LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 15 janvier 2013), qu'engagé le 5 janvier 2007 par la Société des transports départementaux du Gard en qualité de conducteur-receveur, M. X... a fait l'objet d'un avertissement le 27 mars 2007 pour absence et de deux mises à pied les 27 mars et 30 novembre 2007 pour retard ; que par lettre du 18 décembre 2007, il a été licencié pour faute grave ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire le licenciement fondé sur une faute grave et de le débouter de ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que la lettre énonçant les motifs du licenciement fixe les limites du litige ; que l'erreur dans la lettre de licenciement sur la date d'un fait reproché au salarié prive l'employeur du droit de s'en prévaloir, sans que le juge ne puisse lui-même rectifier l'erreur commise ; qu'en procédant à la rectification de l'erreur commise dans la lettre de licenciement, pour retenir qu'il aurait été reproché au salarié de « ne pas avoir prévenu immédiatement son employeur de son indisponibilité le 4 décembre 2007 (et non le 4 novembre comme indiqué par erreur dans la lettre de licenciement ainsi que cela ressort de l'attestation de M. Y... à l'origine du rapport comportant cette erreur de date) » et apprécier l'existence d'une faute grave à son égard, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1 et L. 1232-6 du code du travail ;
2°/ que seul un fait fautif est de nature à justifier le licenciement prononcé pour faute grave ; que les juges du fond sont tenus d'examiner les circonstances des faits allégués pour caractériser ou exclure la faute grave ; qu'en se bornant à retenir que le salarié aurait dû prendre son service le 4 décembre 2007 à 6 heures 40 et qu'il n'aurait informé son employeur de son indisponibilité qu'à 7 heures 20 de sorte « que le ramassage scolaire dont il avait la charge ne pouvait s'effectuer que par le recours à un car relai à 8 heures 00 engendrant ainsi un retard pour les écoliers », sans rechercher comme l'y invitait l'exposant dans ses écritures, si l'absence du salarié, justifiée par un arrêt maladie, dont l'employeur avait été informé le jour même, ne lui ôtait pas son caractère fautif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1232-1 du code du travail ;
3°/ que la lettre énonçant les motifs du licenciement fixe les limites du litige ; que les juges ne peuvent retenir des griefs qui ne figuraient pas dans la lettre de licenciement pour caractériser une faute grave à l'égard du salarié ; qu'en examinant le rapport de contrôle concernant la journée du 22 novembre 2007 reprochant notamment à M. X... une conduite prétendument dangereuse, pour en déduire que « ces précédents pour le moins préoccupants pour la sécurité des enfants transportés autorisaient l'employeur à se saisir d'un nouveau manquement de la part du salarié pour prononcer à son encontre une mesure de licenciement pour faute grave » et juger que « l'attitude désinvolte et réitérée du salarié faisait obstacle à son maintien dans l'entreprise pendant la durée du préavis », cependant que ce rapport, pas plus que de tels griefs n'étaient contenus dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1 et L. 1232-6 du code du travail ;
4°/ qu'il appartient aux juges du fond de caractériser la réalité des faits sur lesquels se fonde le licenciement pour faute grave ; qu'il n'est permis à l'employeur de se prévaloir de faits antérieurs déjà sanctionnés, pour tenter de justifier un licenciement pour faute grave, que pour autant que des faits fautifs identiques aient été réitérés ; qu'en se bornant à retenir en l'espèce que « si des faits déjà sanctionnés ne peuvent venir motiver une nouvelle sanction, l'employeur peut les rappeler dans la lettre de licenciement en cas de réitération auquel cas l'accumulation de ces manquements peut constituer une faute grave justifiant un licenciement », en omettant de caractériser l'existence de nouveaux faits fautifs de même nature que ceux antérieurement reprochés au salarié et déjà sanctionnés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1 et L. 1332-4 du code du travail ;
5°/ qu'en s'abstenant de répondre aux conclusions du salarié qui contestaient la réalité de ses prétendus retards de prise de services déjà sanctionnés et rappelés dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a estimé que c'était par suite d'une erreur matérielle que la lettre de licenciement comportait la date du 4 novembre 2007 et non celle du 4 décembre 2007 à laquelle il est établi et non contesté par le salarié dans ses écritures que le comportement fautif reproché avait eu lieu ;
Et attendu, ensuite, qu'ayant relevé que le salarié avait déjà été sanctionné à deux reprises pour des retards dans sa prise de service et que l'un d'eux avait donné lieu à un contrôle établi par un personnel de la société préalablement au dernier fait fautif dont il résultait que le salarié adoptait, du fait de son retard dans sa prise de service, une conduite dangereuse, la cour d'appel a pu, sans sortir des limites du litige fixées par la lettre de licenciement et sans avoir à entrer dans le détail de l'argumentation des parties, décider que la survenance d'un nouveau manquement du salarié consistant dans le fait d'avertir tardivement son employeur de son indisponibilité à prendre son service désorganisant ainsi le transport des écoliers, justifiait son licenciement pour faute grave, son attitude désinvolte et répétée rendant impossible son maintien dans l'entreprise ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en sa deuxième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept septembre deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour M. X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement de Monsieur X... pour faute grave était justifié et de l'avoir débouté de l'ensemble de ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE « Monsieur X... a été licencié pour trois motifs :- ne pas avoir prévenu immédiatement son employeur de son indisponibilité le 4 décembre 2007 (et non le 4 novembre comme indiqué par erreur dans la lettre de licenciement ainsi que cela ressort de l'attestation de Monsieur Y... à l'origine du rapport comportant cette erreur de date) conformément au règlement intérieur de l'entreprise, et au plus tard deux heures avant,- les précédents retards à la prise de service ayant généré des défauts de conduite,- non respect des consignes et persistance dans le défaut de ponctualité ; que si des faits déjà sanctionnés ne peuvent venir motiver une nouvelle sanction, l'employeur peut les rappeler dans la lettre de licenciement en cas de réitération auquel cas l'accumulation de ces manquements peut constituer une faute grave justifiant un licenciement ; qu'en l'espèce, Monsieur X... devait prendre son service le 4 décembre 2007 à 6h40, or il n'informa son employeur de son indisponibilité qu'à 7h20 en sorte que le ramassage scolaire dont il avait la charge ne pouvait s'effectuer que par le recours à un « car relais » à 8h00 engendrant ainsi un retard pour les écoliers ; que Monsieur X... ne peut prétendre ignorer les dispositions du règlement intérieur relatives à la nécessité de prévenir immédiatement son employeur de tout retard qui lui ont été rappelées à l'occasion de la notification de la mesure de mise à pied prononcée à son encontre le 27 septembre 2007 précisément pour un retard dans la prise de son service ; que ces retards répétés de la part du salarié ont amené l'employeur à faire constater par un contrôleur de la société la conduite de Monsieur X... consécutive à de tels retards ; que le rapport de contrôle concernant la journée du 22 novembre 2007 a établi les faits suivants :- le salarié était absent à l'heure normale de sa prise de service (6h40) ;- les clefs de contact de son véhicule n'étaient pas rangées à l'endroit prévu à cet effet ;- le salarié est arrivé avec 12 minutes de retard et il a pris la route sans que les contrôles et préchauffage du véhicule puissent être effectués, afin de ne pas retarder le service ;- un grand nombre d'enfants n'avait pas de carte de transport, qui est obligatoire pour pouvoir monter dans le véhicule, huit d'entre eux n'étaient même pas inscrits ;
- Monsieur Dominique X... ayant pris la direction d'AIGUESMORTES sans desservir certains arrêts, écoles et gares a, pour corriger cette erreur, fait un demi-tour sur une voie rapide, manquant de très peu de heurter une barrière de sécurité ; que le contrôleur a alors fait descendre Monsieur X... de l'autocar afin de l'interpeller sur sa conduite dangereuse ;- Monsieur X... a redémarré le bus et s'est engagé sur la voie rapide sans vérifier si la chaussée était dégagée ;- le contrôleur a alors demandé à un deuxième chauffeur, lui aussi présent à bord, de prendre le volant et de terminer la tournée, les collégiens d'AIGUES MORTES sont arrivés, ce jour là, avec 10 minutes de retard ; que ces précédents pour le moins préoccupants pour la sécurité des enfants transportés autorisaient l'employeur à se saisir d'un nouveau manquement de la part du salarié pour prononcer à son encontre une mesure de licenciement pour faute grave ; qu'en effet, l'attitude désinvolte et réitérée du salarié faisait obstacle à son maintien dans l'entreprise pendant la durée de son préavis ; que Monsieur X... soutient sans nullement le démontrer avoir averti son employeur en temps utile le 4 décembre 2007 alors qu'il était souffrant ; qu'or Monsieur Y..., agent de régulation, a établi un rapport indiquant n'avoir été prévenu qu'à 7h20 ; que Monsieur X... s'étonne que l'employeur l'ait laissé reprendre son activité après l'entretien préalable alors qu'une faute grave lui était reprochée ; qu'or, par courrier du 30 novembre 2007, l'employeur avait notifié à Monsieur X... une mesure de mise à pied de trois jours prenant effet du 11 au 13 décembre 2007 ; que son licenciement lui a été notifié le 18 décembre 2007 en sorte qu'une mise à pied conservatoire lors de l'envoi de la lettre de convocation le 10 décembre 2007 n'apparaissait pas indispensable, cette circonstance ne saurait venir en contradiction avec la gravité des faits qui lui étaient reprochés ; que les autres développements de Monsieur X... étrangers aux motifs exprimés dans la lettre de licenciement ne présentent aucune pertinence dans l'examen du litige ; qu'il convient pour les motifs qui précèdent substitués à ceux des premiers juges de confirmer de ce chef le jugement déféré » ;
1°/ ALORS QUE la lettre énonçant les motifs du licenciement fixe les limites du litige ; que l'erreur dans la lettre de licenciement sur la date d'un fait reproché au salarié prive l'employeur du droit de s'en prévaloir, sans que le juge ne puisse lui-même rectifier l'erreur commise ; qu'en procédant à la rectification de l'erreur commise dans la lettre de licenciement, pour retenir qu'il aurait été reproché à Monsieur X... de « ne pas avoir prévenu immédiatement son employeur de son indisponibilité le 4 décembre 2007 (et non le 4 novembre comme indiqué par erreur dans la lettre de licenciement ainsi que cela ressort de l'attestation de monsieur Y... à l'origine du rapport comportant cette erreur de date) » et apprécier l'existence d'une faute grave à son égard, la Cour d'appel a violé les articles L. 1232-1 et L. 1232-6 du Code du travail ;
2°/ ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE seul un fait fautif est de nature à justifier le licenciement prononcé pour faute grave ; que les juges du fond sont tenus d'examiner les circonstances des faits allégués pour caractériser ou exclure la faute grave ; qu'en se bornant à retenir que Monsieur X... aurait dû prendre son service le 4 décembre 2007 à 6h40 et qu'il n'aurait informé son employeur de son indisponibilité qu'à 7h20 de sorte « que le ramassage scolaire dont il avait la charge ne pouvait s'effectuer que par le recours à un car relai à 8h00 engendrant ainsi un retard pour les écoliers », sans rechercher comme l'y invitait l'exposant dans ses écritures (conclusions p. 6 et 7), si l'absence de Monsieur X..., justifiée par un arrêt maladie, dont l'employeur avait été informé le jour même, ne lui ôtait pas son caractère fautif, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1232-1 du Code du travail ;
3°/ ALORS QUE la lettre énonçant les motifs du licenciement fixe les limites du litige ; que les juges ne peuvent retenir des griefs qui ne figuraient pas dans la lettre de licenciement pour caractériser une faute grave à l'égard du salarié ; qu'en examinant le rapport de contrôle concernant la journée du 22 novembre 2007 reprochant notamment à Monsieur X... une conduite prétendument dangereuse, pour en déduire que « ces précédents pour le moins préoccupants pour la sécurité des enfants transportés autorisaient l'employeur à se saisir d'un nouveau manquement de la part du salarié pour prononcer à son encontre une mesure de licenciement pour faute grave » et juger que « l'attitude désinvolte et réitérée du salarié faisait obstacle à son maintien dans l'entreprise pendant la durée du préavis », cependant que ce rapport, pas plus que de tels griefs n'étaient contenus dans la lettre de licenciement, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1 et L. 1232-6 du Code du travail ;
4°/ ALORS QU'il appartient aux juges du fond de caractériser la réalité des faits sur lesquels se fonde le licenciement pour faute grave ; qu'il n'est permis à l'employeur de se prévaloir de faits antérieurs déjà sanctionnés, pour tenter de justifier un licenciement pour faute grave, que pour autant que des faits fautifs identiques aient été réitérés ; qu'en se bornant à retenir en l'espèce que « si des faits déjà sanctionnés ne peuvent venir motiver une nouvelle sanction, l'employeur peut les rappeler dans la lettre de licenciement en cas de réitération auquel cas l'accumulation de ces manquements peut constituer une faute grave justifiant un licenciement », en omettant de caractériser l'existence de nouveaux faits fautifs de même nature que ceux antérieurement reprochés à Monsieur X... et déjà sanctionnés, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1 et L. 1332-4 du Code du travail ;
5°/ ALORS QU'en s'abstenant de répondre aux conclusions de Monsieur X... qui contestaient la réalité de ses prétendus retards de prise de services déjà sanctionnés et rappelés dans la lettre de licenciement, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.