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01/10/2014 | FRANCE | N°13-22072

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 01 octobre 2014, 13-22072


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée par l'association Seniors temps libre le 6 septembre 1993 en qualité de secrétaire, a été licenciée pour inaptitude physique par lettre recommandée du 24 décembre 2009 ; qu'estimant avoir été victime d'un harcèlement moral à l'origine de son inaptitude, elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de nullité de son licenciement ;
Attendu qu

e, pour dire le licenciement de la salariée sans cause réelle et sérieuse, l'...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée par l'association Seniors temps libre le 6 septembre 1993 en qualité de secrétaire, a été licenciée pour inaptitude physique par lettre recommandée du 24 décembre 2009 ; qu'estimant avoir été victime d'un harcèlement moral à l'origine de son inaptitude, elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de nullité de son licenciement ;
Attendu que, pour dire le licenciement de la salariée sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient, après avoir rejeté la demande au titre du harcèlement moral, que l'employeur a manqué à son obligation de reclassement ;
Qu'en statuant ainsi, alors que, dans ses conclusions écrites reprises à l'audience, la salariée faisait seulement valoir que son licenciement était nul dès lors que son inaptitude physique était la conséquence du harcèlement moral invoqué, la cour d'appel, qui a dénaturé les écritures des parties, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 mai 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Metz ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Colmar ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier octobre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour l'association Séniors temps libre.
Il est fait grief à l'arrêt d'AVOIR dit que le licenciement de Mme X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE : « Vu le jugement entrepris, Vu les conclusions écrites des parties présentées en cause d'appel et soutenues oralement auxquelles il est expressément renvoyé, en application de l'article 455 du Code de Procédure Civile, pour plus ample exposé des moyens invoqués et des prétentions émises. Sur le harcèlement moral. Vu les articles L. 1152-1, L. 1152-3, L 1152-4, L 1154-1 du Code du Travail. Attendu qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; Attendu que le salarié doit établir des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ; Attendu que l'employeur doit prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; Attendu qu'il est constant qu'une nouvelle directrice a pris en main l'association depuis le 2 février 2009 ; Attendu que celle-ci a entendu réorganisé le fonctionnement de l'association, établissant un nouvel organigramme précisant les attributions de chacun ; Attendu que Madame Valérie X... fait grief à son employeur d'avoir, alors qu'elle était en congés fait transporter les dossiers relatifs au personnel qui étaient jusque là rangés dans le bureau de la secrétaire ainsi que le ou les meubles dans lesquels ils étaient rangés, pour les mettre dans le bureau de la directrice, en créant un certain désordre ; Mais attendu que cet élément ne peut constituer un fait de harcèlement entraînant une dégradation des conditions de travail, et relève du pouvoir de réorganisation de la directrice, étant rappelé que quatre directeurs s'étaient succédé en trois ans avant l'arrivée de la nouvelle directrice et qu'une réorganisation du fonctionnement de l'association s'avérait nécessaire compte-tenu de la situation critique de l'association décrite par la présidente de l'association au contrôleur du travail par courrier du 15 juillet 2009 ; Attendu que Madame Valérie X... reproche à la directrice de lui avoir fait taper la lettre concernant le blâme qui lui était décerné le 29 mai 2009 ; Attendu que selon l'organigramme, Madame Valérie X... doit assurer le secrétariat de la directrice ; qu'il n'y a pas d'autre secrétaire ; qu'il aurait été aussi humiliant pour Madame Valérie X... que la lettre qui lui était destinée soit tapée par le comptable ou tout autre salarié de la société ; que le fait, même s'il est désagréable, ne constitue pas un agissement de harcèlement moral ; Attendu que le fait de demander le 04 juin 2009 les codes d'accès de l'ordinateur utilisé par le secrétariat de l'association ne constitue pas un agissement de harcèlement moral, alors que Madame Valérie X... allait être absente jusqu'au 30 juin 2009 ; que s'agissant d'un équipement de l'association, il est normal que la directrice puisse se servir de cet ordinateur ou y retrouver les documents de l'association ; Attendu que Madame Valérie X... fait reproche de ne pas avoir accepté de la rencontrer le samedi 30 mai 2009, alors que la directrice était venue à l'association accompagnée de sa fillette et d'avoir attendu le mardi 02 juin 2009 ; Attendu que ce fait ne peut constituer un agissement de harcèlement moral, le moment de l'entretien voulu par la salariée étant mal choisi ; Attendu que le fait de demander le 17 juin 2009 de modifier les dates de congés demandées par Madame Valérie X... pour le 07 au 19 septembre 2009, alors que l'association organisait sa semaine " portes ouvertes " du 14 au 20 septembre 2009, ne constitue pas un agissement de harcèlement moral, dès lors que selon les articles L. 3141-13, L. 3141-14 et L. 3141-16 du code du travail, la période de congés et l'ordre des départs en congés est fixé par l'employeur sous réserve des conventions ou accords collectifs ; Attendu que le fait pour la direction de l'association d'user de son pouvoir de fixer les congés de sa salariée, n'est pas constitutif d'un agissement de harcèlement moral d'autant plus que la date choisie par la salariée a été refusée par l'employeur pour un motif objectif légitime ; Attendu que des certificats médicaux du Docteur Y..., médecin traitant de Madame Valérie X... du 03 juin 2009 et du 23 janvier 2010 et du Docteur Z..., psychiatre du 10 novembre 2009 et du Docteur A..., acupuncteur du 27 janvier 2010, attestant que Madame Valérie X... fait l'objet de soins, et ne relatant même pas les dires de l'intéressée ne suffisent pas à caractériser l'existence d'un harcèlement moral ; Attendu que les faits reprochés à l'employeur, qu'ils soient envisagés individuellement ou dans leur globalité, ne constituent pas des agissements de harcèlement moral ; Attendu qu'en conséquence, le jugement querellé sera infirmé en tant qu'il a dit que le harcèlement moral de l'employeur à l'origine de l'état de santé de la salariée était à l'origine de la rupture du contrat de travail ; Attendu qu'aucun agissement de harcèlement moral n'ayant été établi, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en tant qu'il a débouté Madame Valérie X... de sa demande de dommages et intérêts à l'encontre de l'Association Seniors Temps Libre et de Madame B... pour harcèlement moral ; Sur le reclassement. Vu les articles L 1226-2 et L 1226-4 du Code du Travail, Attendu que selon avis du médecin du travail du 02 décembre 2009, Madame Valérie X... a été déclarée inapte à tous les postes dans l'entreprise ; que le médecin du travail précise dans son avis " 2eme examen médical suite à celui du 17 novembre 2009 et à la suite de l'étude de poste du 18 novembre 2009 " ; Attendu que Madame Valérie X... ne peut faire grief à l'employeur d'avoir consulté les délégués du personne le 11 septembre 2009, dès lors que ne s'agissant pas d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, l'avis des délégués du personnel prévu par l'article L. 1226-10 du code du travail, n'est pas exigé ; Attendu que même si le médecin du travail déclare le salarié inapte à tout emploi dans l'entreprise, cette déclaration ne dispense pas l'employeur de rechercher une possibilité de reclassement au sein de l'entreprise et le cas échéant, du groupe auquel elle appartient, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagements du temps de travail ; Attendu que l'employeur a donc l'obligation de reclasser le salarié inapte ; que si le salarié est inapte à tout poste dans l'entreprise, l'employeur doit pour le moins justifier avoir effectué une recherche effective et sérieuse de reclassement au sein du groupe auquel il appartient ; Attendu que l'Association Seniors Temps Libre, ex " Maison du troisième âge ", engage des actions au bénéfice des personnes âgées et ce en liaison avec la Ville de Metz ; Attendu que l'Association Seniors Temps Libre indique dans la lettre de licenciement du 24 décembre 2009 : " Nous avons proposé par écrit à plusieurs entreprises et institutions vos services. A ce jour, aucune suite n'a été donnée à ces démarches de la part des organismes contactés. " ; Attendu que l'Association Seniors Temps Libre ne fournit aucun document justifiant des démarches qu'elle aurait entreprises au bénéfice de Madame Valérie X... auprès d'institutions ou d'organismes partenaires ; Attendu qu'en l'absence d'une tentative sérieuse de reclassement, l'employeur a manqué à son obligation de reclassement ; que la sanction de l'obligation de reclassement donne lieu au versement par l'employeur d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; Attendu que Madame Valérie X... doit donc bénéficier, outre l'indemnité légale de licenciement, de dommages et intérêts pour rupture abusive et de l'indemnité compensatrice de préavis (deux mois) et des congés payés afférents, même si elle ne peut physiquement exécuter son préavis ; Attendu que Madame Valérie X... était âgée de 41 ans et avait une ancienneté de plus de deux ans à la date de son licenciement ; que l'Association Seniors Temps Libre emploie plus de onze salariés ; que Madame Valérie X... avait un salaire mensuel brut de 1. 929, 24 euros ; que le salaire mensuel brut moyen des six derniers mois est de 751, 51 euros, compte-tenu des arrêts pour maladie ; Attendu que Madame Valérie X... est actuellement gérante de la Sari C...
X... exploitant un pressing, après avoir bénéficié de l'allocation d'aide au retour à l'emploi à compter du 08 février 2010 ; Attendu que les premiers juges ont exactement apprécié les indemnités dues à Madame Valérie X... ; Attendu qu'en conséquence le jugement déféré sera confirmé en tant qu'il a alloué à Madame Valérie X... les sommes de 20. 000 euros à titre de dommages et intérêts et de 3. 858 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de 385, 80 euros au titre des congés payés afférents ; Attendu que l'Association Seniors Temps Libre, partie perdante, qui succombe dans son appel, sera condamnée aux dépens conformément aux dispositions de l'article 696 du Code de Procédure Civile ; ».
1) ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties, fixées par l'acte introductif d'instance et les conclusions en défense ; qu'en jugeant que le licenciement de Mme X... était sans cause réelle et sérieuse au motif que l'ASSOCIATION SENIOR TEMPS LIBRE n'aurait pas respecté son obligation de reclassement alors qu'au soutien de sa demande tendant à voir juger que son licenciement était abusif, Mme X... s'était bornée à faire valoir qu'elle avait été victime d'un harcèlement moral mais n'avait jamais soutenu, même à titre subsidiaire, que son ancien employeur n'avait pas respecté son obligation de reclassement, la Cour d'appel, qui a dénaturé les termes du litige, a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
2) ALORS A TOUT LE MOINS à supposer que la cour d'appel ait disposé d'un tel pouvoir, QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en retenant, d'office, et sans provoquer préalablement les observations des parties à cet égard, que l'ASSOCIATION SENIORS TEMPS LIBRE avait manqué à son obligation de reclassement en sorte que le licenciement de Mme X... était sans cause réelle et sérieuse après avoir indiqué qu'à l'audience, « les parties présentes ou représentées ont repris et soutenu oralement leurs conclusions écrites » et que les conclusions de Mme X... ne comportaient aucun moyen selon lequel l'ASSOCIATION SENIORS TEMPS LIBRE n'aurait pas respecté son obligation de reclassement, la cour d'appel, qui a soulevé ce moyen d'office, sans avoir préalablement recueilli les observations des parties à cet égard, a violé l'article 16 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-22072
Date de la décision : 01/10/2014
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Metz, 27 mai 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 01 oct. 2014, pourvoi n°13-22072


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.22072
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