La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/09/2014 | FRANCE | N°13-18017

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 septembre 2014, 13-18017


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé en qualité de réceptionniste de nuit par la société Shema le 1er avril 1991 ; qu'il a saisi une première fois le conseil de prud'hommes de Marseille d'une demande en paiement de rappels de salaires, qui a été partiellement accueillie par jugement du 14 décembre 2006 dont l'employeur a relevé appel avant de s'en désister, ce qui a été constaté par arrêt du 4 mars 2008 ; que le 5 février 2009, le salarié a, de nouveau, saisi la juridiction prud'homal

e pour demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail pour...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé en qualité de réceptionniste de nuit par la société Shema le 1er avril 1991 ; qu'il a saisi une première fois le conseil de prud'hommes de Marseille d'une demande en paiement de rappels de salaires, qui a été partiellement accueillie par jugement du 14 décembre 2006 dont l'employeur a relevé appel avant de s'en désister, ce qui a été constaté par arrêt du 4 mars 2008 ; que le 5 février 2009, le salarié a, de nouveau, saisi la juridiction prud'homale pour demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail pour harcèlement moral et discrimination syndicale ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article R. 1452-6 du code du travail ;
Attendu que pour déclarer irrecevables les prétentions du salarié nées avant le 26 février 2008, la cour d'appel a retenu qu'elle n'était elle-même pas juge de l'arrêt définitif du 4 mars 2008, lequel mentionne en première page " M. X... non comparant, ayant constitué Me Cohen ", constate un désistement parfait et l'extinction de l'instance, et que c'est dès lors à bon droit que le premier juge a fait application des dispositions de l'article R. 1452-6 du code du travail et a écarté les demandes que le salarié était en mesure de former au titre des faits antérieurs au mois de février 2008 ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans vérifier, comme elle y était invitée, si le salarié avait eu connaissance de l'appel interjeté par l'employeur, alors que la règle de l'unicité de l'instance ne peut être opposée à une partie que lorsque celle-ci a été en mesure de former une demande au cours de la précédente instance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 mars 2013, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne la société Shema aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Shema et condamne celle-ci à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept septembre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé par substitution partielle de motifs le jugement du conseil de prud'hommes de Marseille du 6 octobre 2011 en ce qu'il avait déclaré irrecevables les demandes fondées sur la discrimination syndicale et sur les temps de pause ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'est invoqué au soutien de cette demande le moyen tiré de l'unicité de l'instance au regard de l'arrêt du 4 mars 2008 ; que Monsieur X... oppose que cette décision ne lui est pas opposable dès lors que, pour cause de changement d'adresse, il n'a pas été informé de l'appel diligenté par la société SHEMA, ni de son désistement ; que lui-même n'avait aucun intérêt à remettre en cause la décision du 14 décembre 2006, partant à saisir la cour de demandes nouvelles, lesquelles ne se sont révélées que postérieurement à ce jugement ; que dès lors c'est à tort que le premier juge a considéré que devaient être portés devant la cour les faits antérieurs au 12 février 2008 lorsque, ni convoqué ni représenté, il est pourtant mentionné dans un arrêt qualifié à tort de réputé contradictoire ; que cependant doit être relevé que la cour n'est elle-même pas juge de l'arrêt définitif du 4 mars 2008, lequel mentionne en première page « Monsieur X... non comparant, ayant constitué Maître COHEN » et dans son dispositif « constate l'extinction de l'instance » après avoir relevé « attendu que l'appelante déclare se désister sans réserve de son appel ; attendu que les intimés n'ont pas formé d'appel incident ou de demande incidente avant ce désistement » ; que la cour a par cette formulation constaté un désistement parfait au sens des dispositions des articles 384, 400 et 405 du code de procédure civile et en tout état de cause, constaté l'extinction de l'instance ; que c'est dès lors à bon droit que le tribunal a fait application des dispositions de l'article R. 1452-6 du code du travail et écarté les demandes que Monsieur X... était en mesure de former au titre des faits antérieurs au mois de février 2008, le premier juge visant toutefois à tort la date du 12, lors que les débats ont été clos le 26 ; que de fait les éléments invoqués pour caractériser la discrimination syndicales sont datés des années 2007 et 2008 se heurtent au moyen tiré de l'unicité de l'instance ;
ET AUX MOTIFS QUE s'agissant du rappel de salaires pour pauses travaillées, seule peut être concernée la nuit du 25 du 26 février ; que le tableau produit par Monsieur X... s'arrête au 21 février ; que la demande est en conséquence irrecevable ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE toutes les demandes liées au contrat de travail entre les mêmes parties font, qu'elles émanent du demandeur ou du défendeur, l'objet d'une seule instance ; que cette règle n'est pas applicable lorsque le fondement des prétentions est né ou révélé postérieurement à la saisine du conseil de prud'hommes ; qu'il est acquis aux débats que le demandeur a déjà saisi le conseil de prud'hommes le 21 octobre 2004 pour obtenir un rappel de congés d'ancienneté, de 13ème mois, de primes d'objectifs et de primes de nuit ; que Monsieur X... fait valoir d'une part, que les éléments justifiant la présente procédure s'étaient révélés postérieurement au jugement rendu le 14 décembre 2006 et notifié le 18 décembre 2006, et d'autre part, qu'il n'avait pas été personnellement informé de la procédure d'appel qui avait été diligentée par son employeur et de la date de convocation à l'audience de la cour de sorte qu'il n'aurait pu former appel incident ; que la première instance s'est éteinte le 12 février 2008 avec un arrêt de désistement ; que Monsieur X... fonde ses demandes pour ce qui concerne la discrimination syndicale : sur des agissements survenus ou constatés par lui aux mois de février, d'octobre et décembre 2007 ; que pour ce qui concerne le harcèlement moral, sur des agissements ayant conduit à une altération de son état de santé constatée par certificat médical du 28 février 2008 ; que pour ce qui concerne l'exécution fautive du contrat de travail relative aux temps de pause : sur des faits qui se sont révélés au mois de février 2007 mais qui se sont poursuivis au-delà jusqu'en 2008, qu'il est donc certain, que les faits de discrimination invoqués étaient connus du salarié avant l'achèvement de la première procédure ; qu'il avait donc la possibilité de présenter ses nouvelles prétentions lors de la première instance et il n'a pas été privé de son droit d'accès au juge ; que ce chef de demande sera en conséquence déclaré irrecevable ;
1° ALORS QUE dans les procédures sans représentation obligatoire, les parties doivent être régulièrement convoquées par le greffier de la cour d'appel à l'audience prévue pour les débats ; que, pour déclarer irrecevable Monsieur X... de ses demandes, la cour d'appel a relevé que l'arrêt définitif réputé contradictoire du 4 mars 2008, mentionnait en première page que Monsieur X..., non comparant, avait constitué Maître COHEN et avait constaté dans son dispositif l'extinction de l'instance par un désistement parfait au sens des dispositions des articles 387, 400 et 405 du code de procédure civile et que c'était donc à bon droit que le tribunal avait fait application des dispositions de l'article R. 1452-6 du code du travail et écarté les demandes que Monsieur X... était en mesure de former au titre des faits antérieurs 26 février 2008 ; qu'en statuant de la sorte sans pour autant constater les conditions dans lesquelles Monsieur X... avait été convoqué à l'audience ayant donné lieu à l'arrêt de désistement du 4 mars 2008, la cour d'appel n'a pas permis à la Cour de cassation d'exercer son contrôle sur la régularité de cette convocation, privant son arrêt de base légale au regard des articles 14, 937 et 938 du code de procédure civile, et de l'article R. 1452-6 du code du travail ;
2° ALORS QU'aucune disposition légale ne conférant un caractère obligatoire à l'exercice d'une voie de recours, le salarié n'est pas tenu de relever appel du jugement rendu sur la demande initiale dans le seul but de présenter sa demande nouvelle devant la cour d'appel ; qu'en énonçant que c'était à bon droit que le conseil de prud'hommes avait fait application des dispositions de l'article R. 1452-6 du code du travail et qu'il avait écarté les demandes que Monsieur X... était en mesure de former au titre des faits antérieurs 26 février 2008, quand le salarié qui n'était pas tenu de relever appel incident était recevable à saisir de nouveau la juridiction prud'homale sans qu'on puisse lui opposer la fin de nonrecevoir tirée de l'unicité de l'instance, la cour d'appel a violé les articles R. 1452-6 et R. 1452-7 du code du travail ;
3° ALORS QUE les dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail relatives à la répartition, entre l'employeur et le salarié, de la charge de la preuve des heures de travail effectuées, ne sont pas applicables aux durées maximales de travail et aux temps de repos fixés par le droit de l'Union européenne ; qu'il en résulte que c'est à l'employeur qui prétend avoir donné aux salariés leur temps de pause qu'il appartient de le prouver ; qu'en refusant de faire droit à la demande du salarié au motif qu'il ne produisait pas d'éléments, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé par substitution partielle de motifs le jugement du conseil de prud'hommes de Marseille et d'avoir rejeté la demande en paiement de dommages et intérêts formée par Monsieur X... au titre du harcèlement moral ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE s'agissant du harcèlement moral il n'est pas discuté que Monsieur X... a cessé de travailler à dater du 26 février 2008 et ce jusqu'à son licenciement, il ne peut être allégué ou justifié, au regard de la nature même du harcèlement qui procède de faits répétitifs sur la durée, que Monsieur X... en ait été victime sur la seule journée du 26 février 2008 ; que s'agissant du rappel de salaires pour pauses travaillées, seule peut être concernée la nuit du 25 eu 26 février : le tableau produit par Monsieur X... s'arrête au 21 février ; que la demande est en conséquence irrecevable ; que ni les circonstances du litige, ni les éléments de la procédure, ne permettent de caractériser à l'encontre de Monsieur X... une faute de nature à faire dégénérer en abus le droit de se défendre en justice ; qu'il n'est pas fait droit à la demande de dommages-intérêts formée à ce titre ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'il sera rappelé que selon la loi le harcèlement moral s'entend d'agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que pour étayer ses allégations Monsieur X... a produit : des courriers et attestations de Madame Y..., Messieurs Z..., A..., et B... ; qu'aucun d'entre eux ne se réfère à des agissements précis et circonstanciés ; qu'un courrier de Madame Y... à l'inspecteur du travail, daté du 27 février 2008 dans lequel cette salariée indique se faire du souci pour Monsieur Didier X... qui « craque littéralement aussi et ne supporte plus le management de notre hôtel » ; que cette pièce n'apporte pas plus de précision que les premières sur la nature des agissements répétés susceptibles de caractériser le harcèlement moral ; que deux certificats médicaux d'un psychiatre établis au mois de septembre 2009 et février 2010, rapportant le premier que « selon les dires de l'intéressé il y a attaques, menaces, pressions, manipulations quant à ses responsabilités son rôle dans l'entreprise quotidien amenant un véritable « état de stress imposant un arrêt dc travail » ; que le second préconise une reprise du travail à temps partiel, l'après-midi avec repos hebdomadaire, sans aucun contact avec la clientèle, dans un poste respectant ses aptitudes, son expérience professionnelle, et permettant les repos en cas de malaise ; qu'en l'état, il sera jugé que Monsieur X... n'a pas produit d'éléments assez précis pour permettre au conseil de caractériser le harcèlement moral qu'il invoque ; que toutes ses demandes de ce chef seront en conséquence rejetées ;
1° ALORS QUE par application de l'article 624 du code de procédure civile, la censure qui s'attachera au premier moyen de cassation entraînera, par voie de conséquence, la cassation du chef de dispositif de l'arrêt attaqué ayant débouté le salarié de ses demandes tendant à obtenir le paiement de dommages et intérêts au titre du harcèlement moral ;
2° ALORS QUE les faits constitutifs de harcèlement moral peuvent se dérouler sur une brève période ; qu'en énonçant qu'il ne pouvait être allégué ou justifié, au regard de la nature même du harcèlement qui procédait de faits répétitifs sur la durée, que Monsieur X... en avait été victime sur la seule journée du 26 février 2008, la cour d'appel a ajouté au texte légal une condition qu'il ne prévoit pas et a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

3° ALORS QU'en toute hypothèse le salarié n'est tenu que d'apporter des éléments qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et que la charge de la preuve du harcèlement moral ne pèse pas sur le salarié ; qu'en énonçant par motifs adoptés des premiers juges que le salarié ne produisait pas d'éléments suffisamment précis pour caractériser le harcèlement moral qu'il invoquait, la cour d'appel a fait peser la charge de la preuve du harcèlement sur le salarié et a violé les articles L. 1152-1- et L. 1154-1 du code du travail ;
4° ALORS QU'il appartient aux juges du fond de se prononcer sur chaque fait allégué par le salarié, pris isolément, et de rechercher si ces faits, pris dans leur ensemble, ne permettaient pas de présumer l'existence d'un harcèlement moral et dans l'affirmative si l'employeur prouvait que ces agissements n'étaient pas constitutifs d'un tel harcèlement ; qu'en ne recherchant pas si les éléments produits par le salarié pris dans leur ensemble ne permettaient pas de présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-18017
Date de la décision : 17/09/2014
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 22 mars 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 sep. 2014, pourvoi n°13-18017


Composition du Tribunal
Président : Mme Lambremon (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.18017
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award