LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société John Deere du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Patoux Equipagri ;
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société John Deere, que sur le pourvoi incident relevé par la société Etablissements X... ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 28 mars 2013), que la société John Deere (la société John Deere ou le concédant) était liée à la société X... Agri, aux droits de laquelle est venue la société Etablissements X... (la société X...), par un contrat de concession stipulant qu'afin de préparer la succession du dirigeant de la société X..., celle-ci devait présenter au concédant un successeur « acceptable » dans un délai de dix-huit mois ; que la société John Deere n'a pas agréé les candidats présentés par la société X... dans ce délai ni renouvelé le contrat à son terme ; qu'estimant que la société John Deere n'avait pas respecté son engagement de lui permettre de mettre en oeuvre une solution de reprise ou de succession, la société X... l'a fait assigner en réparation de son préjudice ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal :
Attendu que la société John Deere fait grief à l'arrêt de dire qu'elle porte la responsabilité de l'échec de la mise en place d'une solution de succession ou de reprise de la société X...alors, selon le moyen :
1°/ que la cour d'appel a constaté que par courrier du 21 juillet 2006, ayant précédé la signature du contrat de concession du 20 décembre 2006, la société John Deere avait accepté la proposition de renouvellement du contrat pendant trois ans, à condition que M. X... trouve un successeur ou un repreneur pour sa société au plus tard le 1er avril 2008 ; qu'il en résultait qu'une fois la reprise réalisée, ce dernier n'aurait plus été impliqué dans la gestion de la société X... ; que la possibilité, pour M. X..., de devenir associé d'une structure à créer destinée à lui succéder n'avait nullement été envisagée pas les parties de sorte que la société John Deere n'était pas tenue d'accepter un tel projet associatif impliquant le maintien de M. X... dans l'entreprise ; qu'en affirmant toutefois, pour retenir que la société John Deere devait réparation à la société X... pour avoir agi de mauvaise foi en ayant mis malicieusement les candidats à la reprise en position de devoir renoncer à leur projet, que la renonciation de M. Y...aurait été causée par le fait que M. Z..., directeur commercial de la société John Deere, « ne souhaitait pas que M. X... restât son associé dans la structure à créer qui aurait repris la concession », la cour d'appel a statué par des motifs impropres à établir la mauvaise foi de la société John Deere violant ainsi l'article 1134 du code civil ;
2°/ que les juges du fond ont l'obligation d'indiquer l'origine et la nature des documents sur lesquels ils se fondent pour affirmer l'existence d'un fait ; qu'en affirmant, pour retenir que la société John Deere aurait agi de mauvaise foi en ayant mis malicieusement les candidats à la reprise en position de devoir renoncer à leur projet, que la raison de la renonciation de MM. A...et B...à leur projet de reprise de la société X... était le refus, de la part de la société John Deere, « de leur garantir qu'elle leur donnerait son agrément pour après le départ de la société X... », sans indiquer ni l'origine ni la nature des documents sur lesquels elle s'était fondée pour affirmer l'existence de ce fait, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ qu'à la fin du rapport de visite du 11 mars 2008, établi à la suite de l'entretien entre M. A..., candidat à la reprise de la société X... et M. C..., inspecteur de la société John Deere, celui-ci avait indiqué qu'« au vu de la tournure que prennent nos discussions avec Patoux et Lannoy, je ne sais pas s'il faut donner suite » ; que ce document ne précisait nullement les implantations géographiques des concessions objet des négociations entre la société John Deere et les sociétés Patoux et
Lannoy ; qu'en affirmant toutefois qu'il résultait de ce document que la société John Deere ne se souciait plus que la société X... n'eût pas de successeur dès lors qu'elle aurait négocié, avant même l'expiration du délai de dix-huit mois qu'elle avait accordé à cette dernière pour trouver un repreneur, avec les sociétés Patoux et Lannoy pour « apparemment » la reprise non seulement de la concession d'Orchies, dont la société X... n'avait plus l'exclusivité depuis 2006, « mais encore de celle de Wormouth », la cour d'appel a dénaturé, par addition, le rapport de visite du 11 mars 2008 violant ainsi l'article 1134 du code civil, ensemble l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;
4°/ qu'un motif hypothétique équivaut à une absence de motif ; qu'en affirmant, pour retenir que la société John Deere aurait agi de mauvaise foi en ayant mis malicieusement les candidats à la reprise de la société X... en position de devoir renoncer à leur projet, que la société John Deere ne se souciait plus que sa cocontractante n'eût pas de successeur dès lors qu'elle aurait négocié, avant même l'expiration du délai de dix-huit mois qu'elle avait accordé à cette dernière pour trouver un repreneur, avec les sociétés Patoux et Lannoy pour « apparemment » la reprise non seulement de la concession d'Orchies, dont la société X... n'avait plus l'exclusivité depuis 2006, « mais encore de celle de Wormouth », la cour d'appel s'est prononcée par un motif hypothétique violant ainsi l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant constaté souverainement que chacun des trois candidats à sa succession présentés par la société X... n'avaient pas donné suite à leurs projets en raison de l'attitude de la société John Deere, qui n'avait pas voulu que M. X... restât l'associé de M. Y...dans la société à créer pour reprendre la concession, ni garantir à MM. A...et B..., lesquels disposaient des compétences et de moyens financiers les rendant aptes à reprendre la concession, qu'ils seraient agréés après le départ de la société X..., puis avait négocié la reprise de la concession avec des sociétés tierces avant même l'expiration du délai accordé à la société X... pour trouver un successeur, la cour d'appel a pu en déduire, sans dénaturation, que la société John Deere, qui, en dehors de tout impératif tenant à la sauvegarde de ses intérêts commerciaux, plutôt que refuser son agrément aux candidats repreneurs, les avait malicieusement mis en position de devoir renoncer à leurs projets, avait agi de mauvaise foi et engagé sa responsabilité à l'égard de la société X... ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Et attendu que le rejet du premier moyen de ce pourvoi rend sans objet le second moyen ;
Sur le premier moyen du pourvoi incident, pris en sa première branche :
Attendu que la société X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en paiement par la société John Deere de dommages-intérêts en compensation de la dévalorisation de ses actifs incorporels alors, selon le moyen, qu'en retenant, pour en déduire la prétendue absence de préjudice subi par la société concessionnaire du fait d'une perte de valeur de son fonds de commerce, que la valeur comptable dudit fonds était toujours inscrite au bilan de l'entreprise au titre des exercices postérieurs à la rupture du contrat de concession, sans rechercher, comme la société X... l'y avait expressément invitée, si cette valeur inscrite à l'actif du bilan n'était pas entièrement compensée par une provision pour dépréciation figurant également dans les états comptables de l'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant examiné l'ensemble des documents comptables produits, la cour d'appel, qui a nécessairement constaté l'existence de la provision figurant dans le bilan clos au 31 décembre 2010, a pu souverainement retenir que celle-ci n'était pas de nature à établir une dépréciation de la valeur réelle du fonds de commerce de la société X..., qui n'avait pas subi de préjudice à cet égard ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen de ce pourvoi, pris en ses deux premières et deux dernières branches :
Attendu que la société X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en paiement par la société John Deere de dommages-intérêts en compensation des coûts sociaux qu'elle a dû supporter jusqu'à la reprise de ses salariés par une autre entreprise ou leur démission alors, selon le moyen :
1°/ qu'en retenant qu'il n'était pas « imaginable » que la concessionnaire ait payé sept salariés pendant un an à ne rien faire, pour en déduire en substance que les salariés concernés auraient en réalité été employés pour les besoins d'une autre activité que celle relevant de la concession ayant pris fin le 1er novembre 2009, la cour d'appel a statué par une affirmation abstraite et d'ordre général, impropre à constituer une motivation effective, et elle a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en ne recherchant pas, comme elle y avait été invitée par la société X..., si le maintien des salariés concernés dans l'effectif de la concessionnaire, malgré la fin de la concession, ne s'expliquait pas par la recherche, par celle-ci, d'un repreneur disposé, notamment, à poursuivre les contrats de travail, et si la concessionnaire n'avait donc pas subi un préjudice certain imputable au manquement du concédant à son engagement de permettre la mise en oeuvre, par la concessionnaire, d'une solution de reprise ou de succession, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
3°/ qu'en retenant, pour exclure la responsabilité du concédant du fait de la conservation par la concessionnaire des salariés payés mais inemployés pendant un an, qu'une telle conservation procédait d'un choix personnel au chef de l'entreprise concessionnaire et n'avait donc pas pour cause le comportement du concédant, cependant que la rupture du contrat de concession était la cause certaine et directe de cette conservation qu'elle avait rendue nécessaire, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
4°/ qu'en retenant, pour en déduire en substance que la conservation des salariés n'aurait pas été rendue nécessaire par le comportement du concédant, qu'il aurait été possible à la concessionnaire de ne pas conserver les intéressés dans son personnel, cependant qu'il n'incombe pas à la victime de limiter son préjudice dans l'intérêt du responsable, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté, par motifs propres et adoptés, que la société X... avait exercé une activité après la fin du contrat de concession, comme elle l'avait elle-même reconnu, la cour d'appel en a exactement déduit, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la première branche, que le maintien de salariés dans l'entreprise, lequel résultait de la seule décision de cette société de poursuivre son activité, n'était pas la conséquence d'un manquement à ses obligations de la part de la société John Deere et que celle-ci ne pouvait donc être tenue d'en assumer les conséquences ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Et attendu que les autres griefs ne seraient pas de nature à permettre l'admission de ce pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois principal et incident ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour la société John Deere, demanderesse au pourvoi principal.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la société John Deere portait la responsabilité de l'échec de la mise en place d'une solution de succession ou de reprise de la société X...Agri, aux droits de laquelle est venue la société Etablissements X... ;
AUX MOTIFS QUE « les parties ont signé, le 20 décembre 2006, un contrat de concession pour une durée non renouvelable de trois ans à compter du 1er novembre 2006 ; que la signature de ce contrat avait été précédée d'un courrier de M. Z..., directeur commercial de la société John Deere, par lequel celui-ci précisait à M. X... : " tu nous as demandé à la place (d'un contrat d'un an), de te donner 18 mois à compter du 1er novembre 2006 pour te trouver un repreneur ou un successeur qui nous soit acceptable, tout en comprenant que s'il n'a pas été trouvé d'ici le 1er avril 2008, nous te signifierons alors un préavis de 18 mois pour ne pas renouveler le contrat à la fin de 2009 ; je voulais donc te confirmer par ce courrier, que nous acceptons la proposition d'un contrat de 3 ans au 1er novembre 2006 et t'assurer du soutien de l'équipe de la zone 2 pour t'aider, et travailler avec toi dans l'avenir " ; que contrairement à ce que prétend la société X..., la société John Deere n'a pris, dans cette lettre, aucun engagement de l'aider à trouver un repreneur ou successeur, dès lors que cette recherche incombait à la société X... seule ; qu'en revanche, dès lors que la société X... lui aurait présenté un candidat sérieux, la société John Deere s'engageait à l'accepter et à lui confier la concession de la société X... à compter du 1er novembre 2009 ; que la société X... lui ayant présenté trois candidats à sa succession, il convient désormais d'examiner si c'est par la faute de la société John Deere que cette succession n'a pas pu s'opérer ; qu'en premier lieu, la société John Deere indique avoir écarté la première candidature, posée par M. Y..., en raison de son faible niveau de formation (certificat d'électromécanicien) et de son expérience inadaptée de chef d'entreprise (expérience de " coaching " dans une très petite structure, sur un territoire de 15 km) ; que l'on ne peut toutefois que s'étonner que, si tels sont les vrais motifs de sa mise à l'écart, les négociations se soient poursuivies avec lui de novembre 2006 à avril 2007 qu'il ait, à cette occasion, rencontré à plusieurs reprises M. C..., inspecteur de la société John Deere, pour y discuter de son projet, et qu'il se soit même déplacé au siège de la société dans le Loiret pour y rencontrer M. Z...; qu'en réalité, la société John Deere n'a même pas eu à notifier son refus à M. Y..., dès lors que c'est lui-même qui a renoncé à son projet, au motif, ainsi qu'il le précise dans son courrier de rupture du 2 avril 2007, que M. Z...ne souhaitait pas que M. X... restât son associé dans la structure à créer qui aurait repris la concession ; qu'en second lieu, le projet de Messieurs A...et B...n'aurait pas vu le jour, selon l'appelante, au motif que ces deux candidats s'en seraient désintéressé après avoir été informés, le 18 avril 2008, par M. C...que le contrat venait à échéance le 31 octobre 2008 ; mais attendu qu'il est bien évident que ce n'est pas ce seul fait qui a pu les faire renoncer à leur projet, dès lors qu'ils savaient nécessairement que le contrat de la société X... venait un jour ou l'autre à échéance, mais que c'est plutôt le refus de la société John Deere de leur garantir qu'elle leur donnerait son agrément pour après le départ de la société X... ; qu'au demeurant, lorsque M. C...concluait le compte rendu de l'entretien qu'il avait eu, le 11 mars 2008, avec M. A...par : " au vu de la tournure que prennent nos discussions avec Patoux et Lannoy, je ne sais pas s'il faut donner suite ", il était clair que la société John Deere ne se souciait plus que la société X... n'eût pas de successeur, dès lors qu'elle négociait, avant même l'expiration du délai de dix-huit mois qu'elle avait accordé à la société X... pour trouver un repreneur, avec les sociétés Patoux et Lannoy, pour apparemment la reprise non seulement de la concession d'Orchies, mais encore de Wormhout ; que pourtant, il n'est pas soutenu que M. A...et M. B...n'auraient pas été " acceptables " pour la société John Deere, et que, de fait, ils avaient les compétences et disposaient des moyens financiers qui les rendaient aptes à reprendre la concession ; qu'il apparaît, dans ces conditions, que c'est de mauvaise foi, et en dehors de tout impératif tenant à la sauvegarde de ses intérêts commerciaux, que la société John Deere a, non pas refusé de donner son agrément aux successeurs présentés par la société X..., ce qui l'aurait obligée à donner les motifs de son refus, mais malicieusement mis ces candidats repreneurs en position de devoir renoncer à leur projet ; qu'elle doit donc réparation à la société X... » ;
1°/ ALORS QUE la Cour d'appel a constaté que par courrier du 21 juillet 2006, ayant précédé la signature du contrat de concession du 20 décembre 2006, la société John Deere avait accepté la proposition de renouvellement du contrat pendant trois ans, à condition que Monsieur X... trouve un successeur ou un repreneur pour sa société au plus tard le 1er avril 2008 ; qu'il en résultait qu'une fois la reprise réalisée, ce dernier n'aurait plus été impliqué dans la gestion des Etablissements X... ; que la possibilité, pour Monsieur X..., de devenir associé d'une structure à créer destinée à lui succéder n'avait nullement été envisagée pas les parties de sorte que la société John Deere n'était pas tenue d'accepter un tel projet associatif impliquant le maintien de Monsieur X... dans l'entreprise ; qu'en affirmant toutefois, pour retenir que la société John Deere devait réparation à la société X... pour avoir agi de mauvaise foi en ayant mis malicieusement les candidats à la reprise en position de devoir renoncer à leur projet, que la renonciation de M. Y...aurait été causée par le fait que M. Z..., directeur commercial de la société John Deere, « ne souhaitait pas que M. X... restât son associé dans la structure à créer qui aurait repris la concession », la Cour d'appel a statué par des motifs impropres à établir la mauvaise foi de la société John Deere violant ainsi l'article 1134 du Code civil ;
2°/ ALORS QUE les juges du fond ont l'obligation d'indiquer l'origine et la nature des documents sur lesquels ils se fondent pour affirmer l'existence d'un fait ; qu'en affirmant, pour retenir que la société John Deere aurait agi de mauvaise foi en ayant mis malicieusement les candidats à la reprise en position de devoir renoncer à leur projet, que la raison de la renonciation de Messieurs A...et B...à leur projet de reprise de la société Etablissements X... était le refus, de la part de la société John Deere, « de leur garantir qu'elle leur donnerait son agrément pour après le départ de la société X... », sans indiquer ni l'origine ni la nature des documents sur lesquels elle s'était fondée pour affirmer l'existence de ce fait, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
3°/ ALORS QU'à la fin du rapport de visite du 11 mars 2008, établi à la suite de l'entretien entre Monsieur A..., candidat à la reprise de la société Etablissements X... et Monsieur C..., inspecteur de la société John Deere, ce dernier avait indiqué qu'« au vu de la tournure que prennent nos discussions avec Patoux et Lannoy, je ne sais pas s'il faut donner suite » ; que ce document ne précisait nullement les implantations géographiques des concessions objet des négociations entre la société John Deere et les sociétés Patoux et Lannoy ; qu'en affirmant toutefois qu'il résultait de ce document que la société John Deere ne se souciait plus que la société X... n'eût pas de successeur dès lors qu'elle aurait négocié, avant même l'expiration du délai de dix-huit mois qu'elle avait accordé à cette dernière pour trouver un repreneur, avec les sociétés Patoux et Lannoy pour « apparemment » la reprise non seulement de la concession d'Orchies, dont la société X... n'avait plus l'exclusivité depuis 2006, « mais encore de celle de Wormouth », la Cour d'appel a dénaturé, par addition, le rapport de visite du 11 mars 2008 violant ainsi l'article 1134 du Code civil ensemble l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;
4°/ ALORS QU'un motif hypothétique équivaut à une absence de motif ; qu'en affirmant, pour retenir que la société John Deere aurait agi de mauvaise foi en ayant mis malicieusement les candidats à la reprise de la société Etablissements X... en position de devoir renoncer à leur projet, que la société John Deere ne se souciait plus que sa cocontractante n'eût pas de successeur dès lors qu'elle aurait négocié, avant même l'expiration du délai de dix-huit mois qu'elle avait accordé à cette dernière pour trouver un repreneur, avec les sociétés Patoux et Lannoy pour « apparemment » la reprise non seulement de la concession d'Orchies, dont la société X... n'avait plus l'exclusivité depuis 2006, « mais encore de celle de Wormouth », la Cour d'appel s'est prononcée par un motif hypothétique violant ainsi l'article 455 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société John Deere à payer à la société Etablissements X... la somme de deux cent trente-trois mille (233 000) euros au titre de la dépréciation du stock de pièces de rechange ;
AUX MOTIFS QUE « la société X... réclame à juste titre le remboursement du stock de pièces de rechange dont elle n'a pu se défaire faute de repreneur ; qu'au vu de l'inventaire qui lui avait été adressé, la société John Deere a elle-même valorisé le stock, le 3 décembre 2009, à la somme de 293 723, 63 euros ; qu'elle a toutefois cru devoir préciser que ces pièces n'étaient " retournables " qu'à hauteur d'une somme de 85 142, 20 euros au maximum, au motif que des emballages contenant plusieurs pièces avaient été ouverts, alors que, dans la mesure où c'est par sa faute que la société X... a été dans l'impossibilité de céder son stock à un successeur, la société John Deere est tenue de reprendre toutes les pièces ; que toutefois, il convient d'appliquer la décote de 20 % prévue au contrat, de sorte qu'il sera alloué à la société X... l'indemnité de 233 000 euros qu'elle réclame » ;
ALORS QUE la cassation à intervenir sur le fondement du premier moyen du pourvoi entraînera, par voie de conséquence, la cassation du chef du dispositif de l'arrêt ayant condamné la société John Deere à payer à la société Etablissements X... 233 000 euros au titre de la dépréciation du stock de pièces de rechange en relevant que cette dernière aurait été placée, par la « faute » de la société John Deere, dans l'impossibilité de céder son stock à un successeur et ce par application de l'article 624 du Code de procédure civile.
Moyens produits par la SCP Barthélémy, avocat aux Conseils, pour la société Etablissements X..., demanderesse au pourvoi incident.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, D'AVOIR débouté la société Etablissements X..., venant aux droits de la société X... Agri, concessionnaire, de sa demande tendant à voir condamner la société John Deere, concédante, à lui verser une somme de 271. 000 ¿ à titre de dommages-intérêts en compensation de la dévalorisation des actifs incorporels de la société X... Agri ;
AUX MOTIFS QUE la société X... réclamait, en premier lieu, une somme de 271. 000 ¿ au titre des éléments incorporels de son fonds de commerce, sur la base des actifs incorporels valorisés à 371. 000 euros à son bilan clos le 31 décembre 2007, dont elle déduisait les 100. 000 euros de la vente du fonds de commerce d'Orchies ; mais que la valorisation de son fonds était toujours de 271. 000 euros dans ses bilans clos aux 31 décembre 2009, 2010 et 2011, ce dont il se déduisait que les éléments incorporels de son fonds n'avaient subi aucune diminution de valeur ; que la société X... ne produisait aucune pièce pouvant apporter la preuve d'une dépréciation de son fonds, de sorte qu'elle devait être déboutée de sa demande (arrêt, p. 6) ;
ALORS QU'en retenant, pour en déduire la prétendue absence de préjudice subi par la société concessionnaire du fait d'une perte de valeur de son fonds de commerce, que la valeur comptable dudit fonds était toujours inscrite au bilan de l'entreprise au titre des exercices postérieurs à la rupture du contrat de concession, sans rechercher, comme la société Etablissements X... l'y avait expressément invitée (conclusions, p. 19, in fine), si cette valeur inscrite à l'actif du bilan n'était pas entièrement compensée par une provision pour dépréciation figurant également dans les états comptables de l'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
ALORS, DE SURCROIT, QU'en affirmant que la société Etablissements X... ne produisait aucune pièce de nature à apporter la preuve d'une dépréciation de son fonds, cependant qu'au soutien de sa démonstration de l'existence d'une provision pour dépréciation d'actif annulant la valeur comptable du fonds, cette société avait produit aux débats, sous les numéros 112 et 120 du bordereau de pièces annexé à ses conclusions, ses bilans des exercices 2009 et 2010 et que les états comptables de la société X... des exercices 2009 à 2011, faisant apparaître une provision pour dépréciation du fonds de commerce d'un montant de 271. 000 ¿ constatée en 2010, avaient également été produits aux débats par la société John Deere sous les numéros 61 à 63 du bordereau de pièces annexé à ses conclusions, la cour d'appel a modifié l'objet du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué, confirmatif de ce chef, D'AVOIR débouté la société Etablissements X..., venant aux droits de la société X... Agri, concessionnaire, de sa demande tendant à voir condamner la société John Deere à lui verser une somme de 252. 075, 63 ¿ à titre de dommages-intérêts en compensation des coût sociaux qu'elle avait dû supporter jusqu'à la reprise de ses salariés par une autre entreprise ou leur démission ;
AUX MOTIFS PROPRES ET ADOPTES QUE pour seule preuve du bien-fondé de sa réclamation, la société X... produisait aux débats un récapitulatif des salaires versés à sept salariés pour la période du 1er novembre 2009 au 31 décembre 2010, ainsi que des charges patronales y afférentes ; mais que la société X... était très discrète sur ce qu'avait pu être son activité depuis la fin de sa concession, alors qu'elle existait toujours, avait donc une activité et qu'il n'était pas imaginable qu'elle ait payé sept salariés pendant un an à ne rien faire ; qu'en tout cas, elle faisait l'aveu (p. 22 avant-dernier paragraphe de ses conclusions) de ce qu'elle avait eu une activité à Wormhout jusqu'à la fin de 2010 ; que les premiers juges avaient dès lors avec raison rejeté sa demande (arrêt, p. 7) ; que la société X... qui avait cessé toute activité de concessionnaire avec la société John Deere depuis le 1er novembre 2009 prétendait avoir maintenu en poste son personnel à ses frais jusqu'à fin 2010 dans l'attente de leur reprise par la société Godefroy Services, que quoique la démarche des Etablissement X... soit tout à son honneur, il s'agissait d'un choix de chef d'entreprise dont la société John Deere ne pouvait assurer la responsabilité (jugement p. 22) ;
ALORS, D'UNE PART, QU'en retenant qu'il n'était pas « imaginable » que la concessionnaire ait payé sept salariés pendant un an à ne rien faire, pour en déduire en substance que les salariés concernés auraient en réalité été employés pour les besoins d'une autre activité que celle relevant de la concession ayant pris fin le 1er novembre 2009, la cour d'appel a statué par une affirmation abstraite et d'ordre général, impropre à constituer une motivation effective, et elle a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en ne recherchant pas, comme elle y avait été invitée par la société X... (conclusions d'appel, p. 22), si le maintien des salariés concernés dans l'effectif de la concessionnaire, malgré la fin de la concession, ne s'expliquait pas par la recherche, par celle-ci, d'un repreneur disposé, notamment, à poursuivre les contrats de travail, et si la concessionnaire n'avait donc pas subi un préjudice certain imputable au manquement du concédant à son engagement de permettre la mise en oeuvre, par la concessionnaire, d'une solution de reprise ou de succession, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
ALORS, EN OUTRE, QUE s'il résultait des conclusions d'appel de la société X... que celle-ci avait conservé « un établissement » à Wormhout jusque fin 2010 (conclusions d'appel, p. 22, avant dernier alinéa), elle avait cependant indiqué qu'elle n'y avait plus exploité aucune activité, le maintien de l'établissement et des emplois étant justifié par l'attente de leur reprise et que, par ailleurs, si elle avait exploité un fonds de commerce de lavage de véhicules automobiles, cette dernière activité n'avait jamais été exploitée dans le secteur de Wormhout (conclusions d'appel, p. 22) ; qu'en affirmant cependant que la société X... avait, par les écritures précitées, « fait l'aveu de ce qu'elle a vait eu une activité à Wormhout jusqu'à fin 2010 », la cour d'appel les a dénaturées, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
ALORS, DE SURCROIT, QU'en retenant, pour exclure la responsabilité du concédant du fait de la conservation par la concessionnaire des salariés payés mais inemployés pendant un an, qu'une telle conservation procédait d'une choix personnel au chef de l'entreprise concessionnaire et n'avait donc pas pour cause le comportement du concédant, cependant que la rupture du contrat de concession était la cause certaine et directe de cette conservation qu'elle avait rendue nécessaire, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
ALORS, ENFIN, QU'en retenant, pour en déduire en substance que la conservation des salariés n'aurait pas été rendue nécessaire par le comportement du concédant, qu'il aurait été possible à la concessionnaire de ne pas conserver les intéressés dans son personnel, cependant qu'il n'incombe pas à la victime de limiter son préjudice dans l'intérêt du responsable, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil.