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01/10/2014 | FRANCE | N°13-21616

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 01 octobre 2014, 13-21616


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., locataire d'un logement dont la société Logiseine est propriétaire, a reçu, en mai 2011, de la communauté de l'agglomération Rouen-Elbeuf-Austreberthe (la CREA), une facture d'eau d'un montant anormalement élevé, qu'il est apparu que l'installation présentait une fuite et que Mme X... a fait assigner la société Logiseine et la CREA en vue d'obtenir le remboursement de la somme qu'elle avait payée au titre de la facturation litigieuse ;

Sur le p

remier moyen :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de condamner in sol...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., locataire d'un logement dont la société Logiseine est propriétaire, a reçu, en mai 2011, de la communauté de l'agglomération Rouen-Elbeuf-Austreberthe (la CREA), une facture d'eau d'un montant anormalement élevé, qu'il est apparu que l'installation présentait une fuite et que Mme X... a fait assigner la société Logiseine et la CREA en vue d'obtenir le remboursement de la somme qu'elle avait payée au titre de la facturation litigieuse ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de condamner in solidum la CREA et la société Logiseine à payer à Mme X... la somme de 1 370,58 euros, outre 1 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, alors, selon le moyen, que les délibérations des juges sont secrètes, et qu'un greffier ne peut assister au délibéré ; que le jugement attaqué comporte la mention suivante : « Charlotte Trochet, greffier présent lors du délibéré » ; qu'il ressort de ces énonciations que le greffier a assisté au délibéré, de sorte que le tribunal d'instance a violé les articles 447, 448 et 458 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'il ne résulte pas de la mention critiquée que le greffier ait assisté au délibéré ; que le moyen manque en fait ;

Mais sur le second moyen, pris en ses quatre branches :

Vu l'article 1147 du code civil ;

Attendu que, pour retenir la responsabilité de la CREA, le jugement relève qu'elle a commis une faute sur le fondement de l'article 1382 du code civil, dès lors qu'elle aurait dû, en application du règlement de service applicable, signaler à l'abonné sa consommation anormalement importante d'eau, dès qu'elle l'a constatée ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le lien de droit qui unit l'exploitant du service public industriel et commercial de distribution de l'eau à ses usagers est de nature contractuelle, le tribunal a violé, par refus d'application, le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 21 mars 2013, entre les parties, par le tribunal d'instance de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance du Havre ;

Condamne la société Logiseine aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier octobre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour la communauté de l'agglomération Rouen-Elbeuf-Austreberthe (CREA).

Le premier moyen de cassation fait grief au jugement attaqué d'avoir condamné in solidum la CREA et la société LOGISEINE à payer la somme de 1.370,58 ¿ à Madame X..., outre 1000 ¿ par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Alors que les délibérations des juges sont secrètes, et qu'un greffier ne peut assister au délibéré ; que le jugement attaqué comporte la mention suivante : « Charlotte TROCHET, greffier présent lors du délibéré » (p. 2) ; qu'il ressort de ces énonciations que le greffier a assisté au délibéré, de sorte que le tribunal d'instance a violé les articles 447, 448 et 458 du code de procédure civile.

Le second moyen de cassation, subsidiaire, fait grief au jugement attaqué d'avoir condamné in solidum la CREA et la société LOGISEINE à payer la somme de 1370,58 ¿ à Madame X..., outre 1000 ¿ par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Aux motifs que « la CREA a commis une faute et a engagé sa responsabilité sur le fondement de l'article 1382 du code civil dès lors qu'en application de l'article 18 (ou 19 suivant les exemplaires), article intitulé « gestion des branchements » du règlement de service EAU, dispositions reprises dans la loi du 17 mai 2011, l'agent de la direction aurait dû, dès le constat d'une consommation importante, signaler le fait à l'abonné ce qu'il n'a pas fait ; la CREA par la voie d'un de ses représentants habilité n'a d'ailleurs pas méconnu cette faute dans son courrier en date du 30 juillet 2011 ; ultérieurement, lors de l'audience et avec une certaine mauvaise foi, la CREA a remis en cause cette reconnaissance de responsabilité expliquant que Claire X... avait eu connaissance de la fuite le 31 mars, affirmation non démontrée, alors qu'à l'inverse, il est établi que, dans sa lettre du 16 mai 2011, Claire X... rappelait qu'elle n'avait pas été avertie de cette fuite ; enfin, la CREA n'a produit aucun courrier justifiant du respect de son obligation ; en dernier lieu, l'argument développé tant par la SA LOGISEINE que la CREA selon lequel la responsabilité de Claire X... serait engagée en raison des pouvoirs d'usage, de direction et de contrôle qui lui sont déférés en application du bail sera écarté : en effet, la SA LOGISEINE et la CREA n'indiquent pas quel « témoin d'alerte » aurait justifié une plus grande vigilance de Claire X... s'agissant d'un défaut ou vice affectant la tuyauterie d'un logement neuf et dans ces conditions, ne caractérisent pas le reproche qu'elles formulent à l'encontre de la locataire (à la différence des circonstances énoncées à l'arrêt de la cour d'appel de LYON du 07 juin 2011 auquel le bailleur se réfère) ; dans ces conditions, la demande de la CREA en paiement de la somme de 1.370,58 ¿ réclamée à Claire X... au titre d'une surconsommation d'eau est injustifiée et il sera observé que faisant la preuve de sa bonne foi, Claire X..., par l'intermédiaire de son assurance, a offert à la CREA de régler la somme de 170 à 180 ¿ pour la période de juin 2010 à mars 2011 (période litigieuse) (LRAR du 05 janvier 2012) après avoir reçu en novembre 2011 la facturation pour la période de mars 2011 à septembre 2011 laquelle s'élevait à la somme de 124,17 ¿ pour une consommation de 51,84 m3 ; en conséquence, il convient de faire droit à la demande principale de Claire X... et de condamner in solidum la SA LOGISEINE et la CREA à lui régler la somme principale de 1.370,58 ¿ » (jugement, pp. 5 et 6) ;

Alors, d'une part, que l'usager d'un service public de distribution de l'eau ne peut engager la responsabilité de l'exploitant que sur le fondement de la responsabilité contractuelle lorsqu'il invoque une faute dans l'exploitation du service ayant causé son dommage ; qu'en l'espèce, le tribunal a décidé que la CREA, exploitant chargé du service de distribution de l'eau, aurait commis une faute dans l'exécution de ses obligations et engagé sa responsabilité sur le fondement de l'article 1382 du code civil envers Madame X..., usager de ce service ; qu'en statuant ainsi, quand les relations entre ces parties sont contractuelles, le tribunal a violé l'article 1147 du code civil par refus d'application, ensemble l'article 1382 du code civil par fausse application ;

Alors, d'autre part, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'en l'espèce, le tribunal a retenu que la CREA aurait commis une faute et engagé sa responsabilité dès lors qu'en application de l'article 18 (ou 19 suivant les exemplaires), article intitulé « gestion des branchements », du règlement de service EAU, l'agent de la direction aurait dû, dès le constat d'une consommation importante, signaler le fait à l'abonné, ce qu'il n'a pas fait ; que cependant, aucune disposition du règlement de service EAU ne prévoit une telle obligation à la charge des agents de la CREA, de sorte que le tribunal a violé l'article 1134 du code civil ;

Alors de surcroît que la reconnaissance de responsabilité d'une partie ne doit pas être équivoque ; que le tribunal a affirmé, pour retenir la responsabilité de la CREA, qu'elle n'aurait pas méconnu sa faute dans son courrier du 30 juillet 2011 ; que cependant, l'exploitant y avait seulement écrit à l'usager que son agent aurait certes dû lui signaler la consommation importante lors de la relève du compteur et qu'il était regrettable que cette information ne lui ait pas été transmise, ce qui manifestait le regret de la CREA que les évènements aient conduit à cette situation litigieuse, mais ne constituait pas une reconnaissance de responsabilité ; que le tribunal a donc statué par des motifs impropres à établir une reconnaissance de responsabilité non équivoque, et a violé l'article 1147 du code civil ;

Alors en tout état de cause qu'à supposer même que soit retenue une obligation contractuelle contraignant l'agent, dès le constat d'une consommation importante, à signaler le fait à l'abonné, en affirmant que la CREA soutenait, avec mauvaise foi, que Madame X... avait eu connaissance de la fuite dès le 31 mars 2011, mais que cette affirmation n'était pas démontrée, sans rechercher si cette connaissance ne résultait pas, au contraire, de la signature par l'abonnée, avec mention « bon pour accord », de la facture de la société PORRAZ datée du 31 mars 2011, produite aux débats par Madame X... elle-même, qui précisait que l'intervention de l'entreprise de plomberie au domicile de l'abonnée avait pour objet les « remplacement clapet anti-pollution et raccord PE Ø 25 suite à fuite importante », ce qui constituait précisément l'origine de la surconsommation d'eau litigieuse, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 13-21616
Date de la décision : 01/10/2014
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Rouen, 21 mars 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 01 oct. 2014, pourvoi n°13-21616


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Boulloche

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.21616
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