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01/10/2014 | FRANCE | N°13-16571

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 01 octobre 2014, 13-16571


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er février 2000 par la société Boucherie Roger Cazot en qualité de boucher vendeur ; qu'il a été licencié pour faute grave le 23 janvier 2009 ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident du salarié :
Vu les articles 606, 607 et 608 du code de procédure civile ;
Attendu que ne peut être reçu, indépendamment de la décision à intervenir sur le fond, un pourvoi en cassation formé contre une décision qui ne tranche pas le principal

ou qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er février 2000 par la société Boucherie Roger Cazot en qualité de boucher vendeur ; qu'il a été licencié pour faute grave le 23 janvier 2009 ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident du salarié :
Vu les articles 606, 607 et 608 du code de procédure civile ;
Attendu que ne peut être reçu, indépendamment de la décision à intervenir sur le fond, un pourvoi en cassation formé contre une décision qui ne tranche pas le principal ou qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident sans mettre fin à l'instance ;
Attendu que l'arrêt a notamment réservé les demandes relatives aux heures supplémentaires, congés payés afférents et repos compensateur, ordonné sur ces points la réouverture des débats et prescrit au salarié de calculer ses demandes sur des bases qu'il indique ;
Attendu que le moyen se borne à critiquer l'arrêt en ce qu'il indique le mode de calcul selon lequel la cour dit que le salarié devra calculer ses demandes ;
Attendu cependant que cette prescription, seulement ordonnée avant dire droit, ne tranche pas le principal et ne lie pas le juge ; que le moyen, dès lors, est irrecevable ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal de l'employeur :
Vu les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
Attendu que pour dire le licenciement non fondé sur une faute grave, la cour d'appel retient que deux fautes sont avérées, à savoir, d'une part, la présence, dans le camion vente, d'une personne étrangère à l'entreprise et, d'autre part, l'achat d'un poulet sans en acquitter le prix ; qu'au contraire, le troisième grief invoqué n'est pas établi ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans examiner les fautes antérieures imputées au salarié, dont l'employeur invoquait que celles retenues par la cour en étaient la réitération, la cour d'appel, à qui il appartenait d'examiner l'ensemble des griefs invoqués dans la lettre de licenciement, n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que le licenciement se fondait non sur une faute grave, mais sur une cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a condamné en conséquence la société Boucherie Roger Cazot à payer à M. X... les sommes de 6 131,16 euros d'indemnité compensatrice de préavis, de 613,12 euros de congés payés afférents et de 5 505,54 euros d'indemnité conventionnelle de licenciement, l'arrêt rendu le 22 mars 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier octobre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils, pour la société Boucherie Roger Cazot, demanderesse au pourvoi principal.
Il est fait grief à la Cour d'appel de LYON d'avoir jugé que le licenciement de M. X... par la SARL BOUCHERIE ROGER CAZOT se fonde non sur une faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse et, en conséquence, d'avoir condamné la société BOUCHERIE ROGER CAZOT à payer à M. X... les sommes de 6.131,16 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 613,12 € au titre des congés payés y afférent et 5.505,54 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement ;
AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement qui circonscrit le litige contient les motifs suivants : « Le 2 janvier 2009, je me suis rendu sur le marché de Tassin afin de contrôler le bon déroulement de l'activité. J'ai eu la surprise de constater la présence, dans le camion magasin de Mme Catherine Y..., votre amie, qui n'est pas salariée de la société. Demandant des explications sur la raison de la présence dans le camion-magasin de cette personne, j'ai eu la stupéfaction d'apprendre que vous l'aviez chargée de l'encaissement des clients en lieu et place de la caissière. Lors de mes demandes d'explication, les salariés présents m'ont informé que cette personne a, à plusieurs reprises, effectué des travaux dans le camion-magasin : installation des étiquettes, encaissement des clients, etc. Une telle situation est inacceptable et de nature à engager gravement la responsabilité de la société et la mienne à titre personnel, Mme Y... n'ayant aucune qualité pour travailler dans ce camion-magasin. Le fait que vous m'ayez dissimulé votre décision de faire intervenir votre amie constitue à lui seul un manquement grave rendant impossible la poursuite de votre contrat de travail. Par ailleurs, à l'occasion de cet incident du 2 janvier 2009, j'ai également été avisé de faits mettant en cause votre probité. J'ai ainsi été avisé que le 7 décembre 2008, vous avez dérobé des marchandises (un poulet qui a été rôti chez le commerçant rôtisseur voisin sur le marché, et un tournedos sur le marché de Ménival). Lors du nettoyage du camion-magasin, vous avez été vu en possession des marchandises incriminées et vous avez été vu par un salarié entrain de les charger dans votre véhicule sans qu'aucun ticket de caisse ne soit saisi en caisse. Poursuivant mes investigations, je demande au rôtisseur, qui se trouve être le commerçant voisin sur ce marché, s'il peut me confirmer que vous lui avez demandé de rôtir un poulet à titre personnel ce jour là. Il me confirme cette information et m'indique que cet état de fait s'est répété à plusieurs reprises au cours de l'année 2008. Or, vous n'avez jamais fourni de tickets de caisse pour vos achats personnels, alors qu'existe dans l'entreprise un système de réduction permettant pour les achats personnels des salariés de bénéficier d'une réduction de 33 %. Il ressort donc de ces faits que vous avez subtilisé à plusieurs reprises de la marchandise, ce qui est intolérable, surtout eu égard à votre statut dans l'entreprise et à la confiance que je vous ai accordée. J'ai enfin également appris depuis votre mise à pied, par certains clients, qu'ils doivent de l'argent à l'entreprise. Il n'en est fait nulle part mention dans la caisse (la patronne d'un bar doit 200 ¿ de viande provenant de la boucherie), ce qui est réellement inacceptable » ; que concernant la présence de Catherine Y..., amie d'Alain X... et personne étrangère à l'entreprise, dans le camion-vente le 2 janvier 2009 au marché de Tassin, le fait est constant ; que celle-ci y procédait à des encaissements de la part des clients ; que la faute du salarié est avérée sur ce point ; qu'il en va de même de l'achat d'un poulet le 7 décembre 2008 sans en acquitter le prix ; qu'au contraire, le crédit non autorisé qui aurait été consenti à des clients, n'est pas prouvé et rien n'établit qu'il soit imputable à Alain X... ; qu'il ressort de ces éléments que deux griefs sur trois sont avérés ; que ces fautes se commettaient pendant des marchés matinaux sur la voie publique, période où l'application rigoureuse du droit n'est pas la norme première, ce qui les relativise ; qu'elles avaient lieu dans un contexte d'un important différend portant sur des heures supplémentaires et repos compensateurs non pris ; qu'au vu de ces éléments la cour considère que le licenciement repose non sur une faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse ;
1/ ALORS QUE relèvent de la faute grave rendant impossible le maintien de l'intéressé dans l'entreprise, pour le boucher ayant la responsabilité d'un camion-magasin sur des marchés le fait d'avoir confié les encaissements à un tiers extérieur à la boucherie, sans en avoir informé son employeur dont la responsabilité, notamment pénale, pouvait se trouver engagée et le fait d'avoir soustrait de la viande pour son usage personnel sans s'être acquitté du prix réservé aux collaborateurs de la boucherie ; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
2/ ALORS QUE l'indivisibilité de la République garantit une application uniforme du droit sur l'ensemble du territoire national ; qu'après avoir constaté que le boucher ayant la responsabilité du camion-magasin sur des marchés, avait, le 2 janvier 2009, confié les encaissements à un tiers extérieur à la boucherie, sans en avoir informé son employeur dont la responsabilité, notamment pénale, pouvait se trouver engagée et avait, le même jour, soustrait de la viande pour son usage personnel sans s'être acquitté du prix réservé aux collaborateurs de la boucherie, la cour d'appel a considéré que « ces fautes se commettaient pendant des marchés matinaux sur la voie publique, période où l'application rigoureuse du droit n'est pas la norme première, ce qui les relativise » ; qu'en se déterminant de la sorte pour écarter la faute grave, la cour d'appel a violé l'article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958, ensemble les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
3/ ALORS SUBSIDIAIREMENT QU'après avoir constaté que le boucher ayant la responsabilité du camion-magasin sur des marchés, avait, le 2 janvier 2009, confié les encaissements à un tiers extérieur à la boucherie, sans en avoir informé son employeur dont la responsabilité, notamment pénale, pouvait se trouver engagée et avait, le même jour, soustrait de la viande pour son usage personnel sans s'être acquitté du prix réservé aux collaborateurs de la boucherie, la cour d'appel devait rechercher, ainsi qu'elle y avait été invitée (cf. conclusions, p. 7) si, comme le mentionnait la lettre de licenciement, ces fautes découvertes le 2 janvier 2009 constituaient des réitérations des mêmes fautes antérieures (cf. conclusions, p. 9 à 12); qu'en s'abstenant de procéder à cette recherche avant d'écarter la faute grave, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
4/ ET ALORS QUE dans ses conclusions d'appel, la société BOUCHERIE ROGER CAZOT s'était également prévalue de l'avertissement infligé à M. X... le 9 septembre 2008 pour réitération de consommation d'alcool sur les lieux et au temps du travail ; qu'en s'abstenant de s'interroger sur cet avertissement pour apprécier la portée des faits constitutifs de la faute grave alléguée, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour M. X..., demandeur au pourvoi incident.
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR dit que Monsieur Alain X... devra calculer ses demandes au titre des heures supplémentaires, congés y afférents et repos compensateurs sur les bases suivantes : période du 6 juin 2004 au 6 janvier 2009, 47 semaines travaillées en 2005, 2006, 2007 et 2008, 11,75 heures supplémentaires par semaine ;
AUX MOTIFS QUE « selon l'article L.3171-4 du code du travail en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu'au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; que s'il résulte des dispositions de cet article que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; qu'Alain X... formule sa demande pour la période non couverte par la prescription quinquennale, à savoir celle allant du 6 juin 2004 au 6 janvier 2009 ; que l'embauche avait lieu sans contrat écrit, d'où il résulte que le salarié était soumis à la durée légale du travail ; que les fiches de paie mentionnent 151,67 heures par mois et le paiement de 20 heures supplémentaires mensuelles à 125 % pour la période d'octobre 2007 à décembre 2008 ; qu'aucune élément versé aux débats ne permet de connaître le nombre précis d'heures travaillées par Alain X... ; qu'il ressort néanmoins des écritures sur ce point concordantes des parties qu'Alain X... travaillait chaque semaine sur les marchés du mardi au samedi inclus de 5 heures à 13 heures 30 et un dimanche sur deux selon le même horaire ; qu'il travaillait ainsi une semaine 42 heures 30 et l'autre 51 heures, d'où une moyenne hebdomadaire de 46 heures 45 minutes (46,75 heures), soit 11,75 supplémentaires ; que cela représente mensuellement 202,43 heures ou 50,75 heures supplémentaires ; qu'il en ressort que des heures supplémentaires restent dues à Alain X... ; qu'il convient de le renvoyer à effectuer les calculs sur cette base à raison de 47 semaines par année civile et ainsi de réouvrir les débats et renvoyer l'affaire à l'audience du mercredi 2 octobre 2013 à 9 heures ; que par voie de conséquence seront réservées les demandes relatives aux repos compensateurs et à l'indemnité pour travail dissimulé » ;
1°) ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que, dans ses conclusions d'appel, Monsieur Alain X... demandait le paiement des heures supplémentaires effectuées par lui à compter du 1er avril 2004 (conclusions d'appel, p. 10) ; qu'en retenant néanmoins que Monsieur Alain X... formait sa demande au titre des heures supplémentaires pour la période non couverte par la prescription quinquennale allant du 6 juin 2004 au 6 janvier 2009, la cour d'appel a dénaturé les conclusions d'appel de Monsieur Alain X... en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE, subsidiairement, les juges ne peuvent suppléer d'office un moyen tiré de la prescription quinquennale ; que l'employeur n'invoquait pas la prescription d'une partie des demandes formées par Monsieur X... au titre des heures supplémentaires ; que l'arrêt retient que le salarié ne peut formuler sa demande de rappel d'heures supplémentaires que pour la période non couverte par la prescription quinquennale, à savoir celle courant du 6 juin 2004 au 6 janvier 2009 ; qu'en suppléant d'office le moyen tiré de la prescription quinquennale, la cour d'appel a violé les articles 2247 du code civil et L.3245-1 du code du travail ;
3°) ALORS QUE, en tout état de cause, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des partie; que, dans ses conclusions d'appel, Monsieur Alain X... indiquait, au soutien de sa demande en paiement d'heures supplémentaires, avoir travaillé le mardi et le samedi de 4 h 30 à 15 heures, le mercredi et le jeudi de 5 heures à 14 h 30, le vendredi de 4 h 30 à 16 heures et un dimanche sur deux de 5 heures à 14 heures (conclusions d'appel, p. 8) ; qu'en retenant néanmoins qu'il ressortait des écritures sur ce point concordantes des parties, que Monsieur Alain X... travaillait chaque semaine sur les marchés du mardi au samedi inclus, de 5 heures à 13h30 et un dimanche sur deux selon le même horaire (cf. arrêt, p. 5 § 7), la cour d'appel a dénaturé les conclusions d'appel de Monsieur Alain X... et violé l'article 4 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-16571
Date de la décision : 01/10/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 22 mars 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 01 oct. 2014, pourvoi n°13-16571


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Ghestin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.16571
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