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15/10/2014 | FRANCE | N°13-11524

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 octobre 2014, 13-11524


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 décembre 2012 ), que M. X... engagé en novembre 1978 par la société SCAM appartenant au groupe EPC, a travaillé à compter du 31 août 2001 pour la société Adex qui fait partie du même groupe en qualité de directeur marketing-division explosifs industriels, son contrat de travail comprenant une clause de discrétion ; qu'il a été licencié pour motif économique par lettre du 19 février 2009 ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal de l'employeur :
Atte

ndu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement dépourvu de ca...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 décembre 2012 ), que M. X... engagé en novembre 1978 par la société SCAM appartenant au groupe EPC, a travaillé à compter du 31 août 2001 pour la société Adex qui fait partie du même groupe en qualité de directeur marketing-division explosifs industriels, son contrat de travail comprenant une clause de discrétion ; qu'il a été licencié pour motif économique par lettre du 19 février 2009 ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal de l'employeur :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner à payer des dommages-intérêts au titre de la rupture, alors, selon le moyen :
1°/ que l'employeur est libéré de l'obligation de faire des offres de reclassement au salarié dont il envisage le licenciement pour motif économique lorsque l'entreprise ou le groupe ne comporte aucun emploi disponible en rapport avec ses compétences, au besoin en le faisant bénéficier d'une formation d'adaptation ; qu'en se bornant à affirmer que la société Adex ne justifiait pas d'une impossibilité de reclassement sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'employeur ne justifiait pas de cette impossibilité en l'absence de postes disponibles au sein du groupe, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail ;
2°/ que les juges ne peuvent accueillir ou rejeter la demande d'une partie sans examiner l'intégralité des éléments de preuve qui leur sont soumis ; qu'en retenant à l'appui de sa décision que « ¿le licenciement économique ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement du salarié ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient, ce dont ne justifie pas la société Adex » sans examiner les différents éléments de preuve produits par cette société, et notamment les courriers adressés aux sociétés du groupe et les registres du personnel de l'ensemble de ces sociétés, dont résultait l'absence, dans la période contemporaine du licenciement, de tout poste disponible susceptible d'être proposé au salarié, fût-ce après une formation d'adaptation, la cour d'appel a derechef violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que les possibilités de reclassement doivent être recherchées à l'intérieur du groupe auquel appartient l'employeur ; qu'en retenant, pour juger dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement du salarié, que la société Adex ne justifiait pas « d'une quelconque tentative (de reclassement) en dehors (du groupe) », la cour d'appel a violé l'article L. 1233-4 du code du travail ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement les éléments de preuve produits devant elle et procédant à la recherche prétendument omise, la cour d'appel, qui a constaté que l'employeur, n'ayant proposé aucun poste de reclassement, ne justifiait pas que le reclassement ne pouvait être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel il appartenait, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident du salarié :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande d'indemnisation au titre de la clause de discrétion, alors, selon le moyen :
1°/ que l'atteinte portée à la liberté fondamentale d'exercer une activité professionnelle justifie l'existence d'une contrepartie financière ; qu'en l'espèce, le salarié soutenait précisément dans ses écritures que l'obligation de discrétion qui lui avait été imposée dans son contrat de travail l'empêchait en réalité, à l'instar d'une clause de non concurrence, de retrouver un emploi dès lors d'une part, qu'il avait toujours travaillé dans le même domaine d'activité sur lequel il y a très peu d'intervenants et d'autre part, que cette atteinte était d'autant plus importante que ladite obligation n'était limitée ni dans le temps, ni dans l'espace ; qu'en se bornant à affirmer de manière péremptoire que la clause en question n'empêchait pas M. X... de travailler pour une entreprise concurrente sans rechercher précisément et ainsi cependant qu'elle y était invitée, si au vu de la situation particulière de M. X... et du domaine d'activité dans lequel il était toujours intervenu, ladite clause n'avait pas pour effet de limiter sa possibilité de retrouver un nouvel emploi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale, au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
2°/ qu'en statuant ainsi par voie de pure affirmation et sans expliquer précisément en quoi, en l'espèce, ladite clause n'empêchait pas le salarié de retrouver un nouvel emploi, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant constaté que la clause litigieuse ne portait pas atteinte au libre exercice par le salarié d'une activité professionnelle, mais se bornait à imposer la confidentialité des informations détenues par lui et concernant la société, la cour d'appel, qui n'avait pas à suivre les parties dans le détail de leur argumentation, en a exactement déduit que cette clause n'ouvrait pas droit à contrepartie financière ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois tant principal qu'incident ;
Condamne la société Adex aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze octobre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la société Adex, demanderesse au pourvoi principal.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement pour motif économique de Monsieur Christian X... par la Société Adex et condamné cette société à verser à son ancien salarié une somme de 250 000 € à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS propres QUE la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, est fondée sur un motif économique caractérisé par :
- la forte concurrence existant sur le marché des explosifs, - les mauvais résultats de la situation en Afrique, - la liquidation de la société STIPS TI une des sociétés du groupe, - tous éléments la conduisant à supprimer 4 postes dont celui de M. Christian X... ; que la lettre mentionne que "aucune solution de reclassement n'a pu être trouvée" et que donc il n'existe pas d'autre solution que le licenciement ;
QU' au regard du motif économique allégué pour justifier le licenciement, force est de constater que, au cours de l'année 2008, la SNC Adex a rencontré des difficultés financières les résultats financiers et d'exploitation ayant subi des baisses drastiques de, respectivement : - 236 % et - 484 % par rapport à l'année précédente ; que le bénéfice a, quant à lui, baissé de 361% , la perte s'élevant à - 243.310 euros ; que le motif économique allégué par la SNC Adex est donc justifié ;
QUE (cependant) il est patent que la SNC Adex n'a pas proposé à M. Christian X... de poste de reclassement, s'étant bornée à indiquer dans la lettre de licenciement : "qu'aucune solution de reclassement n'avait pu être trouvée", ceci alors même que le licenciement économique ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement du salarié ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient, ce dont ne justifie pas la SNC Adex, étant observé que les propositions doivent être préalables à la mesure de licenciement et doivent être écrites et détaillées ; que, pour ce seul motif, le licenciement de M. Christian X... par la SNC Adex produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, comme l'a justement retenu le Conseil de prud'hommes" (arrêt p.3) ;
1°) ALORS QUE l'employeur est libéré de l'obligation de faire des offres de reclassement au salarié dont il envisage le licenciement pour motif économique lorsque l'entreprise ou le groupe ne comporte aucun emploi disponible en rapport avec ses compétences, au besoin en le faisant bénéficier d'une formation d'adaptation ; qu'en se bornant à affirmer que la Société Adex ne justifiait pas d'une impossibilité de reclassement sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'employeur ne justifiait pas de cette impossibilité en l'absence de postes disponibles au sein du groupe, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1233-4 du Code du travail ;
2°) ALORS QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter la demande d'une partie sans examiner l'intégralité des éléments de preuve qui leur sont soumis ; qu'en retenant à l'appui de sa décision que "le licenciement économique ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement du salarié ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient, ce dont ne justifie pas la SNC Adex" sans examiner les différents éléments de preuve produits par cette société, et notamment les courriers adressés aux sociétés du groupe et les registres du personnel de l'ensemble de ces sociétés, dont résultait l'absence, dans la période contemporaine du licenciement, de tout poste disponible susceptible d'être proposé à Monsieur X..., fût-ce après une formation d'adaptation, la Cour d'appel a derechef violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE "le conseil constate que la SNC Adex n'apporte pas la démonstration de sa volonté de reclasser Monsieur X... au sein de son groupe, ni d'une quelconque tentative au dehors" (jugement p.5) ;
3°) ALORS QUE les possibilités de reclassement doivent être recherchées à l'intérieur du groupe auquel appartient l'employeur ; qu'en retenant, pour juger dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement de Monsieur X..., que la société Adex ne justifiait pas "d'une quelconque tentative (de reclassement) en dehors (du groupe)", la Cour d'appel a violé l'article L.1233-4 du Code du travail.

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. X..., demandeur au pourvoi incident.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. X... de sa demande tendant à obtenir la somme de 135.230 euros à titre d'indemnisation de la clause de discrétion ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE : « Sur la clause de discrétion : Considérant que la clause de discrétion figurant au contrat de travail de M. Christian X... ne s'analyse pas en clause de non-concurrence ; qu'en effet la clause en question n'empêchait pas M. Christian X... de travailler pour une entreprise concurrente à condition de respecter la confidentialité des informations détenues par lui concernant la SNC ADEX ; qu'il sera, en conséquence, débouté de sa prétention financière à ce titre; ».
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « Sur la clause de discrétion, le Conseil constate qu'il ne s'agit pas d'une clause de non concurrence mais du devoir de discrétion dû par tous les employés d'une entreprise ».
1) ALORS QUE l'atteinte portée à liberté fondamentale d'exercer une activité professionnelle justifie l'existence d'une contrepartie financière ; qu'en l'espèce, M. X... soutenait précisément dans ses écritures que l'obligation de discrétion qui lui avait été imposée dans son contrat de travail l'empêchait en réalité, à l'instar d'une clause de non concurrence, de retrouver un emploi dès lors d'une part, qu'il avait toujours travaillé dans le même domaine d'activité sur lequel il y a très peu d'intervenants et d'autre part, que cette atteinte était d'autant plus importante que ladite obligation n'était limitée ni dans le temps, ni dans l'espace ; qu'en se bornant à affirmer de manière péremptoire que la clause en question n'empêchait pas M. X... de travailler pour une entreprise concurrente sans rechercher précisément et ainsi cependant qu'elle y était invitée, si au vu de la situation particulière de M. X... et du domaine d'activité dans lequel il était toujours intervenu, ladite clause n'avait pas pour effet de limiter sa possibilité de retrouver un nouvel emploi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale, au regard de l'article L. 1221-1 du Code du travail, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
2) ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QU'en statuant ainsi par voie de pure affirmation et sans expliquer précisément en quoi, en l'espèce, ladite clause n'empêchait pas M. X... de retrouver un nouvel emploi, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-11524
Date de la décision : 15/10/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Obligations du salarié - Obligation de loyauté - Clause de discrétion - Effets - Contrepartie financière - Exclusion - Détermination

La clause de discrétion qui ne porte pas atteinte au libre exercice par le salarié d'une activité professionnelle mais se borne à lui imposer la confidentialité des informations détenues par lui concernant la société n'ouvre pas droit à une contrepartie financière


Références :

article 1134 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 04 décembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 oct. 2014, pourvoi n°13-11524, Bull. civ. 2014, V, n° 240
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2014, V, n° 240

Composition du Tribunal
Président : M. Frouin
Avocat général : Mme Courcol-Bouchard
Rapporteur ?: Mme Duvallet
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.11524
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