LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Mme Angélina X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de VERSAILLES, en date du 16 mai 2014, qui, dans la procédure d'extradition suivie contre elle à la demande du gouvernement ukrainien, a émis un avis favorable ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 12 et 16 de la Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957, de l'article préliminaire et des articles, 696-24, 591 et 593 du code de procédure pénale, de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
"en ce que l'arrêt attaqué a omis d'ordonner d'office la mise en liberté de Mme X... ;
"aux motifs que Mme X... était interpellée le 25 février 2014 par la police française devant son domicile à Neuilly-sur-Seine (92) ; qu'elle était conduite le même jour devant le procureur général de Versailles qui procédait au procès-verbal de notification de la demande d'arrestation provisoire aux fins d'extradition, conformément à l'article 692-23 du code de procédure pénale, puis était placée sous écrou extraditionnel sur décision du premier président ; que Mme X..., veuve Sviltiana Z..., a comparu le 11 avril 2014 à l'audience de la chambre de l'instruction et a été interrogée par procès-verbal ; que par arrêt du 2 mai 2014, la chambre de l'instruction de Versailles a retenu que si de nombreuses pièces ont été adressées par les autorités judiciaires ukrainiennes, il y a lieu de constater, comme l'indique le mémoire en défense , que le mandat d'arrêt de référence, daté du 21 octobre 2013, émanant du tribunal d'Ivano-Frankivsk, n'a pas été transmis ; qu'avant dire droit, la production de cette pièce par l'Etat requérant a été ordonnée et l'affaire renvoyée à l'audience de jugement du 16 mai 2014 ; que pendant ce délai, la décision du tribunal de district d'Ivano-Frankivsk ayant ordonné, le 21 octobre 2013, la détention de Mme X..., ce titre valant mandat d'arrêt, confirmé par les décisions ultérieures déjà citées, est parvenu avec sa traduction au ministère de la justice français qui l'a transmise à la cour d'appel de Versailles par le canal de M. le procureur général ;
"alors qu'il résulte de l'article 16 de la Convention européenne d'extradition que la personne ayant fait l'objet d'une arrestation provisoire en vue d'une extradition doit être remise en liberté si, dans les quarante jours qui suivent l'arrestation, les pièces composant la demande d'extradition et qui s'entendent d'une expédition authentique soit d'une condamnation exécutoire soit d'un mandat d'arrêt ou de tout autre acte ayant la même force, ne sont pas parvenues à l'Etat requis ; qu'en l'espèce, les mentions de l'arrêt font apparaître que Mme X... a été arrêtée et écrouée le 25 février 2014 cependant que le mandat d'arrêt qui devait appuyer la demande d'extradition n'est parvenue aux autorités françaises qu'après l'audience du 11 avril 2011, soit plus de quarante jours après le placement en détention provisoire, ce dont résulte que les prescriptions du texte susvisé n'ont pu être respectées, de sorte qu'il appartenait à la cour d'appel de prononcer d'office la mise en liberté ;
Attendu qu'il résulte des pièces de la procédure, qu'à la suite d'une demande d'arrestation provisoire présentée par le Gouvernement ukrainien pour l'exécution d'un mandat d'arrêt délivré le 21 octobre 2013 par le tribunal d'Ivano-Frankivsk, Mme Angélina X..., a été incarcérée le 25 février 2014 ; que, le 17 mars suivant, est parvenue au ministère des Affaires étrangères la demande d'extradition accompagnée d'un mandat d'arrêt, en date du 20 janvier 2014, délivré par le tribunal d' Ivano-Frankivsk et confirmant le mandat initial ; qu'après exécution d'un complément d'information, ordonné aux fins d'obtenir la communication du premier mandat, la chambre de l'instruction, par arrêt en date du 16 mai 2014, a émis un avis favorable à l'extradition ;
Attendu qu'en cet état, la demanderesse ne saurait se faire un grief de ce que les pièces de justice, base de l'extradition, ne seraient pas parvenues aux autorités françaises dans le délai de quarante jours prévu par l'article 16.4 de la Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957, dès lors que la Cour de cassation est en mesure de s'assurer que satisfait aux prescriptions de ce texte la transmission par l'Etat requérant d'un mandat d'arrêt confirmant celui pour l'exécution duquel l'arrestation provisoire avait été demandée ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 et 14 de la convention européenne des droits de l'homme, des articles préliminaire, 144, 591 et 593 du code de procédure pénale,défaut de réponse à conclusions, insuffisance de motivation ;
"en ce que l'arrêt attaqué a donné un avis favorable à la demande d'extradition faite par les autorités ukrainiennes à l'encontre de Mme X... ;
"aux motifs que l'extradition de Mme X..., veuve Svitlana Z..., citoyenne ukrainienne est demandée en exécution d'un mandat d'arrêt décerné le 21 octobre 2013 par le tribunal du district d'Ivano-Frankivsk en Ukraine, confirmé le 20 janvier 2014 par Monsieur PA RudnytsKyy juge d'instruction au tribunal du district municipal d'Ivano-Frankivsk en Ukraine pour des faits qualifiés de crime grave en l'espèce des faits de possession illégale, transfert réitéré en Ukraine, vente et transmission réitérée dans les prisons par un groupe de personnes de substances narcotiques faits prévus et réprimés par les articles 305 partie 2 et 307 partie 2 du code pénal de cet Etat d'une peine maximale de dix années d'emprisonnement, commis en Ukraine, entre les mois de janvier et de juin 2013 ; que cette infraction s'analyse en droit français en celles d'infraction à la législation sur les stupéfiants (importation, transport, détention, cession illicites de stupéfiants) prévues par les articles 222-36 et 222-37 du code pénal et punies de dix ans d'emprisonnement ; que pour ces infractions, la peine encourue est supérieure au seuil prévu par la convention européenne d'extradition compte tenu de la réserve émise par la France, soit deux ans (article 696-3 du code de procédure pénale); que cette condition légale est remplie en l'espèce ; que les poursuites ne sont pas atteintes par la prescription de l'action publique en Ukraine, le délai de prescription étant de dix ans à compter de la date de commission de crime grave ; que la prescription n'est pas nonplus acquise selon la procédure française s'agissant d'un délai de vingt ans prévu aux articles 706-26 et 706-31 du code de procédure pénale ; qu'il s'agit donc d'une infraction de droit commun commise en Ukraine reprochée à une personne qui n¿est pas de nationalité française, qui n'a pas été jugée en France pour ces faits ; que l'intéressée n'allègue aucunement être réclamé par les autorités ukrainiennes pour un motif politique, religieux, racial ou tenant à sa nationalité ; qu'enfin, il n'apparaît pas contrairement à ce qui est allégué par le mémoire en défense, qu'en Ukraine, signataire de la Convention Européenne d'extradition depuis 1998, les garanties fondamentales d'un procès équitable, notamment les droits de la défense, ne soient pas respectées ; qu'en l'espèce, aucune des conditions au refus d'extrader de l'article 696- 4 du code de procédure pénale n'est constituée ;
"alors que Mme X... ne soutenait pas « qu'en Ukraine, les garanties fondamentales d'un procès équitable ne sont pas respectées », mais, très précisément et très exactement, qu'au cas présent, dans ce dossier particulier, elle avait un doute sur l'impartialité de la juridiction qui la poursuivait, et qui avait fait parvenir aux autorités françaises, un document intitulé « des preuves de la culpabilité de Mme X... » ; qu'en statuant par un motif d'ordre général, tiré de ce que l'Ukraine, pour être signataire de la convention européenne d'extradition, serait en principe un Etat respectueux des exigences du procès équitable sans répondre aux conclusions qui faisaient valoir qu'au cas particulier,, ces exigences étaient méconnues, la chambre de l'instruction a rendu un arrêt qui ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale ; Attendu que, pour émettre un avis favorable à la demande d'extradition en cause, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu que le moyen, qui est nouveau comme invoquant pour la première fois devant la Cour de cassation les dispositions de la Convention européenne des droits de l'homme, est irrecevable au regard de l'article 696-15 du code de procédure pénale ;
Et attendu que l'arrêt a été rendu par une chambre de l'instruction compétente et composée conformément à la loi, et que la procédure est régulière ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Foulquié, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Carbonaro, conseiller rapporteur, Mme Ract-Madoux, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;