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09/07/2014 | FRANCE | N°13-16797

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 juillet 2014, 13-16797


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses troisième et quatrième branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 février 2013), que M. X... a été engagé le 12 mai 1977 par la société SFP et son contrat repris en 1979 par l'Institut national de l'audiovisuel ; que le médecin du travail ayant déclaré le salarié inapte à tout poste dans l'entreprise, celui-ci a été licencié pour inaptitude le 10 novembre 2010 ; qu'il avait, le 27 juillet 2009, saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliat

ion judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur ;
Attendu qu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses troisième et quatrième branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 février 2013), que M. X... a été engagé le 12 mai 1977 par la société SFP et son contrat repris en 1979 par l'Institut national de l'audiovisuel ; que le médecin du travail ayant déclaré le salarié inapte à tout poste dans l'entreprise, celui-ci a été licencié pour inaptitude le 10 novembre 2010 ; qu'il avait, le 27 juillet 2009, saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts à la date du 10 novembre 2010 et de le condamner à payer au salarié diverses sommes, alors, selon le moyen :
1°/ que l'article 1er du protocole sur l'indemnité de sujétions professionnelles des cadres en date du 5 mai 1994 qui subordonne l'attribution de cette indemnité à « la capacité du cadre à conduire les missions qui lui sont confiées », prévoit que l'évaluation de ces aptitudes doit être notamment appréciée suivant les critères « d'aptitude à l'encadrement et à l'animation » ; qu'en affirmant, pour dire que la suppression de la prime de sujétion constituait une sanction pécuniaire, que les motifs d'opposition et d'insubordination de M. X..., invoqués par l'INA pour supprimer sa prime de sujétion, n'avaient rien à voir avec les critères devant être pris en compte, comme notamment l'aptitude à l'encadrement et à l'animation, la cour d'appel a violé l'article 1er du protocole sur l'indemnité de sujétions professionnelles des cadres en date du 5 mai 1994, ensemble l'article V.7 de la convention collective de la communication et de la production audiovisuelle et l'article 1134 du code civil ;
2°/ que ne manque pas à son obligation de sécurité, l'employeur qui a pris des mesures destinées à résoudre les difficultés rencontrées par le salarié dès lors qu'il a eu connaissance de faits de harcèlement ; qu'en se bornant, pour accueillir la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'Institut national de l'audiovisuel, à énoncer qu'en dépit des signalements opérés par la médecine du travail, le CHSCT et les syndicats, l'employeur n'avait entrepris aucune enquête sérieuse et laissé la situation se dégrader au point d'avoir entraîné pour M. X... un arrêt longue maladie, sans vérifier, ainsi qu'elle y était invitée, si, dès qu'il avait eu connaissance de la situation conflictuelle invoquée par le salarié, l'employeur n'avait pas, dans un souci d'apaisement, vainement proposé à M. X... qui s'y était cependant opposé, de travailler sous l'autorité d'une tierce personne, ce dont il résultait qu'il avait pris des mesures destinées à résoudre les difficultés rencontrées par le salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1152-4 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant relevé que les motifs invoqués par l'employeur étaient étrangers aux critères devant être pris en compte pour justifier de la prime de sujétion, la cour d'appel a décidé à bon droit que la suppression de cette prime était en réalité une sanction pécuniaire illicite ;
Et attendu qu'ayant constaté que devant l'importance du conflit opposant le salarié à sa responsable hiérarchique, en dépit des signalements de la médecine du travail, du CHSCT et des syndicats, l'employeur n'avait entrepris aucune enquête sérieuse et laissé la situation se dégrader, la cour d'appel a décidé à bon droit que ce dernier avait manqué à son obligation de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité du salarié victime de harcèlement ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen qui ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi : REJETTE le pourvoi ; Condamne l'INA aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. X... ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juillet deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils, pour l'Institut national de l'audiovisuel L'Institut national de l'Audiovisuel fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. X... à ses torts à la date du 10 novembre 2010 et de l'avoir en conséquence condamné à payer à ce dernier les sommes de 12210 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre celle de 1221,10 euros au titre des congés payés s'y rapportant, de 48840 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul, de 1200 euros au titre de la prime de sujétion 2008 et celle de 120 euros au titre des congés payés afférents ; AUX MOTIFS QUE l'examen des différentes pièces versées aux débats par M. X... laisse pourtant incontestablement présumer l'existence d'un harcèlement moral au regard des faits qu'il dénonce : - les faits allégués d'absence de formation continue depuis trois ans sont avérés alors que ces formations, prévues clairement dans les entretiens annuels d'évaluation (OBA), sont indispensables et nécessaires à la réalisation de ses objectifs ou encore à l'actualisation des ses connaissances dans un domaine d'activité à forte valeur technologique, - la perte de la qualité de responsable de filière depuis trois ans n'est pas contestée alors que le salarié continue, sans être contredit, à assumer les missions associées à cette responsabilité, ce qui concrètement remet en cause sa mission d'encadrement et d'organisation dans l'accomplissement de ses fonctions, - la diminution de la prime de sujétion est également un fait et a privé le salarié d'une partie de sa rémunération en décembre 2008, - le retrait de la responsabilité d'action du stage PMV (production musicale en variété) n'est pas non plus contesté et résulte d'une note de Mme Y... du 4 décembre 2008, - les éléments médicaux produits révèlent un état dépressif sévère ayant donné lieu dans un premier temps à une inaptitude temporaire, puis à un congé de longue maladie ayant entraîné le 16 janvier 2009 une lettre d'alerte du médecin du travail à la Directrice des Ressources Humaines pour signaler que les symptômes présentés étaient liés au travail, - l'avis des représentants de la commission tripartite du 2 juin 2009 qui note que M. X... se trouvait en longue maladie depuis le 10 janvier 2009 pour « dépression consécutive à une situation de harcèlement professionnel », - la lettre d'alerte envoyée le 18 février 2009 à l'employeur par le secrétaire du CHSCT pour signaler une situation conflictuelle larvée perdurant depuis plusieurs mois à l'unité Son, pose clairement la question des conditions de travail collectives des salariés de cette unité et des autres secteurs de la direction, - les organisations syndicales dans plusieurs lettres et tracts ont effectivement dénoncé les cas de souffrance au travail (huit au total) au sein de l'Unité Son, et le départ de ces salariés fragilisés sans avoir pu être écoutés et confortés ; que si les pièces produites établissent nettement qu'un conflit d'autorité a bien opposé M. X... à Mme Y..., ce que révèlent les échanges de courriers produits aux débats, il faut cependant constater que les reproches faits au salarié par sa supérieure hiérarchique (indifférence, manque de politesse et de respect, maltraitance, propos agressifs ou menaces verbales) ne résultent que des lettres de Mme Y... à M. X... ou à sa hiérarchie, mais ne sont corroborés par aucun autre élément extérieur ; qu' il est donc impossible d'apprécier concrètement les propos, attitudes ou menaces précises dont se serait rendu coupable le salarié envers Mme Y... ; (...) ; que s'agissant de la suppression de la prime de sujétion, et si l'on considère les critères d'octroi de cette prime, largement exposés par l'INA, les motifs invoqués par l'employeur (opposition et insubordination) n'ont rien à voir avec les critères qui devraient être pris en compte, (notamment la réalisation des objectifs, l'aptitude à l'encadrement, l'initiative et la prise de décisions, la capacité à anticiper ou à innover, la technicité, la responsabilité ou la charge de travail), critères dont le défaut pourrait justifier la baisse ou le retrait de la prime ; que dans ce contexte la suppression de la prime de sujétion se révèle en réalité être une sanction pécuniaire, pourtant prohibée par le code du travail ; (...) ; qu'en l'espèce, il est peu compréhensible que devant l'importance du conflit opposant depuis plusieurs mois le salarié à sa responsable hiérarchique, conflit où chacun des protagonistes invoquait une situation de harcèlement moral, et en dépit des signalements opérés par la médecine du travail, le CHSCT et les syndicats, que l'INA n'ait entrepris aucune enquête sérieuse et laissé la situation se dégrader au point d'avoir entraîné pour M. X... un arrêt longue maladie de plus d'un an, ayant ensuite abouti à son licenciement pour inaptitude, le médecin du travail ayant estimé que l'intéressé était définitivement inapte à tout poste dans l'entreprise et ne pouvait plus que travailler à domicile, avec aménagement d'horaires ; qu'en l'état des explications et des pièces fournies, M. X... établit ainsi l'existence matérielle de faits précis et concordants, qui pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre ; que l'employeur de son côté échoue à démontrer que les faits matériellement établis par M. X... étaient justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que le harcèlement moral est établi ; que dès lors la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur doit être accueillie ; que cette résiliation produit les effets d'un licenciement nul (...) ; que cette résiliation prendra effet à la date du 10 novembre 2010, date du licenciement qui a mis fin au contrat de travail ; qu'il y a donc lieu d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement du conseil des prud'hommes de Créteil ; 1°) ALORS QU'il résulte du bordereau des pièces communiquées, annexé aux écritures de l'Institut national de l'Audiovisuel que celui-ci versait aux débats, sous les numéros 27, 28, 29, un mail d'une salariée, Mme Z..., qui attestait de l'attitude menaçante de M. X... à l'égard de sa supérieure hiérarchique, Mme Y..., et deux certificats médicaux attestant des troubles anxio dépressifs dont cette dernière souffrait en raison de la maltraitance relationnelle sur son lieu de travail ; qu'en affirmant, pour dire qu'il était impossible d'apprécier concrètement les propos, attitudes ou menaces dont M. X... se serait rendu coupable envers Mme Y..., que les lettres de cette dernière faisant état de la maltraitance, des propos agressifs dont elle faisait l'objet de la part du salarié, n'étaient corroborés par aucun autre élément extérieur, la cour d'appel a dénaturé le bordereau de communication de pièces annexé aux conclusions de l'INA et a ainsi violé l'article 4 du code procédure civile ; 2°) ALORS QUE dans ses écritures (p. 3-4), l'Institut national de l'Audiovisuel qui soutenait que M. X... avait provoqué une situation ouverte de crise avec sa supérieure hiérarchique au point d'avoir entraîné pour cette dernière un arrêt maladie, faisait valoir, à l'appui de sa prétention, qu'il ne supportait plus l'autorité de Mme Y..., s'insurgeait contre toute décision qu'il estimait empiéter sur son périmètre, refuser de se plier aux consignes internes, discutait les choix budgétaires et refusait de rendre compte de ses activités ; qu'en se bornant, pour dire qu'il était impossible d'apprécier concrètement les attitudes précises dont M. X... s'était rendu coupable envers sa supérieure et écarter le conflit d'autorité les opposant, à retenir que les reproches faits au salarié par sa supérieure ne résultaient que des lettres de cette dernière, la cour d'appel n'a pas répondu au moyen précité, violant ainsi l'article 455 du code de procédure civile ; 3°) ALORS QUE l'article 1er du protocole sur l'indemnité de sujétions professionnelles des cadres en date du 5 mai 1994 qui subordonne l'attribution de cette indemnité à « la capacité du cadre à conduire les missions qui lui sont confiées», prévoit que l'évaluation de ces aptitudes doit être notamment appréciée suivant les critères « d'aptitude à l'encadrement et à l'animation » ; qu'en affirmant, pour dire que la suppression de la prime de sujétion constituait une sanction pécuniaire, que les motifs d'opposition et d'insubordination de M. X..., invoqués par l'INA pour supprimer sa prime de sujétion, n'avaient rien à voir avec les critères devant être pris en compte, comme notamment l'aptitude à l'encadrement et à l'animation, la cour d'appel a violé l'article 1er du protocole sur l'indemnité de sujétions professionnelles des cadres en date du 5 mai 1994, ensemble l'article V.7 de la convention collective de la communication et de la production audiovisuelle et l'article 1134 du code civil ; 4°) ALORS QUE ne manque pas à son obligation de sécurité, l'employeur qui a pris des mesures destinées à résoudre les difficultés rencontrées par le salarié dès lors qu'il a eu connaissance de faits de harcèlement ; qu'en se bornant, pour accueillir la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'Institut national de l'Audiovisuel, à énoncer qu'en dépit des signalements opérés par la médecine du travail, le CHSCT et les syndicats, l'employeur n'avait entrepris aucune enquête sérieuse et laissé la situation se dégrader au point d'avoir entraîné pour M. X... un arrêt longue maladie, sans vérifier, ainsi qu'elle y était invitée, si, dès qu'il avait eu connaissance de la situation conflictuelle invoquée par le salarié, l'employeur n'avait pas, dans un souci d'apaisement, vainement proposé à M. X... qui s'y était cependant opposé, de travailler sous l'autorité d'une tierce personne, ce dont il résultait qu'il avait pris des mesures destinées à résoudre les difficultés rencontrées par le salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1152-4 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-16797
Date de la décision : 09/07/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 27 février 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 jui. 2014, pourvoi n°13-16797


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.16797
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