LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches, ci-après annexé : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 13 février 2013), qu'à l'occasion des opérations de liquidation et de partage de la succession de André X..., décédé le 27 décembre 2006, M. Laurent X... a fait valoir une créance de salaire différé ; Attendu qu'il fait grief à l'arrêt de le débouter de cette demande ; Attendu qu'après avoir constaté que, pendant la période considérée, M. Laurent X... avait travaillé aussi dans le camping exploité par sa mère, la cour d'appel, qui a souverainement estimé qu'il avait été rémunéré à hauteur du travail fourni sur l'exploitation agricole de son père, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Laurent X... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq juin deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Tiffreau, Marlange et de La Burgade, avocat aux Conseils, pour M. Laurent X...
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Laurent X... de ses demandes au titre du salaire différé ; AUX MOTIFS QUE « André X..., qui avait exercé la profession d'exploitant agricole, est décédé le 27 décembre 2006 laissant à sa succession son épouse Ghislaine Y... leurs trois enfants Jacques X..., Christine X... et Laurent X... ; que Laurent X... demande, dans le cadre de la liquidation de cette succession, que lui soit reconnue une créance de salaire différé pour la période du 1er décembre 1983 au 31 décembre 1993, ce à quoi s'opposent Ghislaine Y..., Jacques X... et Christine X... (les consorts X...
Y...), dont la proposition d'une médiation ne signifie pas qu'ils reconnaissent l'existence du droit allégué ; qu'il résulte des dispositions de l'article L. 321-13 du code rural, celui qui se prétend créancier d'un salaire différé doit rapporter la preuve de ce qu'il avait participé directement et effectivement à l'exploitation agricole de ses parents durant les périodes pour lesquelles la créance de salaire différé est demandée, mais qu'il doit aussi prouver qu'il n'a pas été associé aux bénéfices ni aux pertes de cette exploitation et qu'il n'a pas reçu de salaire en argent en contrepartie de sa collaboration ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces produites aux débats que Laurent X... a travaillé sur l'exploitation agricole de son père entre le 1er décembre 1983 et le 31 décembre 1993, et le fait qu'il n'ait été déclaré auprès de la Mutualité sociale agricole qu'en qualité d'aide familial n'empêche pas de rechercher si, en fait, il a ou non perçu un salaire le rétribuant de cette activité ; que Laurent X... reconnaît lui-même que son père lui avait versé certaines rémunérations, soit 100 francs par semaine en 1984, 2 000 francs par mois de 1985 à 1991 et 4. 000 francs par mois en 1992 et 1993, si bien qu'il a reçu entre 1983 et 1993 la somme totale de 268. 800 francs alors que, sur une base théorique du salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) en vigueur aux époques considérées, le salaire brut pour 40 heures de travail par semaine et 52 semaines par an se serait élevé à 604. 136 francs, soit un salaire net à 483. 308, 80 francs après un abattement de 20 %, ce qui donne une différence de 214. 508, 80 francs sur dix ans ; que cependant dans la mesure où Laurent X... n'établit avoir disposé d'un domicile personnel, distinct de celui de son père, qu'à partir du mois d'octobre 1992, il a donc bénéficié, durant tout le reste de la période décennale en cause, d'avantages en nature substantiels que représentaient son logement gratuit au domicile familial et sa nourriture quotidienne ; qu'en outre, les attestations rédigées par Germaine C..., Michel Z..., Michel A... et Florimond B... indiquent que Laurent X... avait bien été employé sur l'exploitation agricole de son père, mais sans préciser qu'il s'agissait d'un travail à plein temps ; qu'or ces mêmes personnes ont aussi attesté que Laurent X... avait travaillé entre 1984 et 1994 dans le camping exploité par sa mère, activité touristique qui n'étant pas secondaire si l'on se rapporte aux revenus indiqués sur les avis d'imposition des époux X...- Y... ; qu'ainsi, les avantages en nature dont a bénéficié Laurent X... et son activité extérieure expliquent la différence entre le SMIC et les sommes que son père lui a versé en espèces, de sorte qu'il apparaît que l'intimé, loin de ne percevoir que de l'argent de poche, a été rémunéré à la hauteur du travail fourni sur l'exploitation agricole de son père et qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris sans qu'il y ait même lieu d'examiner le bien fondé des autres moyens proposés par les consorts X...
Y.... » ALORS QUE 1°) le taux du salaire différé tel qu'il est fixé par la loi constitue un minimum dont il y a lieu de déduire les sommes qui peuvent avoir été perçues à titre de salaire par le descendant qui a collaboré à l'exploitation agricole ; qu'en l'espèce la Cour d'appel a constaté, en se fondant sur la valeur du SMIC « en vigueur aux époques considérées » et après un abattement de 20 %, qu'il y avait entre le salaire versé et le salaire dû « une différence de 214. 508, 80 francs sur dix ans », soit près de la moitié de la somme due ; qu'en refusant d'octroyer à Monsieur Laurent X... qui avait participé de manière régulière à l'exploitation agricole de son père de 1983 à 1993 le bénéfice du salaire différé, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé l'article L. 321-13 du Code rural ; ALORS QUE 2°) les avantages en nature, inhérents au statut d'aide familial vivant au domicile et sur l'exploitation, ne peuvent être assimilés à des salaires en argent au sens de l'article L 321-13 du Code rural ; qu'en refusant de faire droit aux demandes de Monsieur Laurent X... aux motifs qu'il « n'établit avoir disposé d'un domicile personnel, distinct de celui de son père, qu'à partir du mois d'octobre 1992 ; (qu') il a donc bénéficié, durant tout le reste de la période décennale en cause, d'avantages en nature substantiels que représentaient son logement gratuit au domicile familial et sa nourriture quotidienne », la Cour d'appel a violé l'article L. 321-13 du Code rural ; ALORS QUE 3°) la participation du descendant à l'exploitation agricole pour ouvrir droit au salaire différé peut ne pas être exclusive dès lors qu'elle n'est pas occasionnelle ; qu'en refusant de faire droit à la demande de salaire différé de Monsieur Laurent X... aux motifs que « en outre, les attestations rédigées par Germaine C..., Michel Z..., Michel A... et Florimond B... indiquent que Laurent X... avait bien été employé sur l'exploitation agricole de son père, mais sans préciser qu'il s'agissait d'un travail à plein temps ; or ces mêmes personnes ont aussi attesté que Laurent X... avait travaillé entre 1984 et 1994 dans le camping exploité par sa mère, activité touristique qui n'étant pas secondaire si l'on se rapporte aux revenus indiqués sur les avis d'imposition des époux X...- Y... », la Cour d'appel a derechef violé l'article L. 321-13 du Code rural.