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24/09/2014 | FRANCE | N°13-86795

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 24 septembre 2014, 13-86795


Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Gilles A...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de RENNES, 11e chambre, en date du 12 septembre 2013, qui, pour abus de confiance, l'a condamné à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve, cinq ans d'interdiction d'exercer une activité relative aux produits financiers, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 25 juin 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel, président,

M. Germain, conseiller rapporteur, Mme Nocquet, conseiller de la chambre ;

Greffie...

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Gilles A...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de RENNES, 11e chambre, en date du 12 septembre 2013, qui, pour abus de confiance, l'a condamné à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve, cinq ans d'interdiction d'exercer une activité relative aux produits financiers, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 25 juin 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel, président, M. Germain, conseiller rapporteur, Mme Nocquet, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de M. le conseiller GERMAIN, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIÉ, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LACAN ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
« en ce que la cour d'appel a rejeté les exceptions de nullité de la procédure soulevées in limine litis par M. A... ;
« aux motifs que suite aux plaintes déposées par Mme X...et par M. Y..., les services de police et gendarmerie ont procédé comme ils en avaient la possibilité, même d'office, à des enquêtes préliminaires dans les conditions des articles 75 et suivants du code de procédure pénale, le ministère public informé des mêmes faits par les plaintes de La Poste (qui seront transmises pour jonction à l'enquête les 03 avril et 13 mai 2008 au commissariat de police de Saint-Brieuc) intervenant dans le contrôle et le suivi de l'enquête, notamment tant lors de la garde à vue du prévenu que par des instructions soit écrites (saisissant la DIPJ de Rennes en continuation d'enquête par soit-transmis du 05 décembre 2008 dont l'original figure au dossier), soit verbales (les réquisitions initiales de gendarmerie et celles du commissariat de police puis de la DIPJ mentionnant l'autorisation expresse du procureur de la République à de tels actes réalisés dans le cadre de l'enquête) ; que diverses vérifications sur les comptes et documents bancaires ainsi que plusieurs auditions dans le cadre préliminaire ont été réalisées, dont celles établissant à décharge du prévenu l'absence d'indices infractionnels au regard de clients (autres que M. Y...et Mme X...) de M. A... dont les dénégations quant à tout détournement ont été actées dans le cadre de son audition ; que M. A..., n'a à aucun stade de la procédure d'enquête puis de jugement sollicité la réalisation d'actes d'enquête, n'interrogeant d'ailleurs pas après sa garde à vue le procureur de la République des suites données à la procédure comme la possibilité lui en était ouverte en conséquence des dispositions de l'article 77-2 du code de procédure pénale ; que le prévenu a été régulièrement cité le 23 mai 2011, et ce notamment au regard du délai de 10 jours fixé à l'article 552 du code de procédure pénale, pour l'audience du 16 juin 2011, disposant ainsi du temps nécessaire à la préparation de sa défense ; que s'il a demandé le renvoi de l'affaire par courrier de son avocat du 10 juin 2011 sollicitant par ailleurs copie du dossier, réitérant cette demande de renvoi à l'audience, un tel renvoi n'était pas de droit mais soumis à l'appréciation de la juridiction de jugement ; que la juridiction de première instance a rejeté la demande de renvoi alors que M. A... qui était à même de préparer utilement sa défense, avait choisi de ne pas comparaître personnellement, ni de mettre en mesure l'avocat intervenant le 16 juin 2011 de le défendre utilement au fond, s'exposant ainsi à voir l'affaire être retenue comme cela a été le cas, le tribunal appréciant en première instance au regard des éléments résultant du dossier la culpabilité du prévenu qui a exercé, par son appel, son droit effectif au double degré de juridiction ; qu'il convient, en conséquence, de rejeter les exceptions de nullité de la procédure d'enquête et de jugement, ainsi que de la citation soulevées par le prévenu » ;

« 1°) alors que, l'article 6, § 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, impose à toute juridiction de jugement de mettre le prévenu en mesure d'exercer utilement ses droits de la défense ; que, dès lors, les juges correctionnels ne peuvent refuser une demande de renvoi sur le simple constat de l'absence du prévenu lorsqu'il est établi que ce dernier, qui n'avait pu accéder au dossier, ne pouvait mettre en mesure son avocat de le défendre utilement ; qu'en conséquence, la cour d'appel ne pouvait refuser d'annuler le jugement de première instance en considérant sans s'en justifier que M. A... était « à même de préparer utilement sa défense », et sans rechercher s'il avait pu être porté atteinte à ses droits ;
« 2°) alors que, toute personne ayant la qualité de prévenu est en droit d'obtenir la délivrance, à ses frais, le cas échéant par l'intermédiaire de son avocat, de la copie des pièces du dossier soumis à la juridiction devant laquelle elle est appelée à comparaître ; qu'en l'espèce, M. A... a été jugé sans pouvoir prendre connaissance des pièces réunies à sa charge durant l'enquête préliminaire afin de préparer utilement sa défense ; que la cour d'appel ne pouvait, pour refuser de constater la violation des droits de la défense et du principe du contradictoire en découlant, se borner à relever qu'une demande de copie du dossier avait été formulée par l'avocat du demandeur le 10 juin 2011 ;
Attendu que le demandeur ne saurait se faire un grief de ce que l'arrêt attaqué n'ait pas annulé le jugement, dès lors qu'en cas d'annulation, la cour d'appel aurait été tenue d'évoquer et de statuer au fond en application de l'article 520 du code de procédure pénale ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 314-1 du code pénal, 6, 8, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
« en ce que la cour d'appel a déclaré M. A... coupable d'abus de confiance ;
« aux motifs que les déclarations concordantes de M. Y...et de Mme X..., reçues séparément à des dates différentes, font toutes deux état de retraits d'espèces (sur chacun de leur compte bancaire respectif à La Poste) qu'ils n'ont pas effectués ni sollicités et dont ils n'ont eu connaissance que postérieurement ; que les investigations établissent que lesdites retraits ont été réalisés par le prévenu qui dans les deux cas indique avoir agi à la demande de ses clients, ce qu'on démenti formellement et constamment ceux-ci ; qu'il apparaît que les bordereaux de retraits d'espèces SF35 concernant M. Y...(établis par le prévenu) portent au minimum pour plusieurs d'entre eux une signature qui n'y a pas été apposée par M. Y..., alors que Mme X...indique avoir signé en blanc un tel bordereau à la demande du prévenu en qui elle avait toute confiance comme « étant son conseiller depuis une douzaine d'année » dans le cadre d'opérations d'assurance n'impliquant nullement un retrait en espèces de 8 000 euros ; que M. Y...indique n'avoir jamais reçu les liquidités retirées par le prévenu alors que Mme X...déclare que M. A... est venu déposer contre son gré dans sa chambre de la maison de retraite une somme correspondant à 7 600 euros le 11 janvier 2008 ; qu'il résulte suffisamment de ces éléments et notamment des déclarations concordantes des deux victimes que, quelles que soient les contestations du prévenu, M. A... a dans les deux cas, à l'insu de ses clients, opéré sur les comptes de La Poste détenus par ceux-ci des retraits d'espèces pour les montants visés à la prévention, sommes qu'il n'a pas remises par la suite à M. Y...et qu'il n'a remise après-coup et en urgence dans le contexte de l'enquête bancaire interne et de sa mise à pied que partiellement à Mme X...; qu'il est par ailleurs établi que M. A... a fait souscrire à M. Y...en 2004, neuf bons au porteur pour une somme totale de 13 500 euros, bons en définitive laissés à l'agence postale dans le dossier de M. Y...par M. A... sur les conseils de ce dernier dont il est établi qu'il lui a demandé par la suite de « continuer à suivre ses affaires à Yffiniac où il avait été muté », bons qui n'ont pas été retrouvés et dont la disparition a été constatée en 2007 au terme des entretiens entre M. Y...et le successeur de M. A... ; qu'il résulte suffisamment de ces éléments mis en parallèle avec le procédé utilisé par le prévenu concernant les retraits d'espèces précédemment analysés, et notamment les déclarations de M. Y..., que le prévenu a consciemment et frauduleusement détourné lesdits bons anonymes en ne les représentant pas à M. Y...; qu'ainsi, en opérant à leur insu des retraits de fonds que M. Y...et Mme X...avaient remis au prévenu ou à l'établissement l'employant et qu'il avait accepté à charge de les rendre, de les représenter ou d'en faire un usage déterminé (notamment de gestion et d'utilisation selon les conditions fixées par son employeur) et en ne représentant pas à M. Y...les bons au porteur que ce dernier lui avait confié à sa demande et qu'il avait accepté à charge notamment de les rendre ou de les représenter, M. A... a détourné lesdits fonds et bons au préjudice de M. Y...et Mme X..., ainsi que de La Poste qui en était dépositaire au regard de ses clients, agissant consciemment et en pleine connaissance des conséquences dommageables pour les victimes de ses actes qu'il recherchait, masquant ceux-ci notamment par l'établissement de bordereaux mensongers ou fallacieusement obtenus ; que considérant que les faits concernant M. Y...ne sont apparus dans des conditions permettant leur constatation et l'exercice de poursuites qu'à compter au plus tôt de 2007 dans la mesure où les relevés de compte étaient domiciliés àl'agence postale (et non au domicile de la victime) et que le prévenu n'en donnait alors qu'une présentation tronquée à M. Y...lors de ses visites chez ce dernier, de telle sorte qu'aucune prescription de l'action publique ne peut être retenue de ce chef ; qu'il apparaît que le prévenu a réalisé le 3 janvier 2004 un virement de 5 100 euros depuis son compte sur le compte de La Poste de son ex-concubine Mme Z...puis quelques jours plus tard, la même opération en sens inverse, du même montant, alors qu'il n'avait pas procuration sur le compte de Mme Z..., l'infraction poursuivie devant dès lors être retenue de ce chef à l'encontre du prévenu ; que là encore, ces faits ne sont apparus dans des conditions permettant leur constatation et l'exercice de poursuites qu'à compter des investigations sur les relevés bancaires du prévenu lors de l'enquête de 2008 dans la mesure où Mme Z...a précisé qu'elle n'avait eu que partiellement accès à ses propres relevés puisque le prévenu qui s'occupait de ses comptes les conservait alors, de telle sorte qu'aucune prescription de l'action publique ne peut être retenue de ce chef ; que les abus de confiance au préjudice de M. Y..., de Mme X..., de La Poste et de Mme Z..., objet de la poursuite, étant établis en tous leurs éléments constitutifs, le jugement sera confirmé sur la déclaration de culpabilité du prévenu les concernant ;
« 1°) alors que, la juridiction du fond qui retarde le point de départ du délai de prescription doit fixer le moment où l'infraction est apparue et a pu être constatée dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique ; qu'en s'abstenant de répondre aux chefs péremptoires des écritures de M. A... qui faisaient valoir que tant M. Y...que Mme Z...avaient pu prendre connaissance de l'état de leur compte au moment de la commission des faits objet de la prévention, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
« 2°) alors qu'en se contentant, s'agissant des faits commis au préjudice de M. Y..., d'affirmer sans aucune autre précision que ceux-ci ne sont se sont révélés « qu'à compter au plutôt de 2007 dans la mesure où les relevés de compte étaient domiciliés à l'agence postale (et non au domicile de la victime) et que le prévenu n'en donnait alors qu'une présentation tronquée à M. Y...lors de ses visites chez ce dernier », la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
« 3°) alors que s'agissant des faits concernant Mme Z..., ex-compagne de M. A..., la cour d'appel ne pouvait, pour fixer la découverte des faits « à compter des investigations sur les relevés bancaires du prévenu lors de l'enquête de 2008 », se borner à relever que Mme Z...a précisé qu'elle n'avait eu que partiellement accès à ses propres relevés puisque le prévenu qui s'occupait de ses comptes les conservait alors » ; qu'en se déterminant ainsi, sans préciser la date exacte à laquelle la prescription avait commencé à courir et en se fondant exclusivement sur les allégations d'un des témoins, la cour d'appel n'a pas suffisamment motivé sa décision » ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que M. A..., conseiller de la clientèle à la Banque postale, est poursuivi pour avoir, entre 2004 et 2008, détourné, au préjudice de cet établissement et de ses clients, des fonds qu'il avait acceptés à charge de les représenter ou d'en faire un usage déterminé ;
Attendu que, pour écarter l'exception de prescription de ces délits d'abus de confiance, les juges énoncent que les faits ne sont apparus, dans des conditions permettant leur constatation et l'exercice de l'action publique, qu'à compter de 2007, après une enquête interne, suivie d'une enquête préliminaire diligentée en 2008 ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, exemptes d'insuffisance, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 3000 euros la somme que M A... devra payer à la banque Postale au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-quatre septembre deux mille quatorze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 13-86795
Date de la décision : 24/09/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 12 septembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 24 sep. 2014, pourvoi n°13-86795


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié, SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.86795
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