime, fixée de manière forfaitaire, compense une sujétion particulière de l'emploi, de sorte qu'elle ne correspond pas à un remboursement de frais, mais constitue un complément de salaire ;
Attendu que pour débouter les salariés de leur demande, les jugements retiennent que la prime de panier de jour correspond au remboursement des frais d'un repas rapide pris pendant le temps de pause ;
Qu'en statuant ainsi, le conseil de prud'hommes a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils décident que la prime de panier de jour n'est pas un complément de salaire et en ce qu'ils déboutent les trente-six salariés concernés de leur demande au titre de cette prime durant les absences pour congés payés, journées de temps libre ou arrêts maladie, les jugements rendus le 5 juin 2012, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Nevers ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits jugements et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Bourges ;
Condamne la société Ugitech aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Ugitech à payer aux salariés la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des jugements partiellement cassés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux octobre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Ugitech, demanderesse aux pourvois principaux
Il est fait grief aux jugements attaqués d'AVOIR jugé que la « prime de panier de nuit » prévue par l'article 18 de la Convention collective de la métallurgie de la Nièvre avait la nature d'un complément de salaire et non d'un remboursement de frais et d'AVOIR condamné la société UGITECH à payer aux salariés demandeurs un rappel de salaire au titre de ladite prime durant les jours d'absence ;
AUX MOTIFS QUE « les primes de panier de nuit : que la convention collective de la métallurgie de la Nièvre prévoit, d'une part que les ouvriers qui travaillent au moins huit heures consécutives, présents dans l'établissement de 23 heures à 2 heures, recevront une indemnité de panier dont le montant est fixé paritairement, et que d'autre part ils peuvent prendre un repos « casse-croûte ». Que l'accord d'établissement du 26 juin 1969 précise que la prime de panier de nuit est fixée de manière forfaitaire à une somme évoluant en fonction de la valeur de la prime de panier fixée au niveau de la convention collective de la métallurgie de la Nièvre. Que si le fait que cette prime soit fixée de manière forfaitaire n'est pas suffisant en soi pour la qualifier de complément de salaire, la circonstance qu'il ne soit pas expressément mentionné dans les accords-et à défaut pas démontré-qu'elle vient dédommager de frais réellement engagés, permet de considérer qu'elle a pour objet de compenser une sujétion particulière de l'emploi. Que la prime de panier de nuit doit ainsi être qualifiée de complément de salaire. Que Marc X...a calculé que 500, 50E lui étaient dûs au titre de son action en répétition du salaire (prime de panier de nuit) ; que ce montant n'étant pas contesté, la Société UGITECH SA sera condamnée à lui verser cette somme » ;

ALORS D'UNE PART QU'une indemnité forfaitaire revêt le caractère d'un remboursement de frais et non d'un élément de salaire si son versement est subordonné à des conditions de travail impliquant l'engagement de dépenses spécifiques de la part du salarié qui la perçoit et si son montant correspond à une estimation raisonnable desdites dépenses ; que l'article 18 de la Convention collective de la métallurgie de la Nièvre institue une « indemnité de panier de nuit » pour les ouvriers ou ATAM qui travaillent au moins huit heures consécutives et sont « présents dans l'établissement de 23 heures à 2 heures », en précisant que « les ouvriers ou ATAM qui travaillent huit heures en une seule séance seront autorisés à prendre un repos dit " casse-croûte " » ; que l'employeur avait fait valoir que les salariés qui remplissaient ces conditions étaient conduits à engager des frais pour financer ledit « casse-croûte » et que le montant de l'indemnité de panier de nuit litigieuse, qui était pour l'essentiel inclus dans le seuil en-deçà duquel l'indemnité est considérée comme un remboursement de frais au regard du droit de la sécurité sociale, correspondait dès lors à une estimation raisonnable de ces frais ; qu'en décidant que l'indemnité de panier de nuit litigieuse n'avait pas la nature d'un remboursement de frais, au motif inopérant qu'elle avait un caractère forfaitaire et qu'elle était fixée dans le cadre de la Convention collective départementale, cependant qu'elle constatait les conditions spécifiques de travail des salariés les contraignaient à engager des dépenses supplémentaires de nourriture et que le montant remboursé, fût-il forfaitaire, correspondait à une estimation raisonnable du montant de ces dépenses, le conseil de prud'hommes a violé l'article 18 de la Convention collective de la métallurgie de la Nièvre, ensemble les articles L. 1221-1 et L. 3211-1 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART ET SUBSIDIAIREMENT QUE l'article 18 de la Convention collective de la métallurgie de la Nièvre institue une « indemnité de panier de nuit » pour les ouvriers ou ATAM qui travaillent au moins huit heures consécutives et sont « présents dans l'établissement de 23 heures à 2 heures » ; qu'un salarié absent pour quelque cause que ce soit et qui ne travaille pas n'est, par définition, pas présent dans l'établissement de 23 heures à 2 heures et n'est pas appelé à travailler en poste continu de 8 heures ; qu'il s'ensuit que c'est en violation des dispositions conventionnelles susvisées et des articles L. 1221-1 et L. 3211-1 du Code du travail que les jugements attaqués ont admis que les salariés postés avaient droit au paiement de l'indemnité de panier de nuit pendant leurs jours d'absence. Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. Y...et les trente-cinq autres demandeurs au pourvoi incident

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté les salariés de leur demande tendant à ce qu'il soit dit que la prime de panier était un complément de salaire à intégrer dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés et du salaire dû en cas d'arrêt de travail et à ce que l'employeur soit condamné à verser aux salariés des rappels de primes de panier de jour pour la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2010.
AUX MOTIFS QUE les primes de panier de jour (¿) sont évoquées à l'article 5 de l'accord d'établissement du 26 juin 1969, lequel stipule : « la prime de panier de jour concerne exclusivement le personnel appelé à travailler en poste continu de 8 heures ¿ le montant de cette prime est fixé à une valeur sensiblement égale au prix d'un casse-croûte (boisson comprise) fourni par les distributeurs en service à l'usine.. », la convention collective de la métallurgie de la Nièvre octroyant par ailleurs aux ouvriers travaillant huit heures en une seule séance, un repos dit « casse-croûte » ; que donc il est clairement défini que les salariés peuvent respecter un court moment de pause pour prendre un repas rapide ; qu'ainsi l'indemnité de panier de jour correspond à un remboursement de frais (en l'occurrence de nourriture et/ ou boisson) ; que l'indemnité de jour ne constitue donc pas un complément de salaire autorisant son paiement en dehors des jours travaillés par le salarié concerné ; que Monsieur Z... sera débouté de sa demande en paiement d'une rappel de prime de panier de jour durant ses absence pour congés payés, journées de temps libre, arrêt maladie ou autres motifs ;
ALORS QUE la prime de panier de jour versée forfaitairement par l'employeur, qui ne correspond pas à des dépenses réellement engagées par le salarié et qui compense une sujétion particulière de son emploi, constitue un complément de salaire et non un remboursement de frais ; que l'article 5 de l'accord d'entreprise du 26 juin 1969 institue une prime de panier de jour versée exclusivement aux salariés appelés à travailler en continu de 8 heures ; et que le montant de cette prime est fixé de manière forfaitaire ; qu'ainsi la prime de panier de jour qui concerne exclusivement le personnel qui, pour des motifs de service, est appelé à travailler en poste continu de 8 heures, soit de 5 heures à 13 heures, soit de 13 heures à 21 heures et qui, fixée de manière forfaitaire, compense une sujétion particulière de l'emploi, ne correspond pas à un remboursement de frais, mais constitue un complément de salaire ; qu'en déclarant néanmoins que cette indemnité de panier de jour avait la nature d'un remboursement de frais professionnels, le Conseil de prud'hommes a violé l'article 5 de l'accord d'établissement du 26 juin 1969, l'article 18 de la Convention collective de la métallurgie, ensemble les articles L. 1221-1, L. 3211-1 et L. 3141-22 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-23390;12-23391;12-23392;12-23393;12-23394;12-23395;12-23396;12-23397;12-23398;12-23399;12-23400;12-23401;12-23402;12-23403;12-23404;12-23405;12-23406;12-23407;12-23408;12-23409;12-23410;12-23411;12-23412;12-23413;12-23414;12-23415;12-23416;12-23417;12-23418;12-23419;12-23420;12-23421;12-23422;12-23423;12-23424;12-23425
Date de la décision : 22/10/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Nevers, 05 juin 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 22 oct. 2014, pourvoi n°12-23390;12-23391;12-23392;12-23393;12-23394;12-23395;12-23396;12-23397;12-23398;12-23399;12-23400;12-23401;12-23402;12-23403;12-23404;12-23405;12-23406;12-23407;12-23408;12-23409;12-23410;12-23411;12-23412;12-23413;12-23414;12-23415;12-23416;12-23417;12-23418;12-23419;12-23420;12-23421;12-23422;12-23423;12-23424;12-23425


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.23390
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