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18/06/2014 | FRANCE | N°13-19893

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 18 juin 2014, 13-19893


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 8 mars 2013), que par acte passé le 3 décembre 2007 devant Mme Y..., notaire, M. X... a vendu à la SARL Fassel immobilier (la société Fassel) un bien immeuble, qu'il est apparu le jour de la signature de l'acte que l'acquéreur ne disposait pas des fonds nécessaires au paiement du prix convenu et qu'il a été alors stipulé que ce prix serait payé au plus tard le 30 janvier 2008, que cet engagement n'a pas été tenu, que M. X... a obtenu une ordonnance du juge d

es référés visant à l'y contraindre, que la société Fassel a été mise ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 8 mars 2013), que par acte passé le 3 décembre 2007 devant Mme Y..., notaire, M. X... a vendu à la SARL Fassel immobilier (la société Fassel) un bien immeuble, qu'il est apparu le jour de la signature de l'acte que l'acquéreur ne disposait pas des fonds nécessaires au paiement du prix convenu et qu'il a été alors stipulé que ce prix serait payé au plus tard le 30 janvier 2008, que cet engagement n'a pas été tenu, que M. X... a obtenu une ordonnance du juge des référés visant à l'y contraindre, que la société Fassel a été mise en liquidation judiciaire sans que cette ordonnance eut été exécutée ; que M. X... a recherché la responsabilité du notaire et a obtenu sa condamnation à lui payer une somme correspondant au prix de vente, outre intérêt, sauf à déduire toute somme qui pourrait lui être allouée au titre de la vente forcée de l'immeuble par le mandataire-liquidateur de la société Fassel ; Sur le moyen unique, pris en ses première, deuxième et quatrième branches : Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de la condamner ainsi, alors, selon le moyen :
1°/ qu'une faute ne peut être retenue comme cause d'un préjudice que s'il est démontré que, sans elle, il ne se serait pas produit ; qu'en condamnant Mme Y... à indemniser M. X... du défaut de paiement du prix de vente, sans établir que, si le notaire avait attiré son attention sur l'insuffisance des garanties et le cas échéant lui avait conseillé de repousser la vente, M. X... aurait évité la réalisation de son dommage en obtenant de l'acquéreur des garanties supplémentaires ou en concluant la vente à des conditions différentes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ; 2°/ que la faute de la victime exonère en tout ou partie le notaire de sa responsabilité ; qu'en condamnant Mme Y... à payer à M. X... la somme de 270 00 euros représentant l'intégralité du prix de vente que la société Fassel immobilier ne lui avait pas versée, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si M. X... n'avait pas commis une faute d'imprudence de nature à exonérer le notaire de tout ou partie de sa responsabilité en ne demandant pas la résolution de la vente avant que la société Fassel immobilier dont l'impécuniosité était manifeste ne soit placée en liquidation judiciaire, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ; 3°/ que constitue une faute le défaut de diligence dans la préservation de ses droits ; qu'en relevant par motifs adoptés qu'« il ne saurait être reproché à M. X... d'avoir tardé à défendre ses droits » puisque « l'action résolutoire n'était enfermée dans aucun délai » bien que le seul retard à exercer l'action résolutoire constituait une faute quand bien même elle n'aurait été soumise à aucun délai, la cour d'appel s'est fondée sur un motif inopérant et a violé l'article 1382 du code civil ; Mais attendu que, d'abord, l'arrêt, après avoir relevé que les garanties constituées étaient insuffisantes pour prémunir le vendeur des conséquences d'une défaillance de l'acquéreur dans l'exécution de ses obligations, alors qu'une telle hypothèse devait être envisagée en vue d'assurer l'efficacité même de l'acte, énonce que l'importance du risque aurait dû conduire le notaire, soit à s'informer préalablement de la solvabilité de l'acquéreur, soit à conseiller de reporter la vente au jour prévu pour le paiement du prix, soit à assortir l'acte d'une clause de réserve de propriété au profit du vendeur, caractérisant ainsi un manquement du notaire à son devoir de conseil et à son obligation d'assurer l'efficacité de son acte ; qu'ensuite, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel, constatant que, par suite de négligences du notaire, M. X..., qui ne pouvait opposer le privilège du vendeur à la date de la vente forcée de l'immeuble, ce qui rendait quasi-inexistantes ses chances de participer à la distribution du prix d'adjudication, qui ne disposait pas d'autre voie de droit efficace résultant de la situation juridique créée par l'acte, à défaut de stipulation d'une clause résolutoire de plein droit, a pu en déduire, sans être tenu de rechercher si M. X... avait commis une faute dans la préservation de ses droits en n'usant pas à l'encontre de la société Fassel d'autres voies de droit qu'il n'était pas tenu d'exercer, que le préjudice n'avait aucun caractère aléatoire en dépit de la volonté du vendeur de faire aboutir la vente et qu'il était entièrement consommé pour être incontestablement en relation avec les manquements relevés à l'encontre de Mme Y... ; que le moyen, non fondé en sa première branche, est inopérant en ses deuxième et quatrième branches ; Et attendu que la troisième branche du moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ; Condamne Mme Y... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit juin deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour Mme Y.... Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné Madame Y... à payer à Monsieur X... la somme de 270. 000 ¿ assortie des intérêts au taux conventionnel de 4, 8 % a compter du 1er février 2008, d'AVOIR dit que les intérêts se capitaliseront par année entière conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code Civil, D'AVOIR donné acte au demandeur que toute somme qu'il percevrait de Maitre Z..., es qualités, provenant de la vente forcée de l'immeuble litigieux viendrait en diminution de la créance sus indiquée et d'AVOIR débouté Madame Y... de l'intégralité de ses prétentions ; AUX MOTIFS QUE l'acte notarié du 3 décembre 2007 prévoyait des garanties basiques, à savoir le privilège du vendeur et l'action résolutoire (et non une clause résolutoire de plein droit comme le soutient l'intimée), mais leur inscription au Livre Foncier était stipulée limitée au 15 février 2008 ; que malgré le non-paiement du prix au 30 janvier 2008 Maitre Y... a longtemps tardé à renouveler ces inscriptions, ainsi qu'il résulte des extraits du Livre Foncier ; que la société FASSEL IMMOBILIER ayant acquis les biens immobiliers de M. X... en qualité de marchand de biens, comme indiqué dans l'acte du 3 décembre 2007 (sous " Déclarations fiscales "), le droit à résolution non inscrit au Livre Foncier pendant de nombreux mois était inopposable à un éventuel sous-acquéreur, qu'au surplus M. X... n'a été mis en possession d'une copie exécutoire de l'acte notarié qu'en date du 11 aout 2008, ce qui limitait ses possibilités d'action et multipliait les risques ; que le privilège du vendeur a certes été renouvelé suite à une requête en inscription présentée par le notaire le 21 novembre 2008, puis le 7 mai 2009, mais seulement jusqu'au 30 juin 2010 ; que ce privilège n'est cependant opposable à la procédure de liquidation judiciaire de la société FASSEL, ouverte le 2 juin 2009, qu'à la condition que son inscription soit renouvelée jusqu'à la date de l'adjudication forcée, laquelle n'est intervenue que le 26 octobre 2012,- qu'en conséquence les chances de M. X... de participer à la distribution du prix d'adjudication, au demeurant fort modeste, sont quasi-inexistantes ; qu'ainsi que l'a indiqué le tribunal, une clause de réserve de propriété aurait été plus appropriée pour sauvegarder les intérêts de M. X... ; que les manquements relevés à l'encontre de Maître Y... étant incontestablement en relation avec le préjudice subi par M. X..., le jugement entrepris doit être confirmé ; ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QU'il appartenait à Maître Y... d'attirer spécialement l'attention de M. X... sur les modifications apportées aux modalités de règlement du prix de vente et leurs conséquences, voire même de refuser, comme elle l'a justement fait dans un premier temps, de faire signer l'acte par son client alors qu'elle ne pouvait que douter de l'état de solvabilité de l'acquéreur des biens ; qu'elle aurait dû, ce qu'elle ne prouve pas, attirer l'attention de M. X... sur l'insolvabilité éventuelle de la SARL FASSEL IMMOBILIER et de s'assurer de la parfaite compréhension par ce dernier de l'avertissement donné et de sa volonté réelle de régulariser l'acte dans les nouvelles conditions (octroi de délais de paiement) ; que compte tenu de la situation, il aurait fallu proposer au vendeur des garanties plus substantielles que celles habituellement proposées (privilège du vendeur, action résolutoire) lesquelles ne résistent pas à une liquidation judiciaire ; qu'une garantie fondé sur les dispositions des articles 2367 et suivants du Code civil (clause de réserve de propriété) aurait incontestablement permis la sauvegarde des intérêts de son client ; qu'il en résulte que c'est à juste titre que M. X... recherche la responsabilité professionnelle de Me Y... ; que cette dernière aurait dû, d'une part, attirer l'attention de son client sur les risques d'une éventuelle insolvabilité de l'acquéreur ainsi que sur ceux résultant des modalités de paiement fixées, d'autre part, entourer la transaction de garanties supplémentaires ; par conséquent que Maître Y... a commis, dans l'exercice de ses fonctions, des fautes de nature à engager sa responsabilité ; qu'il est indéniable que le préjudice de M. X... s'entend déduction faite du montant à percevoir sur le prix de vente de l'immeuble, ce que le demandeur ne conteste nullement ; que le lien de causalité entre la faute et le dommage est établi ; qu'il ne saurait être reproché à M. X... d'avoir tardé à défendre ses droits, notamment par une action résolutoire, alors qu'une part l'action résolutoire n'est enfermée dans aucun délai et que d'autre part, la clause de paiement figurant dans l'acte authentique signé par les parties, imprudence supplémentaire quant à sa rédaction, ne prévoit aucune date butoir de paiement, seule une date limite " sans intérêt " ayant été fixée, 1°) ALORS QU'une faute ne peut être retenue comme cause d'un préjudice que s'il est démontré que, sans elle, il ne se serait pas produit ; qu'en condamnant Madame Y... à indemniser Monsieur X... du défaut de paiement du prix de vente, sans établir que, si le notaire avait attiré son attention sur l'insuffisance des garanties et le cas échéant lui avait conseillé de repousser la vente, Monsieur X... aurait évité la réalisation de son dommage en obtenant de l'acquéreur des garanties supplémentaires ou en concluant la vente à des conditions différentes, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; 2°) ALORS QU'en toute hypothèse, la faute de la victime exonère en tout ou partie le notaire de sa responsabilité ; qu'en condamnant Madame Y... à payer à Monsieur X... la somme de 270. 00 euros représentant l'intégralité du prix de vente que la société FASSEL IMMOBILIER ne lui avait pas versé, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si Monsieur X... n'avait pas commis une faute d'imprudence de nature à exonérer le notaire de tout ou partie de sa responsabilité en ne demandant pas la résolution de la vente avant que la société FASSEL IMMOBILIER dont l'impécuniosité était manifeste ne soit placée en liquidation judiciaire, la Cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ; 3°) ALORS QU'en toute hypothèse, en relevant par motifs adoptés « qu'il ne saurait être reproché à M. X... d'avoir tardé à défendre ses droits » puisque « la clause de paiement figurant dans l'acte authentique signé par les parties, imprudence supplémentaire quant à sa rédaction, ne prévoit aucune date butoir de paiement, seule une date limite " sans intérêt " ayant été fixée » (jugement, p. 4, al. 7) bien que l'acte de vente ait stipulé que « le prix est payable au plus tard le 30 janvier 2008 » (acte de vente, p. 5, al. 1er), la Cour d'appel a dénaturé l'acte de vente du 3 décembre 2007 et a violé l'article 1134 du Code civil ; 4°) ALORS QU'en toute hypothèse, constitue une faute le défaut de diligence dans la préservation de ses droits ; qu'en relevant par motifs adoptés qu'« il ne saurait être reproché à M. X... d'avoir tardé à défendre ses droits » puisque « l'action résolutoire n'était enfermée dans aucun délai » (jugement, p. 4, al. 7) bien que le seul retard à exercer l'action résolutoire constituait une faute quand bien même elle n'aurait été soumise à aucun délai, la Cour d'appel s'est fondée sur un motif inopérant et a violé l'article 1382 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 13-19893
Date de la décision : 18/06/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 08 mars 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 18 jui. 2014, pourvoi n°13-19893


Composition du Tribunal
Président : M. Charruault (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.19893
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