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29/09/2014 | FRANCE | N°13-18344

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 29 septembre 2014, 13-18344


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 12 octobre 2012), que M. B..., engagé le 13 juillet 2009 par la société Dommartin distribution en qualité d'ouvrier professionnel d'entretien et maintenance, a été licencié pour cause réelle et sérieuse par lettre du 9 avril 2010 ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes en nullité de son licenciement et en réintégration dans son emploi, alors, selon le moyen, que dès lors que le salarié a droit au respect de s

a vie privée, le licenciement de ce dernier, prononcé en violation de cette ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 12 octobre 2012), que M. B..., engagé le 13 juillet 2009 par la société Dommartin distribution en qualité d'ouvrier professionnel d'entretien et maintenance, a été licencié pour cause réelle et sérieuse par lettre du 9 avril 2010 ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes en nullité de son licenciement et en réintégration dans son emploi, alors, selon le moyen, que dès lors que le salarié a droit au respect de sa vie privée, le licenciement de ce dernier, prononcé en violation de cette liberté fondamentale, est nul ; que la cour d'appel qui, bien qu'elle ait constaté que le licenciement du salarié n'était pas fondé sur ses manquements professionnels, mais sur la révélation à la fin de l'année 2009 de son passé pénal, a néanmoins, pour débouter M. B... de sa demande de nullité du licenciement, retenu, de manière inopérante, qu'à partir du moment où les informations utilisées par l'employeur avaient été publiées par la presse et diffusées par la télévision, aucune liberté fondamentale, en particulier le droit au respect de la vie privée, n'avait été violée, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que le licenciement du salarié, fondé sur les informations parvenues à l'employeur au sujet de son passé pénal, avait été prononcé en violation du droit au respect de sa vie de privée et donc était nul, violant ainsi les articles 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 9 du code civil et L. 1221-1 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, ayant constaté que le licenciement fondé sur une condamnation pénale publiquement prononcée pour des faits étrangers aux obligations contractuelles résultant du contrat de travail, a retenu à bon droit qu'il ne portait pas atteinte à une liberté fondamentale, de sorte qu'il était dépourvu de cause réelle et sérieuse et non pas atteint de nullité ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. B... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé et signé par M. Lacabarats, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, conformément à l'article 456 du code de procédure civile, en l'audience publique du vingt-neuf septembre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils, pour M. B...

M. B... fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de l'avoir débouté de sa demande en nullité de son licenciement et en réintégration dans son emploi ;
AUX MOTIFS QUE (¿) dans le cas présent, il est constant que M. B... a été mis en cause et condamné pénalement dans le cadre d'une affaire survenue en 2002 ayant reçu un large écho médiatique sous le vocable de « l'affaire du bagagiste de Roissy », cette affaire et le nom de M. B... étant rappelés à l'occasion de l'émission de France 2 du 29 novembre 2009 « Faites entrer l'accusé » ; que Mme X..., agent de sécurité au service d'une société intervenant au sein du magasin Leclerc de Dommartin, a établi une attestation le 23 juin 2006 aux termes de laquelle « en décembre 2009, M. Fabien Y...travaillant en tant qu'agent de sécurité au centre commercial Leclerc à Dommartin lès Toul a divulgué publiquement dans tout le magasin et intentionnellement à la direction, l'implication de M. B... dans l'affaire du bagagiste de Roissy il y a 8 ans. Dès lors la direction a pris une mesure de licenciement à l'encontre de M. B... » ; que Mme X...qui, dans un premier temps, a contesté avoir rédigé cette attestation dans un document daté du 9 novembre 2010, a finalement reconnu en être l'auteur devant les services de police, alors qu'elle était entendue, le 27 février 2012, dans le cadre de la plainte pour faux témoignage déposée par l'employeur ; que M. Y..., également agent de sécurité, a établi quant à lui une attestation le 20 juin 2010 dans laquelle il mentionne l'intervention du responsable qualité de l'établissement immédiatement après la diffusion de l'émission du 29 novembre 2009, « sur la découverte du passé d'un certain B... », il ajoute que la direction de l'entreprise « qui n'avait jamais été au courant de cette affaire » l'a chargé « personnellement de mener une enquête interne sur M. B... et sur ses connaissances extérieures si possible pour savoir, d'une part, si la personne de l'émission n'était pas un homonyme de celui-ci et d'autre part, si M. B... pouvait être impliqué dans le braquage du centre Leclerc de Dommartin qui avait eu lieu quelques jours avant le 25 novembre 2009 », il précise avoir visionné un enregistrement de l'émission et avoir confirmé au PDG de la société que M. B... était bien la personne mise en cause ; que M. Y...indique que 15 jours plus tard, son supérieur hiérarchique lui a expressément demandé d'approfondir ses recherches durant les vacations de travail de M. B..., qu'il devait orienter « à charge contre lui pour se séparer très rapidement de lui, donc le licencier » ; que M. Z..., collaborateur de M. B..., a également établi une attestation le 26 juin 2010, dans laquelle il affirme que la direction de l'entreprise enquêtait sur le passé de M. B... depuis décembre 2009 ; que Messieurs Y...et Z...ont confirmé les termes de leurs attestations lors de leur audition par les services de police, M. Y...précisant que le P. D. G. avait décidé de « se débarrasser » de M. B... en raison de ses antécédents ; que le fait que la direction de l'entreprise ne connaissait pas l'implication de M. B... dans l'affaire du bagagiste de Roissy avant qu'elle ne soit divulguée au sein du personnel par certains agents ayant vu l'émission de télévision est confirmé par une attestation de M. A...du 29 mars 2010 ; qu'il résulte de ces éléments que la mise en cause de M. B... dans l'affaire précitée et sa condamnation pénale ont motivé son licenciement alors que ces faits ne sont pas mentionnés dans la lettre de licenciement ; (¿) ; que par suite, le licenciement de M. B... n'était pas fondé sur ses manquements professionnels, mais par les informations parvenues à l'employeur à la fin de l'année 2009 au sujet de son passé pénal ; que pour autant, le licenciement n'en pas nul le juge, en effet, ne peut, en l'absence de dispositions le prévoyant et à défaut de violation d'une liberté fondamentale, annuler un licenciement ; qu'aucune disposition ne prévoit la nullité du licenciement en pareil cas et aucune liberté fondamentale n'a été violée, en particulier le droit au respect de la vie privée, les informations utilisées par l'employeur ayant été largement publiées par la presse et diffusées par la télévision ; que la réintégration de l'intéressé ne peut donc être ordonnée de même que ne peut être ordonné le versement des salaires du jour du licenciement jusqu'au jour de la réintégration ; que seule peut être décidée l'indemnisation du préjudice résultant de l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement compte tenu de l'ancienneté de M. B... (8 mois et 26 jours), de son âge au moment de la rupture (47 ans), de sa qualification, du fait qu'il n'a pas retrouvé d'emploi et a rencontré d'importantes difficultés familiales et de logement, la cour est en mesure de fixer l'indemnité due au salarié en réparation de l'ensemble de ses chefs de préjudice, matériels et moraux, résultant de la rupture à 9. 000 euros ; que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de réintégration et la demande en paiement des salaires jusqu'à la date de la réintégration ; il sera en revanche infirmé en ce qu'il a déclaré le licenciement nul et alloué au salarié 10. 800 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement illicite ;
ALORS QUE dès lors que le salarié a droit au respect de sa vie privée, le licenciement de ce dernier, prononcé en violation de cette liberté fondamentale, est nul ; que la cour d'appel qui, bien qu'elle ait constaté que le licenciement du salarié n'était pas fondé sur ses manquements professionnels, mais sur la révélation à la fin de l'année 2009 de son passé pénal, a néanmoins, pour débouter M. B... de sa demande de nullité du licenciement, retenu, de manière inopérante, qu'à partir du moment où les informations utilisées par l'employeur avaient été publiées par la presse et diffusées par la télévision, aucune liberté fondamentale, en particulier le droit au respect de la vie privée, n'avait été violée, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que le licenciement du salarié, fondé sur les informations parvenues à l'employeur au sujet de son passé pénal, avait été prononcé en violation du droit au respect de sa vie de privée et donc était nul, violant ainsi les articles 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 9 du code civil et L. 1221-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-18344
Date de la décision : 29/09/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 12 octobre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 29 sep. 2014, pourvoi n°13-18344


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.18344
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