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16/09/2014 | FRANCE | N°13-10284

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 16 septembre 2014, 13-10284


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 10 décembre 2012), que, par contrat du 14 novembre 2004, M. et Mme X... ont confié à la société Geoxia Ile de France (société Geoxia) la construction d'une maison individuelle ; que la garantie de livraison a été fournie par la société Zurich Versicherung AG (société Zurich) ; que M. et Mme X... se plaignant de remontées de la nappe phréatique dans le sous-sol de leur pavillon et du non-respect par le constructeur des dispositions d'ordre public du code d

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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 10 décembre 2012), que, par contrat du 14 novembre 2004, M. et Mme X... ont confié à la société Geoxia Ile de France (société Geoxia) la construction d'une maison individuelle ; que la garantie de livraison a été fournie par la société Zurich Versicherung AG (société Zurich) ; que M. et Mme X... se plaignant de remontées de la nappe phréatique dans le sous-sol de leur pavillon et du non-respect par le constructeur des dispositions d'ordre public du code de la construction et de l'habitation, une expertise a été ordonnée ; que la réception du pavillon a été prononcée avec réserves le 6 mars 2009 ; que M. et Mme X... ont, après dépôt du rapport d'expertise, assigné en réparation la société Geoxia et la société Zurich ;
Sur le moyen unique, pris en qu'il fait grief à l'arrêt de condamner les sociétés Geoxia et Zurich à payer les sommes de 33 379 euros au titre des pénalités de retard, 17 608, 28 euros au titre des intérêts intercalaires et 40 682, 12 euros au titre des travaux non chiffrés, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé que le pavillon n'avait été habitable qu'une fois exécutés les travaux de comblement du vide sanitaire, qu'il ne pouvait être réceptionné sans le recouvrement de la dalle du plancher du rez-de-chaussée par une chape ciment lissé qui avait été réalisée à la fin de l'année 2008, que la société Geoxia n'avait effectué aucune diligence pour procéder à la réception avant le 6 mars 2009 et qu'avant cette date, M. et Mme X... n'avaient pas pris possession du pavillon, retenu exactement, d'une part, que les intérêts intercalaires du prêt bancaire correspondaient à des préjudices distincts de ceux réparés par l'allocation des pénalités de retard, d'autre part, qu'en omettant de mentionner les travaux d'embellissement nécessaires pour que la maison soit habitable dans la liste des travaux à la charge du maître de l'ouvrage, la société Geoxia avait manqué à son obligation légale, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Mais sur le moyen unique, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de condamner les sociétés Geoxia et Zurich à payer à M. et Mme X... la somme de 10 341, 11 euros au titre des loyers :
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu que, pour condamner les sociétés Geoxia et Zurich à payer à M. et Mme X... la somme de 10 341, 11 euros au titre des loyers, l'arrêt retient que le paiement des loyers pour l'appartement que M. et Mme X... avaient continué à occuper en raison du retard apporté à la livraison du pavillon correspondait à un préjudice distinct de ceux réparés par l'allocation des pénalités de retard ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a indemnisé deux fois le même préjudice, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné les sociétés Geoxia et Zurich à payer à M. et Mme X... la somme de 10 341, 11 euros au titre des loyers, l'arrêt rendu le 10 décembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne la société Geoxia Ile de France et la société Zurich Versicherung aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Geoxia Ile de France et la société Zurich Versicherung à payer à M. et Mme X... la somme de 3 000 euros ; rejette la demande des sociétés Geoxia Ile de France et Zurich Versicherung ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize septembre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour les sociétés Geoxia Ile-de-France et Zurich Versicherung AG.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné in solidum la société en nom collectif Geoxia Ile de France et la société Zurich Versicherung à payer aux époux Y...
X... la somme de 122. 180, 09 ¿ à titre de dommages intérêts avec intérêts au taux légal à compter du 10 novembre 2009 ;
AUX MOTIFS QUE : « les premiers juges ont établi le montant total des sommes dues à M. et Mme X... de la façon suivante :
- VMC manquante dans le dressing 538, 00 ¿ TTC-vide sanitaire 1. 814, 00 ¿ TTC-pompe à eau 1. 015, 00 ¿ TTC-mur « stepoc » 1. 369, 00 ¿ TTC-étude de sols 1. 022, 58 ¿ TTC-porte fenêtre 461, 00 ¿ TTC-approfondissement fondations et surélévation 1. 950, 00 ¿ TTC-travaux non chiffrés 40. 682, 12 ¿- pénalités de retard 33. 379, 00 ¿- intérêts intercalaires prêt bancaire 17. 608, 28 ¿- loyers 10. 341, 11 ¿- préjudice moral 12. 000, 00 ¿

Sur les pénalités de retard Considérant qu'il n'est pas contesté que le délai contractuel de livraison expirait le 26 août 2006 et que la réception a été prononcée le 6 mars 2009, soit un retard de 898 jours ; que conformément aux articles L 231-2 et R 231-4 du code de la construction et de l'habitation, l'article 2-6 des conditions générales du contrat prévoit des pénalités de retard égales à 1/ 3000èmes du prix convenu fixées au contrat par jour de retard ; que ces pénalités s'élèvent à la somme de 111. 510, 40 ¿ x 1/ 3000 x 898 = 33. 379 ¿. Que si la réception a été retardée du fait des opérations d'expertise, celles-ci ont mis en lumière les défauts de conception (vide sanitaire) et d'exécution (prestations non réalisées qui ont généré des moins-values ou qui ont été effectuées soit en cours d'expertise comme la chape en béton du plancher du rez-de-chaussé, soit ultérieurement) de la société Geoxia ; que ces opérations n'ont pas été inutiles bien que la société Geoxia persiste à sous-estimer les conséquences des inondations récurrentes du vide sanitaire ; que la fréquence de ces inondations a été de nature à provoquer de l'humidité à l'intérieur de tout le pavillon qui n'a été habitable qu'une fois exécutés les travaux de comblement du vide sanitaire ; qu'en outre, le pavillon ne pouvait pas être réceptionné sans le recouvrement de la dalle de compression du plancher du rez-de-chaussée par une chape de ciment lissé qui a été réalisé en cours d'expertise, à la fin de l'année 2008, la société Geoxia ayant soutenu à tort qu'elle ne devait pas cette prestation ; que par la suite la société Geoxia n'a effectué aucune diligence pour procéder à la réception avant le 6 mars 2009 ; qu'avant cette date, M. et Mme X... n'avaient pas pris possession du pavillon ; qu'au regard des carences de la société Geoxia, le refus de M. et Mme X... de payer les appels de fonds a été justifié jusqu'au 6 mars 2009 ; Que le jugement déféré doit donc être confirmé en ce qu'il a condamné la société Geoxia à payer à M. et Mme X... la somme de 33. 379 ¿ TTC ;

Sur les préjudices supplémentaires Considérant qu'il n'est pas contesté que Monsieur et Madame X... sont en droit de réclamer des dommages-intérêts qui se cumuleront avec les pénalités de retard à condition qu'ils réparent un préjudice distinct ; que Monsieur et Madame X... produisent les pièces justificatives du versement de la somme de 10. 341, 11 ¿ au titre des loyers de septembre 2006 à janvier 2009 et de celle de 17. 608, 28 ¿ au titre des intérêts intercalaires de leur prêt bancaire sur la même période ; qu'il convient d'observer que la somme de 33. 379 ¿ allouée au titre des pénalités de retard correspond à l'indemnisation de la privation de jouissance du pavillon entre le 29 août 2006 et le 6 mars 2009, soit 1. 112, 63 ¿ par mois ainsi qu'à l'indemnisation du trouble de jouissance subi du fait qu'ils ont continué à vivre dans un petit appartement avec leurs trois enfants alors qu'ils auraient dû disposer de leur pavillon ; qu'en revanche le paiement des loyers pour l'appartement que Monsieur et Madame X... ont continué à occuper en raison du retard apporté à la livraison du pavillon, de même que les intérêts intercalaires du prêt bancaire qu'ils ont dû payer pour le même motif, correspondent à des préjudices distincts de ceux réparés par l'allocation des pénalités de retard ; que par ailleurs M. et Mme X... justifient avoir subi un préjudice moral du fiat du comportement de la société Geoxia qui voulait leur imposer la réception d'un ouvrage avec de l'eau en sous-sol et sans chape de ciment, qu'ils ont dû, pour faire valoir leurs droits, engager une longue procédure d'expertise puis une instance au fond, ce qui provoque inévitablement des tracasseries ; que les premiers juges ont justement évalué ce préjudice à la somme de 12. 000 ¿ ;

Sur les travaux non chiffrés Considérant que M. et Mme X... sollicitent la condamnation de la société Geoxia à leur payer la somme de 40. 682, 12 ¿ correspondant aux travaux restant à leur charge et qui n'ont pas été chiffrés par le constructeur ; que comme l'a dit le tribunal les travaux à la charge du maître d'ouvrage sont décrits sur le document intitulé « liste des travaux à la charge du maître d'ouvrage » signé par les parties le 5 novembre 2004 pour un montant total de 1. 739 ¿ ; que leur description détaillée figure également dans la notice descriptive, conformément à l'article R 231-4 du code de la construction et de l'habitation ; que leur coût est mentionné dans l'annexe de la notice descriptive comportant la mention manuscrite du maître de l'ouvrage « les travaux non compris dans le prix convenu qui restent à ma charge s'élèvent à la somme de 17 139 ¿ ; qu'ils concernent notamment des travaux d'évacuation des terres, de raccordements et de branchements ; que le coût des revêtements intérieurs et extérieurs, non compris dans le prix convenu, n'est pas chiffré ; que Monsieur Et Madame X... produisent un devis du 3 mars 2008 de la SARL AZRO qui chiffre des travaux de faïence, peintures, plinthes, revêtements des sols, clôture, terrasse, nivellement du terrain et enduit de parement à l'extérieur de la maison sur la partie du vide sanitaire hors sol ; que les premiers juges ont exactement retenu que l'article R 231-4 du code de la construction et de l'habitation est clair et oblige le constructeur à indiquer le coût des travaux non compris dans le prix global de la construction qui est forfaitaire et ne peut souffrir aucun coût supplémentaire ; qu'il doit être ajouté qu'en application de ce texte et de l'article L 231-2 du même code, la notice descriptive doit établir précisément les travaux à la charge du matière de l'ouvrage, qu'il doit donc y figurer les travaux d'équipements intérieurs et extérieurs qui sont indispensables à l'implantation et à l'utilisation de l'immeuble, en ce compris les travaux d'embellissement (revêtement de sol, peinture, papier peint) qui sont nécessaires pour que la maison soit habitable dans des conditions normales ; qu'en omettant de mentionner les travaux d'embellissement dans la liste de travaux à la charge du maître de l'ouvrage, la société Geoxia a manqué à son obligation légale et a privé Monsieur et Madame X... de la faculté que leur offre l'article L 231-7 du même code de demander au constructeur, dans les 4 mois de la signature du contrat, d'exécuter les travaux dont ils s'étaient réservé l'exécution au prix et conditions mentionnés au contrat ; que le jugement déféré doit donc être confirmé en ce qu'il a dit que la société Geoxia n'a pas respecté l'obligation qui lui était impartie par le texte précité et condamné cette dernière à payer la somme de 40. 682, 12 ¿ à Monsieur et Madame X... ».

ALORS 1°/ QUE : les pénalités prévues en cas de retard ont pour terme la livraison de l'ouvrage qui doit s'entendre comme la date à laquelle les parties ont pris possession de l'ouvrage ou ont été à même de le faire ; qu'en l'espèce la cour d'appel a constaté que l'immeuble était réceptionnable à la fin de l'année 2008 ; qu'en refusant d'arrêter à cette date le cours des pénalités de retard au motif que Monsieur et Madame X... n'avaient pris possession de l'ouvrage que le 6 mars 2009 sans rechercher si ils n'avaient pas été en mesure d'en prendre possession plus tôt, le retard dans cette prise de possession leur étant exclusivement imputable, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard des articles L 231-2 et R 231-14 du code de la construction et de l'habitation ;
ALORS 2°/ QUE : le retard à la livraison de l'ouvrage déjà réparé par l'allocation de pénalités de retard ne peut donner lieu à une double indemnisation ; qu'en allouant aux époux X... outre des pénalités de retard, correspondant à l'indemnisation de la privation de jouissance du pavillon et au fait qu'ils ont continué à vivre dans un petit appartement, outre des dommages intérêts correspondant aux loyers acquittés pour l'appartement jusqu'à ce qu'ils aient pris possession de leur maison, et encore des dommages intérêts correspondant au paiement des intérêts intercalaires de leur prêt bancaire, la cour d'appel a méconnu le principe de la réparation intégrale et violé l'article 1382 du code civil ;
ALORS 3°/ QUE : si un préjudice distinct de celui réparé par les pénalités de retard peut exister c'est à la condition que ce préjudice soit en lien de causalité avec un manquement contractuel reproché au constructeur ; qu'en allouant en l'espèce aux époux X... outre des pénalités de retard, des dommages intérêts complémentaires représentant les intérêts intercalaires de leur prêt bancaire, sans rechercher si ce préjudice ne résultait pas seulement de l'exécution du contrat de prêt et ne pouvait être lié au manquement imputé au constructeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L231-6 du code de la construction et de l'habitation et 1382 du code civil ;
ALORS 4°/ QUE : le constructeur doit indiquer au contrat les travaux d'équipement intérieur ou extérieur qui sont indispensables à l'implantation et à l'utilisation de l'immeuble et préciser entre ces éléments ceux qui sont ou non compris dans le prix convenu ; que cette obligation ne porte que sur les éléments indispensables à l'implantation et à l'utilisation de l'immeuble et ne s'étend pas aux travaux de finition ou d'embellissement tels le revêtement de sol, les peintures et papiers peints qui, n'étant pas indispensables à l'utilisation de l'immeuble peuvent être exclus du prix convenu sans pour autant faire l'objet d'un poste chiffré et détaillé ; qu'en condamnant les exposantes à payer aux époux X... la somme de 40. 682, 12 ¿ correspondant à des travaux de décoration et de finition restés à leur charge aux motifs que ces travaux n'avaient pas été chiffrés et détaillés par le constructeur, quand ces travaux portant sur des travaux d'embellissement, n'étant pas indispensables à l'utilisation de l'immeuble, n'avaient pas à figurer de manière chiffrée et détaillée sur la liste des travaux restant à la charge des époux X..., qui avaient d'ailleurs signé un contrat de construction d'une maison prête à finir, la cour d'appel a violé l'article R 231-4 du code de la construction et de l'habitation.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 13-10284
Date de la décision : 16/09/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 10 décembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 16 sep. 2014, pourvoi n°13-10284


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard et Poupot, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.10284
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